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Le roman de l’hiver : « Dream Team » (10)

Depuis deux ans, Basket USA vous propose le roman de l’été (avec des extraits de l’autobiographie de Phil Jackson puis du « Michael Jordan, The Life » de Roland Lazenby), et pour vous accompagner au coin du feu, nous vous proposons désormais le roman de l’hiver. On attaque avec l’ouvrage de référence de Jack McCallum, grande plume de l’hebdomadaire US « Sports Illustrated », sur l’aventure de la « Dream Team » à Barcelone. Une formation de légende qui fêtait en 2017 ses 25 ans. Bonne lecture !

Première partie
Deuxième partie
Troisième partie
Quatrième partie
Cinquième partie
Sixième partie
Septième partie
Huitième partie
Neuvième partie

Le travail du comité était de peser les avantages des qualités de Charles Barkley (ils adoraient ses facultés de rebondeur) et de sa grande popularité (tous les joueurs de premier plan de la Ligue l’aimaient et le respectaient, tout particulièrement Michael Jordan, pour lequel il avait été de bon cœur caddy lors d’un tournoi de golf de charité à l’été 1990) face à la possibilité qu’il déclenche la Troisième Guerre mondiale. « La question à laquelle nous devions répondre était : “Barkley est-il trop cinglé ?” », m’expliqua Donnie Walsh, l’un des membres du comité.

Les deux voix les plus puissantes de la NBA au sein du comité étaient divisées concernant Barkley. S’il n’en avait tenu qu’à Russ Granik, le comité aurait probablement dit non à Charles. S’il n’en avait tenu qu’à Rod Thorn, il aurait dit oui à Charles. « Les gens qui viennent du basket sont toujours angoissés à l’idée de ne pas avoir suffisamment de bons joueurs et Thorn était un gars issu du basket », me dit David Stern. En revanche, les cadres tels que Granik sont toujours plus soucieux de ne pas s’encombrer de coquilles de noix. Et ils le doivent. Aucun de ces deux hommes ne serait allé au choc frontal pour défendre sa position et progressivement, le basketteur Barkley commença à gagner sur Barkley la coquille de noix. Et il n’avait pas encore mis K.-O. un type bourré d’un direct du gauche devant un bar de Milwaukee à 2h30 du matin.

Chapitre 14 – Le Comité et la « Dream Team » 

OK, les superstars, préparez-vous à être déifiées… Euh, Isiah ? Pas si vite

Il y a un passif dans cette histoire et même vingt ans plus tard, beaucoup de circonvolutions de la part de tous ceux qui ont été impliqués dans la décision finale concernant qui serait convié à jouer dans l’équipe olympique de 1992 et qui ne le serait pas. C’est l’un des sujets les plus embarrassants de l’histoire de la NBA. Mais venons-en aux faits avant de tout déballer. Isiah Thomas n’a pas été membre de la « Dream Team » principalement à cause de deux hommes : Michael Jordan et Chuck Daly. Si on veut mettre un point final à tout ça, il s’agissait plus véritablement d’un seul homme – Jordan.

Durant les mois du printemps et de l’été 1991, les affaires du comité de sélection olympique d’USA Basketball ont été plutôt menées comme s’il s’était agi de celles du Politburo. Des bribes d’informations filtraient de temps en temps mais elles étaient fausses la plupart du temps, comme quand le « Chicago Tribune » rapporta qu’Isiah Thomas s’était vu offrir une place. USA Basketball ressemblait un peu à une bande de collégiennes préparant une boum pour les 16 ans de l’une d’entre elles. Ils voulaient que les gars les plus cools y participent mais si les gars les plus cools ne voulaient pas venir, ils devaient s’assurer d’avoir les seconds gars les plus cools pour remplir leur quota. Parfois, les gars les plus cools étaient ceux qui se faisaient le plus désirer et tardaient à se prononcer, donc ils devaient laisser penser aux seconds gars les plus cools qu’ils avaient une chance d’y participer, sans toutefois leur faire entretenir de vains espoirs.

