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Roman de l’été : Kobe Bryant, « Showboat » (2)

Qui se cache derrière Kobe Bryant ? Vous le découvrirez avec la biographie de Roland Lazenby dont Basket USA vous propose de larges extraits pendant tout l’été.

C’est désormais une tradition sur Basket USA : chaque été et chaque hiver, nous vous proposons la lecture de larges extraits d’un ouvrage de basket, soit pour vous distraire sur la plage (comme en ce moment), soit pour occuper les longues soirées au coin du feu.

Après Phil Jackson, Michael Jordan, Larry Bird, Magic Johnson, Allen Iverson et la « Dream Team », nous vous proposons de nous attaquer à un autre monument : Kobe Bryant, quintuple champion NBA qui a pris sa retraite il y a trois ans et qui attend toujours que les Lakers lui donnent un successeur.

Ce livre, « Showboat », est signé Roland Lazenby, le même auteur qui a rédigé la biographie fleuve de Michael Jordan.

Bonne lecture !

Première partie

Ce soir-là au Spectrum, la salle de Philadelphie, son oncle maternel, Chubby Cox, était le principal représentant de la famille. Et lorsque Cox et sa femme sont gentiment allés à la rencontre de la jeune star des Lakers après le match, Bryant a complètement craqué. « Joe Bryant m’a raconté une chose à propos de cette soirée, s’est souvenu Gary Charles. Quand l’oncle et la tante de Kobe sont arrivés pour le voir, Kobe les a pris dans ses bras et s’est effondré en larmes. »

En ce soir de sacre, la douleur et les larmes sur son visage révélaient combien il avait souffert de la perte de sa famille et de l’éloignement. Pourtant, cette jeune star déterminée avait tout de même estimé qu’elle devait aller de l’avant, sans ses proches. « C’est difficile d’être quelqu’un de très déterminé, de très obstiné », m’a confié Mo Howard, un ami de longue date de la famille Bryant. « C’est triste, vraiment triste, m’a dit Anthony Gilbert, un autre ami de la famille de Philadelphie qui a suivi de près la vie et la carrière de Bryant. Comme dirait Francis Scott Fitzgerald : « Montrez-moi un héros et je vous écrirai une tragédie. » »

PREMIÈRE PARTIE

QUAND ÇA BALANCE COMME ÇA, C’EST DE LA BOMBE

« J’ai toujours eu l’impression que personne ne le prenait au sérieux, que tout le monde pensait que Joe Bryant était le rigolo de service. »

Paul Westhead

Chapitre 1 – L’ARRESTATION

Philadelphie, 5 mai 1976

La voiture de sport blanche avançait doucement, presque silencieusement, dans la brume de minuit, en direction du véhicule de la police. Ce dernier avançait lui aussi tranquillement. Sa radio recevait des informations diverses sur l’état de la circulation, un mercredi soir à Philadelphie. Lorsque la voiture de sport est passée, ils ont vu un grand homme noir penché au volant. La scène se déroule début mai 1976, dans le tentaculaire Fairmount Park, et l’homme dans la voiture est Joe Bryant, un rookie de 22 ans des Philadelphie 76ers. Connu comme un gars marrant et surnommé Jelly Bean, il est une sorte de héros du basket local. D’après de nombreux témoignages, c’est Mo Howard, un ami d’enfance de Bryant, qui lui avait donné ce surnom.

Des années plus tard, Howard a affirmé que ce n’était pas vrai, expliquant que ce surnom était venu du style fluide et athlétique avec lequel Bryant jouait au basket. « Je pense que ce sont les gars de South Philly (1) qui l’ont appelé Jelly, s’est souvenu Howard. Ils l’ont appelé Jelly à cause de la façon dont il faisait danser les gens sur le terrain, vous voyez ce que je veux dire ? Vous connaissez cette phrase : « Gotta be Jelly « cause jam don’t shake ». » (2) Et c’était sûrement une très bonne façon de décrire la façon dont Joe jouait. »

