Devant nos yeux, la NBA est en train de profondément changer. Et la mutation va s’accélérer. Rien n’est sacré. Format des matchs, calendrier, maillots, parquets…
Si David Stern a été crédité du rôle de sauveur de la ligue en lui permettant de prospérer après le départ de Michael Jordan, Adam Silver a une mission : permettre à la ligue de devenir une marque globale, omniprésente et lucrative. Décryptage.
Aux Etats-Unis : rattraper son retard sur la NFL
Aux États-Unis, la NFL est la ligue sportive la plus populaire du pays. Mais aussi la plus lucrative. Du monde.
Ses revenus sont estimés à 9 milliards de dollars par an. Et ce n’est que le début. D’ici 2027, l’objectif de la ligue de football américain est de rentrer annuellement la coquette somme de 25 milliards de dollars.
La NBA – qui pourtant génère plus de revenus hors du pays – culmine à 4,5 milliards de dollars. Deux fois moins donc.
Certes, ce chiffre est à la hausse, principalement grâce au nouveau contrat de droits TV. Mais du côté des bureaux d’Adam Silver, le modèle économique de la NFL fait rêver.
Aussi le futur de la NBA ressemblera beaucoup à celui de la NFL. Comment ?
La première étape – la plus complexe – est d’augmenter la visibilité de la ligue. Un problème de taille puisque la saison débute fin octobre pour s’achever à la mi-juin. Et ce ne sont pas les matchs de présaison à l’audience insignifiante et à l’intérêt contestable qui vont permettre à la NBA de booster sa présence.
La NFL s’est retrouvée face à la même situation mais a réussi à revoir son calendrier pour finalement capter l’attention 12 mois par an. Et ce malgré une saison encore plus courte.
Pour cela, la NFL a transformé tous ces rendez-vous hors saison en événements.
Par exemple, son “combine” est devenu un challenge où les espoirs qui viennent du College s’affrontent dans une série d’exercices pour espérer une bonne position au moment du draft. Tout cela devant les caméras. Avec une véritable mise en scène et un goût prononcé pour le “drama”. Ce modèle est exportable en NBA. Et il n’est pas le seul.
Dans le monde : s’inspirer de la FIFA
Au delà de l’exemple du foot US, la NBA est très intéressée par ce que fait la FIFA. Oui, vous avez bien lu, la FIFA, pas la FIBA.
L’idée d’un rendez vous qui, après la saison et à l’étranger, rassemblerait les meilleures équipes de la ligue pour disputer un véritable tournoi fait son chemin. Elle a la préférence des propriétaires qui ont toujours été contre l’idée de voir partir leurs joueurs participer à la Coupe du monde, au risque d’une blessure et sans la perspective de revenus financiers.
Disputés à la mi-août, les NBA World Games pourraient par exemple opposer les meilleures équipes de la NBA aux meilleures équipes des championnats européens. Un événement qui non seulement permettrait d’occuper aux USA le ventre mou de l’été mais aussi d’augmenter la présence internationale de la ligue.
La surcharge pour les joueurs serait limitée. Et puis de toute manière, dans le futur de Silver, les rencontres seront plus courtes. On en a déjà parlé ici, l’idée est de rendre le format des matchs plus pratiques pour les grilles de programmes mais aussi pour faire face aux nouvelles habitudes de consommation des téléspectateurs.
C’est en pensant à eux et leur niveau d’attention de plus en plus volatile que les règles évolueront. La priorité à l’attaque devenue une réalité ces dernières années sera encore plus accentués. Pour attirer des yeux, la ligue a besoin de points et d’actions spectaculaires.
Cela pourrait dire par exemple revoir la manière dont les classements sont établis. Tomber sur un système de points comme en Ligue 1 en France. Avec du bonus pour les équipes marquant plus de 120 points par rencontres.
Ou encore, créer une ligne de 4 points maintenant que le tir à 3 points s’est complètement banalisé.
Autre direction : la suppression de temps mort, surtout en fin de match. Ou encore le passage à un seul lancer franc. En fait, l’élimination de tous les facteurs rendant le sport statique.
La fantasy et les paris sportifs vont se développer
Côté revenus, et au-delà des droits télés et d’une offensive encore plus grande sur les réseaux sociaux, le futur de la NBA passe par une augmentation de la publicité. Et donc, comme c’est déjà le cas en D-League, par la présence de sponsors sur les maillots. Et sur les parquets.
Enfin – et cette mutation là a déjà débuté – la NBA a décidé d’embrasser la culture du pari sportif. Officiellement comme l’a expliqué Silver dans le New York Times afin d’empêcher que des centaines de millions de dollars partent financer le crime organisé. En réalité parce que le pari et son second bras, la fantasy league sont les véritables raisons du succès de la NFL.
Si les Américains se passionnent pour le quotidien de la ligue de foot, c’est principalement car ils y investissent de l’argent. Le pari sportif est une sorte de second Wall Street où l’information est la clé. Afin de placer son argent sur un match mais aussi gérer son équipe de fantasy.
Pour cette saison, la NBA a signé un partenariat avec le site FanDuel. Légal dans 48 États, il permet CHAQUE JOUR de construire son équipe fantasy et espérer empocher le gros lot payé dès le lendemain. Croyez-moi, pour tester le service depuis deux semaines, j’ai rarement vu quelque chose d’autant immersif. Non seulement, il faut étudier les rencontres du soir afin de créer la meilleure équipe possible mais aussi suivre l’intégralité de la soirée afin de voir comment nos joueurs se débrouillent et à quelle place on se retrouve face à la concurrence grâce à un classement qui évolue en direct. La recette diaboliquement parfaite pour augmenter la visibilité de la ligue et l’intérêt du grand public.
Bien entendu il existe d’autres directions, comme la réforme des conférences ou des divisions. Certaines seront testées, d’autres pas. Quelques unes seront adoptées. Les fans de la première heure râleront du glissement progressif de leur sport vers le spectacle. Mais éventuellement s’aligneront. Car avec le futur, il existe qu’une seule certitude : il est voué à devenir notre présent.