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Saga Grizzlies (#4) – Un fiasco inévitable

Dernier volet de notre trilogie rétro sur le basket dans le grand Nord-Ouest avec l’histoire, brève mais mouvementée, des Grizzlies à Vancouver.

Ça se passe entre 1995 et 2001. Six saisons courtes et longues à la fois dans la cité canadienne de Vancouver. Sortis de leur tanière à la surprise générale en 1995, à la suite de leurs compatriotes Raptors, les Grizzlies n’ont malheureusement pas pu s’installer durablement dans le paysage de la Grande Ligue. Un hiver sans fin. Un hiver sans hibernation…

1ère partie : La genèse d’une franchise sortie de nulle part

2e partie : Une première saison à oublier

3e partie : L’anti-Orlando

DES GRIZZLIES EN VOIE DE DISPARITION

On est le 14 avril 2001. Dans le « Garage » de Vancouver, l’ambiance est électrique, étrange, unique. En un mot, indéfinissable…

Les Grizzlies vont jouer leur dernier match à domicile, avant que la franchise ne se déplace à Memphis, et les fans sont partagés. Certains déplorent évidemment ce déménagement fortement teinté de trahison alors que d’autres savourent le départ d’une franchise qui n’a fait que salir la réputation de la ville avec un des pires bilans de l’histoire, durant six piètres saisons.

« C’est comme une illusion, comme si ça n’était jamais arrivé », explique Squire Barnes, le commentateur star de la chaine locale. « C’est comme si la NBA n’avait jamais vraiment été à Vancouver. Ça semble bizarre de penser maintenant qu’on a bel et bien fait partie de la NBA, et qu’on l’a été pendant une période assez longue. Mais maintenant, ça semble si loin et comme si ça n’était jamais arrivé, comme si on racontait une histoire qu’on aurait inventée. »

En voici la conclusion peu glorieuse… C’est l’histoire de l’extinction pure et simple des Grizzlies dans l’indifférence générale, bientôt passés de l’anonymat relatif aux oubliettes de l’histoire.

La chasse aux Grizzlies

Quand on évoque le déménagement des Grizzlies avec Kat Jayme, la réalisatrice du documentaire sur Bryant Reeves et la franchise NBA de Vancouver, les émotions remontent forcément à la surface. Les souvenirs aussi… mais les meilleurs seulement !

« Je n’étais pas au tout dernier match mais j’étais là à l’avant-dernier match à la maison. On était la pire équipe de la ligue et beaucoup de fans étaient mécontents », nous confiait-elle. « Mais je préfère me souvenir des bons moments, et d’aller au match, tout simplement. J’adorais rentrer dans la salle et entendre la musique, avoir la chance de supporter l’équipe de ma ville. Je me souviens en particulier de Charles Barkley. A l’époque, il faisait partie des superstars de la Ligue et rien que de pouvoir le voir jouer, c’était un moment magique pour nous, gamins de Vancouver, de voir ça dans notre jardin. »

La parenthèse dorée s’apprête à se refermer à Vancouver mais la réalité de ce départ forcé ne semble pas encore vraiment s’installer pour notre interlocutrice privilégiée – alors âgée de 12 ans à sa décharge. « J’étais super anéantie mais je ne pensais pas qu’on allait rester sans équipe pendant longtemps. A la différence des générations plus âgées, j’étais très naïve en pensant qu’on allait retrouver une autre équipe dans quelques années. Je ne me rendais pas compte que c’était vraiment la fin, qu’on n’allait pas avoir d’autre équipe. »

David Stern : C’est une superbe ville, on les a déçus et on s’est déçu nous-mêmes

In fine, la nouvelle fait évidemment mal à une large portion de fans. Dont les plus jeunes comme la réalisatrice Kat Jayme, mais également Robert Sacre, l’ancien pivot des Lakers, également âgé de 11-12 ans à l’époque. « J’étais suffisamment âgé pour comprendre que c’était merdique », dit Sacre en riant jaune et en ne mâchant pas ses mots. « J’ai trouvé ça extrêmement contrariant. Pour moi mais pour beaucoup de gens aussi, car l’équipe était une grande part de notre identité. »

Rachetés en janvier 2001 par l’homme d’affaires de Chicago, Michael Heisley, les Grizzlies n’auront pas survécu plus de six saisons à Vancouver. NBA, monde impitoyable, du fait de réglementations assez débilitantes mais aussi tout simplement trop impatiente avec une franchise pas encore au niveau de sa ville hôte.

« Vu comment les choses ont tourné, je regrette qu’on ait fait cette expérience à Vancouver », a avoué David Stern en 2008 sur ESPN.com. « C’est une superbe ville, on les a déçus et on s’est déçu nous-mêmes. C’est une ville magnifique mais je crois qu’on n’a pas su profiter de notre opportunité. »

Dès février 2001, soit un mois seulement après sa prise de pouvoir, Heisley va à la rencontre de David Stern pour une réunion d’une heure et demie, de laquelle ils ressortent tous deux avec la conviction irrévocable que la situation économique des Grizzlies est devenue intenable. Ça n’était plus arrivé depuis 1985 et le changement d’adresse des Kings de Kansas City à Sacramento, mais voilà un nouveau déménagement entériné en 2001 : de Vancouver à Memphis.

