Comme Kevin Durant et tant d’autres l’ont rappelé ces dernières années, Stephen Curry est le « système » offensif de Golden State de l’ère Steve Kerr. Pourtant, le meneur de jeu n’est pas forcément un système direct, comme peuvent l’être LeBron James ou Luka Doncic, ou comme a pu l’être James Harden, avec qui l’attaque dépend en majeure partie de leur capacité à marquer ou à trouver un partenaire démarqué, suite aux différentes aides.
Il n’en reste que l’attaque des Warriors repose sur le tir en sortie de dribble de son double MVP, par la peur qu’il inspire, les points qu’il apporte et les prises à deux qu’il génère.
Tirer avantage de la stratégie défensive
Ces Finals en ont sans doute été le plus flamboyant exemple. Jusqu’au Game 4, les Celtics ont ainsi choisi de défendre en « drop coverage » sur le meneur, une tactique que les Cavaliers ou les Raptors n’avaient quasiment pas utilisée lors des précédentes Finals de Golden State. Cela offrait ainsi beaucoup de bons tirs à Stephen Curry, qui tournait à 34.3 points à 50% de réussite, dont 49% à 3-points, sur les quatre premières rencontres !
La contrepartie, c’est que Draymond Green ne pouvait plus servir de « second créateur » et que les Warriors ne profitaient d’aucun surnombre suite à des prises à deux sur Stephen Curry.
Comme l’a d’ailleurs noté Thinking Basketball, cette séquence dans le Game 4 illustre bien la force et la faiblesse de la stratégie d’Ime Udoka. Une stratégie qui a toutefois changé à partir du Game 5, les Celtics ayant fini par demander à leurs intérieurs de contester les tirs de Stephen Curry.
De quoi mieux gêner le leader de la Baie… mais aussi de permettre à Golden State de retrouver son jeu secondaire.
L’humilité du poison
Sur les deux dernières rencontres, Stephen Curry a vu ses moyennes au shoot baisser (surtout à cause de son Game 5 conclu à 7/22 dont 0/9 à 3-points) à 25 points avec 44% de réussite, dont 30% de loin. Mais sa moyenne de passe a par contre doublé, passant de 3.8 à 7.5, alors que celle de Draymond Green passait de 5.8 à 7.0.
C’est là qu’est peut-être la force la plus sous-estimée de Stephen Curry, et une certaine forme d’incompréhension. Car lorsque Steve Kerr le compare à Tim Duncan et loue son humilité, beaucoup s’étonnent en pensant à ses célébrations et ses danses. Mais l’humilité du MVP des dernières Finals n’est pas dans l’attitude, elle est dans l’acceptation de son rôle dans le plan de jeu collectif, comme l’intérieur des Spurs, qui avait petit à petit cédé les clés de l’attaque à Tony Parker puis Kawhi Leonard dans le Texas.
L’humilité de Stephen Curry vient du fait qu’il tire profit des ouvertures qui lui sont offertes pour shooter, mais qu’il n’hésite jamais à utiliser les prises à deux pour servir ses coéquipiers. C’est ainsi ce qu’expliquait entre les lignes Ime Udoka, par rapport à d’autres superstars qui ne faisaient pas peser une telle pression sur les défenses, justement parce qu’elles ont tendance à garder le ballon plus longtemps dans les mains, même sur les prises à deux.
« On peut mélanger certains trucs, être plus physique, passer sous l’écran quand il est très loin. On a été plutôt bon sur ça. Mais le fait est qu’il est un créateur incroyable, et spontané. C’est dur de le presser, par rapport à d’autres gars qui ne veulent pas lâcher la balle. Parce qu’il trouve des gars immédiatement dans l’espace. Et évidemment, c’est là que Draymond est à son meilleur niveau, quand il peut créer pour les autres. »
Le chef d’œuvre de Stephen Curry ?
On peut dire que ces Finals représentent (pour l’instant) le chef d’œuvre de Stephen Curry car elles illustrent à merveille tout ce qu’il est, tant au niveau du shoot que de son rôle de « système » offensif.
Pourtant, comme le note Todd Whitehead, son scoring était assez différent de la saison régulière. Face au « drop coverage » sur quatre des six matchs, il a ainsi beaucoup plus utilisé le « pick-and-roll » (P&R Ball Handler) et le main-à-main (Handoff). Mais avec la pression défensive des Celtics, le jeu sans ballon (Off-ball Screen) ou en « catch-and-shoot » (Spot Up) était plus difficile à obtenir, tout comme les points sur contre-attaque (Transition).
Plus puissant, et donc plus capable de déborder ses adversaires, Stephen Curry a pu d’ailleurs davantage s’illustrer en un-contre-un (Isolation), son efficacité baissant par rapport à la saison régulière (1.20 point par possession contre 1.06 en finale) mais restant à un niveau très élevé face une bien meilleure défense.
