Loin de l’ambiance brûlante et enfumée de la Jazine Arena de Zadar, Frédéric Fauthoux et les Bleus ont retrouvé le calme et la douceur du pays dans la salle d’Orléans. Une Co’Met Arena où ils retrouveront la Bosnie-Herzégovine lundi soir, pour le dernier match des phases qualificatives au prochain Eurobasket, avec l’envie pure et simple de s’imposer. Aussi bien pour finir la prépa sur une bonne note, que pour confirmer à l’Europe du Basket que les Bleus seront encore parmi les favoris cet été…
Freddy, comment abordez-vous ce dernier match de qualification face à la Bosnie, demain lundi, sachant que la qualification est acquise. On peut se détendre… mais pas se relâcher, c’est ça ?
Exactement, voilà, c’est ça ! Mais l’objectif, il est clair : on se doit de terminer de la meilleure des façons ces phases de qualification. C’est vrai qu’on a fait un super résultat en Croatie. Mais on doit, déjà parce qu’on est devant notre public, gagner ce match contre la Bosnie. Parce que c’est important pour le ranking mondial. Et puis aussi pour l’image qu’on veut laisser ici, devant notre public. Une victoire me semble essentielle.
« À part Andrew (Albicy), qui n’a pas joué, je pense que tous les joueurs ont plutôt bien participé à la victoire … Tout le monde a eu ses responsabilités, c’est comme ça que j’aime impliquer mes équipes. Il y a des chances qu’on reste sur la même philosophie »
Vous avez hérité d’une culture de la gagne après l’ère Vincent Collet, est-ce que vous sentez qu’elle continue sous votre tutelle ?
Bien sûr, on doit maintenir cette culture, qui était là avant moi. En plus, aujourd’hui, il y a la Lettonie et la Serbie qui sont aussi invaincues, comme nous. On veut maintenir cette exigence pour montrer à l’Europe qu’on continue à être conquérant. On veut garder cette mentalité de vouloir gagner tous les matchs.
Quels sont, selon vous, les gros points positifs de cette phase de préparation qui se terminera lundi ?
Par rapport à février, je trouve qu’on continue à bien progresser sur le jeu qu’on veut mettre en place. Défensivement, ce qui est la force depuis des années de l’Equipe de France, on a vu que le travail qu’on a fait a marché vendredi. De même, on a beaucoup progressé sur le jeu de passe, dans le jeu collectif. Il y a d’autres joueurs qui peuvent faire encore plus de choses et on pourra évoluer là-dessus, mais les joueurs [qui étaient présents] ont bien accepté le rôle qu’on leur a donné. On a senti un gros match collectif. J’espère que l’on va continuer à montrer ça demain.
C’est difficile tant les effectifs diffèrent, mais est-ce que vous arrivez tout de même à vous projeter sur l’Euro de l’été prochain ?
On observe bien sûr, on ne va pas dire le contraire ! Mais on ne peut pas se projeter beaucoup, parce qu’il y a beaucoup de joueurs qui ne sont pas là, à commencer par les joueurs NBA. Mais on ne sait pas non plus comment les joueurs NBA, certains qui jouent et d’autres moins, vont finir la saison. On y pense un peu, mais ce n’est pas forcément l’objectif [de ces matchs]. La vérité de février ne sera probablement pas celle de mai/juin. On verra bien…
Est-ce que ce dernier match va vous permettre de faire aussi tourner l’effectif, pour voir des associations, des duos, des trios se dessiner ?
À part Andrew (Albicy), qui n’a pas joué, je pense que tous les joueurs ont plutôt bien participé à la victoire. Je crois que le plus gros temps de jeu était à 26 minutes [pour Timothé Luwawu-Cabarrot, ndlr] et le plus petit, c’était 11 [10, en fait, pour Yoan Makoundou]. Tout le monde a eu ses responsabilités, c’est comme ça que j’aime impliquer mes équipes. Il y a des chances qu’on reste sur la même philosophie.
Plusieurs joueurs nous ont confié qu’ils sentaient avoir plus de libertés dans le jeu que sous l’ère Collet. Est-ce que ça fait plaisir d’entendre ça ?