Bryant avait également un goût prononcé pour les bonbons haricots, les « jelly beans ». « C’était son truc, les jelly beans, m’a dit Howard en souriant. A l’époque, on ne voyait des jelly beans qu’à Pâques. Mais Joe, lui, en avait toujours. » Certains ont prétendu plus tard qu’il avait hérité de ce surnom parce que des fans lui avaient donné des « jelly beans » sur le banc un soir, durant un match. Quelle que soit son origine, ce surnom collait comme un gant à son style. Jelly Bean était un gars facile à vivre avec un sourire irrésistible, lié aux dents du bonheur. L’expression de son visage séduisait instantanément tout le monde. « Il a toujours été comme ça, a ajouté Howard. Il avait toujours le sourire aux lèvres. Il se marrait et plaisantait tout le temps. Je pense que c’est ce qui m’a attiré vers lui. »

« Jelly Bean Bryant, un garçon au cœur léger »

Son cœur était tout aussi grand que son sourire, ce qui ne gâchait rien. Des années plus tard, l’un de ses camarades de classe en Quatrième s’est souvenu que Joe Bryant était naturellement venu en aide à un petit juif qui se faisait harceler à l’école. « Joe était un garçon au cœur léger, a poursuivi Howard. On s’amusait beaucoup en soirée. Il fallait le voir danser, ce grand gaillard de 2,06 m… C’était le type le plus harmonieux et élégant sur la piste. Il dansait comme un dieu et c’était vraiment un chouette gars. Je n’ai jamais eu le sentiment que « B » se soit jamais inquiété de quoi que ce soit. »

Avec le recul, cette nature insouciante explique peut-être pourquoi en cette douce soirée de mai 1976, où les cerisiers commençaient à fleurir, Jelly Bean Bryant s’est retrouvé emporté dans ce qui semblait être une mission pour tenter le diable. A sa décharge – et Dieu sait qu’il a eu besoin d’être défendu pour son comportement ce soir-là -, cela avait été une journée difficile, pleine d’émotions, à cause des funérailles de la mère de son ami proche Gilbert Saunders.

D’une certaine façon, elle avait été la deuxième mère de Bryant. Il avait passé tellement de temps chez les Saunders que c’était comme un second foyer pour lui. Il adorait être à table chez elle et partager les délicieux et copieux repas qu’elle préparait. Sa propre famille avait des ressources très limitées. Madame Saunders était la seule personne qui remarquait quand il avait besoin d’une paire de chaussures ou d’un blouson. Et elle les lui fournissait discrètement.

Ce jour-là, Bryant s’était rendu chez les Saunders après les funérailles et il avait sorti son chèque des 76ers pour leur montrer qu’il gagnait bien sa vie. « Bon sang ! », s’est exclamé Monsieur Saunders en écarquillant les yeux de surprise. Bryant avait obtenu un contrat rookie de près d’un million de dollars (3) – une somme incroyable à l’époque – et depuis quelques mois, il avait palpé plus de cash que dans n’importe lequel de ses rêves les plus fous. Gilbert Saunders, qui jouait à l’époque au basket pour John Chaney à Cheyney State, pensait que Bryant avait sorti son chèque « pour réconforter (sa) famille. Il avait été accepté par ma famille. Nous l’avions adopté. Les baskets et les manteaux, c’était des choses que ma mère se procurait pour lui. Son geste était une façon de dire à mon père : « Voilà comment je m’en sors maintenant. » »

Donc, les événements, les émotions de la journée, expliquent sans doute ce qui a poussé Jelly Bean à se mettre dans une situation hasardeuse quelques heures plus tard, vers minuit, à Fairmount Park. Il avait un feu arrière en panne et roulait sans permis ; il disposait seulement d’un permis probatoire, malheureusement périmé. Il n’avait commencé à conduire sérieusement que depuis l’automne précédent, quand il avait acquis deux toutes nouvelles Datsun 280 Z flambant neuves – une pour sa femme, Pam, et une pour lui – après avoir signé son contrat rookie chez les Sixers. « Ces Z avaient de la puissance, s’est souvenu Gilbert Saunders. C’est ce que Joe et sa femme avaient choisi. C’est ce qu’elle voulait, donc c’est ce qu’ils ont acheté. Chacun la sienne. »

Un monde bruissant de lignes de tramway et de rames de métro

Bryant avait été élevé ici, à Southwest Philly, dans ce qu’il aimait décrire comme le « ghetto ». Un monde bruissant de lignes de tramway, de rames de métro aérien, de bus et de gangs locaux qui se battaient pour leur business à chaque coin de rue. Il était passé de piéton à conducteur de Z, une véritable fusée sur roues. Dotée de 170 chevaux pour un poids de 1,3 tonne seulement, cette deux places à injection avait le potentiel pour alternativement exalter et terrifier quiconque s’asseyait derrière le volant. Et tout particulièrement Jelly Bean, qui était encore inexpérimenté sur la route.