Le temps des promesses optimistes a donc vite cédé à la panique et au sombre tableau d’une situation irrécupérable économiquement. Un revirement spectaculaire pour Heisley et son bureau, bourreaux des Grizz !

« Ils ont abandonné beaucoup trop vite, absolument », maintient quant à lui Jack Armstrong, le consultant de longue date des Raptors mais fervent défenseur du basket canadien, pour SI. « Je trouve simplement que c’est une immense honte qu’il n’y ait plus d’équipes NBA à Vancouver. Surtout quand on voit maintenant comment la ville a changé. Je n’ai aucun doute qu’une franchise NBA est un projet viable à Vancouver. »

Ce qui interpelle dans la situation de Vancouver, c’est que le soutien des fans n’a jamais véritablement failli, même s’il a de fait faibli sur la fin. Et surtout, comparativement, les Grizzlies ne se débrouillaient pas si mal que ça en termes de billetterie par rapport à d’autres franchises établies sur le sol américain qui n’étaient pas sous la menace d’un déménagement.

« L’équipe n’avait pas à déménager », soutient Bob Stamnes, le président de l’agence de pub qui s’occupait des Grizzlies dans un article d’époque. « Le soutien des fans était là, malgré les résultats sportifs. D’autres équipes ont eu des problèmes bien plus handicapants dans d’autres marchés et elles sont restées en place. »

Que ce soit chez les Nuggets, les Clippers ou encore les Mavericks – pour ne citer qu’eux, l’affluence n’était effectivement pas au rendez-vous mais Denver, Los Angeles et Dallas n’ont jamais vraiment été inquiétés par la Ligue. A l’inverse, bien qu’ayant déboursé la somme colossale de 125 millions de dollars, rien que pour entrer dans la danse, les pauvres Grizzlies étaient non seulement menottés mais ils avaient aussi cette épée de Damoclès au-dessus de leur gueule poilue… quasiment dès le début !

« Si vous me demandez mon avis, vous êtes soit un partenaire de la Ligue ou vous ne l’êtes pas. Et quand on a payé la taxe de 125 millions pour créer l’équipe, on n’a pas été accepté en tant que partenaire intégral », insiste Artur Griffiths dans un article de SportsNet en 2014. « La ligue nous a fait jouer au basket avec les mains attachées dans le dos et sur un pied. »

De cette maldonne originale ont découlé de nombreux obstacles qui se sont avérés insurmontables, et ont fini par avoir la peau de ces Grizzlies en équilibre précaire. Le point de non-retour a été atteint au cours de leur dernière saison au Canada, quand ils se sont retrouvés dans une situation ubuesque où certains joueurs majeurs ont été placés sur le bloc des transferts, avant d’en être retirés pour ne pas porter préjudice au déménagement proche.

« Je veux simplement trouver une meilleure situation », déclare alors Abdur-Rahim qui tourne alors à 21 points et 9 rebonds par match, dans sa 5e saison, pour son 5e coach. Cette demande de transfert émanant d’Abdur-Rahim, le joueur qui se rapproche le plus d’un franchise player et, un des rares joueurs irréprochables des Grizzlies avec ses 21 points, 8 rebonds et 3 passes de moyenne en 5 saisons, en dit long sur la situation intenable atteinte à Vancouver en 2000-01.

Les dirigeants se sont effectivement aperçus un peu tard, que pour un déménagement viable, il faudrait proposer une équipe avec un minimum de talents déjà à bord. Du coup, Mike Bibby qui avait des envies d’ailleurs a subi le même traitement. Au final, les deux joueurs seront échangés dès l’arrivée du nouveau groupe à Memphis…

Ce qui nous ramène à cet ultime match, le 14 avril 2001, dans une ambiance surréaliste et une salle quasiment à guichets fermés (à une centaine de fans près – 18 571 spectateurs au total).

Il faut dire que cette dernière partie de basket met aux prises les Grizzlies et les Rockets… d’un certain Steve Francis, l’ennemi n°1 à Vancouver ! Pour un soir donc, le Garage se transforme en salle grecque ou turque chauffée à blanc, avec certains fans virulents qui balancent carrément des piles en direction de Francis. Entre ces huées et ces projectiles, Vancouver quitte la scène NBA sur une drôle de sortie. Aigre-douce à tout le moins…

« Je me souviens qu’il y avait une drôle d’énergie dans les gradins », atteste Shareef Abdur-Rahim. « Je n’avais jamais connu un tel sentiment auparavant. C’était à la fois énergique mais aussi émotionnel et aussi un peu étrange en même temps. »

Pourquoi encourager cette équipe qui ne sera… n’est déjà plus la leur ? Pourquoi être triste pour autant, car c’est une équipe de « losers » invétérés qui quitte enfin la ville ? Cette palette très variée de sentiments extrêmes s’est traduite par une diversité de panneaux dans les travées du Garage : « Merci pour la pire équipe de l’histoire », ou « 100 victoires sont mieux que rien. Merci les Grizz ».

À la fin avril, un autre fan avait apporté une pancarte plutôt symbolique : « Adieu, cruelle NBA ». En l’occurrence, aucun affront ne sera épargné aux Grizzlies avec ce dernier match perdu à la maison, qui plus est, des mains de leur ennemi intime…

Malgré une belle prestation globale, qui leur permet notamment de compter 4 points d’avance à la mi-temps, la fin de match tourne en faveur des visiteurs, avec 12 points de Steve Francis en deuxième mi-temps. Le meneur des Rockets prend le contrôle des opérations et, à défaut de faire taire les huées qui lui sont destinés, il parvient à porter Houston à la victoire. Un énième pied de nez de l’histoire !