Il y a forcément un cadre à mettre en place. Et si, à l’intérieur de ce cadre, les joueurs s’expriment avec leur talent… Après, s’ils pensent qu’ils ont plus de libertés dans ce cadre, tant mieux ! En tous cas, si ça peut libérer certains. Mais, dans mon jeu, on fait des exercices et des entraînements pour ça. Je leur explique aussi vers quoi où on veut aller. Après, on essaie de prendre des joueurs qui peuvent jouer là-dedans. On veut prendre des joueurs qui peuvent coller au jeu qu’on veut pratiquer, c’est-à-dire des gars qui sont habitués à se passer le ballon, à faire des passes, à mettre des paniers sans oublier de faire des stops défensifs, ce qui est l’ADN de l’Equipe de France.
Quel était l’état de forme générale de vos troupes pour cette troisième fenêtre de qualifications ? N’était-ce pas plus difficile avec l’enchaînement des compétitions à tous niveaux ?
Non, c’était très bien. On a fait en sorte aussi que notre programme sur la semaine s’adapte à ça et évolue, parce qu’on savait que certains de nos joueurs avaient joué le week-end juste avant le rassemblement. Que ce soit en Coupe du Roi, en Leaders Cup ou autre. Pas mal de nos joueurs avaient joué donc on a fait attention pour évaluer l’état de forme de chacun. C’est pour ça qu’on n’a pas fait d’oppositions directement dès le début, pour ne pas prendre de risque de se blesser. On n’a repris les entraînements collectifs que le mardi soir ou le mercredi matin, peu importe. On a des joueurs qui prennent bien soin de leur corps et ils savent enchaîner les compétitions.
« Avec le staff, ce dont on peut se réjouir, c’est que les joueurs adhèrent au discours, ils adhèrent aux méthodes de travail. Ils continuent à véhiculer cette nécessité, pardon je me répète, mais cette volonté de défendre »
Personnellement, êtes-vous satisfait de votre travail ? De votre prise en main de ce groupe, sachant qu’il n’est jamais facile de succéder à un coach si longtemps en place avant vous…
On se satisfait rarement de soi, en général. On pense toujours à ce qu’on peut améliorer. Mais, avec le staff, ce dont on peut se réjouir, c’est que les joueurs adhèrent au discours, ils adhèrent aux méthodes de travail. Ils continuent à véhiculer cette nécessité, pardon je me répète, mais cette volonté de défendre. Je suis forcément satisfait de la victoire de vendredi, mais rien n’est jamais acquis. On veut continuer à se faire des passes et échanger le ballon, permettre à certains joueurs de continuer à s’habituer à des rôles précis, que ce soit scoreurs, rebondeurs ou défenseurs. Chacun a respecté son rôle, ça se passe très bien pour le moment, mais on sait bien que c’est encore fragile.
Dites-nous un mot sur la Bosnie, votre adversaire de demain…
On a un adversaire qui, contrairement à nous, a l’habitude de jouer ensemble depuis un moment. Ils se connaissent par coeur et ils n’ont pas beaucoup besoin d’entraînements pour jouer ensemble. Là-dessus, ils ont un avantage par rapport à nous. Ils disposent de joueurs de grande taille, très polyvalents, qui peuvent jouer à plein de postes, plutôt rugueux. On s’attend à un match âpre, car, même si les deux équipes sont déjà qualifiées, on reste tous des compétiteurs et tout le monde a envie de gagner.
Sur un autre sujet, la fin de saison de Victor Wembanyama, quelle a été votre réaction quand vous avez appris la nouvelle ?
Ce n’est jamais une bonne nouvelle, que ce soit pour Victor ou pour un autre joueur. Parce que tous les joueurs qui apportent une grosse plus-value à l’Equipe de France, et ceux qui peuvent être sélectionnés en Equipe de France, on ne veut jamais les voir blessés. D’abord, on est triste, on se met à sa place et on imagine qu’il est le plus triste de cette nouvelle. Pour lui, c’est vraiment dommage. Et puis, pour l’Equipe de France, on va voir. Personnellement, je ne l’ai pas encore eu au téléphone, donc je ne sais pas encore combien de temps il sera arrêté. Mais on discutera évidemment avec toutes les personnes concernées sur une éventuelle venue de cet été.
Enfin, quelle est votre opinion sur ce qui s’est passé à Zadar, avec des cris de singe et des insultes racistes envers quelques-uns de vos joueurs ?
Ce sont des choses qu’on ne veut voir sur aucun terrain, peu importe le sport. Nous, en tant que sportif, on voulait rester concentré sur ce qu’on était venu faire, jouer un match et le gagner. C’est ce qu’on a fait. Après, tout ce qui se passe autour, on ne peut pas toujours le maîtriser. En tout cas, ce qui est sûr, c’est que ce genre de comportements doit disparaître.
Propos recueillis à Orléans