Cet été, Jason Kidd a encore fait parler de lui. Fidèle à un long passif dans le domaine, le futur Hall of Famer a manigancé en coulisses pour prendre la place du malheureux (mais guère compétent) Larry Drew. Par la même occasion, les nouveaux propriétaires lui ont offert davantage de pouvoir, alors même qu’il était encore sous contrat avec les Nets.
Si la manoeuvre a fait couler beaucoup d’encre à l’époque, notamment dans nos colonnes, tout laisse à croire qu’elle est aujourd’hui payante pour le principal intéressé. Contre toute attente, ou presque, son équipe affiche un bilan positif avec sept victoires en douze rencontres, dont une de prestige la nuit dernière face aux… Nets.
Les Bucks sont devenus plaisants à regarder
C’est un fait qui m’était encore inconcevable il y a quelques semaines mais les Bucks sont l’équipe que j’ai le plus vue depuis le début de saison, devant les Lakers, les Spurs, les Knicks ou les Grizzlies. Plus surprenant encore, j’y ai pris goût. C’est dire à quel point l’arrivée de Jason Kidd a considérablement changé la culture de Milwaukee en quelques mois à peine.
En premier lieu, les Bucks plaisent par la jeunesse de l’effectif. Enthousiastes, disciplinés malgré des naïvetés inhérentes à l’âge, ces gamins jouent à fond, se donnent sans concession sur chaque possession du ballon. Leur engagement défensif est à ce titre particulièrement rafraîchissant dans une ligue où le début de saison est généralement un théâtre aux portes grandes ouvertes. Quand on se rappelle des dernières déclarations estivales de James Harden, enfin touché par une révélation défensive cinq ans après son arrivée dans la ligue, on ne peut que se réjouir de voir une jeune équipe aussi impliquée dès son plus jeune âge.
À ce sujet, il y a également un point primordial qui fait le bonheur du coach, amoureux des mismatchs : la dimension physique de ses joueurs. Longs, athlétiques, vifs, les mantes religieuses du Wisconsin représentent un vrai casse-tête pour leurs adversaires. D’autant que balle en main, tous sont dangereux, comme le démontre parfaitement Giannis Antetokounmpo, lequel démontre un jeu de jambes de plus en plus redoutable, ainsi qu’un handle déroutant pour un joueur de sa taille. Sixième aux rebonds, huitième dans les deuxièmes chances, la peinture des Bucks est devenue un enfer dont on ne ressort pas indemne.
Des gosses en constante progression
Par ailleurs, les kids de Kidd progressent à vitesse grand V. Sur ses cinq défaites, Milwaukee n’en a perdu que deux à plus de dix points d’écart. Et la fébrilité de l’équipe dans les moments importants, mise en lumière par Kidd au début de saison, est déjà un lointain souvenir. Contre les Knicks, elle n’a pas craqué malgré une panne d’adresse et le retour de ses adversaires. Cette nuit, face aux Nets, elle a trouvé les ressources pour l’emporter après trois prolongations, sans jamais perdre espoir malgré une balle de match toute faite manquée par Brandon Knight. Petit à petit, Milwaukee apprend à finir ses matchs.
De plus, et c’est tout à son honneur, Jason Kidd tient les promesses faites à son arrivée. Il s’était notamment engagé à se montrer patient et pédagogue. Et si tout laissait penser que c’était pour mieux se justifier par anticipation d’un échec futur, il n’en est rien. L’ancien meneur de Dallas s’éclate dans son rôle : encourageant, souriant, proche de ses joueurs, il laisse apparaître un plaisir sincère à voir ses joueurs évoluer et faire mentir les pronostics. Il se montre également suffisamment intelligent pour laisser à l’assistant Joe Prunty le soin d’apporter les éclaircissement tactiques, se réservant l’approche humaine, sans aucun doute son domaine de prédilection en tant qu’ancien joueur. Et cela fonctionne, le groupe montre une cohésion encore impensable en avril dernier.
Alors certes, la saison ne fait que commencer et les premières difficultés arriveront. Milwaukee ne sera bientôt plus l’équipe surprise et les adversaires s’ajusteront. Je n’oublie pas que l’an passé, Philadelphie avait débuté par trois victoires de suite, avant de rapidement s’écrouler. Oui, il est probable que les Bucks se prennent quelques fessées au cours de la saison. Oui, Jabari Parker rencontrera sans doute des soucis de constance. Oui, Brandon Knight perdra encore de nombreux ballons et encore oui, Giannis Antetokounmpo ne shootera probablement pas à 52% tout au long de la saison.
Un parfum de NCAA
Mais au final, peu importe que les Bucks tiennent la distance et parviennent à se qualifier en playoffs. En quelques semaines, l’enthousiasme est revenu dans le Wisconsin, dans une franchise qui était désolée depuis des années, un club dont on oublie trop souvent qu’il a lui aussi marqué l’histoire de la ligue par le passé. Si le basket universitaire est si excitant à regarder, c’est qu’il dégage une sincérité indissociable à la jeunesse et la candeur de ses acteurs, et c’est précisément ce qui caractérise cette équipe de Milwaukee.
Enfin, je suis celui qui a osé pronostiquer le titre de coach de l’année à Jason Kidd dans notre preview d’avant-saison et rien que pour cette raison, je n’espère qu’une chose : pourvu que ça dure.