Dans le Game 2 des Finals, les Warriors ont simplifié leur plan de jeu, Stephen Curry jouant beaucoup plus de pick-and-roll, afin de pouvoir attaquer Al Horford ou Daniel Theis en un-contre-un. Ce n’est pas le jeu « historique » de Golden State mais cette chasse aux « matchups » favorables est devenue une stratégie universelle en NBA.
« J’ai l’impression que ce n’était pas comme ça quand j’ai commencé à entraîner, il y a huit ans », reconnait Steve Kerr à USA Today. « Lors des cinq à six dernières années, c’est devenu de plus en plus populaire alors qu’il y avait de plus en plus de 3-points et avec des équipes qui jouaient à cinq à l’extérieur. Et puis avec tous les changements défensifs, c’est difficile d’attaquer. Je pense que c’est la raison pour laquelle cette chasse s’est développée. »
« C’est pour ça que tout le monde recherche ce joueur athlétique de 2m03 avec une envergure de 2m20 qui peut défendre sur toutes les positions et shooter à 3-points »
Ironiquement, Golden State utilise donc une stratégie que ce groupe a contribué à développer. Car la puissance de frappe extérieure des « Splash Brothers », en particulier en sortie de dribble pour Stephen Curry, rendait tout retard très dangereux. Le « drop coverage » n’est pas une option, les prises à deux (blitz, hedge…) peuvent être exploitées par Draymond Green en deuxième créateur et le « switching » permanent, avec des changements sur tous les écrans, représente finalement la meilleure option pour tenir le choc face aux Warriors de Steve Kerr.
Systématisé par les Rockets, la tactique s’est petit à petit diffusée dans la ligue, au point que des défenses (Boston, Toronto…) sont désormais construites pour ne pas pouvoir offrir de duels favorables sur les changements.
« Il n’a jamais été aussi difficile de défendre en NBA qu’aujourd’hui, à cause de tout l’espace qu’il faut couvrir », explique Steve Kerr. « C’est pour ça que tout le monde recherche ce joueur athlétique de 2m03 avec une envergure de 2m20 qui peut défendre sur toutes les positions et shooter à 3-points. C’est le joueur le plus convoité dans la ligue à l’heure actuelle parce que si vous pouvez mettre la main sur quelques-uns d’entre eux, alors vous avez un truc à faire. Et c’est ce que tout le monde actuellement en NBA essaie de faire. »
« Ce n’est pas simplement attaquer un matchup favorable, il s’agit aussi de faire travailler l’adversaire. Pour faire baisser son efficacité de l’autre côté du terrain »
Chercher des « matchups » favorables n’est pas nouveau, les Rockets de James Harden le faisaient ainsi constamment, mais c’est devenu une tactique globale face à des stratégies défensives basé sur les « switchs ». Et puis, comme les Cavaliers de LeBron James l’ont prouvé lors de leurs (premières) Finals face aux Warriors, c’est aussi une manière de fatiguer les stars adverses, en l’occurrence Stephen Curry, et de leur faire prendre des fautes.
« La seule façon de forcer une prise à deux et de créer des tirs ouverts, c’est de battre quelqu’un en un-contre-un sur le dribble et de forcer l’aide » détaille Stan Van Gundy. « Et pour faire ça, il faut des duels favorables … Mais ce n’est pas simplement attaquer un matchup favorable, il s’agit aussi de faire travailler l’adversaire. Pour faire baisser son efficacité de l’autre côté du terrain. Il ne s’agit pas de dire : ‘Chris Paul ne peut pas défendre’. L’idée, c’est plutôt : ‘Chris Paul a 37 ans, ils dépendent énormément de lui pour créer du jeu en attaque, donc il faut l’épuiser à défendre sur ce gars (Luka Doncic) autant que possible. »
Reggie Miller conclut avec une comparaison intéressante.
« C’est comme un combat de boxe de prestige. Les deux premiers rounds, il s’agit surtout de s’accrocher, de bouger, de frapper, de voir ce que l’on peut faire. Mais une fois qu’on arrive au septième, huitième ou dixième round et qu’on a tenu, si on pèse 5 ou 10 kilos de plus que son adversaire, c’est là qu’on cherche le KO. C’est ce que beaucoup d’équipes font désormais, en cherchant les matchups préférentiels qu’elles souhaitent. »