« La vie va suivre son cours ici », laisse entendre Jack Scott, un fan qui a dépensé 136 000 dollars en abonnements sur les six saisons de Vancouver, pour SI. « Nos fans vont partir avec grâce et style, il n’y aura pas d’animosité. S’il y en a, j’en serai embarrassé parce que les Canadiens ne se comportent pas comme ça. »

On imagine que notre ami Jack Scott a donc dû rougir un peu en voyant l’accueil réservé à certains joueurs, mais c’est bel et bien dans l’indifférence générale que les Grizzlies disparaissent pour de bon, alors que le dernier match de leur histoire face à Golden State, n’est même pas diffusé à Vancouver (ni à San Francisco d’ailleurs). Il y avait match des Canucks juste avant…

Des Grizz à l’aise dans les bureaux

Parents pauvres de Vancouver qui ne peut renier sa passion, très canadienne, pour le hockey, sport national, les Grizzlies ont connu un paquet de soucis hors terrain, mais ce n’est pas faute d’avoir essayé non plus. Sur le vaste marché canadien, les Grizzlies arrivent à se faire leur place. Le service marketing de la franchise parvient à trouver des accords publicitaires très intéressants : Nike, Kellogg, Air Canada, IBM, Coca Cola, McDonald’s, Xerox…

Remplir les loges est cependant une autre paire de manches alors que les bureaux de ces compagnies internationales ne sont pas à Vancouver, mais plutôt à Toronto. Qu’importe, cela laisse libre cours à des innovations marketing, comme de proposer un pack qui comprend des tickets pour les Grizzlies et des entrées au parc de ski de Blackcomb Mountain. Plus communément, et non moins malin, les Grizzlies se sont souvent associés avec les Canucks, l’équipe de NHL locale, pour des achats groupés pour leurs loges avec certaines compagnies partenaires.

Bref, si ça ne marche pas fort sur les parquets de NBA, les Grizzlies arrivent tout de même à s’en sortir, de manière fort honorable, dans les rangs du management et des bureaux en général. La structure est saine, mais la partie sportive ne va toujours pas.

« L’un des trucs très importants que les gens n’ont pas apprécié, c’est qu’aucun des joueurs ne restait à Vancouver pendant l’intersaison », commentait Jay Triano, alors commentateur. « C’était difficile de rester en contact et de leur faire faire des choses à distance pendant l’été. Et surtout de garder le basket dans la section sport durant ces mois d’été. »

Parmi les joueurs « traîne savates », on peut évidemment recenser Steve Francis en premier lieu, avec plusieurs lieues d’avance sur ses poursuivants ; mais également des joueurs de seconde zone comme George Lynch qui se plaignait de ne pas trouver de supermarchés à Vancouver ou encore Othella Harrington qui n’a eu de cesse de « supplier » qu’on le transfère… Emportés dans une spirale infernale de défaites, les Grizzlies n’avaient nul besoin d’une telle campagne de pub de la part de leurs propres employés !

« Les gens n’ont jamais eu la sensation que les Grizzlies faisaient partie de la ville », ajoute Squire Barnes, présentateur de télé locale. « Il semblait toujours que les joueurs n’avaient pas envie d’être là. On avait cette sensation qu’ils étaient des mercenaires qui s’étaient retrouvés avec ce mauvais boulot à Vancouver et ils ne pensaient qu’à partir. »

Un sentiment partagé par Shareef Abdur-Rahim, un des rares joueurs à être resté à Vancouver jusqu’au déménagement…

« Je n’ai jamais eu le sentiment qu’on avait suffisamment bien joué pour vraiment les accrocher afin qu’ils deviennent des fans fervents des Grizzlies », reconnaît très humblement Abdur-Rahim.

Pourtant, preuve que la barre n’est pas placée très haut, dans la vidéo promotionnelle qui annonce la 4e saison des Grizzlies à Vancouver, on peut entendre Brian Hill se réjouir de l’arrivée de Bobby Hurley et Michael Smith. Oui, oui, Bobby Hurley et Michael Smith, deux joueurs qui tournent à 4 et 5 points de moyenne en carrière.

Pendant trois ans, l’équipe quitte la ville depuis un aéroport… américain !

Loin d’être des foudres de guerre, Hurley et Smith ont au moins le mérite d’être des vétérans sérieux et appliqués, avec du caractère, la bonne attitude et l’expérience du haut niveau. « On a joué notre meilleur basket après leur arrivée », soulignera Coach Hill avant d’être remercié au début de l’antépénultième saison des Grizzlies à Vancouver.

Au centre du nouveau projet sportif des Grizzlies en 1997, l’ancien coach d’Orlando n’arrivera pas à retrouver la magie de sa pige en Floride. Le scénario espéré d’un bis repetita de Coach Hill qui avait réussi à sortir le Magic du trou pour l’amener jusqu’en finale NBA ne se réalisera pas au nord de la frontière. Au contraire, le climat économique de Vancouver a douché les ambitions locales.

