La saga Lakers-Celtics version moderne est née en 1984. Andrew Bernstein est reporter photographe NBA. Ses clichés ont fait le tour du monde. Ils ont notamment illustré sept couvertures de « Sports Illustrated », le magazine de référence du sport américain.
Bernstein, c’est aussi des « close up » avec les plus grandes stars de la Ligue : Magic Johnson, Larry Bird, Shaquille O’Neal, aujourd’hui Kobe Bryant. Son album privé est un collector.
Andrew a collaboré avec « Mondial Basket » dès 1991. Pour nous, il a ressorti quelques joyaux de cette collection, qu’il commente avec enthousiasme et passion. Andy, fondu de baseball et grand admirateur des Red Sox de Boston, adore également le basket américain. Et surtout ses acteurs.
« Il n’existe pas de recette miracle pour réaliser un bon cliché. Mais si tu aimes les joueurs, c’est plus facile. »
1993 : « Shaq fut Superman le premier »
« Nous étions en tournée à Londres. J’avais eu l’idée de transformer Shaquille O’Neal en Superman puisqu’on le présentait ainsi un peu partout dans le monde.
Sa taille et sa force après une année de NBA faisaient de lui un authentique Superman. Le premier, bien avant Dwight Howard, ce fut Shaquille avec le maillot du Magic.
Tout le monde a oublié cela mais Superman à l’époque, c’était Shaq. Et c’était bien avant qu’il ne rejoigne les Lakers, à l’été 1996.
A juste titre, Shaq dit que Dwight Howard n’a rien inventé aujourd’hui. C’est vrai pour Superman en tout cas. »
2000 : « La photo de famille des Lakers »
« Pour moi, cette photo, c’est le père, le big brother et le petit dernier, Kobe, avec sa casquette, qui s’amuse et qui ne tient pas en place. Bryant est le seul qui n’écoute pas pour la photo… Je lui avais demandé de ne pas bouger. Mais c’est drôle, c’était l’aboutissement de plusieurs années de travail après l’arrivée du Shaq à Los Angeles en 1996. Cette photo symbolise aussi le début d’une nouvelle ère pour les Lakers qui remporteront deux nouveaux titres en 2001 et 2002. On sent beaucoup de bonheur dans ce cliché. C’est une vraie photo de famille. Une famille qui, par la suite, va connaître de gros problèmes jusqu’à son éclatement en 2004. Mais c’est partout la même chose. Dans toutes les familles, il y a de bons et de mauvais moments à passer. Chez les Lakers, en 2000 comme en 2001 et en 2002, c’était un vrai bonheur, l’équipe surfait sur la vague des succès. Cette photo illustre les temps heureux entre Kobe, Phil et Shaq. La déchirure viendra plus tard. Moi, je ne garde que les photos de bonheur. »
2002 : « Magic entre au Hall of Fame à Springfield »
« L’un ne va pas sans l’autre. Larry Bird est entré au Hall of Fame quelques années plus tôt. Aussi, il vient accueillir son ami Magic. C’est Larry qui prononça le discours d’introduction. Les maillots encadrés côte à côte, c’est une partie de l’histoire de la Ligue qui se retrouve dans cette photo, simple et pourtant riche de tout un tas de souvenirs.
Je ne suis pas nostalgique pour autant. Je trouve que le jeu d’aujourd’hui est tout aussi flamboyant avec de nouvelles stars, plus rapides, et un volume de jeu plus dense. Mais là, le Hall of Fame Magic-Bird, c’est l’apothéose. Derrière ces deux bonhommes en costume, il y a quelques titres, des All-Star Games, des awards de MVP et plus que tout, une rivalité qui n’a jamais cessé.
On le voit encore aujourd’hui dans la Finale Lakers-Celtics. »
2008 : « Un retour aux sources du basket américain »
« Vingt-et-un ans exactement se sont écoulés depuis la dernière finale Lakers-Celtics. Une nouvelle ère, avec Kobe Bryant, peut commencer. Il n’y a plus Shaq pour le conduire en Finales. Face à Bryant, Boston, la meilleure défense de la Ligue en 2008 et le fameux « Big Three ». Pour tous ces joueurs qui portent le maillot des Lakers ou celui des Celtics, c’est un retour en arrière, aux sources du basket américain, avec les deux équipes les plus titrées.
