Elle n’est certes pas l’équivalent des Jeux Olympiques dans l’imaginaire basket, la faute à la Dream Team qui a marqué à jamais l’histoire du sport à Barcelone en 1992, et elle n’a pas la densité de l’EuroBasket. Mais la Coupe du Monde version balle orange commence peu à peu à prendre de l’épaisseur.
Des grandes stars du jeu vont évidemment manquer à l’appel, chez les Américains en premier lieu, mais le plateau reste relevé et prometteur. Au-delà des talents individuels, le niveau de talent monte à travers le globe, avec des joueurs de haut niveau, ou en NBA ou en Euroleague, qui évoluent dans quasiment chaque sélection.
Trente-deux équipes sont sur la ligne de départ, répartis en huit groupes, qui croiseront sur un second tour avant les phases finales, à partir du quart.
Les Etats-Unis sont les favoris de l’épreuve a priori, avec la France pas loin derrière tandis que l’Espagne, tenante du titre, est affaiblie. D’autres équipes sont en embuscade, tel le Canada, l’Australie ou encore l’Allemagne.
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États-Unis
Dans une version plutôt édulcorée, à savoir un effectif sans véritable superstar, si ce n’est peut-être Anthony Edwards, qui n’en est encore qu’aux prémices de sa carrière, Team USA dispose tout de même d’une sacrée dose de talent. Mieux, d’un talent intelligemment réparti sur plusieurs postes, dans des rôles spécifiques. Comme pour prouver que les têtes pensantes du basket américain ont appris des erreurs du passé…
En l’occurrence, outre Edwards qui devrait être le leader d’attaque, les Américains débarquent avec deux autres All Stars (Tyrese Haliburton et Jaren Jackson Jr.), dont le meilleur défenseur de l’année. Plus le rookie de l’année (Paolo Banchero). Avec ce groupe dense et équilibré, plus un staff blindé d’expérience, quinze titres NBA partagés entre Steve Kerr, Tyronn Lue et Erik Spoelstra, Team USA dispose de nombreuses armes pour aller re-conquérir le titre.
Oui, car, encore au sommet aux derniers Jeux Olympiques, les Américains reviennent en Coupe du Monde marqués au fer rouge d’une vilaine septième place lors de la dernière édition en Chine, sortis en quart par les Bleus (89-79). Sur sa préparation, l’escouade de l’Oncle Sam est invaincue, avec plusieurs succès de prestige dont une victoire face à l’Espagne (98-88) en Espagne, dans une chaude ambiance qui a plu à Mikal Bridges, entre autres.
Ça tombe bien : les Américains seront attendus à chaque tournant durant cette compétition où ils restent favoris sur la ligne de départ. Mais d’une courte tête…
France
Plutôt séduisante en préparation avec six victoires en sept matchs, sa seule défaite intervenant sur son ultime match amical face à l’Australie (78-74), l’Équipe de France se veut ambitieuse pour cette Coupe du Monde 2023 en Asie. Et comment pourrait-il en être autrement ?
Vice-champions olympiques et vice-champions d’Europe, plus une médaille de bronze à la dernière Coupe du Monde, les Bleus sont toujours bien placés… mais jamais couronnés sur les trois dernières compétitions internationales.
Sachant que Vincent Collet dispose d’un effectif expérimenté, qui a déjà beaucoup joué ensemble et qui arrive à un moment critique de sa fenêtre de tir qui se fermera après les JO à domicile l’an prochain, c’est maintenant ou jamais pour les Batum, De Colo, voire Fournier et Gobert !
Renouvelée sur ses lignes arrières avec les spécialistes défensifs que sont Yakuba Ouattara et Terry Tarpey, plus Isaia Cordinier en dernier arrivé, ou le pétard ambulant Sylvain Francisco à la mène, la France va pour le coup pouvoir compter sur la pile électrique Mathias Lessort sous les panneaux, idéal pour compléter les tours jumelles Fall et Gobert. C’est une évidence, mais toujours bonne à rappeler : l’apport du banc, notamment en défense, sera crucial pour que les Bleus aillent loin.
Trop souvent coupables dans la protection du rebond défensif, les Bleus devront retrouver leur ADN de ce côté-ci du terrain, s’ils souhaitent vraiment accomplir leurs ambitions.
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Allemagne
Médaillée de bronze pour son Euro à domicile l’été passé, son premier podium depuis 2005, l’Allemagne veut garder sa belle dynamique avec une belle génération qui émerge derrière les frères Wagner (Moritz et Franz), mais aussi Isaac Bonga et les vétérans Dennis Schroder et Daniel Theis.
En misant sur cette continuité, avec pas moins de neuf joueurs déjà présents au dernier Euro bronzé, et les retours cumulés de Bonga et Moe Wagner, la Mannschaft compte retrouver un nouveau podium, cette fois sur la scène mondiale. Un exploit plus réalisé depuis l’époque du Hall of Famer Dirk Nowitzki en 2002, à Indianapolis.