Par chance pour le comité, le gars cool Magic Johnson ne se fit pas prier. Après avoir reçu un premier coup de fil de Russ Granik, le premier coup de fil officiel donné par le comité, Johnson sauta des deux pieds dans l’aventure, devenant ainsi une sorte de pilier de la sélection. « Magic nous a vraiment aidés. Il a donné le ton en signifiant que faire partie de l’équipe olympique était la chose à faire », me dit Dave Gavitt.

Jordan ne veut pas d’Isiah

En tant que general manager des Bulls, Rod Thorn avait drafté Jordan en 1984. Il se vit assigner la tâche la plus importante : mettre cette prise de choix dans la barque. Thorn appela Jordan directement pendant l’été, après que les Bulls eurent remporté leur premier titre de champion (en fait, toutes les invitations furent expédiées directement aux athlètes sans passer par leurs agents ; Granik, qui avait livré de nombreuses et âpres batailles en tant que cadre de la Ligue à l’époque, avait insisté là-dessus). Donc, soyons clairs dès maintenant sur ce qu’a dit Jordan lors de ce premier appel téléphonique. « Rod, je ne veux pas jouer si Isiah Thomas est dans l’équipe », dit Michael.

J’ai écrit ça dans « Sports Illustrated » à l’époque, pas parce que Jordan l’a confirmé, ce qu’il n’a pas fait, mais parce qu’au moins deux sources fiables l’ont fait. A l’époque, Jordan a plus ou moins démenti avoir fait obstacle à Isiah. Mais il me l’a confirmé à l’été 2011. « J’ai dit à Rod que je ne voulais pas jouer avec Isiah Thomas dans cette équipe. » C’est ce qu’il a dit.

Thorn savait ce qu’il avait à dire. Je ne sais pas de quelle manière il a rendu explicite son propos – et Thorn ne le dira pas – mais il a clairement fait comprendre que personne ne jouerait dans cette équipe sans l’aval de Jordan. Personne dans le comité n’a eu besoin de faire redescendre l’information à Daly car Daly le savait également, tel que Jordan le lui avait dit dans un entretien téléphonique antérieur : « Je ne jouerai pas si Isiah Thomas est dans cette équipe. » Et Chuck a fait savoir qu’il ne se battrait pas pour Isiah.

Jordan avait-il tort ? Eh bien, vous pouvez dire qu’il était un enfant gâté et que c’était « l’équipe de l’Amérique » et tout le tralala. Mais il hésitait à renoncer à ses vacances d’été de toute façon et il ne voulait certainement pas y participer si cela impliquait de faire ami-ami avec un gars qu’il détestait. « Michael se préoccupait seulement de qui allait être dans l’équipe, me confia Magic des années plus tard. C’était plus important… Non, disons que c’était aussi important, pour lui, de prendre du bon temps que de jouer des matches. » Non, Magic, reste sur ta première idée – c’était plus important.

Chuck Daly a-t-il failli ?

Une question plus intéressante est de savoir si Daly avait tort. Un certain nombre de personnes le pensent, sans toutefois accepter de le reconnaître publiquement. L’exception était Clyde Drexler (voir l’interlude suivant le chapitre 18). Mais à ceux qui disent que Daly a politisé l’affaire en laissant un homme dicter ce que le comité devait décider et à ceux qui voudraient blâmer le comité pour s’être plié aux diktats d’un seul joueur, demandez-vous ce que vous auriez fait. Auriez-vous sélectionné Isiah Thomas plutôt que Michael Jordan à l’été 1992 ? Ou n’importe quel autre été ?

Même s’il avait l’assurance qu’Isiah Thomas ne serait pas dans l’équipe, Michael Jordan continuait de se faire désirer. Magic Johnson joua le rôle d’ambassadeur, appelant Jordan de temps en temps. Aussi tardivement que le 19 août, jour où ils ont partagé le podium du All-Star Game d’été annuel de Magic à L.A., pour soutenir le United Negro College Fund, Jordan a joué au chat et à la souris. Mais je maintiens que Jordan savait depuis le début qu’il allait jouer une fois qu’il a été clair qu’Isiah ne serait pas invité et que Daly lui laisserait suffisamment de temps pour s’amuser au golf. Depuis le début, Jordan se tenait prêt ; il n’était pas encore fin prêt, un peu à la manière dont William Goldberg a pu décrire, dans « Adventures in the Screen Trade », la façon très particulière, c’est-à-dire avec une grande légèreté, dont les contrats se signaient à l’époque à Hollywood.

