« L’attaque en triangle ». Voici la solution miracle qui pourrait relancer les Knicks grâce au tandem Phil Jackson – Derek Fisher. Ce système offensif, que tout le monde connaît, a permis aux Bulls et aux Lakers de rafler 11 titres. C’est LE système de jeu prôné par Phil Jackson, et dans quelques semaines, Carmelo Anthony prendra la suite de Michael Jordan et de Kobe Bryant pour tenter de gagner le titre avec ce système.
Mais si ce système de jeu est très connu, il n’en demeure pas moins mystérieux. Pourquoi Phil Jackson est le seul à l’utiliser et à le défendre ? Et quels en sont les principes ?
Basket USA vous propose de découvrir ce qui se cache derrière.
Qui a inventé ce système de jeu ?
Même si on lie les deux en permanence, l’attaque en triangle n’a pas été inventée par Phil Jackson. Les principes de base ont été posés par Sam Barry, à l’université de Californie du Sud, au milieu des années 40. Coach dès l’âge de 25 ans, Tex Winter, qui avait joué pour Berry, l’a ensuite développée pour l’université de Texas Tech. Ce même Tex Winter, après avoir écrit un livre en 1962 (The Triple-Post Offense) sur l’attaque en triangle, et avoir coaché durant 2 ans les Houston Rockets (1972-74) a fini par être embauché comme assistant aux… Chicago Bulls, en 1985.
Quelles franchises NBA l’ont utilisé ?
Tex Winter arrive aux Bulls en 1985, mais ce n’est que deux ans plus tard que Phil Jackson le rejoint lui aussi comme assistant coach, avant d’être promu coach en 1989. Autant dire que le Maître Zen, s’il ne l’a pas inventé, a eu au moins la capacité de détecter le potentiel de ce système, avant de l’utiliser avec le succès que l’on sait. En fait, de sa prise de fonction, jusqu’à sa retraite en 2011, Phil Jackson n’utilisera que ce système en attaque. A ses côtés, le fidèle Tex Winter, encore consultant à Los Angeles lors de la saison 2008-09, à l’occasion du premier des deux derniers titres des Lakers. Le bilan de Jackson est exceptionnel : 11 titres en 20 ans, 20 qualifications en playoffs, 70% de victoires en saison régulière.
Outre les Bulls, les Mavs et les Wolves ont essayé le jeu en triangle. Logique quand on sait qu’ils étaient entraînés par deux anciens assistants de Phil Jackson, Jim Cleamons et Kurt Rambis. Ce fut deux gros échecs…
Pourquoi appelle-t-on ça l’attaque en triangle ?
Comme son nom l’indique, ce système de jeu s’appuie sur un triangle dont les angles sont formés par trois joueurs. En fait, dans la position de départ, et on le constate sur le schéma ci-dessous, ce n’est pas le jeu en triangle, mais en triangle(s). Ils sont au nombre de trois, permettant ainsi diverses solutions au porteur de balles, qui est le plus souvent en position 1. Sur notre visuel, le 5 est au poste, mais il peut très bien se trouver à l’aile.
Quelles sont les postulats de départ ?
Paradoxalement, le jeu en triangle s’appuie sur quatre piliers.
– L’une des clés de l’attaque en triangle, c’est l’absence de position fixe pour les joueurs. C’est une mini-révolution dans le basket moderne puisqu’il n’y a pas de véritable meneur de jeu ou de pivot attitré, et qu’il n’y a pas de position liée à un type de joueur. Ainsi, un intérieur peut se retrouver au niveau de ligne des 3-points, et un arrière, comme Michael Jordan ou Kobe Bryant, peut jouer au poste bas. Aux Knicks, on peut parier que Carmelo Anthony jouera au poste bas, et c’est un ailier. En clair, la polyvalence des joueurs est primordiale.
– L’autre élément essentiel, c’est le mouvement. Lorsqu’il est parfaitement exécuté, le jeu en triangle est un régal. Peu de dribbles, des passes rapides, et des joueurs en mouvement. Même s’il y a un côté fort (côté ballon), les deux joueurs hors du triangle doivent être attentifs puisqu’ils peuvent, à tout moment, intégrer le triangle.
– Puis, il y a l’espace. Plus particulièrement, l’espace entre les joueurs. Dans le jeu en triangle, les joueurs doivent être distants l’un de l’autre d’environ 4 à 5 mètres. C’est la clé de la réussite de ce système puisque plus on écarte le jeu, plus il y a d’espace pour les attaquants, et moins les défenseurs peuvent aider. C’est pour cette raison que des joueurs comme Michael Jordan, Scottie Pippen et Kobe Bryant ont brillé dans ce système. Malgré une apparence rigide, et l’absence de dribbles, c’est un système fait pour le jeu en-un-contre-un dans l’espace libre.
– Enfin, et ça ne dépend pas du système, mais des joueurs eux-mêmes, il y a l’intelligence du jeu. Le fameux « QI basket ». Le jeu en triangle exige des joueurs intelligents, capables de lire le mouvement de leurs coéquipiers, mais aussi de les anticiper. C’est pour cette raison que le jeu en triangle est difficile à mettre en place. Cela exige plusieurs semaines d’apprentissage, et de posséder des joueurs bons passeurs, et bons sans ballon. Aux Bulls, Phil Jackson aimait utiliser Scottie Pippen en tête de raquette pour ses qualités de passeur. Aux Lakers, Jackson utilisait de la même manière Lamar Odom ou Pau Gasol.
Existe-t-il un triangle par défaut ?
