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Roman de l’été : Kobe Bryant, « Showboat » (1)

Qui se cache derrière Kobe Bryant ? Vous le découvrirez avec la biographie de Roland Lazenby dont Basket USA vous propose de larges extraits pendant tout l’été.

C’est désormais une tradition sur Basket USA : chaque été et chaque hiver, nous vous proposons la lecture de larges extraits d’un ouvrage de basket, soit pour vous distraire sur la plage (comme en ce moment), soit pour occuper les longues soirées au coin du feu.

Après Phil Jackson, Michael Jordan, Larry Bird, Magic Johnson, Allen Iverson et la « Dream Team », nous vous proposons de nous attaquer à un autre monument : Kobe Bryant, quintuple champion NBA qui a pris sa retraite il y a trois ans et qui attend toujours que les Lakers lui donnent un successeur.

Ce livre, « Showboat », est signé Roland Lazenby, le même auteur qui a rédigé la biographie fleuve de Michael Jordan.

Bonne lecture !

 

AVANT-PROPOS

Au premier abord, il avait l’air d’un jeune qui aimait bien la rigolade. Il ne l’était pas, pour sûr. Kobe Bean Bryant a dû se donner beaucoup de mal pour montrer que rien ne l’agaçait. Tout particulièrement lors de sa saison rookie, assez compliquée. J’étais là le soir où il a marqué son premier panier en NBA, un 3-points, au Charlotte Coliseum, en décembre 1996. Il faisait des bonds dans le vestiaire après le match et il m’a gratifié d’un « soul shake » : une main aux doigts étirés qu’il a tendue vers la mienne, avant de replier ses doigts sur les miens puis de les tirer vers lui. Il n’avait absolument aucune idée de qui j’étais. Juste un gars avec un bloc notes et un magnétophone. Mais il était prêt à étreindre le monde entier. Plus tard dans la saison, je me suis retrouvé tout seul avec lui dans un vestiaire désert à Cleveland, alors qu’il attendait avant d’aller disputer le concours de dunks du All-Star week-end, pour le cinquantième anniversaire de la NBA.

Nous passions le temps avant son entrée en scène. Nous parlions de son statut de figure emblématique pour toute une génération de jeunes talents qui arrivaient en NBA, la plupart très jeunes. En fait, le plus jeune groupe de joueurs, encore aujourd’hui, à rejoindre la Ligue. Il m’a parlé de ses difficultés, de ses attentes, des risques et des aléas, ainsi que des nombreuses tentations pour un jeune joueur de 18 ans dans la ville tentaculaire, aux mille dangers, qu’est Los Angeles. Il m’a confié combien l’annonce du VIH de Magic Johnson en 1991 l’avait touché, alors qu’il avait 13 ans. Il avait aussi affirmé qu’il éviterait les tentations qui, selon Johnson, l’avaient amené à coucher avec 300 à 500 personnes chaque année. Bryant m’a dit : « Avec moi, c’est clair car je veux accomplir beaucoup de choses dans ma vie. »

Paumé, solitaire et frustré

Et en effet, quelques minutes après la fin de notre petite conversation pleine de sagesse dans le vestiaire, il est parti réaliser une performance tout en énergie et a remporté le concours de dunks, ce qui a avivé la flamme d’une ambition déjà brûlante. L’année suivante, il était dans le cinq de départ de l’équipe de l’Ouest au All-Star Game et ce, alors qu’il n’était même pas titulaire aux Lakers. A suivi la calamiteuse saison 1999 durant laquelle Jerry Buss, le propriétaire, a démantelé une équipe pleine de talent qui semblait n’aller nulle part. Au milieu du chaos, dans sa troisième saison, Bryant avait 20 ans. Il était paumé, solitaire et frustré. « Tout ce que je veux, c’est être quelqu’un qui compte, m’a-t-il dit, réaffirmant son objectif de devenir l’un des tout meilleurs joueurs de l’histoire de la NBA. Je ne sais pas comment je vais y arriver. Il faut que je trouve le moyen. »