Au propre comme au figuré, l’image de marque des Grizzlies n’a jamais pris son envol. Du point de vue logistique effectivement, tout n’était pas aussi rôdé que prévu.

Par exemple, durant ses trois premières saisons, l’équipe ne pouvait pas décoller ni atterrir directement du sol canadien. Du coup, ils prenaient un bus pendant 45 minutes pour faire le chemin entre leur centre d’entraînement à Richmond, en Colombie Britannique jusqu’à Bellingham, dans l’état de Washington. Disons que ça ajoutait aux désagréments quotidiens des pauvres Grizzlies…

« Une fois, en revenant de Miami, on a pris un avion de nuit et quand on est arrivé à Bellingham, on a dû prendre le bus, passer la frontière, rejoindre notre centre d’entraînement et ensuite prendre encore la voiture pour rentrer à la maison », raconte Lionel Hollins. « C’était rude. »

Entre l’apathie des médias et des résultats décevants, c’est aussi un choc culturel pour les joueurs américains. À Vancouver, outre les pluies récurrentes, le plus gros souci est qu’il n’y avait aucune couverture médiatique des sports américains. De quoi déboussoler les Yankees les plus endurcis… surtout si on y ajoute les impôts à payer !

L’affluence baissant graduellement chaque saison, les Grizzlies devaient aussi compenser de lourdes pertes avec un dollar canadien dévalué, à 70 centimes de dollar américain. En janvier 2000, l’homme d’affaires de Chicago, Michael Heisley prend possession de la franchise pour 160 millions de dollars. Après avoir accepté les termes de l’achat, dont une clause qui stipule qu’aucun déménagement ne peut être envisagé dans les cinq années à suivre, Heisley a même chanté l’hymne canadien pour se mettre les fans de Vancouver dans la poche. Mais la mascarade ne prend pas. « Les gens ont accusé Heisley, il était le n°1 », explique Pasha Bains dans Sports Illustrated. « Les gens de Vancouver sont très intelligents et nous étions bien conscients de tout ce qui se tramait. »

Lors de son entretien avec David Stern lors du All Star Game 2001, Heisley estimait qu’il allait perdre 40 millions lors de la saison 2000-01, avec l’affluence tombé à 13 727, soit 27e de la Ligue. Ses lamentations finissent d’user David Stern qui lui donne le feu vert pour trouver une autre ville capable d’accueillir les Grizzlies. « Je n’ai jamais senti que l’équipe était en danger », déclarait, incrédule, Shareef Abdur-Rahim a posteriori. « Il n’a jamais été confirmé qu’il allait se passer quoi que ce soit. » 

Ce « quoi que ce soit », c’est un véritable sabotage en bonne et due forme de la part de Michael Heisley et sa nouvelle équipe dirigeante. En sorte de déguerpir le plus vite possible de ce guêpier canadien…

Le sabotage de Michael Heisley 

« Nous sommes très optimistes sur le fait que Vancouver va continuer à être une ville NBA de premier choix », entonne Stern en 2000 après l’achat de Michael Heisley. « Ils récupèrent un excellent propriétaire qui va faire tout son possible pour en faire une franchise qui réussit, et je ne vois aucune raison que ça ne marche pas. »

Plein de bonnes intentions, en déclarant notamment qu’il préférerait  vendre l’équipe plutôt que de la déménager, Michael Heisley a en fait réussi là où Bill Laurie, l’héritier (par alliance) de la fortune de Walmart avait échoué. Il a réussi à embobiner Stern et les dirigeants de la Ligue. « Je ne pense pas qu’il avait l’intention de sauver l’équipe », avance Squire Barnes. « Il a fait ce que Laurie a fait avant lui, mais il a été plus malin. Il a créé l’image d’un désastre financier et d’une situation si désespérée pour la présenter à la NBA et les propriétaires. Après avoir fixé cette ligne directrice, il s’est assuré de ne plus jamais en changer. »

Avec ses gros sabots – ou plus probablement ses bottes de cowboy – Bill Laurie s’était effectivement rapproché de la NBA afin de reprendre les rênes des Grizzlies. Mais l’optique d’un déménagement à St Louis, où le groupe d’investisseurs de Laurie possédait déjà l’équipe de NHL des Blues, est bien trop évidente.

« La NBA a vu clair dans son jeu », ajoute Barnes. « Quand il était sur le terrain à Vancouver, alors qu’il n’avait pas officiellement acheté l’équipe, nos caméras l’ont vu avec Brian Hill qui lui demandait comment était la salle à St Louis. Pourquoi une telle question si Bill Laurie avait l’intention de garder l’équipe à Vancouver ? C’état un secret de polichinelle et la NBA ne pouvait pas le tolérer. »

Plus discret et plus rusé, Heisley a su monter de toutes pièces une façade et un discours bien plus crédibles. Il promettait évidemment de garder l’équipe à Vancouver mais il y a ajouté le panache en prenant le micro pour chanter l’hymne canadien pour le match d’ouverture de la saison 2000, face aux Sonics. Imaginez un peu : si Steve Ballmer entonnait la bannière étoilée a capella au Staples Center !

Accessoirement, il annonçait aussi que Vancouver allait être une équipe à plus de 50% de victoires dans les cinq ans… Bref, il en fait des tonnes, des caisses, tout le pataquès !

