L’incertitude demeure quant au potentiel réel du pivot des Lakers, fragilisé par les blessures depuis deux ans. Si son entourage se veut positif, certains insiders émettent de gros doutes. Explications.
Dwight Howard en a bavé en Finales NBA. Andrew Bynum, tantôt associé à l’expérimenté Pau Gasol, tantôt au versatile Lamar Odom, a revêtu la panoplie du bourreau, même si les fautes ont contrarié son travail de décapitation. « D12 » connaît très bien le parcours du jeune pivot des Lakers.
« Comme moi, il a quitté le lycée pour aller directement en NBA. Je suis bien placé pour mesurer la difficulté de l’adaptation. C’est un long chemin, encore plus pour lui qui n’a pas été épargné par les blessures. Elles ont freiné sa progression. »
Reste à déterminer la marge de progression réelle de cet intérieur qui aura 22 ans le 27 octobre et qui reste sur une saison régulière mitigée (14.3 pts à 56%, 8 rbds, 1.8 ct). D’autant qu’en playoffs, les stats du n°17 ont sérieusement piqué du nez (6.3 pts à 45.7%, 3.7 rbds, 0.9 ct). On trouve peu de gens très loquaces sur le sujet. Dans le big circus NBA, Andrew Bynum est un intermittent du spectacle. Ses deux dernières saisons, émaillées de blessures aux genoux avec des ligaments touchés, ont désarmé les observateurs. Bynum est-il un joueur à risques ? Mark Heisler, beatwriter du « Los Angeles Times », reste prudent :
« Dans le passé, on a vu de jeunes talents détruits par de multiples opérations aux genoux. Dans le cas d’Andrew, les ligaments ont été touchés mais il n’y a pas eu de rupture totale. Physiquement, il est revenu et son impact athlétique augmentera si les blessures l’épargnent. Ce sera un All-Star s’il ne connaît plus de blessures. Dans le cas contraire, il restera un joueur fragile. »
Depuis deux saisons maintenant, le n°17 des Lakers connaît des up and down inquiétants liés à de longues absences. Mais le Dr Sean Zarzana, son préparateur physique, qui travaille à Atlanta, est formel :
« Mentalement, il n’est pas du tout touché. C’est un battant qui ne se décourage pas devant les coups du sort. Il a quand même fallu lui faire comprendre qu’il était jeune et que ces arrêts restaient des épiphénomènes. Certes, ça retarde sa progression mais il lui reste beaucoup de temps pour réaliser une grande carrière. »
Preuve que Bynum voit loin : à la lecture des résultats de l’équipe américaine à Pékin l’été dernier, il se projetait dans l’avenir.
« Je dois me préparer pour 2012. Les Jeux Olympiques ont l’air d’être un événement particulier. Michael Phelps (ndlr : le nageur huit fois médaillé d’or en Chine) m’a raconté son aventure, ça m’a vraiment donné envie de faire les Jeux Olympiques. »
Andrew Bynum reste un pivot d’avenir. C’est Howard, le leader de la nouvelle génération de big men, qui le certifie.
« Je l’ai vu prendre des tirs en reculant et je me suis même demandé si c’était bien du Andrew… Je crois qu’il y a du respect mutuel entre nous. En NBA, on est un peu comme des dinosaures, nous autres pivots. On est une espèce en voie de disparition. »
Avant de s’envoler pour l’Afrique du Sud en septembre pour le programme « Basketball without borders », le pivot du Magic a joué avec son homologue des Lakers. « D12 » réside à Atlanta et c’est aussi là qu’officie le préparateur physique de l’intérieur californien. La démarche de Bynum – travailler loin de Los Angeles – n’a pas plu à tout le monde dans le staff technique des champions en titre. Il faut souligner que si certains joueurs n’hésitent pas à demander conseil à Kobe Bryant, Bynum, couvé par Kareem Abdul-Jabbar, n’a pas du tout les mêmes rapports avec le MVP des Finales 2009, qui appartient à une autre génération. Et puis il a perdu ses deux meilleurs amis chez les Lakers.
