Formation aux Etats-Unis : les propos de Mark Cuban font polémique

Interrogé sur le phénomène Luka Doncic, Mark Cuban ne s’attendait sans doute pas à ce que son intervention prenne une telle ampleur. Pour avoir dit qu’il serait mieux que les ados américains soient envoyés en Slovénie dès le plus jeune âge pour qu’ils apprennent les rudiments du jeu et non à « chambrer et faire des mixtapes », le propriétaire des Mavs s’est attiré les foudres des défenseurs du basket à la sauce américaine.

Interrogé sur la question, Harrison Barnes s’est désolidarisé publiquement de la sortie de son dirigeant, pourtant connu pour ses provocations. En conclusion de son propos, Mark Cuban s’était d’ailleurs fendu d’une blague pleine d’autodérision, ne laissant normalement pas de place à la suspicion : « Je vais peut-être même envoyer mon fils de 9 ans là-bas, pour jouer au basket. « – Papa, où m’envoies-tu ? – Tais toi et dribbles », provoquant un éclat de rire général de l’assemblée.

« Si c’est une blague, je ne trouve pas ça drôle »

Mais Harrison Barnes s’est insurgé qu’on puisse penser comme ça, mettant en avant le mélange de tous les environnements qui fait la force de la NBA depuis 20 ans.

« Si c’est une opinion, je ne suis pas d’accord avec ça et si c’est une blague, je ne trouve pas ça drôle. Franchement, je ne crois pas que ça reflète la spécificité de la NBA d’aujourd’hui. Ce qui est formidable dans notre ligue, c’est que les joueurs viennent de partout dans le monde. Le fait d’avoir été élevés d’une foule d’endroits différents donne une perspective unique (à la ligue) justement grâce à ça. Nous devrions nous en réjouir. Nous les partageons les uns sur les autres, sur des problèmes propres à nos communautés et nous n’avons pas peur d’apprendre et de partager ces perspectives. C’est notre force. »

Un peu de racisme chez Mark Cuban ?

La polémique a aussi pris de l’ampleur lorsque Mark Cuban a été contraint de répondre à un commentaire sur Twitter qui l’accusait de vouloir « faire de l’ombre à la culture noire pour promouvoir Luka Doncic et/ou Dirk Nowitzki », l’encourageant plutôt à s’attaquer aux organisations comme la AAU pour défendre son point de vue. « Je ne fais de l’ombre à aucune culture », a répondu le boss de Dallas. « Je pense que l’AAU est horrible, c’est quelque chose que je dis depuis des années. L’AAU a des tournois pour les plus jeunes où on a l’impression que chaque gamin veut faire une mixtape ou en possède déjà une », a-t-il poursuivi, déplorant l’individualisme à outrance dans le système américain. Mark Cuban a également précisé qu’il avait dit « dunker » plutôt que « chambrer » et que son propos avait été mal interprété.

Lorsqu’il est arrivé en NBA, Tobias Harris avait ainsi le profil du joueur « Made In America », à savoir physique mais manquant de fondamentaux. Également interrogé sur ce début de polémique, l’ailier des Clippers a toutefois été plus mesuré qu’Harrison Barnes, prônant l’apaisement tout en reconnaissant des qualités dans les deux méthodes.

« Je regarde tous les aspects. Bien sûr, ils ont de nombreux joueurs qui viennent d’ailleurs là-bas. Ils ont de bons fondamentaux. Il possède un jeune joueur qui vient de l’étranger (Luka Doncic), un Dirk Nowitzki qui a été une légende pour les Mavs. Donc je peux comprendre pourquoi il peut penser de la sorte, mais il y a aussi beaucoup de jeunes joueurs américains qui sont arrivés dans la ligue et ont été productifs. La NBA est principalement composée de joueurs qui viennent des USA. Ne vous méprenez pas, le talent est indifférent à ces sujets. Mais je peux comprendre pourquoi il peut avoir ce type d’approche ».

Kobe Bryant a aussi un avis bien tranché…

Tobias Harris a aussi été invité à s’exprimer sur le caractère raciste supposé de l’intervention de Mark Cuban par rapport à la communauté noire américaine, pour avoir critiqué le système de développement des basketteurs aux Etats-Unis.

« J’ai également entendu ça. Comme je l’ai dit précédemment, je pense que si on regarde la base d’où venaient les commentaires, c’était plutôt au sujet de son rookie, qui est un très grand joueur de la ligue. Et juste pour être honnête, ces gars jouent probablement plus au basket que beaucoup de nos enfants ici. Il a été professionnel à quel âge, 13, 14 ans ? Il était déjà à un stade de développement et c’est ça la partie essentielle. J’espère que ses dires venaient de là, je ne sais pas, je ne suis pas Mark Cuban. Je ne sais pas ce qu’il pensait à ce moment précis, mais voilà ce que je comprends et c’est ce que j’aimerais croire ».

Mark Cuban s’est fendu d’un nouveau tweet pour défendre son point de vue. « Comment compareriez-vous la formation en Europe avec ce que nous voyons ici aux États-Unis ? Je pense que les Européens portent davantage d’attention sur les fondamentaux. J’aime les Etats-Unis, mais je pense que notre jeu serait meilleur avec leur approche de la formation ».

Pour couper court à cette pseudo-polémique, on peut aussi se rappeler de cette déclaration de Kobe Bryant sur la question, et le système AAU, datant d’il y a bientôt trois ans.

 « Je déteste ce système car il n’apprend pas à nos joueurs à jouer comme il faut, à réfléchir, et à comment jouer des systèmes à trois. Je pense que ce n’est qu’un système de récompenses. Les coaches sont récompensés d’une manière ou d’une autre. C’est juste un show et c’est absolument horrible pour le basket. »

À l’époque, personne n’avait eu l’idée de juger cette sortie méprisante pour la communauté afro-américaine.

AAU : American Athletic Union (association du sport amateur aux Etats-Unis). Avant d’entrer à l’université, la quasi totalité des meilleurs joueurs des Etats-Unis passent par des « académies », sous les yeux des recruteurs. C’est un championnat d’été où l’individu est roi, au détriment du jeu collectif.