L’Habilleur. C’est le nom d’une pièce de théâtre anglaise qui raconte l’histoire d’un acteur vedette sur le déclin, devenu tyrannique avec sa troupe. Physiquement, il est à bout, les autres comédiens le supportent sans rien dire et seul son habilleur, au courant de ses faiblesses, continue de l’admirer.
Un mauvais sketch
C’est à ce vieux comédien que me fait penser aujourd’hui Kobe Bryant, avec Byron Scott dans le rôle de l’habilleur. Le premier est à la limite de l’auto-parodie, s’entêtant à prendre des tirs compliqués en sortant des systèmes. Comme les plus grandes vedettes du théâtre ou de la chanson, il voulait une « dernière danse » et ça se transforme en mauvais sketch. Le second le conforte dans ses mauvais choix, allant même jusqu’à justifier l’injustifiable : « vu sa carrière, Kobe a le droit de prendre tous les tirs. »
Résultat, 1/14 sur cette nuit face aux Warriors, et 31% aux tirs depuis le début de saison.
On pourrait évidemment avoir de la peine pour lui, mais Kobe ne veut pas de notre compassion. Alors il insiste et se ridiculise. A la fois sur le terrain, mais aussi dans ses mots. Cette nuit, après la pire soirée de sa carrière, il a ainsi expliqué que « planter 80 points face aux Warriors n’aurait pas fait la moindre différence », puis ajoutant ceci : « Je pourrais tourner à 35 points par match mais nous aurions quel bilan : 3v-11d ? »
Kobe ne peut plus tourner à 35 points de moyenne et il est là le problème : il s’entête à ignorer la réalité. On ne peut pas être et avoir été : « Kobe Or Not Kobe » pourrais-je même écrire…
« Les jeunes ne veulent pas me voir comme un joueur moyen »
Avec l’âge, les plus grands joueurs de l’histoire évoluaient. Le Jordan du second triplé n’était pas le même que le Jordan du premier triplé. Le Duncan d’aujourd’hui n’est pas le même qu’il y a 10 ans. La clé, c’est de connaître ses limites et de faire évoluer son jeu. Sur ce qu’on voit, la star des Lakers n’y parvient pas. « Mes tirs étaient déjà compliqués lorsque j’avais 27 ans. Ils le sont encore plus à 37 ans » a-t-il expliqué cette nuit. Mais pourquoi continuer à les prendre ? Pour montrer l’exemple pardi !
« Les jeunes apprennent en m’observant, et ils ne veulent pas me voir comme un joueur moyen ou un gars qui a 20 ans de carrière. Ils veulent et ils ont besoin de me voir déterminé, intense et énergique. C’est comme ça qu’ils apprennent, et qu’ils veulent apprendre. »
Mais le « professeur » ne montre plus l’exemple. Que vont retenir les D’Angelo Russell, Julius Randle et autres Jordan Clarkson ? Tout simplement qu’il ne fait pas bon vieillir…
Ils retiendront aussi que Kobe ne se remet jamais en question, et que cette nuit encore, il a encore tapé sur son équipe. Le tout validé par un Byron Scott à côté de la plaque depuis deux ans.
Qui souhaite encore que Kobe poursuive sa carrière ?
Les jeunes Lakers retiendront aussi que leur prestigieux coéquipier est du genre : « faites ce que je dis, pas ce que je fais. » La preuve avec cette déclaration de la semaine dernière
« Quand c’est moi qui devient le défenseur de la circulation du ballon, c’est qu’il y a un problème. Je n’aurais jamais pensé le devenir un jour. C’est dingue. Je n’arrive pas à croire que c’est moi qui réclame cette merde…Sans blaguer ! Je suis comme un gamin qui découvre qu’il se met à parler comme ses parents. »
Mais parler ne suffit pas. Si Kobe prend à coeur son rôle de mentor, et s’il veut du mouvement en attaque, il doit une bonne fois pour toutes appliquer ce qu’il disait la semaine dernière : « Je pense être assez bon pour planter encore 25 points ou quelque chose comme ça, mais quel intérêt pour ces gars ? »
Quel intérêt de voir un Kobe aussi médiocre… C’en est même triste, et je n’ai pas le souvenir d’une star loupant sa sortie comme il le fait aujourd’hui. Karl Malone, Pat Ewing ou encore Reggie Miller et Hakeem Olajuwon n’ont pas quitté les terrains au sommet, mais ils avaient accepté de se mettre en retrait. Ils avaient pour certains transmis le flambeau, comme David Robinson à Tim Duncan. Jouer les seconds rôles, Kobe n’y arrive pas. A Hollywood, il a besoin de la lumière. Comme ces vieux acteurs qui refusent d’être sur le déclin.