Andrew Bogut, la tour de contrôle de la Baie d’Oakland

Une série de 16 victoires consécutives en début de saison, un meneur « Polly Pocket » qui taquine le trophée de MVP, un record de domination historique à domicile, un shooteur qui plante 37 points en un quart-temps et le meilleur bilan de la conférence Ouest, et donc un coach rookie envoyé au All Star Game… N’en jetez plus, la coupe est pleine !

Les raisons se multiplient chaque jour pour parler en bien des Warriors. Mais on oublie souvent de parler du rôle défensif, aussi obscur que prépondérant, d’Andrew Bogut dans la réussite des californiens. Le pivot australien est la clé de voûte de l’édifice californien. Sans Bogut pas de titre… Avec lui, tout devient possible. BasketUSA vous explique pourquoi.

La définition même du pivot stoppeur

Absent plusieurs fois cette saison à cause d’une tendinite au genou, Bogut tourne à 6.6 points, 8.6 rebonds, 2.7 passes et 2 contres en 24 minutes de jeu sur les 28 rencontres qu’il a disputées (sur 42 de son équipe au total). Surtout, il est le leader de la défense des Warriors, la tour de contrôle qui surveille la Baie d’Oakland des intrusions ennemies.

Déjà l’an passé, le pivot australien avait démontré qu’il revenait lentement mais sûrement à son meilleur niveau après plusieurs blessures (aux chevilles notamment) qui l’avaient écarté des terrains. Il était la saison passée sur le podium de plusieurs catégories statistiques (avancées) qui évaluent le travail défensif; à savoir, le pourcentage de rebonds défensifs (2e), le pourcentage de rebonds tout courts (3e), l’efficacité défensive (2e) et le +/- défensif (2e). Cette saison, il est encore dans le haut du panier dans toutes ces catégories… et celle du pourcentage de contres !

Mais tous ces chiffres, Andrew Bogut s’en contrefout ! Même si cela permet d’évaluer enfin les tâches obscures, mais ô combien importantes en défense, Bogut sait au feeling, à l’instinct quand il fait du bon boulot.

« Je le vois par rapport aux situations de jeu. » explique-t-il sur ESPN. « Je sais que, quand les gars continuent d’attaquer dans la peinture pendant les quatre quart-temps, je n’ai pas fait mon boulot. Il faut que je donne le ton dès le premier quart, en contrant quelques tirs, et après tu vois que tes adversaires filent vers la ligne de fond en deuxième puis en troisième et en quatrième quart. Si ton adversaire parvient à pénétrer facilement, qu’il aime ce qu’il y voit, il va revenir et c’est difficile d’arrêter un joueur NBA. Mais cette saison, ça n’arrive plus tellement. »

Deuxième au classement du vrai +/- défensif* (derrière l’inoxydable Tim Duncan), Bogut est la définition même du stoppeur sous les panneaux. Rapporté sur 48 minutes, les Warriors n’autorisent que 35 points dans la raquette quand il est sur le terrain, 46 quand il n’y est pas. Véritable force de la nature avec un 2m13 et 118kg délié, il règne dans la raquette des Warriors avec sa capacité à aider ses coéquipiers et placer le contre en second rideau.

Plus impressionnant encore, avec Steve Kerr aux manettes, les Warriors ont réussi à tenir leurs adversaires sous les 50% de réussite sur les 23 premiers matchs de la saison ! Si cette série de victoires s’est achevée contre les Grizzlies le 16 décembre dernier, Golden State a néanmoins les preuves statistiques qu’ils sont en bonne voie pour pratiquer le meilleur basket possible avec Bogut.

Un facteur X en attaque… quand il peut jouer !

Comme vous le constaterez sur la figure ci-dessous, l’impact de Bogey est évident à l’évaluation de l’efficacité défensive qui varie entre 92,8 quand il est sur le terrain et 98,6 quand il n’y est pas. Sa défense est cependant loin d’être son unique qualité. En attaque, aussi, il est un pion essentiel en permettant notamment de fixer la défense adverse à l’intérieur pour libérer les Splash Brothers & Co à trois points (43% contre 36 de réussite à longue distance avec ou sans lui).

Le hic chez le Aussie, c’est évidemment son état de santé qui fluctue autant que le vol des goélands au gré des vents contraires de la Baie de San Fran’. En pleine forme cette semaine pour dominer Dwight Howard avec ses 9 points, 10 rebonds et 5 contres, il peut tout à fait être à nouveau sur le flanc sans véritable date de retour la semaine prochaine. Géant aux pieds d’argile, Bogut est pourtant la condition sine qua non du succès des Warriors.

De fait, sa présence, et sa forme physique, seront en playoffs le facteur déterminant pour que les Warriors aillent loin. On vous parlait d’arme atomique en début de saison et il y a bien de ça. Sous le charme, Kevin McHale, pas le dernier des intérieurs doués offensivement, a reconnu tout le talent du pivot des Warriors. A la passe notamment.

« C’est un passeur tellement talentueux. » commente McHale dans le Houston Chronicle. « Steve l’a placé au poste haut, et il prend souvent de très bonnes décisions en fin de possession, particulièrement avec les joueurs qui coupent. Ils ont tellement de coupes et il a une telle vision du jeu. Ils l’utilisent beaucoup sur les handoffs et pour initier leurs systèmes d’attaque. Avec Curry et Thompson qui jouent sans ballon, et lui qui fait les passes, c’est un enfer à défendre. Chaque erreur se paye cash avec des tirs de loin de ses deux supers shooteurs ou des layups en fin de possession. »

Quand Bogut est sur pieds, les Warriors sont un véritable casse-tête à défendre. La capacité du pivot à distiller les bonnes passes et prendre les bonnes décisions rend encore plus redoutable une des meilleures attaques de la ligue, rien que sur le talent pur de ses diaboliques shooteurs. En jouant small ball, coach Kerr peut effectivement réussir de bons coups… mais si Golden State veut voir loin, il lui faudra son australien !

Eh oui, si le mât australien est brisé, le voilier californien n’a plus du tout la même vitesse de croisière…

* Le vrai +/- défensif est une estimation de l’impact du joueur sur les performances défensives de son équipe; elle est mesurée par le nombre de points autorisés sur 100 possessions défensives.