Comme on peut le comprendre, il adorait sa voiture. Il adorait la montrer à son ancien quartier de Southwest Philly, s’est souvenu Vontez Simpson, un ami. « Il la montrait à tout le monde. Il voulait que tout le monde sache qu’il avait réussi. C’était une bombe de caisse à l’époque. » Bryant planait sans doute un peu ce soir-là, même quand la voiture était à l’arrêt, comme le laissent supposer les deux pochons de cocaïne et la petite cuillère adéquate qui se trouvaient dans le véhicule.

Un autre facteur ne venait rien arranger. Il continuait de fréquenter Linda Salter, son ancienne petite amie, la sœur d’un coéquipier de son ancienne école, le lycée John Bartram à Philadelphie. Et ce, malgré le fait qu’il était marié à une belle jeune femme avec laquelle il avait une fille d’un mois. Une femme et une fille avec lesquelles il vivait dans une adorable maison, dans la banlieue chic de la ville.

Depuis le début, son mariage avait été dirigé par sa femme Pam. C’était une beauté sculpturale avec un petit fond de méchanceté. De vieux amis ont remarqué qu’à chaque fois qu’il y avait une décision à prendre, Bryant se tournait immédiatement vers sa compagne, en attendant son approbation. Même les membres de la famille rigolaient de voir Jelly en panique rien qu’à l’idée de la contrarier. Mais il en était arrivé là, à la contrarier méchamment car sur le point d’être pris la main dans le sac.

Si cela avait été une scène d’un film de cette époque, la bande originale aurait pu être « Disco Lady » de Johnnie Taylor, le tube disco-soul de ce printemps 1976. C’était un titre d’une douceur extrême, le genre de chanson que Joe adorait. « Shake it up, shake it down / Move it in, move it round, Disco Lady. » (4)

Sur les trois dernières années, la police de Philly a tué 73 personnes

Quelle que soit la chanson qu’il écoutait dans sa Z, quoi qu’il ait pris pour se détendre ce soir-là, tout s’est brutalement interrompu quand il a pris conscience que les gyrophares étaient braqués sur lui. Bien évidemment, il a immédiatement senti tous les dangers que cette situation comportait. Le moindre d’entre eux n’était pas qu’il était un homme noir dans une voiture de sport, tard dans la nuit, dans une ville gangrenée par la violence des gangs et toutes sortes de problèmes raciaux.

La nouvelle de son engagement aux Sixers quelques mois plus tôt avait fait la une du « Philadelphie Tribune », juste à côté d’un article sur des douzaines d’Afro-Américains tués par la police de Philadelphie durant les derniers mois. Sur les trois dernières années, la police de Philly avait tué 73 personnes et en avait blessé 193 autres. A cette époque, les agents de police avaient l’habitude de faire des tirs de « sommation » sur des suspects en fuite.

Durant les douze derniers mois, cinq agents de police avaient été tués, dont un qui avait été assassiné depuis le toit d’un HLM par un jeune de 15 ans. Ce dernier avait choqué toute la ville en déclarant aux autorités : « Je voulais juste tuer un flic. » Bryant n’avait pas besoin d’un article de journal pour qu’on lui rappelle ces circonstances. Aucun habitant noir de la ville n’avait besoin qu’on les lui rappelle. Peut-être ne s’agissait-il que d’un simple contrôle routier pour un feu arrière défectueux, comme l’ont affirmé plus tard les policiers, mais le contexte était étrange et tendu. Et il allait le devenir plus encore…

Les policiers en ont eu un indice lorsque l’immense Jelly Bean, qui mesurait 2,06 m, s’est déplié pour s’extraire de la voiture. Il est resté calme lorsque le policier lui a éclairé le visage avec sa lampe torche. Il a immédiatement décliné son identité. Dans la foulée, il s’est avisé que la meilleure décision à prendre était d’annoncer aux policiers la vérité concernant son permis de conduire, pensant éviter ainsi la fouille du véhicule.