Plutôt convaincante en préparation avec des victoires faciles face à la Chine et la Suède, puis deux autres plus prestigieuses face à la Grèce et le Canada, contre lequel elle a aussi concédé une défaite en prolongation, l’Allemagne a confirmé tout son potentiel offensif avec le duo Wagner – Schroder qui peut enflammer n’importe quelle défense.
Reste à savoir si la sélection de Gordon Herbert se sortira sans trop de dommage de sa poule E vraiment pas cadeau, en concurrence avec les hôtes japonais, mais surtout l’Australie de Josh Giddey et la Finlande de Lauri Markkanen !
Canada
C’est la grosse cote de la Coupe du Monde ! Attendu comme une des nations fortes du basket international depuis une dizaine d’années et l’exportation massive de ses talents dans la Grande Ligue, le Canada a enfin réussi cet été à réunir un noyau important de joueurs NBA, au premier chef Shai Gilgeous-Alexander, le All Star du Thunder.
À ses côtés, il disposera également de son coéquipier d’Oklahoma City, Lu Dort, mais aussi de RJ Barrett, le Knick habitué du circuit FIBA qu’il a dominé dans les catégories de jeunes, ou encore de la tête brûlée Dillon Brooks et des valeureux Dwight Powell et Kelly Olynyk dans le secteur intérieur. Sous le cercle, il y aura également le colossal pivot de Providence, Zach Edey, qui peut faire des dégâts dans le jeu international.
Menée par Jordi Fernandez, après le départ un peu précipité de Nick Nurse après sa nomination à Philly, la sélection à la feuille d’érable a du talent à tous les postes. La question sera de savoir comment le sirop va prendre ! Avec si peu de temps ensemble et des joueurs plutôt habitués au jeu direct et à la défense évasive…
En préparation en tout cas, les Canadiens ont montré de quel bois ils pouvaient se chauffer, avec une belle victoire face à l’Allemagne, en Allemagne (à Hambourg), en prolongation avec un RJ Barrett déchaîné (85-80). Et puis, une autre face à l’Espagne, en Espagne (à Grenade), au bout d’une nouvelle prolongation âpre et disputée (113-112).
Australie
Un peu comme le Canada, l’Australie est un des miroirs aux alouettes du basket international. Avec beaucoup de ses joueurs qui ont atteint la NBA, de Luc Longley à Ben Simmons en passant par Andrew Bogut ou Patty Mills, les Boomers sont certes un programme pérenne qui domine outrageusement la zone Océanie et peut aller jouer une médaille à chaque compétition, mais, comme en 2016 aux JO de Rio et en 2019 à la Coupe du Monde en Chine, ils avaient plus souvent échoué au pied du podium. À la place du con, la quatrième !
À Tokyo en revanche, toujours sans Ben Simmons, l’Australie a brisé son plafond de verre en allant décrocher une médaille de bronze aussi savoureuse qu’attendue. L’objectif est donc de surfer sur la vague asiatique avec un effectif qui regorge à nouveau de talents, malgré la blessure récente de Jock Landale à l’intérieur.
Dur au contact et toujours difficile à manoeuvrer en attaque, avec des vieux briscards tels que Joe Ingles notamment, les Australiens misent beaucoup sur leur ligne arrière qui apporte création avec Josh Giddey et percussion avec Dante Exum, mais aussi Matisse Thybulle et Josh Green. Plutôt maladroit en préparation, Patty Mills sera encore le guide spirituel d’une attaque australienne qui peut toujours prendre feu quand on s’y attend le moins.
Victorieuse logique face au Venezuela (97-41) et au Sud-Soudan (88-67), l’Australie a en revanche mordu la poussière face au Brésil de Bruno Caboclo (90-86), avant de se rassurer en battant la France. Les Boomers montent encore en régime…
Espagne
Championne du monde et d’Europe en titre, l’Espagne n’est certes pas au complet avec le récent retrait de Ricky Rubio, et l’absence de son meneur naturalisé Lorenzo Brown, mais son savoir-faire est intact avec son coach légendaire toujours aux manettes, Sergio Scariolo.
De même, les frangins Hernangomez qui ont brillé lors du dernier Euro doré sont toujours au rendez-vous, tout comme plusieurs cadres tels que l’inusable Rudy Fernandez, Sergio Llull et Victor Claver.
Battue sur le fil par les Américains, puis en prolongation par le Canada, la Roja n’a en revanche fait qu’une bouchée de la Slovénie et du Venezuela en début de préparation, avant de finir sur un autre succès face à la République Dominicaine et malgré 20 points de Karl Towns (86-77). Une phase de chauffe rondement menée.
Mise à l’épreuve avant la compétition, l’Espagne sera encore un redoutable adversaire avec Santi Aldama et Usman Garuba, tous deux en pleine forme, qui apportent également de la polyvalence dans le secteur intérieur.
Réputée à juste titre pour son jeu offensif léché et des principes défensifs déjà bien assimilés, la Roja visera le doublé après son titre en 2019. Ce sera compliqué sans chef d’orchestre d’expérience, mais il ne faut jamais sous-estimer l’Espagne, les Bleus et d’autres l’ont souvent appris à leurs dépens…
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Slovénie
Le titre européen acquis à domicile en 2017 commence à sembler loin dans le rétroviseur pour la Slovénie du phénomène Luka Doncic. Elle sort effectivement de deux compétitions internationales très décevantes, avec une piteuse sixième place au dernier Euro (éliminé par la Pologne en quart), et une quatrième place rageante aux JO de Tokyo (au terme d’un parcours héroïque pour se qualifier).