Concrètement, il amène une nouvelle équipe de management, sa propre équipe marketing qui a lancé une campagne de 1,2 millions de dollars pour dynamiser la marque. Cela a crée un peu de buzz, les ventes de billet ont connu un léger regain…

« Tout était question d’optique », rapporte Chuck Philips, le directeur de l’agence marketing engagée pour cette campagne. « Michael Heisley a chanté l’hymne national canadien mais c’était purement pour la NBA. Voilà le propriétaire de l’équipe qui fait lui-même la promotion de son équipe. La communauté locale a cru en lui. »

Mais la réalité froide des faits est implacable. Arrivé trop tard, après l’achat de la franchise officialisé en mars et l’embauche de l’agence de pub à la fin août, les Grizzlies n’avaient plus que des miettes, après que les entreprises locales aient déjà vidé leur porte monnaie durant l’été. Complètement dans le désordre, le grizzly, se trouvant fort dépourvu quand la bise fut venue, alla de nouveau crier famine.

Et c’est alors que le deuxième temps de ce « plan machiavélique » entre en marche. Sans sponsoring suffisant, Michael Heisley dénonce un manque de soutien des industries locales.

Mais il sabote également en interne la popularité de sa propre franchise en offrant des packs terriblement basiques. En outre, son équipe marketing importée des Etats-Unis ne prend pas conscience du décalage avec le marché canadien. Le message ne passe pas. Pire, la nouvelle équipe balaye d’un revers de la main les précédentes campagnes, qui avaient elles fait leurs preuves

« Notre campagne de pub était de belle facture si on parle qualitativement », clame Phillips. « Mais ils ne l’ont utilisée nulle part. Ils ont simplement fait de la pub à la radio. »

Des stratégies étranges sont aussi assez remarquables pour une franchise qui sait (en coulisses) que son avenir est en pointillés. La première est de voir le nouveau GM, Dick Versace, refuser systématiquement que les joueurs soient utilisés à des fins marketing. Ça n’était pas dans le contrat visiblement…

Une autre stratégie étrange, l’invitation a priori cordiale au petit déjeuner qui tourne à l’entretien d’embauche humiliant.

« La nouvelle direction n’a jamais eu la moindre intention de garder l’équipe à Vancouver, de ce que je sais des gens qui gravitaient autour et de notre premier contact avec ce groupe, qui a été épouvantable. C’est le pire rendez-vous de toute ma vie », narre le statisticien en chef de Vancouver, Steve Daniel, dans l’excellente histoire orale de la franchise sur Global News. « Quand Heisley a acheté l’équipe, il l’a acheté avec un groupe dont Dick Versace, Tom Penn, Chuck Daly et quelques autres. Ils ont invité sept gars du staff au petit-déjeuner au Waterfront Hotel. On y va et on les voit tous les sept avec sept chaises et aucune pour nous. Ils étaient là depuis une heure déjà et ils nous ont alignés, nous cuisinant de questions un à un. On était debout devant eux qui avaient fini leurs assiettes, à nous demander ce qu’on avait fait pour cette franchise. Ils voulaient nous mettre la pression. On est tous reparti sous le choc et on est allé boire des coups au bar. A 11h du matin. C’est comme ça qu’on a fait leur connaissance… »

Dans le genre intimidant, Dick Versace est particulièrement resté dans les mémoires à Vancouver. Toujours sur son trente-et-un et grand amateur de littérature (dont Edgar Allan Poe et Ernest Hemingway dans ses recherches universitaires), Versace ne prenait par contre pas de gants pour traiter avec les médias ou même les (anciens) partenaires de la franchise, qu’il est pourtant payé pour satisfaire.

« Ce qui se passe ici, c’est que cette entreprise ne marche pas, c’est un échec », envoie ainsi Versace en mars 2001 sur CBC. « La vérité dans toute cette affaire, c’est qu’il s’agit d’un désastre financier. »

Recruté par Heisley qui était un des amis d’enfance de son frère, pris en otage torturé et tué durant la Guerre du Vietnam, Versace n’était pas du genre à parler pour ne rien dire. La vieille école au service d’une mission peu ragoûtante en somme.

« Il ne pouvait pas y avoir d’individu plus belligérant », se souvient Ric Carrick, un entrepreneur local et abonné à l’année. « Il était aussi hostile qu’on peut l’être, il a aliéné tout le monde dans la communauté. Il a catégoriquement rebuté de nombreux hommes d’affaires qui proposaient de promouvoir l’équipe et de trouver d’autres appuis. Il ne pouvait pas y avoir pire recette pour un échec cuisant. »  

Affichant le plus grand désarroi en public et se cachant volontiers derrière ce sentiment d’injustice, Heisley continuait cependant d’envoyer promener des clients potentiels. En privé, il a effectivement refusé de nombreuses opportunités de partenariats qui auraient sans doute pu altérer la destinée des Grizzlies, à tout le moins, en évitant leur disparition si soudaine après l’an 2000.