Ces Finals 2022 sont la parfaite illustration de ce qui rend Stephen Curry si unique : son extrême efficacité à 3-points, notamment en sortie de dribble, mais surtout sa capacité à s’adapter aux couvertures défensives adverses, en shootant lorsque les intérieurs adverses restaient bas, en faisant immédiatement la passe lorsqu’ils montaient pour contester ses tirs. Et c’est bien le fait qu’il n’hésite pas à passer de l’un à l’autre, en faisant confiance à son tir ou à ses coéquipiers, pour punir les défenses, qui est la base du jeu des Warriors de Steve Kerr. Leur système.
Stephen Curry | Pourcentage | Rebonds | |||||||||||||
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Saison | Equipe | MJ | Min | Tirs | 3pts | LF | Off | Def | Tot | Pd | Fte | Int | Bp | Ct | Pts |
2009-10 | GOS | 80 | 36 | 46.2 | 43.7 | 88.5 | 0.6 | 3.9 | 4.5 | 5.9 | 3.2 | 1.9 | 3.0 | 0.2 | 17.5 |
2010-11 | GOS | 74 | 34 | 48.0 | 44.2 | 93.4 | 0.7 | 3.2 | 3.9 | 5.8 | 3.2 | 1.5 | 3.1 | 0.3 | 18.6 |
2011-12 | GOS | 26 | 28 | 49.0 | 45.5 | 80.9 | 0.6 | 2.8 | 3.4 | 5.3 | 2.4 | 1.5 | 2.5 | 0.3 | 14.7 |
2012-13 | GOS | 78 | 38 | 45.1 | 45.3 | 90.0 | 0.8 | 3.3 | 4.0 | 6.9 | 2.5 | 1.6 | 3.1 | 0.2 | 22.9 |
2013-14 | GOS | 78 | 37 | 47.1 | 42.4 | 88.5 | 0.6 | 3.7 | 4.3 | 8.5 | 2.5 | 1.6 | 3.8 | 0.2 | 24.0 |
2014-15 ★ | GOS | 80 | 33 | 48.7 | 44.3 | 91.4 | 0.7 | 3.6 | 4.3 | 7.7 | 2.0 | 2.0 | 3.1 | 0.2 | 23.8 |
2015-16 ★ | GOS | 79 | 34 | 50.4 | 45.4 | 90.8 | 0.9 | 4.6 | 5.4 | 6.7 | 2.0 | 2.1 | 3.3 | 0.2 | 30.1 |
2016-17 | GOS | 79 | 33 | 46.8 | 41.1 | 89.8 | 0.8 | 3.7 | 4.5 | 6.6 | 2.3 | 1.8 | 3.0 | 0.2 | 25.3 |
2017-18 | GOS | 51 | 32 | 49.5 | 42.3 | 92.1 | 0.7 | 4.4 | 5.1 | 6.1 | 2.2 | 1.6 | 3.0 | 0.2 | 26.4 |
2018-19 | GOS | 69 | 34 | 47.2 | 43.7 | 91.6 | 0.7 | 4.7 | 5.4 | 5.2 | 2.4 | 1.3 | 2.8 | 0.4 | 27.3 |
2019-20 | GOS | 5 | 28 | 40.2 | 24.5 | 100.0 | 0.8 | 4.4 | 5.2 | 6.6 | 2.2 | 1.0 | 3.2 | 0.4 | 20.8 |
2020-21 | GOS | 63 | 34 | 48.2 | 42.1 | 91.6 | 0.5 | 5.0 | 5.5 | 5.8 | 1.9 | 1.2 | 3.4 | 0.1 | 32.0 |
2021-22 | GOS | 64 | 35 | 43.7 | 38.0 | 92.3 | 0.5 | 4.7 | 5.2 | 6.3 | 2.0 | 1.3 | 3.2 | 0.4 | 25.5 |
2022-23 | GOS | 56 | 35 | 49.3 | 42.7 | 91.5 | 0.7 | 5.4 | 6.1 | 6.3 | 2.1 | 0.9 | 3.2 | 0.4 | 29.4 |
2023-24 | GOS | 74 | 33 | 45.0 | 40.8 | 92.3 | 0.5 | 4.0 | 4.5 | 5.1 | 1.6 | 0.7 | 2.8 | 0.4 | 26.4 |
Total | 956 | 34 | 47.3 | 42.6 | 91.0 | 0.7 | 4.1 | 4.7 | 6.4 | 2.3 | 1.5 | 3.1 | 0.3 | 24.8 |
Comment lire les stats ? MJ = matches joués ; Min = Minutes ; Tirs = Tirs réussis / Tirs tentés ; 3pts = 3-points / 3-points tentés ; LF = lancers-francs réussis / lancers-francs tentés ; Off = rebond offensif ; Def= rebond défensif ; Tot = Total des rebonds ; Pd = passes décisives ; Fte : Fautes personnelles ; Int = Interceptions ; Bp = Balles perdues ; Ct : Contres ; Pts = Points.