« Je m’entendais particulièrement bien avec Kwame Brown et Javaris Crittenton. Avec Maurice Evans aussi. »
Pour un jeune joueur qui vient de la Côte Est, le New Jersey plus exactement, évoluer à Hollywood est tout sauf une partie de plaisir. Le vétéran Derek Fisher reste malgré tout confiant sur le potentiel d’un pivot signé pour 4 ans et 58 millions de dollars :
« Il est réservé mais c’est un gros bosseur. Il reste très jeune, inutile de lui mettre une pression supplémentaire en lui disant que l’on attend monts et merveilles de lui. Ça viendra avec le temps. Il fait déjà beaucoup de choses, notamment aux contres. Il a besoin de mûrir pour passer un nouveau cap. »
Ici, le rôle de Kareem Abdul-Jabbar est primordial. Tout comme celui de Sean Zarzana, à Atlanta, qui l’a mis au yoga dans des séances de concentration, avec un travail d’équilibre du corps très pointu. Le but du jeu ?
« Améliorer le travail des pieds lorsqu’il joue dos au panier. Il doit enchaîner avec une meilleure coordination des mouvements. »
Phil Jackson garde ses distances avec ce travail d’apprentissage. C’est son adjoint Jim Cleamons qui fait le lien entre les préparateurs de Bynum et le « Zen Master ». On sait que Bynum avait moyennement goûté, en marge de la signature de son nouveau contrat, le 31 octobre 2008, que Phil Jackson laisse entendre qu’il faisait des stats uniquement pour obtenir un maximum de billets verts… A l’heure actuelle, l’ex-lycéen de St. Joseph n’est pas en affaires avec une grosse compagnie. Il a confié ses intérêts à David Lee (aucun rapport avec le joueur des Knicks) qui est aussi l’agent de Trevor Ariza. Et si Lee a réussi à obtenir un big deal pour son client, c’est parce que les Lakers misent toujours sur Bynum. N’en déplaise à Phil Jackson qui n’est pour rien dans l’arrivée du pivot chez les Lakers. Voilà pourquoi le 10e choix de la draft 2005 se méfie encore des remarques d’un entraîneur que lui aussi respecte plus qu’il n’admire… Lorsque Bynum demandait du temps de jeu dans le moneytime en décembre et janvier derniers, il y avait une certaine dose de provocation.
Si Bynum est aussi impatient, c’est parce qu’il est sûr du chemin qu’il s’est tracé. Chez les Lakers en priorité. A tous ceux qui prétendent qu’il est mentalement friable et joue de façon quasi permanente en foul trouble, Bynum répond simplement :
« J’applique les consignes, les schémas de jeu du staff. On m’a demandé de défendre dur sur Dwight Howard en Finales NBA par exemple. C’est ce que j’ai fait, même si j’ai été piégé par les fautes. Je reste un role player dans cette équipe, pas une option prioritaire. »
Les 42 points marqués plus tôt dans la saison contre les Clippers, certes décimés à l’intérieur, attestent que ce joueur est un All-Star en puissance. A deux conditions que rappelle une fois encore Mark Heisler du « L.A. Times » :
« Que mentalement et physiquement, il ne connaisse plus aucun problème ».
Si ce n’est pas le cas, on parlera d’un gâchis énorme. Mais Bynum, réputé excellent nageur, n’a pas envie de se noyer dans les marinas qui bordent Los Angeles… Il bosse ses workouts plans l’été et suit par ailleurs des cours de business management à Loyola Marymount. Une tête bien faite qui vit avec son temps en s’éclatant devant « Batman », revisité par Christian Bale et Heath Ledger, et « Pineapple Express ». Un stoner movie qui plairait sans doute beaucoup moins à Phil Jackson…
Crédit photo : Keith Allison