« Je pense qu’Heisley s’est énervé et s’est impatienté quand il a vu qu’il n’obtenait pas un soutien monstre des entreprises locales alors qu’il considérait qu’il venait de sauver l’équipe. Mais quand les compagnies locales essayaient de monter au créneau pour l’aider, elles étaient pour ainsi dire ignorées », justifie Barnes. « Ça paraît vraiment douteux. Ne les laissez pas nous apporter leur soutien, comme ça on peut aller ensuite se plaindre à la NBA en disant : laissez nous partir. »

Ne manquant pas de culot, pour ajouter du sel sur la plaie, Heisley affirmait que le soutien des fans avait été « décevant » à l’orée de la saison 2001, et ce, alors qu’en coulisses, de nombreux soutiens locaux avaient proposé d’acheter davantage de billets, tous gentiment refoulés.

Le masque est définitivement tombé. Si certains avaient pu brièvement croire dans les intentions de Heisley de rester à Vancouver, cette déclaration est l’ultime outrage. Carrick et d’autres fans lancent alors leur campagne « Save the Grizzlies » avec un site internet qui reçoit vite beaucoup d’attention (un million de clics). Et ils intentent également un procès contre Heisley, rien que ça !

Voyant que l’orage gronde et que d’autres nuages très menaçants approchent la Baie des Anglais, David Stern ne trouvant pas d’autres acheteurs, il consent à l’inévitable déménagement.

L’héritage  

À son échelle, Kat Jayme a pu mesurer que la flamme de la balle orange n’est pas complètement éteinte à Vancouver. Si l’on peut voir dans son film qu’elle a dû elle-même ramené les chaussures et le maillot dédicacé de Bryant Reeves au musée local, son documentaire et la tournée de festivals qui s’en est suivi lui ont également permis de faire le lien entre de nombreux fans des Grizzlies disséminés un peu partout sur le continent américain, mais aussi au-delà.

« J’ai reçu beaucoup de soutiens après mon premier film et j’ai pu rencontrer beaucoup de gens qui veulent la même chose que moi : qu’une équipe NBA revienne à Vancouver. Le film a clairement réveillé un paquet de fans des Grizzlies qui s’étaient un peu endormis en pensant qu’on était des fans isolés. Mais on est nombreux ! »

Et le succès de son « Finding Big Country » lui a surtout permis de faire tremplin vers un deuxième projet, et elle nous a annoncé qu’il y aura un nouveau documentaire 100% Grizzlies très bientôt (« un an ou deux », nous a-t-elle promis).

« On est en train de bosser sur un documentaire qui retracera l’histoire globale de la franchise, avec l’objectif de connaître les véritables raisons du départ de l’équipe. J’ai discuté avec Mike Bibby et Shareef Abdur-Rahim. Le Big Three de Bibby, Shareef et Bryant Reeves en fait. Ce sont les joueurs que j’adorais et je suis même devenu très amie avec des gars comme Felipe Lopez, Cherokee Parks, ou Bibby. Ils seront tous dans le prochain film. J’aurais adoré pouvoir discuter avec Michael Heisley évidemment, mais il est décédé [en 2014]. C’est difficile de commenter de mon point de vue de fan car je pense qu’il nous a trompé et il avait bel et bien l’intention de déménager l’équipe. On veut approcher cette question depuis l’aspect économique : avait-il vraiment besoin de déménager l’équipe ? Il a fait un paquet de promesses qu’il n’a pas tenues. On verra où ça va nous mener… »

Si elle donne une tribune à Arthur Griffiths, le premier propriétaire des Grizzlies, dans son prochain opus, Jayme peut être sûre d’obtenir une voix qui va dans son sens, et porte haut et fort. Avec un discours net et sans bavure qui incrimine Heisley.

« La réalité, c’est qu’Heisley avait toutes les intentions du monde de détruire le support des fans, d’aliéner les gens, de ne pas promouvoir l’équipe et de présenter l’argument que le basket ne marche pas à Vancouver, ce qui est des foutaises », s’emportait en 2011 le propriétaire originel, Arthur Griffiths dans le Vancouver Sun. « On ne perdait pas, en aucun cas, des millions et des millions. On avait un des meilleurs groupes de fans de la NBA. »

« S’il dit ça, c’est soit qu’il est stupide ou, tout simplement, qu’il ment », a répliqué Heisley en 2012 (avant son décès en 2014). « Je serais heureux de lui donner dix fois l’argent que j’ai perdu s’il peut le prouver. »

Griffiths va même plus loin en affirmant que la NBA doit elle aussi se regarder dans le miroir. David Stern a bien reconnu que c’était un regret et une déception, mais la ligue n’a pas assumé sa part de responsabilité dans cet échec qu’elle a sans aucun doute provoqué, ou du moins consciemment favorisé.

« Vancouver a obtenu un accord d’expansion complètement horrible. Ils essayaient de s’assurer qu’on ne réussirait pas rapidement. C’était tellement débile », renchérit Griffiths. « On avait dépensé 125 millions de dollars en espérant être considéré comme un partenaire à part entière. Je pense que la NBA doit prendre une part de responsabilité pour avoir tourné le dos à la ville. Et Heisley a délibérément trompé les fans à propos du déménagement. »

Pris entre deux feux pour ainsi dire, les Grizzlies n’ont clairement pas eu les cartes en mains pour durer en NBA. N’empêche, Vancouver reste encore aujourd’hui une destination pleine de potentiel pour la Grande Ligue.