Et il y est parvenu, aussi improbable que cela ait pu paraître à l’époque. En 2016, alors que la fin de sa carrière était toute proche, Bryant pouvait se pencher sur le nombre de points qu’il avait accumulés en vingt saisons et déclarer qu’il avait gagné sa « place à la table » des plus grands de ce sport. En 2015, il avait dépassé son idole, Michael Jordan, pour devenir le troisième meilleur marqueur de tous les temps, derrière Kareem Abdul-Jabbar et Karl Malone. Plus important encore, il avait emmené les Lakers à la conquête de cinq titres NBA, il avait été sélectionné dix-huit fois au All-Star Game et il avait gagné deux médailles d’or olympiques.

Si ce soir-là à Cleveland, alors qu’il était rookie, il a déclaré qu’il ne savait pas comment il se hisserait au sommet, il s’était construit une réponse, qu’il connaissait depuis longtemps. Il allait tracer son chemin, implacablement, inlassablement, relever tous les défis de son sport, soir après soir, match après match, jusqu’à ce qu’il puisse dominer. Et ce, grâce à sa capacité à travailler plus que n’importe qui d’autre.

Les événements qui ont jalonné sa carrière – notamment ces vingt années passées au sein de la même franchise – ont fait que Bryant, un garçon distant et sans compromission, brillant et sûr de lui, reste l’une des grandes énigmes du basket professionnel américain. On peut aisément avancer qu’il est le compétiteur ayant possédé la plus grande détermination dans l’histoire de la balle orange. Au fil des saisons, il s’est patiemment forgé une réputation, auprès d’observateurs privilégiés : celle d’être un maître absolu de l’étude du jeu et de la préparation intense. Ceux qui le côtoyaient étaient sidérés en constatant à quel point il s’attachait au moindre détail. En revanche, sa vie a été une machinerie pleine de conflits. Comme autant de produits dérivés de sa volonté de dominer son sport.

Soir après soir, jour après jour, pendant deux décennies, malgré les blessures et les tourmentes, malgré les ruptures avec les personnes avec lesquelles il entretenait les relations les plus fortes, il n’y avait aucun prix qu’il n’était pas prêt à payer pour bâtir sa propre légende. Dans cette aventure, il est devenu celui que tout le monde a maintes et maintes fois décrit comme « le joueur le plus clivant de la NBA ». Tour à tour adoré et détesté par un très grand nombre de fans de basket.

 

Une confiance en lui inébranlable

Depuis son plus jeune âge, son père Joe « Jelly Bean » Bryant, lui-même ancien joueur NBA, avait voulu développer chez son fils un grand capital confiance. Plus que tout autre chose, c’est resté sa marque de fabrique. Cette inébranlable confiance en lui a été l’un des principaux traits de caractère de Bryant. A un degré nettement supérieur à celui de ses pairs, selon George Mumford, un psychologue qui a beaucoup travaillé avec Michael Jordan et celui que l’on présentait comme son successeur : « Il est tout seul dans sa catégorie. » Cette confiance est restée présente parce que Bryant excluait quasiment toute remise en question de celle-ci. « Il ne laissait pas la moindre contrariété s’insinuer en lui », m’a expliqué Mumford.

Cette confiance a guidé le jeune homme Kobe Bryant durant ses premiers combats dans la Ligue, dans ses luttes avec ses coéquipiers et avec ses coaches, face aux accusations de viol en 2003, dans ses conflits avec ses parents et quand il s’est éloigné d’eux. Et, plus tard, dans son combat pour revenir après des blessures graves. Elle a été le ressort principal de son match à 81 points, de ses nombreux tirs pour la gagne, de ses performances de MVP, de son insouciance totale devant l’énorme quantité de shoots qu’il pouvait prendre un soir donné. C’est elle qui a fait que tout au long de sa carrière, Bryant a continué de jouer malgré toutes sortes de douleurs qui auraient mis les autres sur la liste des blessés, m’a certifié Mumford.