Tout bonnement absente de la dernière Coupe du Monde, la petite nation balkanique veut rebondir au plus vite et profiter de la fierté nationale de son prodige, en pleine force de l’âge après un été à se retaper physiquement, pour retrouver les sommets. Ou à défaut, un premier podium mondial dans l’histoire du pays !
Plombée par la blessure grave de Vlatko Cancar en préparation (qui n’a d’ailleurs pas rassuré), la Slovénie de Coach Sekulic a tout de même une belle tête de poil à gratter avec le génie de Doncic à la création, et une belle brochette de shooteurs patentés à ses côtés (dont Prepelic et Blazic), en plus du revenant Mike Tobey, partenaire particulier de Doncic pour des clinics de pick & roll.
Serbie
Au complet, la Serbie figurerait probablement beaucoup plus haut dans ce classement des forces en présence. Mais, sans son MVP et champion en titre, Nikola Jokic, ni son maître à jouer, Vasilije Micic (qui va découvrir la NBA à OKC à 29 ans), voire Nemanja Nedovic qui s’est blessé en cours de route, les hommes de Svetislav Pesic vont surtout compter sur Bogdan Bogdanovic pour les mener, comme en 2014, sur le podium d’une Coupe du Monde.
Car, plus récemment avec une sortie de route au tournoi pré-olympique (et ce à domicile à Belgrade), une insipide neuvième place au dernier Euro et une non moins décevante cinquième place à la dernière Coupe du Monde, la Serbie a clairement perdu de sa superbe sur la scène internationale…
Forte d’un secteur intérieur plutôt riche avec Milutinov et Petrusev et de talents offensifs prometteurs tels que Nikola Jovic, la Serbie arrive dans cette compétition dans l’habit d’outsider. Un costume taillé sur mesure pour ce groupe qui doit faire ses preuves. Et retrouver son identité au final.
Lituanie
Privée de plusieurs joueurs majeurs, dont son unique All-Star NBA Domantas Sabonis, la Lituanie n’en reste pas moins un postulant permanent aux places de choix.
Avec une raquette taillée pour les combats internationaux derrière Jonas Valanciunas et Domantas Motiejunas, et des extérieurs qui ont goûté à la NBA en Ignas Brazdeikis et Mindaugas Kuzminskas, le talent est là.
On attend plus particulièrement de voir si le jeune meneur de 22 ans, Rokas Jokubaitis, qui a brillé par le passé sur la scène FIBA peut enfin passer le cap chez les seniors. Et avec lui une nouvelle génération que pourrait incarner Azuolas Tubeilis, à la fac d’Arizona ces dernières années.
Battus à deux reprises par les Bleus en préparation, les Baltes ont montré certaines limites. Mais, sans podium depuis 2015 à l’Euro en France, la Lituanie peut profiter d’un tirage plutôt favorable (Mexique, Monténégro, Egypte dans son groupe) pour aller jouer les trouble-fêtes en quarts !
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Parmi les équipes qui peuvent éventuellement prétendre à une place au deuxième tour, voire un accessit surprise en quart, on peut évidemment mettre en exergue les nations portées par leur superstar NBA. Une superstar NBA qui peut, sur un match sec, faire basculer la balance et créer la surprise.
À ce titre, la Finlande est évidemment un candidat évident avec un Lauri Markkanen qui sait toujours se transcender avec sa tunique nationale sur les épaules. De même, on peut souligner l’attrait de la nouveauté en République Dominicaine, qui a en Karl-Anthony Towns un leader offensif de tout premier ordre.
Dans une moindre mesure, le Monténégro peut lui aussi compter sur son pivot scoreur des Bulls, Nikola Vucevic, dans un collectif bien rôdé, tandis que l’Italie peut quant à elle s’appuyer sur le shoot extérieur d’un Simone Fontecchio et de ce grain de folie offensif qu’on avait aperçu lors du dernier Euro. Finalement, la Grèce se présentera sans Giannis Antetokounmpo, mais on peut toujours compter sur Dimitris Itoudis aux manettes pour orchestrer un collectif.
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Malheureusement privée de Kristaps Porzingis à quelques jours du début de la compétition, la Lettonie (qui est dans le groupe des Bleus) dispose malgré tout de gros joueurs référencés, comme les frangins Bertans, Davis et Dairis.
Outre l’une des nations hôtes, le Japon et son jeu tout en vitesse et en shoot de loin (avec son Stephen Curry, Keisei Tominaga), les petites équipes des Philippines, avec Jordan Clarkson qui peut faire des cartons, et le plus petit pays qualifié, le Cap Vert, avec Walter Tavares, auront les faveurs du public pour essayer de créer quelques miracles et perturber l’ordre établi. N’oublions pas la Chine de Kyle Anderson, ou Li Kaier, entraînée par la légende serbe, Sasha Djordjevic…