À en croire les locaux, le basket est encore très populaire chez les jeunes de Vancouver. « Le basket s’est démultiplié de manière exponentielle en termes de clubs et d’équipes », confirme Pasha Bains, gamin de Vancouver toujours dans le basket à 35 ans. « Maintenant, il y a des clubs qui jouent à Las Vegas contre de la compétition d’élite. Et le style de vie basket est très répandu ici, on a beaucoup de jeunes qui commencent à jouer en club dès l’âge de 8-9 ans. »

A l’époque des Grizzlies, alors qu’il est le directeur des relations à la communauté – et accessoirement commentateur radio, Jay Triano a pour le coup mis la main à la pâte en participant à plusieurs camps pour jeunes basketteurs en herbe. « Il y a maintenant 10 000 gamins qui jouent au basket de manière organisée», se félicitait Triano. « On est plutôt fier de notre projet. »

De la même manière que sont récemment sortis Shai Gilgeous-Alexander et son cousin Nickeil Alexander-Walker ou encore Andrew Wiggins, Kelly Olynyk et Jamal Murray dans la grande agglomération de Toronto avec ses immenses banlieues, on n’est pas à l’abri de voir quelques jeunes pépites découvertes à Vancouver et ses alentours dans les années à venir. La détonation Raptors ressentie en Ontario au milieu des années 1990 a également été tout aussi puissante en Colombie Britannique.

« Les Grizzlies ont définitivement eu un impact sur ma génération », reprend Jayme. « On a grandi en regardant cette équipe et la NBA et la culture basket de Vancouver est forte grâce à eux. On n’en est pas encore au point de Toronto mais ça ne veut pas dire pour autant qu’elle n’est pas importante non plus à Vancouver. Ce qui est le plus malheureux, c’est que quand ils sont partis, les Grizzlies ont tout emmené avec eux. Ils n’ont rien laissé derrière eux. Malgré ça, il y a encore une grosse communauté basket ici et les Grizzlies y ont clairement participé. On a un paquet de ligues, de playgrounds à travers la ville… »

Il faut dire que les habitants de Vancouver partaient de loin. Pour la plupart, le basket était une découverte totale. On vous rappelle que les Grizzlies ont notamment dû créer un lexique placardé aux quatre coins de la salle pour que les fans puissent tous comprendre les règles du jeu.

« On s’en rendait bien compte », reprend le GM Stu Jackson. « J’ai participé à une émission à Vancouver et le premier appel venait d’une dame âgée. Elle a dit : ‘J’ai vu les Globetrotters il y a quelques années et je me demandais si vous allez employer les mêmes tactiques avec notre équipe.’ C’était son mot : les tactiques. Quatre mois plus tard, je suis de nouveau à la radio et un autre gars appelle : ‘Avec John Salley qui était encore disponible, pourquoi avez-vous choisi Benoit Benjamin ?’ Ce n’était pas ‘pouvez-vous nous expliquer’ ou ‘quelles sont les raisons’, mais ‘pourquoi, pourquoi ?’. Si j’avais reçu ce coup de fil à New York, je me serais dit, « quel imbécile ». Mais c’était à Vancouver et cet appel était très positif au final. »

Les relations avec les fans sont cordiales, mais tout aussi empreintes d’incompréhension. Une incompréhension à la fois due à la nouveauté du basket pour le public de Vancouver et les choix parfois incompréhensibles du GM des Grizzlies.

« Bring Back the Grizz »

Mais la courte histoire des Grizzlies à Vancouver est parsemée de ces décalages coûteux. Du mauvais côté du cours du dollar mais aussi du règlement très particulier de la NBA réservé aux équipes d’expansion au Canada, les Grizzlies ont perpétuellement lutté pour leur survie au lieu de plancher sur leur croissance.

A la différence de Toronto qui a bénéficié d’une plus grande manne financière dans un bassin d’activités plus riche, Vancouver n’a jamais réussi à convaincre complètement du point de vue économique. Mais là encore, les Grizzlies ont été victimes d’une réputation biaisée par l’ignorance d’une poignée de jeunes joueurs américains.

« Steve Francis était le gros joueur. S’il était venu jouer ici, il aurait pu être une superstar », assure Jay Triano. « Mais ça a envoyé un message dans la Ligue et parmi les joueurs. Le grand public a vu des joueurs arrogants qui ne voulaient pas venir ici. »

Une réputation qui mélange plusieurs données, comme des conditions climatiques particulières, une forme d’isolement spécifique au Nord-Ouest et encore plus forte au Canada, mais certainement pas une ville « sans supermarché », une région sans intérêt et un public insuffisant.

« Entre nous, peu importe ce que disaient les gars qui ne voulaient pas venir, tout le monde a apprécié la ville », affirme Abdur-Rahim. « Nos adversaires adoraient la ville. Encore aujourd’hui, j’entends des gars dire que ce voyage à Vancouver leur manquait. Ils adoraient séjourner près de l’eau à l’hôtel Pan Pacific, fréquenter les grands restaurants et profiter de leur soirée. »

On ne sait que très peu que le public a été présent jusqu’à la trahison de Michael Heisley, que les Grizzlies étaient à la pointe du divertissement aux entractes, bien obligés de proposer le spectacle que n’arrivaient pas à produire les joueurs sur le parquet.

