Interview Rudy Gobert : « J’ai l’impression que toutes les équipes se sont renforcées »

À l’approche de sa sixième saison en NBA, Rudy Gobert vit de nouveau un été chargé, entre son camp en France, sa participation à celui de Raul Neto au Brésil, un passage à la Summer League de Las Vegas pour « observer un peu les jeunes » selon ses dires, un retour à Salt Lake pour effectuer quelques tests mais aussi un séjour à Los Angeles pour s’entraîner.

C’est dans ce contexte où le pivot du Jazz nous a accordé quelques minutes d’entretien, durant lequel il admet avoir été « surpris, comme tout le monde, par Donovan Mitchell » ou encore ses attentes pour la saison à venir.

Vous êtes actuellement à Los Angeles où se déroulent de nombreux pick-up games, dont vous avez fait partie en compagnie de Nicolas Batum. Quels sont les joueurs présents et est-ce important de préparer la saison à venir de cette façon, notamment face à des rivaux ?

J’ai joué à deux endroits différents, mercredi et jeudi (la semaine passée). Jeudi, il y avait Kevin Durant, Paul George, Dante (Exum), Buddy Hield, pas mal de joueurs NBA. Ça joue bien et c’est bien pour garder la forme, même si tu fais du travail physique et des entraînements individuels, c’est bien de pouvoir jouer un peu. C’est dur de garder l’intensité du jeu lorsque tu es tout seul. Ensuite, oui, jouer avec des joueurs de haut niveau, des joueurs technique et physique, les meilleurs du monde, ça aide. Ce sont des bons matchs, c’est fun.

« J’espère avoir une année sans blessure »

Revenons sur la saison passée : tout le monde avait enterré le Jazz avant même le début de la campagne et vous finissez pourtant en playoffs, éliminés au deuxième tour par les Rockets. Qu’est-ce que raconte cette saison sur les qualités de l’équipe ?

C’est vrai que la plupart des médias – et même des gens finalement – pensaient que Gordon (Hayward) était le Utah Jazz. Forcément, à son départ, les gens imaginaient un retour, un pas en arrière de notre part. Moi, je savais quelle était la force de cette équipe. Évidemment, il fallait s’adapter sans Gordon, c’est quand même un bon joueur, mais on a gardé notre identité et on savait qu’on allait continuer de progresser.

Au terme de cette saison, vous êtes élu meilleur défenseur et, de surcroit, à deux reprises : par les joueurs puis par les journalistes via le trophée remis par la NBA. Quel est le trophée que vous savourez le plus et à quel point cette récompense est importante à vos yeux ?

Avoir le respect de tous les autres joueurs, des gens sur le terrain, qui jouent contre ou avec toi, c’est… je dirai pas que c’est celui qui a le plus de valeur morale. Tu sais que tu le mérites car les joueurs ont reconnu ton impact. Après, bien sûr, ce titre-là ne vaut rien si tu ne reçois pas le trophée officiel donc ouais, c’est super… Je dirai : « Enfin ! » Enfin, j’ai pu obtenir mon premier trophée individuel et même si ce n’est pas une fin en soi, c’est quelque chose que je voulais accomplir et pas seulement une fois dans ma carrière

Outre cette récompense individuelle, on peut penser que sans les blessures, vous auriez pu obtenir une première sélection au All-Star Game. Ce n’est pas la première fois que vous êtes touché par des pépins physiques. Parmi vos ambitions de la saison prochaine, quelle est l’importance de la santé ?

C’est toujours une priorité. Mon corps reste la chose la plus importante, avec l’esprit évidemment. Malheureusement, je ne me suis jamais blessé tout seul sur ces trois dernières années, cela s’est toujours produit sur des chocs. Malheureusement, il y a des choses que l’on ne maîtrise pas, le corps est fait d’une manière où si on te tombe sur le genou sur le côté, tu as beau être le plus solide du monde, il va se plier, surtout quand tu es grand comme moi. Chaque année, je me renforce, chaque année, je sens que je suis de plus en plus fort physiquement et j’espère avoir une année sans blessure, ça serait bien.

« L’Ouest était déjà dense avant »

C’est l’obstacle principal pour le All-Star Game ?

