Une saison régulière pleine de défis
Habités par une confiance inébranlable en eux, les Bulls vont continuer leur route, enchainant pas moins de 13 victoires consécutives avant de se rendre dans l’Indiana. Coaché par Larry Brown, les Pacers s’appuient sur un triptyque intérieur Rik Smits-Dale Davis-Antonio Davis solide et un backcourt Mark Jackson-Reggie Miller talentueux.
Indiana s’impose et ne compte pas laisser la tâche facile à leurs adversaires de l’Illinois. Un challenge qu’ils relèveront durant toute l’année puisqu’ils seront ceux qui poseront le plus de problèmes à Chicago en saison régulière.
Pourtant, trois jours plus tard, lorsque les Pacers se rendent à « Windy City » pour la revanche, ils se font littéralement mettre en pièce par les troupes de Phil Jackson. 120-93 dans une victoire où le banc aura montré toute sa valeur. Steve Kerr et son shoot à 3 points, Toni Kukoc et son toucher délicat, et même Randy Brown, Bill Wennington ou encore Jud Buechler, tous apportent quelque chose à l’épique, leur souci majeur étant de ne pas diminuer l’intensité lorsqu’ils rentrent sur le terrain.
Ron Harper, meneur scoreur et Luc Longley, pivot utile et bon passeur du poste, complétaient la rotation. Est-ce que les fans étaient en train d’observer la meilleure équipe jamais assemblée ? Peut-être pas, mais les Bulls, et Jordan en particulier, étaient de féroces compétiteurs et, cette année-là, ils arrivaient à trouver sans cesse de nouveaux défis pour garder leur motivation. Et s’ils n’en trouvaient plus, leurs adversaires leur en fournissaient.
Ainsi, le 13 Janvier 1996, les Bulls s’apprêtaient à affronter les médiocres Sixers. Jerry Stackhouse, alors rookie, expliqua aux journalistes comment il avait tenu MJ lors des camps d’été à North Carolina et Vernon « Mad Max » Maxwell, connu pour ses coups de folie (il avait frappé un fan en plein match), déclarait :
Y en a marre de Jordan. Y en a marre de Pippen. Ces deux types n’ont rien fait pour moi. Et vous pouvez imprimez ça.
Adepte du trash-talking, « His Airness » n’était pas facile à vivre. Comme Luc Longley le dira plus tard, il était extrêmement dur avec ses coéquipiers, et plus encore avec ses adversaires. Il aimait les humilier sur le parquet avant de continuer une fois le match terminé, leur envoyant sa paire de chaussures signée. Alors, lorsqu’un d’entre eux se permettait de le provoquer, il entrait en transe. Ce soir-là, il marqua 48 points à 65% de réussite. Plus, il réduisit Stackhouse à 13 points (4/11) en s’amusant avec lui toute la soirée et Maxwell ne scora que 4 points (1/8), dominé des deux côtés du terrain.
« Stackhouse Game » :
Cette victoire eut lieu dans une série de 18 succès consécutifs avant que l’équipe ne soit vaincue deux fois consécutivement à Denver et Phoenix. L’unique double revers de la saison régulière.
Lancés dans une dynamique victorieuse, confiants dans leur talent et leur capacité à revenir dans les moments décisifs, les Bulls continuaient leur route jusqu’aux playoffs. Ils perdront encore 5 matchs sur les 35 derniers de la saison régulière et Jordan aura peu l’occasion de s’illustrer en tant que soliste tant l’équipe semblait rôdée et affûtée.
A deux occasions pourtant, il revêtit à nouveau son habit de lumière. Le 18 Février, il dut à nouveau affronter les solides Pacers. De plus, les journaux, qui commentaient sans arrêt ses exploits, reconnaissaient la domination de MJ sur le jeu mais ils remarquaient aussi qu’il avait perdu un peu de son explosivité.
Rien de plus normal, Jordan avait fêté ses 33 ans la veille et il s’appuyait désormais sur d’autres qualités. Mais, comme toujours, cette polémique enragea le numéro 23 des Bulls et il tint à faire taire tout le monde. Ce match en fut l’occasion. Au final, il compila 44 points, 5 rebonds et 7 passes et démontra que, même s’il avait perdu un peu d’explosivité, il était toujours aussi aérien. Pippen, avec ses 40 points, se mit au diapason et Rodman goba 23 rebonds. Le trio tournait à plein.
Rodman, lunatique et distant avec ses coéquipiers, avait parfaitement trouvé sa place dans le système des Bulls. Il prenait des tonnes de rebond, défendait avec une agressivité sans pareille. Physiquement, il était une anomalie de la nature. Il pouvait jouer la dernière minute du match plus fort encore que la première minute avant de passer une heure à travailler en salle de gym.
Son éthique de vie était pourtant tout à fait spéciale. Il ne faisait que deux choses : faire la fête et s’entrainer. Dormir était devenu une activité d’arrière-plan dont il n’avait même plus besoin. Alors qu’il gagnait des millions de dollars, il vivait dans un squat de deux chambres où il errait durant les heures qui précédaient l’entrainement.
Alors qu’il passait ses nuits dans les soirées, la journée, il travaillait plus dur que n’importe qui. Alors qu’il aimait se maquiller et porter des robes, il jouait plus dur que n’importe qui. Alors qu’il soutenait les droits des homosexuels, il sortait avec les femmes les plus en vue de l’époque, Madonna ou encore Carmen Electra.
Personnalité instable, complexe, il ne pouvait s’accorder avec les autres membres de l’équipe. Et Phil Jackson, en grand psychologue, ne le lui demanda jamais. Tant qu’il faisait son travail sur le terrain, il n’y aurait pas de problème. Et si Jordan, Pippen et Rodman ne passèrent jamais leurs vacances ensemble, sur le terrain, leur rage de vaincre et leur haine de l’échec les unit contre tout.