« Regardez comment Toronto a survécu. Regardez ma classe de draft, quand Vince est arrivé, il était tellement plus excitant que ce que nous avions à Vancouver », reconnaît bien volontiers Mike Bibby dans The Province. « Je pense que ça nous a compliqué la tâche. On ne gagnait pas, on n’était pas excitant. On avait des gars qui jouaient sous le cercle avec Country, Shareef et moi. »

De même, Vancouver a beaucoup innové, étant contraint de s’adapter à ses moyens réduits. Outre les initiatives marketing évoquées par avant, les Grizzlies se sont distingués en devenant la première équipe à diffuser ses matchs en trois langues : l’anglais, l’espagnol et le mandarin !

Franchise moderne et tolérante – parfaitement dans la lignée progressiste voulue par la NBA – au contact de son public, la franchise de Vancouver a également bénéficié d’un fort soutien local, n’en déplaise à Heisley. A la question : les Grizzlies ont-ils été bien accueillis par la ville de Vancouver, et plus généralement par le Canada, la réponse fuse.

« Tout à fait », répond tout de go Abdur-Rahim pour CBC. « Il y avait beaucoup de fans NBA et de fans de basket. Stu Jackson, le GM qui m’a drafté, nous amenait chaque année dans un nouveau coin du Canada. Une année, on a fait le camp d’entraînement à Calgary, une autre à Victoria. Au lieu de tout faire pour nous, il nous laissait prendre le ferry. Après coup, je me rends compte que c’était vraiment une bonne expérience et une bonne manière de nous impliquer dans le tissu de la ville. On en voit les conséquences aujourd’hui avec beaucoup de jeunes talents qui sortent du Canada, des joueurs NBA ou des joueurs à fort potentiel. J’aime à penser que les Grizzlies, leur existence ici, a quelque chose à voir là-dedans. »

Dix huit ans après leur extinction, les Grizzlies demeurent une tâche un poil (ou plus) embarrassante dans l’histoire de la NBA. Une parenthèse qu’on aime laisser fermée, bien cachée derrière l’héritage réapproprié depuis par Memphis et les fans du Tennessee.

A part pour certains fait divers gentillets, comme la vente du parquet de leur terrain d’entraînement en 2012, les Grizzlies ne font pas vraiment les gros titres. Peut-on croire à un retour des Grizzlies en NBA après cette fin en queue de poisson en 2001 ?

Kat Jayme y croit encore et elle n’est pas seule. Le mouvement « Bring Back the Grizz » a encore beaucoup de pain sur la planche pour créer l’espoir légitime d’une franchise NBA. Mais les locaux veulent y croire. Ils maintiennent que la ville a les épaules pour tenir une franchise NBA au long cours.

« Je suis convaincu que Vancouver peut subvenir aux besoins d’une équipe NBA », conclut Abdur-Rahim. « Il y a la passion, les gens adorent le basket. Je ne sais pas si ça arrivera car il faut réunir tellement de facteurs dont certains nous échappent. Mais l’équipe ne serait jamais partie si j’avais pu le décider. C’est une ville magnifique. »

Groupe de réflexion impartial qui analyse des données économiques des différents secteurs du pays, le Conference Board du Canada affirmait ainsi, dès 2012, que les conditions étaient réunies pour le retour de la NBA à Vancouver. 

« Les données fondamentales économiques ont changé », assurait Glen Hodgson pour CBC. « Avec le dollar à parité et une population grandissante essentiellement immigrée, il est bien possible d’avoir une deuxième franchise au Canada, à Vancouver. On pense que le timing n’était pas bon lors de la première tentative. »

Et comment ! En acceptant un contrat inique en 1995, Vancouver s’est engagé dans une voie sans issue (et en pente). Les erreurs de parcours combinées à l’instabilité générale du sportif ont résulté en un des pires bilans de l’histoire pour une franchise naissante.

Mais c’était Vancouver en 1995. Pour Kat Jayme comme de nombreux acteurs de la cause, la ville a bien changé depuis. Plus peuplée, plus dynamique, plus multiculturel encore, Vancouver est une destination encore sous-cotée pour le tourisme.

« A l’époque, je pense que les gens ne savaient pas où était ou ce qu’était Vancouver », relativise Jayme. « C’est évidemment malheureux que Steve Francis ait pris cette décision et d’une certaine manière, c’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Je pense qu’il aurait pu être le joueur qui aurait fait basculer la franchise, comme Vince Carter l’a été à Toronto, car c’était un joueur athlétique, spectaculaire et excitant. Malheureusement, il ne nous a même pas donné une chance… »

Espérons que la prochaine franchise (sera-t-elle encore Grizzly sachant que Memphis a conservé le nom ?) aura quant à elle une vraie chance, sur un pied d’égalité. C’est tout ce que demande les fans et les activistes du mouvement « Bring Back the Grizz ».

La ville de Vancouver le mérite. Bastion du basket américain, le grand Nord-Ouest le mérite. Forte de cet axe pacifique de Portland à Vancouver en passant par Seattle, la NBA réparerait quelques unes de ses erreurs du passé.

Mais on n’a certainement pas fini d’en entendre parler. Et certainement dès cette saison, alors que Memphis va ressortir les jerseys de l’époque Vancouver. Si Jaren Jackson et Ja Morant ne sont ni Big Country, ni Mike Bibby, la discussion devrait irrémédiablement diverger. Et on ne discutera pas seulement chiffons…

Ultime épisode : Le cinq « all-time » de Vancouver

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