La scène est mythique et connue de tous, même des plus jeunes. All-Star Game 1986. La NBA organise le premier concours à 3-points, et Larry Bird entre dans le vestiaire, puis regarde ses sept adversaires : « Alors, lequel de vous va terminer deuxième ? » Larry Bird remportera le concours trois années de suite, se permettant en 1988 de lever le doigt avant même que le dernier shoot ne rentre.
C’était ça Larry Bird, ce mélange de « trash talking », de talent et d’une incroyable confiance en lui.
Autre scène connue, le premier affrontement avec Dominique Wilkins, rookie des Hawks. « Avant l’entre-deux de l’une de nos premières rencontres, je suis venu vers lui pour lui serrer la main. Il était là, devant moi, les mains dans le dos, sans broncher » racontera l’ancien joueur d’Atlanta en 2015. « Puis au moment de l’entre-deux, Bird m’a dit : « Mon pote, tu ne fais pas encore partie de cette ligue… » Je n’arrivais pas à y croire, mais c’est arrivé si vite que je ne savais pas quoi penser. »
Puis vient le premier duel sur le terrain, et Dominique Wilkins poursuit : « Je défendais sur lui et il m’a dit : « Mon gars, je ne sais pas pourquoi ils t’ont choisi pour défendre sur moi. Tu ne peux pas défendre sur moi’. Et bim, il m’a mis un 3-points. Sur l’attaque suivante, il me dit : ‘Ils ont fait une erreur en te mettant sur moi’ et il a shooté à nouveau à 3-points. »
Formidable attaquant, Dominique Wilkins s’en va carrément posterizer Larry Bird ! Et la star des Celtics apprécie : « Je t’aime bien rookie. T’es couillu. »
Sa spéciale ? Annoncer le dernier tir du match… et le mettre pour la gagne !
Autre anecdote très connue, cet affrontement avec Xavier McDaniel, ancien ailier des Sonics et des Knicks. Un fou furieux, bon défenseur et grand intimidateur. C’était à Seattle, il reste cinq secondes à jouer et les Sonics mènent d’un point. Temps-mort, balle aux Celtics. Larry Bird prend la parole : « Pourquoi ne pas me donner la balle et me laisser un quart de terrain ? » K.C. Jones, le coach des Celtics, lui balance : « Larry, tu joues. Moi je coache » mais… il écoute son joueur vedette, et lui laisse un quart de terrain.
Le temps-mort fini, Larry Bird part avant les autres et va voir Xavier McDaniel, pour lui dire : « Xavier, je vais prendre la balle à cet endroit. Je vais faire deux dribbles et ensuite je vais tirer de là. » L’ailier des Sonics raconte la suite : « Il était allé à l’endroit qu’il avait dit et a reçu la balle. Il m’a donné un petit coup d’épaule pour créer de l’espace. J’ai sauté et j’ai essayé de le contrer, mais il l’a mis quand même. » Mais pourquoi faire ces deux dribbles ? « Larry m’a dit qu’il ne voulait vraiment pas qu’il reste du temps sur l’horloge » raconte Xavier McDaniel.
Même situation face aux Sixers avec Charles Barkley face à lui, et c’est Mike Gminski qui raconte : « On menait d’un point avec quatre secondes à jouer. Les Celtics ont demandé un temps-mort, avec une remise en jeu au milieu de terrain. Barkley défendait sur Larry. Il s’est approché de Charles et lui a dit : « Tu sais qui va recevoir la balle, non ? » Charles a plus ou moins hoché la tête, et Larry lui a dit : « Je vais te dire ce que je vais faire : je vais prendre la balle, faire deux dribbles, aller ligne de fond et mettre un fadeaway ». Moi, je suis à l’opposé, je défends sur McHale. Bird fait ses deux dribbles, va sur la ligne de fond, prend son fadeaway. La balle était en l’air que j’avais déjà pris la direction du vestiaire. Je savais que ça allait dedans. »
Face aux Knicks, ce sera un poil différent. « C’était un match important, et le score était quelque chose comme 106-104 pour Boston avec 15 secondes à jouer » raconte Hubie Brown, le coach des Knicks. « On faisait une press, et les Celtics ont fait la remise en jeu. On a fait prise à deux sur Dennis Johnson, et il a balancé la balle à Bird. Bird a dribblé pour passer le milieu de terrain, et la seule chose qu’il avait à faire, c’est attendre et le match était fini. »
Mais que va faire Larry Bird ? Se rapprocher du banc des Knicks et planter un 3-points devant les remplaçants et les coaches. « Bernard King défendait sur Larry et Larry lui a dit : « Le prochain, je vais le tirer d’ici ». Et il l’a mis, et il a chambré Bernard : « Hey B., il était comment ce tir ? Ce n’est pas le plus beau que tu aies vu de ta vie ? »
Même ses coéquipiers prenaient cher
Cette dernière anecdote fait partie d’un « best-of » proposé par The Athletic qui est allé sonder des anciens coéquipiers et adversaires de Larry Bird sur son art du trash-talking. Car Larry « Legend » ne se contentait pas de vanner ses adversaires puisque ses coéquipiers prenaient aussi très cher à l’entraînement. Comme Ed Pickney. « Un jour, il savait qu’Ed Pinckney allait défendre sur lui pendant la séance » raconte Kevin Gamble. « Il est entré dans le vestiaire, et a dit : « Ed Pinckney, ça va être une salle journée. Tu pourrais enlever tes chaussures et même pas t’entraîner car je vais te botter le derrière. » Joe Kleine, autre ancien coéquipier, confirme que ce jour-là Bird répétait : « Je vais te tuer à l’entraînement. »
Le point commun à toutes ces histoires ? Le public ne les entendait pas. Contrairement à d’autres « aboyeurs » de la ligue, Larry Bird faisait en sorte que ce qu’il disait ne soit entendu que par son adversaire. « Le plus beau dans tout ça » conclut Joe Kleine, « c’est qu’il ne faisait pas du trash talking pour que tout le monde l’entende dans les tribunes. C’était dirigé uniquement sur vous, et pour vous. »
Et parfois, ça dégénérait comme cette bagarre célèbre avec Julius Erving. À l’époque, Larry Bird avait aussi eu ce bon mot : « Je me suis toujours battu avec mes frères, et ça ne veut pas dire que je ne les aime pas. »