Kareem Abdul-Jabbar s’interroge sur le rôle des athlètes à la retraite

Dans une chronique pour The Guardian, Kareem Abdul-Jabbar évoque différents sujets qui lui tiennent à coeur. Cette fois, la légende des Lakers revient sur le destin des athlètes, une fois qu’ils ont pris leur retraite sportive.

Comme le rappelait Steve Nash, « un athlète meurt deux fois » et il faut savoir rebondir à cette première « mort » sportive.

« Les athlètes professionnels sont comme des étoiles filantes », écrit ainsi l’ancien pivot. « Ils brillent de mille feux alors qu’ils traversent le ciel, puis disparaissent soudain dans l’obscurité. Les stars de cinéma, les écrivains, les grands musiciens restent attachés au firmament pendant des décennies, scintillant sur nos fils Twitter et nos couvertures de magazine. Mais des années de souffrance physique, par l’entraînement et la compétition, usent le corps des athlètes – et leur importance – pour en faire des appendices raides, douloureux et dépendants à l’Advil. Ils sont les excroissances inutiles de l’industrie du divertissement. Comment rester pertinents dans la société sans ramener sans cesse nos jours glorieux sur le tapis ? »

Kareem Abdul-Jabbar rappelle ainsi que la carrière sportive est en moyenne très courte.

« La durée moyenne d’une carrière en NFL est d’un peu plus de trois ans. En NBA, la moyenne est de 4.8 ans, et de 5.6 ans en MLB. La plupart de ces athlètes se sont entraînés pendant dix ans ou plus pour passer pro, et pour la plupart, ça disparait rapidement. Ils ont pu avoir un goût rapide de ce que c’était, avant d’être poussé dehors avant de devenir accro. Mais pour les athlètes qui ont battu les statistiques et son restés sous les projecteurs pendant de longues années, le point final peut sembler un peu trop final. Kobe Bryant (20 années), Derek Jeter (19 années), John Stockton (19 années), Jack Nicklaus (25 années), Mark Messier (26 années), Nolan Ryan (27 années), Gordie Howe (34 années), Pele (22 années), moi (20 années) et bien d’autres avec plus de vingt ans de carrière dans l’arène des gladiateurs prenons notre retraite plutôt jeunes, généralement à la trentaine ou à la quarantaine. Et c’est là que nous nous posons cette question existentielle : qui suis-je désormais ? »

Le basketteur reconnait que les athlètes retraités sont « vénérés pour nos réalisations passées, loués par les fans qui nous demandent des autographes, traînés devant les caméras pour comparer les joueurs actuels avec ceux de notre époque » mais « même avec tout le respect et la déférence qui nous sont témoignés, nous nous sentons toujours figés dans le temps, comme des vétérans de guerre racontant le débarquement, ou comme un vieux trophée de lycée ébréché qu’on soulève de l’étagère et qu’on dépoussière de temps à autre pour un flashback sentimental. »

Anciens « rois » dont on enregistrait « chacun des mots » et « héros dans nos communautés en tant que symboles d’espoir de succès et ambassadeurs culturels dans l’Amérique blanche », « nous n’avions pas seulement réussi, nous étions importants. »

Pour Kareem Abdul-Jabbar, il est important « d’utiliser notre célébrité pour remodeler la société plutôt que juste la divertir. »

« L’expression « Shut Up And Dribble » reflète la réticence de certains à nous écouter lorsque nous exprimons notre indignation lorsque la police tire sur des personnes noires désarmées, face aux préjugés contre les migrants, face aux tentatives d’empêcher les minorités et les pauvres de voter, et face à d’autres questions importantes. C’est pourquoi il est important pour nous d’être informés sur le sujet avant d’en parler. Nous ne pouvons pas gaspiller la célébrité qui nous reste en faisant des commentaires provocateurs juste pour le divertissement. Nous devons mieux à nos fans, à nos communautés et à nous-mêmes. »