Cette confiance a également été responsable d’un autre événement majeur dans la carrière de Bryant : sa rupture avec son coéquipier Shaquille O’Neal, malgré le succès qui les avait vus remporter trois titres consécutifs avec les Los Angeles Lakers, de 2000 à 2002. De bien des façons, sa relation avec le pivot géant a forgé l’arc de son destin de compétiteur. Elle a aiguisé le penchant de Kobe pour le conflit, présent dans presque toutes les étapes de sa vie.

D’où le titre de ce livre en version originale, « Showboat » (1). C’est le surnom qu’O’Neal avait donné à Bryant quand ce dernier était un rookie toujours prêt à faire étalage de ses capacités, notamment pour dunker et attaquer le cercle. Kobe n’aimait pas du tout ce surnom. Il pensait que ça le rabaissait, en laissant entendre qu’il manquait d’intégrité dans la pratique de son sport. C’est un reproche qui avait souvent été adressé à son père au fil des années, principalement sous la forme de rumeurs dans le milieu du basket pro. Pourtant, ce surnom illustre aussi ce profond amour du basket que Bryant partageait avec son père. Leur plaisir de jouer dans un style fun et flamboyant. « Mon père arpentait les parquets. J’ai en quelque sorte ça dans le sang depuis que je suis môme, m’a expliqué Bryant. J’adorais jouer au basket. Je pratiquais d’autres sports mais je n’ai jamais vraiment retiré autant de plaisir dans ces activités qu’en jouant au basket. »

Enfant, il a passé beaucoup d’heures à regarder les prestations de son père dans la Ligue italienne, où ce dernier s’était replié après l’arrêt prématuré de sa carrière professionnelle en Amérique. « C’était marrant de voir comment les gens réagissaient à ses moves et à son charisme quand il jouait, m’a raconté un jour Bryant. Je voulais ressentir la même chose, en quelque sorte. Mais encore une fois, je trouvais ça cool de le voir jouer. Il était Jelly Bean Bryant. »

 

Né pour assurer le show

Sam Rines, son premier coach en Amateur Athletic Union, a vu cette même passion grandissante chez ce fils encore adolescent. « Il adorait ça, il en bouffait, m’a dit Rines. Kobe veut être au centre de l’attention, il veut être le court central, il veut écrire le scénario, réaliser le film et jouer le premier rôle… Il a été un showman dès l’été précédant son arrivée en classe de Seconde. C’était un incroyable entertainer pour ce qui était d’amuser la galerie. »

L’équivalent, pour « Showboat », serait le surnom « Black Mamba » que Bryant s’est lui-même inventé, en réponse à la désapprobation publique au lendemain des poursuites pour agression sexuelle. Kobe s’était approprié le serpent tueur d’après un film de Quentin Tarantino. C’était la personnification parfaite de sa nature de compétiteur, supposée aussi implacable que celle du reptile. Plus tard dans sa carrière, il s’est mis à décrire son cheminement autrement : il avait endossé le rôle du « méchant ». Il a éclaté de rire lorsque « Real Sports », une émission de la chaîne HBO, a évoqué la déclaration de son ancien coéquipier Steve Nash selon laquelle Bryant était un « sacré connard ». Cette description était vraie, a-t-il reconnu.

S’il s’est donné ce rôle, en tant que compétiteur exigeant, Kobe a adouci son approche durant la très difficile saison 2015-16. Cette année-là, les Lakers ont accumulé les défaites, alors que lui-même effectuait sa tournée d’adieu dans toutes les salles de la Ligue. Au moins le dernier match de Bryant en avril 2016 a-t-il montré une dernière fois sa dévotion au basket ainsi que ce côté « showboat ». Il a lutté jusqu’à l’épuisement pour ponctuer sa carrière d’une performance mémorable, marquant panier sur panier et atteignant les 60 points. Ce soir-là, le futur retraité a mené ses Lakers à un extraordinaire retournement de situation pour arracher la victoire contre le Utah Jazz.