Il a tendu ses papiers mais le policier était perplexe après l’aveu de Bryant au sujet de son permis. Joe a ensuite été pris d’un irrépressible sentiment de panique. Peut-être était-ce dû, comme certains l’ont suggéré plus tard, à la soudaine prise de conscience du fait que sa femme se rendrait compte qu’il était sorti. Peut-être était-ce la peur de la police, même si Bryant lui avait déjà remis ses papiers. Ce qui s’est produit ensuite a sidéré les policiers, aussi bien que la ville de Philadelphie tout entière, et même le milieu culturel très particulier de la NBA des années 1970.

Joe Bryant panique et prend la fuite

Bryant a brusquement tourné les talons et il est remonté dans sa voiture. Les policiers ont supposé qu’il était parti à la recherche de son permis de conduire dans la boîte à gants ; au lieu de cela, Bryant a mis le contact, enclenché une vitesse sur sa Z et mis les gaz, laissant derrière lui un nuage de poussière et de graviers et des policiers complètement abasourdis. Le nuage remplissait le rai de lumière de leurs phares.

Les officiers eurent besoin d’un instant pour se rendre compte que Joe Bryant venait de leur échapper et ce, à grande vitesse. Après ce moment de surprise, ils sont remontés dans leur camionnette et l’ont pris en chasse, en lançant des signalements radio. Ils se sont vite rendu compte qu’il était trop dangereux de poursuivre la Z. Joe Bryant avait disparu à une vitesse folle – bien au-delà de 160 km/h, d’après leurs estimations -, tel un étrange vaisseau transperçant la nuit. En un instant, il était hors du parc et roulait à toute blinde dans les rues de la ville. Tous feux éteints. Ce n’est que douze minutes plus tard qu’il a été repéré par une autre patrouille de police.

L’agent Raymond Dunne a rapporté qu’il se dirigeait vers l’ouest, sur Cedar Avenue, lorsqu’il a vu dans son rétroviseur une voiture de sport foncer vers lui feux éteints. Son conducteur a klaxonné furieusement pour que le véhicule de police s’écarte de son chemin. C’était impressionnant : Jelly Bean Bryant, qui déboulait à un train d’enfer et klaxonnait comme un dingue pour se frayer le passage. Au dernier moment, il a fait un écart pour contourner la voiture de police et l’agent Dunne l’a immédiatement pris en chasse ; il a fini par laisser tomber, ça allait trop vite pour lui. Dunne a déclaré plus tard qu’il roulait si vite, pour essayer de rattraper Jelly Bean, qu’il a eu peur de perdre le contrôle du véhicule de patrouille.

Quelques minutes plus tard, Bryant a débouché sur une intersection très encombrée, sur Baltimore Avenue. Un véhicule lui bloquait le passage. Lancé à toute allure, il a tenté de l’éviter ; ce faisant, il a perdu le peu de contrôle qu’il avait encore de sa voiture. La Z a d’abord heurté un panneau Stop puis a jailli à travers Farragut Street, où elle a arraché un panneau d’interdiction de stationner. Elle a ensuite rebondi de toutes parts le long de la rue, en détruisant une voiture garée d’un côté puis en en fracassant deux autres de l’autre côté. Enfin, elle est revenue sur la voie de circulation avant de sauter miraculeusement sur le trottoir, pour aller s’écraser contre un mur.

Entourés d’une pile de débris dignes d’une tornade, Bryant et son ancienne petite amie se sont retrouvés hébétés dans la voiture réduite en épave. C’est peut-être à ce moment-là qu’il a réalisé qu’à aucun moment de sa course folle, il n’avait songé à balancer la coke. Les agents de police l’ont retrouvée plus tard lors de la fouille du véhicule. A cet instant, Bryant a pris la dernière de ses (très) mauvaises décisions : il a pris la fuite en courant dans la nuit. « Il a sauté en dehors de la voiture et a laissé la fille toute seule, m’a raconté un vieil ami de Bryant. Joe a paniqué et il a sauté de la voiture. Il n’aurait pas dû courir. Si vous êtes un policier dans cette ville et que vous voyez un gars de cette taille courir, vous savez tout de suite qui c’est. Tout le monde connaissait Joe. Il n’avait aucune raison de s’enfuir. »

Qui sera le Messie de la prophétie ?

