Kevin Durant : un MVP sans contestation mais pas sans faille

Complètement en contrôle avec 16 points d’avance à 9 minutes du terme, le match 4 a filé entre les doigts du Thunder malgré un nouveau match de mammouth de Kevin Durant en attaque. Avec 40 points à 12/24 aux tirs, le MVP de la saison régulière a pourtant failli au pire des moments : dans le crunch time !

Opposé à son nouveau « meilleur ennemi », Chris Paul, Durant n’a pas réussi à prendre le contrôle du match et à porter son équipe vers une victoire qui leur tendait les bras. Au lieu d’un match 5 pour clore la série, le Thunder va donc devoir se remonter à nouveau les manches pour un combat au long cours… Comme au tour précédent face à Memphis.

Le quadruple meilleur scoreur stoppé par un meneur d’1m83 ?

Comme l’a souligné Doc Rivers après le match, sa décision de placer (à nouveau) Chris Paul aux basques de Kevin Durant n’était pas tant un trait de génie du coaching qu’une tentative désespérée dans une fin de partie bien mal embarquée. Mais le choix s’est avéré payant puisque Durant n’a pas pesé sur le money time.

En conférence de presse d’après match, la star du Thunder a tenu à minimiser l’influence de la défense de Chris Paul… mais le terrain a parlé !

« Ce n’est pas du un contre un. Quand je reçois la balle, ils font prise à deux et ils ont bien réussi à défendre sur moi. J’ai dû passer la balle. Mais quand c’est du un contre un, j’ai l’avantage. C’est notre défense le vrai problème, en attaque, on a été bon. »

Sur ce dernier point, Kevin Durant a bien raison. Si OKC a manqué le break dans la série, c’est parce que leur défense a complètement pris l’eau en dernier quart. Avec un 12/16 aux tirs dans la peinture, les Clippers ont dominé les débats. Surtout, ils ont réussi à faire ce qu’ils voulaient… au moment le plus important du match !

KD sans solution dos au panier

A l’image de Darren Collison qui s’est régalé des espaces laissés béants dans la défense du Thunder, les californiens ont trouvé la faille sans forcer pour marquer la bagatelle de 38 points, soit davantage qu’en premier (15) et en troisième quart (17) en cumulé !

Avec 42 points marqués en deuxième mi-temps, la troupe de Scott Brooks a manqué de solutions en attaque. Pris par la peste Chris Paul, Durant a soudainement été silencieux car il n’est toujours pas capable de jouer dos au panier. Comme face à Tony Allen lors du premier tour, KD a effectivement semblé très emprunté une fois mis à l’arrêt par les prises à deux des Clippers.

Au lieu d’enfoncer Paul avec sa longueur et sa taille, Durant a continué à jouer en périphérie alors qu’il aurait dû demander la balle plus bas. Un peu comme le fait LeBron James pour punir ses défenseurs plus maigrelets. Ses 8 balles perdues attestent bien d’une incapacité à s’adapter à cette nouvelle donne et surtout, un manque de QI basket pour réaliser la bonne passe. Car qui dit prise à deux, dit coéquipier démarqué…

La maladresse à trois points… comme un aveu de faiblesse

Un autre point noir du match de Kevin Durant (cela semble tellement surréaliste de critiquer une performance à 40 points… mais c’est la marge de progression incroyable de Durant), c’est sa maladresse derrière l’arc. Auteur d’un 1/7 hier soir, l’ailier du Thunder déchire à 7/25 depuis le début de la série, soit 28%. Et si l’on revient encore plus loin, ses playoffs sont un véritable cauchemar au-delà de l’arc avec un 24/78 dans l’exercice.

A part pour son excellentissime 5/5 lors du match 7 face à Memphis, Kevin Durant abuse du tir lointain… comme un aveu de faiblesse. Incapable de se rapprocher du cercle ou de profiter de son avantage de taille dans le jeu arrêté, le MVP arrose un peu à tort et à travers. Au lieu de 39% sur la saison régulière, KD en est donc à un faiblard 30%.

Finalement, et comme un symbole, c’est bien Russell Westbrook qui a pris le dernier shoot du match. Démarqué sur la droite du terrain, Kevin Durant n’a pas reçu le cuir pour tenter d’arracher la victoire. Pire, il ne semble pas avoir été suffisamment démonstratif pour obtenir cette dernière chance. En tant que leader de son équipe, et MVP en titre de la ligue, ce paradoxe interpelle !

Les chiffres le prouvent également. Avec 4/10 dans les 7 dernières minutes du match, Westbrook a cannibalisé le jeu du Thunder quand on aurait attendu que le meilleur joueur de la saison ait, logiquement, la balle entre ses mains plus souvent. Il n’en fût rien car Durant a simplement eu droit à 3 tentatives ; dont 2 qu’il a réussi à convertir.

Le MVP en pleurs doit devenir l’ultime prédateur

Ce manque d’autorité patent laisse perplexe. Certes, ce rôle de grand décisionnaire incombe en partie à Scott Brooks qui devrait contrôler la frénésie de Westbrook dans ces moments chauds… mais, n’empêche, il est temps que Kevin Durant tape du poing sur la table et impose sa marque sur son équipe. Leader discret et partageur, Durant doit se faire violence et briser son image de gentil pour réclamer la balle, sinon sur chaque possession, au moins sur une majorité d’entre elles en dernier quart temps !

Comme LeBron James en son temps, c’est-à-dire sous la tunique des Cavaliers, Kevin Durant est un MVP sans l’instinct du tueur. Peut-être notre image du MVP est à jamais biaisée par la vision de Michael Jordan (et ensuite Kobe Bryant comme plus proche héritier), le prédateur ultime, mais ni James, ni Durant n’ont cette volonté d’écraser l’adversité… parfois jusqu’à l’humiliation publique.

Le pire, c’est que pendant la blessure de Westbrook, Durant avait précisément réussi à faire la transition en endossant, à lui seul (ou quasiment), les responsabilités de tuer le match. A laisser faire son feu follet de meneur, Kevin Durant risque de se brûler les ailes !