En surface, ce match marquait la fin sans importance d’une saison régulière décevante pour deux équipes qui n’avaient pas réussi à atteindre les playoffs. En réalité, ce fut un moment magique, qui a transcendé tout cela. Il s’est transformé en une célébration de la passion que les fans de Los Angeles éprouvaient pour Bryant. Ils admiraient sa capacité à conjurer le sort dans n’importe quel match. Pendant de nombreuses années, il avait été le chef de file de L.A. pour tout ce qui concernait le basket. Et malgré la diminution de ses exceptionnelles qualités, il a réussi à clore le dernier chapitre de la manière la plus théâtrale et spectaculaire qui soit, s’affichant comme l’artiste par excellence dans une ville qui valorise plus que tout les aptitudes à faire le show.

Ce qui va suivre, c’est ma tentative pour retranscrire sa fascinante histoire, un récit plein d’événements extraordinaires, relayés à travers les années par de nombreux témoins. Bryant est âgé de 38 ans au moment de la publication de cette biographie (en 2016). Il espère poursuivre une autre carrière après celle de joueur de basket. Il a monté plusieurs sociétés de médias avec l’espoir de connaître une nouvelle aventure dans l’écriture et la production. On peut penser que quels que soient ses choix dans les années à venir, il continuera d’être ambitieux, d’aborder les grands moments sans aucune peur et d’être agressif dans tous ses projets. Si tel est le cas, j’espère qu’il entamera chacun d’eux avec l’état d’esprit qu’il avait affiché le soir de son premier panier, à Charlotte. Avec un « soul shake » et les yeux grand ouverts sur l’avenir.

Roland Lazenby, août 2016

 

 

INTRODUCTION

Philadelphie, 15 juin 2001

Tout l’attirail de son triomphe était là, au milieu des effervescences délicieusement collantes d’un champagne de luxe. Le globe doré, énorme, étincelant, au style phallique du trophée du championnat 2001 de la National Basketball Association était niché entre ses bras. C’était un prix que Kobe Bryant convoitait plus que tout autre. C’est le trésor ultime pour les compétiteurs acharnés et les mâles alpha qui peuplent le basket professionnel américain. La toute nouvelle casquette officielle des Los Angeles Lakers, frappée du sceau « CHAMPIONS », un mot écrit en lettres d’or au-dessus du logo de l’équipe, trônait fièrement sur sa tête.

Bien que l’on soit en juin et qu’il se trouve dans un vestiaire embué, Kobe porte une veste en cuir multicolore, un collector, avec un écusson pour chacun des innombrables titres de la franchise californienne. Elle indique la place qui est la sienne parmi les nombreuses légendes de cette équipe, à tout juste 22 ans. Bryant a toutes les raisons de dodeliner de la tête, de mâcher ostensiblement son chewing-gum, de rire et de fêter ce moment suprême. Surtout dans sa ville natale de Philadelphie. Il vient tout juste d’offrir aux Lakers un parcours incroyable et sans précédent de 15 victoires pour 1 défaite dans les playoffs, menant ainsi la franchise de L.A. à la conquête d’un second titre de champion consécutif. Le tout couronné par une victoire 4-1 en Finales contre les Philadelphie 76ers de sa bête noire, Allen Iverson. Son mentor, l’ancienne légende des Lakers Jerry West, objet de tant d’affection et de vénération de la part des fans de basket, n’avait gagné qu’un seul et unique titre dans une carrière longue de quatorze saisons. Et pleine de douleurs et de déceptions. Le jeune Kobe Bryant, lui, en avait déjà gagné deux.

Ce garçon file en ligne droite, avançant vers ses rêves de manière étourdissante. Chaque nouveau succès important semble désormais passer à toute allure, comme un panneau sur l’autoroute. Il a été élevé et chouchouté par une famille qui était profondément immergée dans le basket. Une famille qui a fait naître les attentes immenses liées à sa gloire future. Sa mère, Pam Cox Bryant, fut très attentionnée avec lui, comme elle l’avait été avec son propre frère, basketteur des années auparavant.