C’est à ce moment précis que le mauvais calcul de la soirée finit par complètement s’écrouler. Et que les décisions les plus insensées rencontrent la chance la plus inouïe, dans une fenêtre temporelle de pure folie. Fort heureusement, la police n’a pas effectué ses fameux « tirs de sommation » sur le fuyard Jelly Bean. En plus d’être excellent sous les paniers, Bryant avait été une star des pistes d’athlétisme au lycée. Pourtant, l’un des policiers, Robert Lombardi, a réussi à le rattraper en l’espace de quelques mètres. Bryant s’est alors retourné, prêt à agir violemment. « Je l’ai saisi, s’est rappelé Lombardi. Il a levé le poing et je l’ai frappé. Je l’ai maîtrisé et je lui ai passé les menottes. »

Bryant a été touché à la tête, une blessure qui a eu besoin de six points de suture pour se refermer. Des décennies plus tard, Gene Shue, qui était à l’époque le coach de Bryant aux Sixers, s’est souvenu que la police avait apparemment eu la main leste en le frappant. Ce passage à tabac l’a profondément humilié et l’a perturbé pendant très longtemps. Immédiatement, il y a eu les menottes, la prison et l’anxiété terrible de devoir faire face à sa femme.

En un petit peu moins d’une demi-heure, toute l’existence dorée de Joe Bryant s’est transformée en un monde de merde. Beaucoup, à Philadelphie, avaient fait beaucoup moins avant d’être refroidis pour finir à la morgue. Pour Joe Bryant, il est apparu de plus en plus évident, dans les mois et les années qui ont suivi, que cet incident lui avait fait, à lui ainsi qu’à sa carrière, le plus grand mal. Les heures d’angoisse que Jelly Bean a passées en détention l’ont incidemment éclairé sur une révélation. Des années auparavant, sa grand-mère avait prophétisé que quelqu’un dans la famille deviendrait extrêmement riche et célèbre. Cette nuit de mai 1976 a été le premier indice, pour Joe Bryant, que cette personne de la prophétie pourrait ne pas être lui.

Chapitre 2 – LA PATERNITÉ

Durant toute sa jeunesse, la carrière de basketteur de Joe Bryant avait été comme un autre véhicule magique et brillant dans sa vie, pouvant le transporter en des lieux auxquels très peu d’autres garçons de son entourage pouvaient espérer accéder un jour. Cependant, Jelly Bean avait un jeu très différent des autres. Il avait un style bien à lui, qu’il avait développé durant son enfance, chez sa grand-mère à West Philly, sur le playground du quartier entre la 42e rue et Leidy Avenue. Elle l’autorisait à aller jouer tous les jours sauf le dimanche, où elle le faisait lever très tôt le matin. Ils quittaient la maison à six heures pour aller faire le sabbat à la Nouvelle Eglise Baptiste de Bethléem. « On y passait toute la journée », m’a un jour expliqué Bryant.

Les chants, les louanges et les prières constituaient la base de son éducation morale. Son travail sous les paniers était programmé tous les autres jours de la semaine et toujours sur le playground. Alors qu’il devenait adolescent, sa famille s’est installée à Southwest Philadelphie, dans une petite maisonnette pas chère, sur Willows Avenue. Elle était proche du Kingsessing Playground, qui est devenu son nouveau laboratoire de basket. Willows était une petite avenue pas très bien entretenue, comme de nombreuses rues de Southwest Philly. Pourtant, c’était une rue à trois voies, au bord de laquelle le papa de Jelly Bean, Big Joe, s’asseyait et souriait au monde.

La plupart du temps, le monde lui souriait en retour. Dans un autre âge, Joe aurait pu jouer bloqueur défensif aux Eagles (5). Il mesurait 1,90 mètre et il était massif, très large du haut du corps. Vous auriez pu passer tout Philadelphie au peigne fin, vous n’auriez pas trouvé une personne qui n’admirait pas Big Joe pour son physique d’ours, son amabilité et tout l’amour qu’il vouait à son fils.