J’aime cette photo pour deux raisons. L’histoire est revisitée. Et sur un plan technique, elle a été réalisée avec un appareil photo placé dans un angle très précis. Je voulais obtenir une symétrie entre le joueur qui attaque le cercle – Kobe Bryant sur ce coup – et le sommet du Staples Center. On voit la toile avec le logo des Finales NBA. On garde la profondeur dans le champ de cette photo tout en ayant cette symétrie parfaite avec Bryant. C’est la première fois que j’utilisais ce procédé de station photo lors de la Finale 2008.
Kobe aime ce genre de cliché où il vole carrément. Il aime particulièrement une photo où on le voit dans une posture à la Michael Jordan. Il me l’a demandée, évidemment. Il m’a expliqué pourquoi il voulait garder cette photo. Il aime les clichés où il domine l’adversaire en donnant l’impression d’être très aérien. C’est la beauté de ce sport où les joueurs s’envolent comme pour mieux atterrir quelques mètres plus loin. Si le basketteur éprouve des sensations fortes, le photographe prend lui aussi un plaisir inouï en travaillant avec des joueurs comme Kobe. Il possède une gestuelle extraordinaire. J’avais le même feeling avec Michael Jordan quand il entrait en action. »
2008 : « Garnett Vs Kobe, tout un symbole »
« Toutes proportions gardées, cette mismatch avec Kevin Garnett qui attaque Kobe Bryant rappelle ce qu’on voyait entre Larry Bird et Magic Johnson.
Il y avait une vraie position de défense de la part de Kobe pour stopper « KG ». Ce dernier vient dunker avec une force monstrueuse. Lorsqu’on est au bord du terrain, en baseline pour prendre une photo, le bruit fait par ce type d’action est assez violent.
On est concentré sur la photo mais on peut entendre l’impact. Avec Garnett, c’était une déflagration ! »
2009 : « Le titre pour Kobe à Orlando lors du Match 5 »
« J’ai pris cette photo 2 minutes environ après la fin du match qui donne le titre aux Lakers. Je voulais capter l’instant où Phil Jackson et Kobe Bryant se retrouvaient. Non pas seuls, car ce n’est pas possible le soir d’un titre en dehors d’un travail en studio, où il n’y a plus de spontanéité, mais dans une autre dimension, d’une certaine façon… Là, on voit qu’ils sont à part, dans un autre monde, même si des milliers de gens sont derrière eux. Une forme d’intimité entre Phil et Kobe s’est installée.
C’est le paradoxe de cette photo : ils ignorent tout ce qui se passe derrière eux. Ils peuvent se parler quelques instants, se dire : « Mission accomplie, on a gagné. On attendait cela depuis 2002. » Kobe a enfin gagné sans Shaq. C’est ce qu’il voulait depuis 2004. Pour lui, c’était un aboutissement. Je le sens heureux sur cette photo et je pense que Phil Jackson est heureux pour Kobe autant que pour lui-même.
C’était sa dixième bague mais ce couronnement est vraiment le titre de Kobe Bryant. Seul. Il vient voir son mentor, celui qui lui a permis de décrocher cette bague de champion NBA à part. »
2010 : « Le duel des Finales par excellence »
« La série offrait des match-up toutes très différentes. Celle-ci entre Ron Artest et Paul Pierce prenait une autre dimension. On sent qu’ils se détestent depuis très longtemps et le fait de jouer une finale Lakers-Celtics ajoutait du piment à l’histoire. Cela a permis à d’autres de briller à chaque match, d’une certaine façon.
J’ai découvert Ron cette saison-là chez les Lakers. Il est plus attachant et chaleureux que le joueur souvent présenté dans les médias. Il aime les photos. Pas autant que Karl Malone lorsque ce dernier était chez les Lakers mais il me demande de temps à autre quelques portraits ou photos où il est en action. Les joueurs sont sensibles à la façon dont on les représente. Karl Malone était très attentif à cela. Il doit garder des tas d’albums chez lui. Il aimait se voir en action, en studio, les demandes étaient permanentes…
Comme je viens de New York, j’ai sympathisé avec Ron Artest. Il connaissait bien Lamar Odom, qui vient comme lui de « Big Apple ». Le contact a été facile. »