Son enfance rappelle un épisode de « La 4e dimension »

Comme l’a souligné une amie proche de la famille, la jeunesse de Kobe Bryant rappelait un vieil épisode de la série télévisée « The Twilight Zone » (« La Quatrième dimension ») dans lequel un enfant est tellement adoré par sa famille que chaque jour est son anniversaire. « C’est toujours son anniversaire, m’a-t-elle expliqué. Et tous les adultes sont là, en adoration : “Oh, c’est ton anniversaire ! C’est ton anniversaire !” » Paradoxalement, le comportement de ses parents en a fait tout le contraire d’un enfant gâté. Ils l’ont poussé dès son plus âge à poursuivre ses rêves. Depuis son apparition retentissante sur la scène professionnelle, en 1996, à 18 ans, Bryant s’est comporté en jeune homme bien élevé et poli en public. Pourtant, il affichait une confiance en lui complètement démesurée, qui rebutait presque tous ceux qui le rencontraient. Certains en venaient même à douter de son équilibre mental…

La construction de cette « croyance en soi » était due, en partie, à l’influence de son père, Joe « Jelly Bean » Bryant. Il avait continuellement et soigneusement entretenu la confiance de son fils, après avoir vu sa propre carrière prometteuse s’effriter dans les turbulences de la NBA des années 1970. Depuis son adolescence, Kobe avait fait montre d’une prétention outrageuse. Il martelait sa prédiction selon laquelle il allait devenir le plus grand basketteur de tous les temps. A chaque fois, ses déclarations sur sa gloire future suscitaient l’incompréhension et l’incrédulité car de tels rêves étaient risibles, impossibles à accomplir. « Kobe est cinglé », se disaient les gens autour de lui, en rigolant.

Mais aujourd’hui, le voilà bel et bien sur la voie de la fortune et de la gloire. Celles que sa grand-mère avait autrefois prophétisées pour l’un des membres du clan. Ses amis, sa famille et ses coéquipiers champions au lycée étaient là, autour de lui, pour former un beau tableau, comme dans le film « La vie est belle ». Peu de temps avant, ses coéquipiers chez les Lakers avaient lancé les festivités à coups de jet de champagne, en entonnant comme un hymne les paroles de DMX : « Y’all gon’ make me lose my mind / Up in here, up in here / Y’all gon’ make me go all out / Up in here, up in here. » (2)

Ces mots illustraient parfaitement la vie de Kobe Bryant. Mais plutôt que de s’immerger dans les réjouissances, il s’est discrètement mis de côté. Il est allé s’asseoir dans le box aseptisé d’une cabine de douche, cerné par le chrome des barres métalliques. Le carrelage autour de lui était de la même couleur que la brume matinale au-dessus de la rivière Schuylkill (3) le matin à Philadelphie. Il avait le visage dans les mains, le regard fixe vers le sol, comme perdu dans le lointain. Il était triste et complètement seul, bouleversé par le flot des émotions qui avaient inondé sa vie durant ces derniers mois.

Depuis son plus jeune âge, quand il voyageait en bus avec l’équipe de seconde classe de la Ligue italienne où évoluait son père et qu’il promettait à son vieux et à l’un de ses coéquipiers qu’il irait beaucoup plus loin qu’eux, la vie de Bryant avait été une singulière – et presque inhumaine – marche vers la gloire. Des millions d’écoliers de sa génération entretenaient le rêve d’égaler la grandeur de Michael Jordan. Un seul, parmi la multitude, a fait étalage d’une volonté de fer, d’une envie de tutoyer l’excellence dans ce sport. Dès l’adolescence, Kobe fut repéré par des représentants du fabricant de chaussures Adidas ; ceux-ci lui ont dit qu’ils avaient l’intention de faire de lui le prochain Michael Jordan. C’était un rôle qui correspondait parfaitement à ses aspirations et en l’espace de quelques mois, il avait déjà endossé la panoplie complète de « MJ », de sa façon de parler en public à la confiance en lui qu’il affichait. Il alla même jusqu’à arborer une tête complètement rasée et brillante, même s’il n’avait que 17 ans à l’époque. La transformation était ahurissante, se rappelle Sonny Vaccaro, qui était à l’époque représentant chez Adidas. Et un homme influent dans l’industrie du basket.

