La terre a pas mal tremblé aux abords de l’American Airlines Arena ces dernières années. Depuis 2014, il a ainsi fallu digérer le départ de LeBron James au lendemain d’un revers amer, en Finals, face aux Spurs. Chris Bosh a ensuite eu de graves soucis de santé qui l’ont contraint à prendre une retraite anticipée et enfin, la légende de la franchise, Dwyane Wade, après des petites infidélités à Chicago et Cleveland, est revenu pour prendre sa retraite.
Mais contre vents et marées, comme ce fut le cas depuis le début de son mandat, Erik Spoelstra a tenu bon. Le coach floridien a pourtant dû revoir ses objectifs et surtout son degré d’exigence à la baisse. Lors de la fin des « Three Amigos », il a fallu faire le deuil de ces quatre finales NBA consécutives, et remettre le bleu de chauffe pour tirer son groupe vers le haut et le faire progresser. Une approche complètement différente en terme de coaching, qui a nécessité une remise en question du stratège du Heat.
« J’ai connu une période un peu compliquée, » a-t-il confié à Sports Illustrated lorsqu’il s’est rappelé de l’été 2015, sans playoffs, le premier depuis sa nomination en tant que coach principal. « J’ai dû réfléchir et me recalibrer pendant une longue intersaison. Je me suis fixé comme objectif d’être un entraîneur différent, un entraîneur qui correspond un peu mieux à mon identité et à mes objectifs. J’ai dû m’excuser auprès de quelques joueurs en cours de route. Je n’étais pas l’entraîneur que je voulais être, et plus important encore, je n’étais pas l’entraîneur qu’ils avaient besoin que je sois ».
« Tu viens et tu travailles dur chaque jour. Si vous êtes un vrai pro, c’est un environnement dans lequel vous pouvez vous épanouir »
Coach Spo a dû ménager son obsession de victoire pour repartir de zéro et aider ses joueurs à devenir meilleurs. Il a également fallu quelques coups de génie de Pat Riley pour bâtir un groupe à nouveau compétitif : faire de la place à Bam Adebayo en tradant Hassan Whiteside tout en récupérant Meyers Leonard, prendre le risque de perdre Josh Richardson, une valeur sûre, pour faire venir un « franchise player » digne de ce nom (Jimmy Butler) et l’entourer de « role-players » de talent, sans oublier les bonnes pioches comme Kendrick Nunn, Duncan Robinson ou Tyler Herro… On pourrait presque citer tout l’effectif.
Au sein d’une hiérarchie où tout le monde trouve son compte, le mot d’ordre pour atteindre à nouveau les sommets reste le travail, comme le confie Kendrick Nunn. Une valeur cardinale en Floride.
« Le coaching, le développement des joueurs sur et en dehors du terrain, c’est la culture de la gagne. Tu viens et tu travailles dur chaque jour. Si vous êtes un vrai pro, c’est un environnement dans lequel vous pouvez vous épanouir », explique l’arrière, parmi les révélations de ce début de saison.
Avant le début de saison, il restait difficile de placer le Heat parmi les forces en présence à l’Est. Et puis tout est allé très vite. Il y a eu ce succès retentissant sur le parquet des Bucks, le tout sans Jimmy Butler, prouvant que quelque chose de particulier était bel et bien en train d’éclore. Après Bam Adebayo, c’est le trio Nunn-Herro-Robinson qui a épaté la galerie. Jimmy Butler a ensuite pris la mesure de son nouveau rôle avec pour point d’orgue son triple-double victorieux sur le parquet du champion en titre.
« Cette force morale interne est un talent en soi »
Aujourd’hui, le Heat pointe à la 3e place à l’Est avec un bilan remarquable (16v-6d). Malgré les bouleversements de l’été, Erik Spoelstra s’attendait-t-il a un tel départ ?
« On fait ça depuis suffisamment longtemps, on reste ouvert à toute possibilité, y compris de découvrir le meilleur potentiel de l’équipe, » glisse-t-il avant d’évoquer les valeurs morales de son groupe « d’underdogs » de l’Est. « C’est le caractère et le courage des joueurs dont nous parlons. Ils ont trouvé la persévérance nécessaire pour réaliser leurs rêves lorsque les portes ont été fermées au début. Cette force morale interne est un talent en soi. C’est autant un talent qu’un joueur qui entre dans la ligue avec une détente phénoménale. Je veux travailler plus fort pour ce genre de gars. Nous ferons tout, littéralement, pour aider ces gars à réaliser leurs rêves. »
Tout est encore loin d’être parfait, comme en témoigne ce match à Philly où le Heat a clairement bu la tasse (113-86). Il manque peut-être encore un joueur de calibre All-Star pour retrouver un statut de prétendant à la finale NBA. Mais l’alchimie du groupe, la saine émulation qui s’en dégage et cette volonté de progresser en tant qu’équipe ressemble au premier socle d’un avenir qui s’annonce à nouveau radieux.
« On a une super alchimie, tout le monde prend vraiment plaisir à jouer ensemble, est heureux du succès de son coéquipier, ce qui n’est pas toujours le cas dans cette ligue, » glisse Duncan Robinson. « Mes minutes peuvent changer drastiquement d’un match à l’autre, je me concentre sur mon job qui est d’être prêt. Les gars ont la volonté de faire leur boulot au plus haut-niveau sans se prendre la tête ».
C’est le cycle d’une équipe NBA, fait de très hauts et de très bas. L’objectif de chaque franchise est de minimiser la période où les bons résultats se font plus rares. Sur ce point, en passant des « galactiques » Three Amigos au « Miami Vice » en moins de cinq ans, le Heat a réussi sa mue. Toujours avec ses valeurs, mais en s’adaptant.