Larry Bird était une autre question. Cette tâche, moins cruciale que celle qui consistait à amener Jordan dans l’équipe mais symboliquement significative, est tout d’abord revenue à Gavitt. Il était à l’époque dans sa première année à la tête des Boston Celtics. Le comité n’avait pas « besoin » d’un Bird de 34 ans de la même manière qu’il avait besoin d’un Jordan de 28 ans, qui était dans les meilleures années de sa carrière. Mais les membres « voulaient » désespérément Bird, ce qui revenait presque au même.

On ne pourrait surestimer à quel degré Jordan, Magic et Bird constituaient un sous-ensemble dans l’univers des grands joueurs. Magic et Bird s’étaient mesurés l’un à l’autre depuis plus d’une décennie à l’époque et Jordan les avait rejoints ; tous les trois formaient le trépied doré sur lequel reposait la force de la NBA. Personne d’autre ne pouvait intégrer ce club exclusif. Certains joueurs, comme Charles Barkley, comprenaient cela et se forgeaient une position confortable en marge de ce trépied, tout en étant des amis proches de ses trois membres. D’autres, comme Karl Malone, ont pu éprouver du ressentiment envers la prééminence de Michael, Magic et Bird mais ils restaient à l’écart, fulminant à l’intérieur tout en paraissant ne pas être concernés.

Isiah-Magic, la fin d’une amitié 

Isiah, c’était différent. C’était une grande frustration pour lui de ne pas pouvoir s’immiscer dans cette société très sélect, d’être arrivé si haut et de rester là à regarder, de l’extérieur. S’il avait fait la même taille que Magic, que Larry ou même que Michael, là, oui, peut-être aurions-nous parlé d’un « Big Four » (Isiah émettrait cette idée des années plus tard, de sa manière typiquement maladroite). Mais du haut de son 1,85 m, il ne pouvait tout simplement pas dominer comme les autres et il était rongé par le sentiment d’être perpétuellement sous-estimé. Ce qui le peina davantage fut que Magic, son vieux pote, devenait de plus en plus proche de Jordan, son ennemi. La plupart d’entre nous ont été familiers et peut-être même sujets de ce genre de dynamique… au collège.

Gavitt pensait qu’il avait une chance avec Bird. Leur relation était au beau fixe au retour de Bird pour la saison 1990-91, Larry constatant que Gavitt, désormais président des Celtics, avait fait moderniser la vieille salle d’entraînement d’Hellenic College. « Hey, on se donne de nouveau les moyens de gagner, hein ? », lui dit Bird. Gavitt aborda pour la première fois le sujet de Barcelone au domicile de Bird à Needham, au Massachusetts. « Larry, on veut que tu sois dans l’équipe olympique, lui dit-il.

– Je représente le passé, lui dit Bird. Place aux jeunes, maintenant. » Gavitt n’insista pas. Il y avait encore du temps. Bird ne voulait surtout pas être un figurant purement symbolique et ses maux de dos le forçaient à conclure que c’était exactement ce qu’il serait. J’étais souvent en sa présence à cette époque-là ; j’écrivais un livre sur la saison des Celtics. « Comment va Larry ? Larry va-t-il annoncer sa retraite ? Est-ce que Larry va recevoir un nouveau traitement ? Est-ce que Larry va donner des interviews aujourd’hui ? »

Gavitt, usant au maximum de son influence politique, décida que toute la communication concernant Bird viendrait de lui. Aujourd’hui encore, quand je vois le préparateur physique des Celtics Ed Lacerte (qui a également été le préparateur physique de la « Dream Team »), je lui demande : « Des news de Larry ? » Et Lacerte, le plus délicat des hommes et le plus compétent des préparateurs physiques, me répond : « Dave produira un communiqué très prochainement. »