 

« Il a fait le ménage, comme les Russes avec les Romanov… »

Et maintenant, dans ce moment de triomphe, le visage de Bryant confirme qu’il ne reculera devant rien et qu’il fera tous les sacrifices nécessaires pour devenir, comme il l’explique, « le meilleur », comprendre le joueur le plus dominant de ce sport. Plus récemment, c’est sa famille proche qu’il a exposée sur l’autel de sa conquête. Une famille admirée par tous comme un modèle d’accomplissement et d’équilibre. Cependant, elle est aujourd’hui en miettes, victime de son inflexible détermination. « Il a fait comme les Russes avec les Romanov. Il s’est débarrassé de tout le monde », a observé Vaccaro avec le recul.

Il a bien vite écarté son agent, sa société de chaussures de sport et même son coach, Phil Jackson, ainsi que son collègue star Shaquille O’Neal. Aujourd’hui, ce sont sa mère, son père et ses deux sœurs qu’il a écartés de sa vie, d’une puissance et d’une précision quasi chirurgicales. Des membres de la famille ont raconté à de nombreuses connaissances des anecdotes sur des cartes de crédit résiliées, des véhicules enlevés sur une remorque, des emplois annulés, des appels téléphoniques restés sans réponse, des résidences familiales complètement vidées, des relations terminées…

« Ce qui s’est passé est une tragédie », a relaté Gary Charles, un coach new-yorkais d’AAU (4), ami de la famille. Une opinion largement relayée par des amis de la famille et des connaissances. « C’était incroyable de les voir ensemble, s’est souvenu Charles à propos de la relation entre l’adolescent Kobe et son père Joe. L’amour et le respect de Kobe pour son père étaient évidents. Dès que l’un de ses matches en AAU était terminé, Kobe courait dans les bras de son père et lui demandait : “T’as vu ce que j’ai fait ?” Et Joe lui répondait : “Ouais, j’ai vu.” Durant tout le temps que j’ai passé en leur compagnie, je n’ai jamais vu Kobe manquer une seule fois de respect à son père. » Mais l’arrivée du succès, du désir et d’une fortune éblouissante dans la vie professionnelle de Bryant a créé une fracture telle, dans la famille, que cela a sidéré tous ceux qui l’avaient connue avant.

 

A suivre…

1- Le frimeur, le fanfaron.

2- Vous allez tous me faire perdre la tête / Là-dedans, là-dedans / Vous allez tous me faire délirer grave / Lа-dedans, lа-dedans.

3- Rivière américaine, affluent du Delaware, qui coule dans l’Etat de Pennsylvanie.

4- Amateur Athletic Union, organisme ayant pour but le développement du sport amateur aux Etats-Unis. Ce fut un acteur majeur dans la découverte de jeunes talents, en concurrence avec les lycées et les universités.

 

Roland Lazenby, « Kobe Bryant, Showboat », éditions Talent Sport. Sorti le 11 avril 2018.

 

Paru chez le même éditeur :

Phil Jackson, « Un coach, onze titres NBA » (14 mai 2014)

Roland Lazenby, « Michael Jordan, The Life » (17 juin 2015)

Jack McCallum, « Dream Team » (8 juin 2016)

Kent Babb, « Allen Iverson, Not a game » (9 novembre 2016)

Jackie MacMullan, « Larry Bird-Magic Johnson, quand le jeu était à nous » (31 mai 2017)

Julien Müller et Anthony Saliou, « Top 50 : Les légendes de la NBA » (10 octobre 2018)

Marcus Thompson II, « Stephen Curry, Golden » (31 octobre 2018)

Julien Müller et Elvis Roquand, « Petit quiz basket » (28 novembre 2018)

George Eddy, « Mon histoire avec la NBA » (6 mars 2019)

Jackie MacMullan, « Shaq sans filtre » (3 juillet 2019)

 

Talent Editions : https://www.talenteditions.fr

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