La haute estime dont il jouissait dans son entourage constituait un grand accomplissement pour un homme qui avait réussi à élever trois enfants dans des conditions financières difficiles. Des décennies plus tard, des gens de toutes conditions se souvenaient très bien de Big Joe, appelé aussi Pop Bryant par les enfants du quartier. Au fil des années, le « Philadelphie Tribune », qui parlait souvent de lui dans ses pages Sport, avait fini par l’appeler affectueusement le « Charmant gentleman de Willows Avenue ».

Le grand-père est aux anges

Regarder son fils jouer au basket semblait être le meilleur élixir de bonheur de Big Joe. Il avait de grandes mains charnues et un gros visage rond, au sourire facile. Cependant, il avait un sens aigu de la discipline, tout droit hérité de la maxime de l’Ancien testament : « Qui aime bien châtie bien. » Il a un jour expliqué au journaliste sportif de Philadelphie Julius Thompson qu’il avait souvent demandé à son fils « de ne pas ramener la lumière du jour dans (sa) maison » quand il sortait le soir. En d’autres termes, de ne pas sortir trop tard et de rentrer après l’aube. Son fils a contrevenu une fois à cette règle et Big Joe l’a littéralement assommé, si durement que Jelly Bean aurait mis vingt minutes avant de retrouver tous ses esprits. Quand ça a été le cas, il avait compris le message, s’est souvenu Thompson.

Big Joe avait une forte présence. Il veillait sur son fils de près. « Pop Bryant était là partout où était Joe », s’est souvenu Vontez Simpson, un ami de la famille. « Big Joe était complètement investi auprès de son fils. Il était immensément fier de lui », a commenté Dick Weiss, un journaliste spécialisé basket qui a œuvré sur Philadelphie pendant de longues années.

« Big Joe Bryant était un gars super, très liant, s’est souvenu Paul Westhead qui a coaché Jelly Bean à La Salle University. Les gens des alentours de la ville connaissaient le père de Joe. Il se préoccupait de ce qui était bon pour l’avenir de son fils et de sa famille. Ce qui est bon, ce sont les bonnes choses qui font que vous devenez quelqu’un de bien. C’était un homme charmant. » En prenant de l’âge, il a été rattrapé par le diabète et des problèmes de poids. Big Joe s’est mis à marcher avec une canne. Malgré cela, il affichait quand même une véritable joie de vivre, d’abord en voyant jouer Jelly Bean puis en voyant jouer son petit-fils Kobe. La force de son amour était sans bornes. Des années plus tard, quand son diabète a eu raison de son mode de vie, Big Joe est allé voir les matches de son petit-fils en trimbalant son réservoir à oxygène.

A suivre…

 

  1. « Philly » est le diminutif de la ville de Philadelphie.
  2. Littéralement, « Ça doit être de la gelée car la confiture ne remue pas », que l’on peut traduire par « Quand ça bouge comme ça, c’est de la bombe ».
  3. Environ 847 982 euros.
  4. « Bouge comme ça de bas en haut / Approche-toi, tourne-toi, Disco Lady. »
  5. Pour les Philadelphie Eagles, équipe de football américain de la ville de Philadelphie.

 

Paru chez le même éditeur

Phil Jackson, « Un coach, onze titres NBA » (14 mai 2014)

Roland Lazenby, « Michael Jordan, The Life » (17 juin 2015)

Jack McCallum, « Dream Team » (8 juin 2016)

Kent Babb, « Allen Iverson, Not a game » (9 novembre 2016)

Jackie MacMullan, « Larry Bird-Magic Johnson, quand le jeu était à nous » (31 mai 2017)

Julien Müller et Anthony Saliou, « Top 50 : Les légendes de la NBA » (10 octobre 2018)

Marcus Thompson II, « Stephen Curry, Golden » (31 octobre 2018)

Julien Müller et Elvis Roquand, « Petit quiz basket » (28 novembre 2018)

George Eddy, « Mon histoire avec la NBA » (6 mars 2019)

Jackie MacMullan, « Shaq sans filtre » (3 juillet 2019)

 

Talent Editions : https://www.talenteditions.fr

 

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