Déjà, je pense que je le méritais l’année d’avant mais mon nom n’était pas encore assez populaire, je suis passé près de l’être, en gros j’étais le treizième. La saison dernière, malheureusement, quand tu rates des matchs à cette période, c’était impossible de l’être et dans ce contexte, cela aurait de toute façon enlevé une place à des joueurs qui étaient méritants. On verra la saison prochaine.

Parlons de l’intersaison : il y a eu du mouvement, notamment à l’Ouest avec l’arrivée de LeBron James aux Lakers, de DeMarcus Cousins aux Warriors ou de Carmelo Anthony aux Rockets. Même si j’imagine que vous vous préoccupez davantage de votre équipe, qu’il faudra attendre le retour en pleine santé de DeMarcus Cousins, que pensez-vous de ces changements ?

En ce qui nous concerne, je pense que cela ne change pas grand chose pour nous, on va jouer LeBron trois fois au lieu de deux. Maintenant, il faudra se battre comme chaque soir, surtout à l’Ouest. Mais j’ai l’impression que toutes les équipes se sont renforcées, c’est étrange. En NBA, chaque soir est un combat, il n’y a pas un match où tu peux te relancer. Les Warriors restent les Warriors, ce sont les champions en titre mais comme tu l’as dit, il faudra attendre de voir comment ça va se passer au retour de DeMarcus. L’Ouest est en effet de plus en plus dense mais l’était déjà avant donc il faudra se battre.

Vous avez évoqué un renforcement général, quelles sont les équipes dont on ne parle pas et dont il faut se méfier selon vous ?

C’est dur mais New Orleans… Même s’ils ont perdu Rajon Rondo, Anthony Davis est toujours là, ils ont signé Julius Randle et ils resteront difficiles à manoeuvrer. Globalement, beaucoup d’équipes progressent : Memphis, c’est intéressant ce qu’ils font, même Dallas. Les gens les voyaient moins bien sans Blake Griffin mais les Clippers seront aussi difficiles à jouer. De toutes façons, tu ne peux pas t’endormir sur une équipe en NBA.

« Je ne pense pas aux Warriors »

En ce qui concerne le Jazz, l’intersaison s’est surtout concentrée sur le maintien du noyau dur, avec les prolongations de contrat de Derrick Favors, Dante Exum, Raul Neto ou Georges Niang. Êtes-vous satisfait du travail des dirigeants et avez-vous craint le départ de Derrick Favors ?

Craint, non, mais je n’en étais pas sûr. On ne sait jamais, je ne savais pas s’il allait rester ou non, je savais qu’il se plaisait au Jazz mais la NBA est un business, chacun doit penser à soi, tout peut arriver dans la free agency. Je suis en effet satisfait, Derrick est une part importante de l’équipe, de notre jeu. Pour progresser, pour la cohésion, c’était important de conserver le groupe.

Si le groupe a été maintenu, le staff a subi le départ d’Igor Kokoskov, parti pour coacher les Suns. Est-ce que la perte d’un élément comme lui peut influencer la saison d’un groupe ?

Igor est en effet un très bon coach, avec beaucoup d’expérience et c’est pour ça qu’il devient d’ailleurs head coach mais tu sais, ce sont les joueurs qui sont sur le terrain. Notre coach reste le même, Igor a été remplacé, notre identité et notre jeu restent les mêmes donc même s’il était évidemment important, ce n’est pas là où ça se joue, ce n’est rien qu’un groupe ne puisse pas dépasser.

Qu’ambitionnez-vous pour la saison à venir : le titre est-il envisageable quand il y a une armada comme les Warriors ?

L’objectif, c’est toujours d’aller le plus loin possible, de progresser. Les Warriors sont les Warriors, c’est une équipe qui ne laisse pas le droit à l’erreur, pas le droit au moindre relâchement, il n’y a pas de marge de manoeuvre face à eux mais nous les avons battus trois fois la saison passée. Moi, je ne pense pas aux Warriors. Ce n’est pas à eux que l’on pense en commençant la saison, le travail se fait sur nous, sur notre capacité à franchir un cap et c’est ce sur quoi on se concentre.