Le palmarès de Maya Moore ne souffre d’aucun vide. En WNBA, avec les Minnesota Lynx, elle a tout gagné : rookie de l’année (2011), quadruple championne (2011, 2013, 2015, 2017), MVP de la saison régulière (2014) et des Finals (2013), meilleure marqueuse (2014), sept fois élue dans une All-NBA Team et deux médailles d’or olympiques.
C’est une superstar de la ligue féminine, mais en 2019, à 30 ans, elle a décidé de mettre sa carrière entre parenthèses, se focalisant sur sa famille et la religion. Elle voulait aussi consacrer davantage de temps et utiliser sa notoriété pour une cause qui lui tenait à cœur : faire libérer Jonathan Irons.
50 ans de prison sans preuve
Cet homme aujourd’hui âgé 40 ans avait été condamné à 50 ans de prison pour un vol et une agression à main armée qu’il aurait commis dans la banlieue de Saint Louis. Sauf que la victime, Stanley Stotler, n’avait pas réussi à formellement identifier son agresseur. Par défaut, l’homme avait accusé Jonathan Irons, 16 ans à l’époque, bien qu’aucune preuve (témoignage, empreinte ou ADN) ne puisse confirmer ses dires.
Jonathan Irons aurait reconnu les faits devant un policier – ce qu’il a toujours nié – et là encore, aucune preuve écrite ou orale de l’entretien ne fut fournie. Malgré son jeune âge, il fut jugé comme un adulte et déclaré coupable. Aucune liberté conditionnelle n’était possible avant l’âge de 60 ans. Il entre en prison en 1998, à 18 ans. Il allait donc passer au moins 42 ans en prison pour un acte qu’il n’avait pas commis.
C’est en 2007 que Maya Moore et Jonathan Irons se rencontrent. La joueuse est alors à l’université de Connecticut et une amitié se noue. Ce n’est qu’en 2016 que la star de WNBA déclare publiquement qu’elle est amie avec le prisonnier. Au même moment, elle entame des démarches pour changer le système carcéral. Nous sommes deux ans après les morts de Michael Brown à Ferguson ou d’Eric Garner à New York. Le mouvement Black Lives Matter est encore jeune.
Grâce à sa notoriété, elle permet d’impliquer dans son combat Kent Gipson, un avocat réputé de Kansas City. Il prendra désormais en charge le dossier Jonathan Irons.
Libéré le 1er juillet, 22 ans après
En mars dernier, un juge du Missouri, Daniel Green, rend ses conclusions. Il pointe les faiblesses de l’accusation et qualifie cette dernière de « très faible ». Résultat : la condamnation de 1998 est annulée.
L’avocat général a fait appel de cette décision, mais cela n’a rien donné. C’était au procureur principal du comté de Saint Charles de décider ou non si un nouveau procès était nécessaire. Il a refusé de relancer l’affaire.
Si bien que ce mercredi 1er juillet, Jonathan Irons est sorti de prison. Et il était bien évidemment attendu par Maya Moore, qui a filmé la scène.
« Je suis libre, je suis béni », a-t-il déclaré dans les colonnes du New York Times, après 22 ans passés derrière les barreaux. « Je peux enfin vivre désormais. Je remercie tout ceux qui m’ont soutenu, Maya et sa famille. J’espère être un acteur positif pour le changement. Je veux qu’on avance, qu’on réforme la police et la justice. Et je tends la main, en signe de paix, à Stanley Stotler. Je veux dialoguer avec lui. »
Pour Maya Moore, c’est donc la fin d’un combat de plusieurs années et d’un sacrifice de deux saisons (en 2019 et en 2020) dans sa carrière.
« Ma décision de prendre une seconde année sabbatique allait bien plus loin que cette affaire », avait-elle déclaré en mars dernier, au moment de l’annulation de la condamnation, dans des propos rapportés par ESPN. « Bien évidemment, cette affaire est primordiale dans mon esprit. Ce moment de libération s’est fait attendre. Je suis impatient, quand ce sera fait, de pouvoir me reposer et passer du temps avec ma famille. »
Catch us tomorrow on @GMA with @RobinRoberts! #winwithjustice pic.twitter.com/0z1B1RRS2b
— Maya Moore (@MooreMaya) July 2, 2020