Même si on compte trois triangles (et même des dizaines selon les mouvements des joueurs), le triangle principal est formé par un joueur placé à l’aile (ici le poste 2), un joueur placé dans le coin (le poste 3), et un joueur au poste (le poste 4). Il est la plupart du temps complété par un joueur à l’extérieur de la ligne des 3-points (poste 1), à peu près en face du panier, et un joueur au coin de la raquette, ou dans l’aile opposée (poste 5). Ce triangle peut évidemment être reproduit de l’autre côté du terrain, et d’ailleurs, sur une même attaque, on peut se retrouve avec la symétrie parfaite du système de départ.
Comment débuter l’attaque ?
C’est le porteur de balle qui est le maître du système, et on l’a vu, il ne s’agit pas forcément du meneur de jeu… En l’occurrence, selon Phil Jackson, il existe 35 variantes… et c’est ce qui complique sa mise en place, mais aussi la tâche de la défense. En fait, il n’y a pas de système précis, et c’est donc un mouvement perpétuel. La clé, c’est que le possesseur du ballon puisse toujours avoir plusieurs solutions de passes, ou de tirs, et que le joueur qui lui a fait la passe, donne des solutions.
Pour vous permettre de mieux en comprendre les bases, voici une entrée de système souvent vue aux Lakers ou aux Bulls, avec le porteur de balle qui fait sa passe pour rejoindre le corner. Le plus souvent, il s’agissait de Steve Kerr, Ron Harper ou Derek Fisher.
Première info importante : l’action ne débute qu’après deux passes !
Deuxième info importante : le joueur 2 est un danger permanent, et c’est souvent un shooteur, qui se déplace dans le dos de la défense lors que le ballon est dans le corner ou ou poste bas.
La mise en place
Sur le visuel A, le joueur 1 passe à 3 et vient se placer dans le corner. 2 prend sa place. Sur le visuel B, on voit bien le triangle recréé avec plusieurs possibilités de passes pour 3.
On vous propose alors deux variantes à partir de ce schéma, en fonction de la passe de 3.
La passe dans le corner
Sur le visuel C, 3 passe à 1, 5 lui fait un écran, et on obtient alors un simple passe-et-va. L’écran dans le dos du défenseur est fatal. Si le défenseur 1 vient aider sur 3, c’est 1 qui se retrouve tout seul. Si le défenseur de 5 lâche son joueur, et défend sur 3, c’est 5 qui peut se retrouve libre à 3-points. Si enfin la passe est impossible, 3 part à l’opposé, et 1 peut jouer le un-contre-un après un écran de 5. D’un simple transfert de passes, on peut recréer le triangle à l’opposé.
La passe à l’intérieur
2- Sur le visuel E, 3 fait la passe à 5 qui se retrouve avec plusieurs possibilités : jouer le un-contre-un dos au panier, soit par le centre de la raquette, soit par la ligne de fond. Il se retrouve comme une tour de contrôle et peut alors distribuer le jeu. Après sa passe (visuel F), 3 porte un écran sur 1 qui coupe vers l’intérieur, tandis que 3 peut jouer ligne de fond. Cette situation se présente très souvent dans le jeu en triangle, et des joueurs comme Pau Gasol, Kobe Bryant, Michael Jordan ou même Dennis Rodman étaient de remarquables points d’ancrage. A l’opposé, 4 se rapproche de la raquette pour offrir une autre solution.
Comment défendre sur cette attaque ?
Cette attaque est redoutable sur une défense individuelle, et c’est justement pour cette raison que les Bulls et les Lakers ont pu dominer de la sorte en NBA. Avec l’arrivée de la zone, l’attaque en triangle a davantage souffert, et on en avait eu la preuve en 2011 avec la large victoire des Mavs face aux Lakers en playoffs. On se souvient aussi qu’avant l’arrivée de Pau Gasol, ces mêmes Lakers n’étaient pas parvenus à le mettre en place avec efficacité.
En 2011, les Mavs ne jouaient pas en permanence en zone, mais l’utilisation de Tyson Chandler comme libéro de la défense, gênait considérablement les Lakers de Phil Jackson. L’une des clés pour gêner cette attaque, c’est de ralentir son déroulement. Soit en mettant de la pression sur celui qui mène, soit en gênant les déplacements.
Autre lacune, même s’il existe une trentaine de variantes du jeu en triangle, cette attaque reste très prévisible, et les défenses intelligentes sont capables d’anticiper les déplacements ou la mise en place du triangle.
Est-ce que ça va fonctionner aux Knicks ?
Phil Jackson et Derek Fisher ont donc annoncé la couleur en décidant d’imposer le jeu en triangle à Carmelo Anthony et ses coéquipiers. Ils n’ont pas pu choisir leurs joueurs, mais Jose Calderon nous semble être un bon choix pour diriger le jeu et jouer le rôle de shooteur longue distance, tandis que Carmelo Anthony devrait briller dans le même rôle que Michael Jordan et Kobe Bryant. A leurs côtés, ce sera Amare Stoudemire qui aura le rôle le plus important. Il n’a pas le profil d’un Pau Gasol ou d’un Luc Longley, mais sa mobilité et son physique peuvent permettre d’en faire un point d’ancrage. Ce qui est certain, c’est qu’il s’agira d’une saison d’apprentissage, et il faudra sans doute attendre la saison prochaine pour que le jeu en triangle soit pleinement assimilé.
Des exemples en vidéo avec les Lakers 2011
[videopub https://www.youtube.com/watch?v=Hb59fJ4Rb_o]