Bird peut à peine marcher

En réalité, Bird avait mis au second plan sa participation aux Jeux. Son inquiétude principale était la possibilité que sa carrière soit terminée. Au milieu de la saison 1990-91, alors que je commençais à travailler sur ce qui devint l’article « Dream Team » dans « Sports Illustrated », Magic fit savoir qu’il n’apparaîtrait pas en couverture sans Bird. « Mais Larry a dit qu’il ne jouerait pas, lui ai-je dit.

– Je vais vérifier par moi-même », m’a-t-il répondu.

Quelques douzaines de coups de fil ont été échangés avant que Magic ne finisse par accepter que Bird ne viendrait pas à Barcelone. En se penchant rétrospectivement sur la carrière prestigieuse de Bird, il y a pire que d’étudier la saison 1990-91 pour saisir la grandeur de l’homme. Il y avait des matins où il pouvait à peine marcher. Je l’ai vu de mes propres yeux. Cela n’en fait pas un messie, ni un saint, ni un héros de guerre mais cela rend les stats de sa saison à 60 matches, dont la plupart joués dans la douleur, absolument remarquables. Il tourna à 19.4 points, 8.5 rebonds et 7.2 passes et signa un ou deux matches épiques. L’un d’entre eux eut lieu contre les Bulls de Jordan le dernier jour de mars ; il marqua 34 points et les Celtics gagnèrent 135-132. « Ce gars a encore du jus », dit Jordan après le match en hochant la tête.

En dehors du trépied doré, les membres du comité avaient quelques choix aisés. David Robinson et Patrick Ewing étaient des évidences, compte tenu de la pénurie de pivots de qualité. Karl Malone était retenu. Scottie Pippen s’était illustré en 1991 dans la quête du titre par les Bulls et il était devenu un titulaire naturel. Certains membres du comité ne considéraient pas Chris Mullin autant que Daly mais l’intelligence de Mullin et sa capacité à jouer arrière shooteur et petit ailier ont infléchi la tendance en sa faveur. Il a donc été retenu.

Il y a eu un grand débat autour de Charles Barkley, qui avait été poursuivi pour coups et blessures suite à l’incident de Milwaukee après un match contre les Bucks. Barkley s’est défendu en prétendant qu’un groupe d’hommes l’avait suivi au détour d’un immeuble, s’était moqué de lui et que l’un d’entre eux, un jeune homme de 25 ans appelé James R. McCarthy, s’était approché de lui poing serré. Charles l’avait frappé. « OK, on peut passer là-dessus », ont tranché les membres du comité.

Barkley collectionne les casseroles

Puis il y a eu la présence de Charles à un vilain incident dans le hall d’un hôtel de Chicago. Son coéquipier Jayson Williams avait fracassé une chope de bière sur la tête d’un homme de Chicago qui, d’après les joueurs, s’était avancé vers eux de manière menaçante. Barkley n’a pas été poursuivi – Williams ne l’a pas été non plus – et cet incident est revenu sur le devant de la scène des années plus tard, quand il s’est avéré que Williams avait une face très sombre (Williams plaida coupable en 2010 pour homicide par imprudence concernant la mort du chauffeur de sa limousine lors d’un très moche incident qui eut lieu en 2002 et qui traîna en longueur pendant des années).

« Eh bien, on va également passer là-dessus », ont résolu certains membres du comité. Finalement, les supporters du « grand joueur » l’ont emporté sur les défenseurs de « la charte du bon citoyen » et Barkley a été retenu. Je dois dire ici que j’ai été de tout cœur en accord avec cette décision ; à plusieurs égards, Barkley s’est révélé comme le plus important « Dream Teamer ».

Cependant, demeurait la question Isiah. Personne ne voulait poser franchement les choses et dire que Jordan ne voulait pas de lui. A un moment donné, C.M. Newton s’est levé et a dit : « Attendez une minute. Nous avons une équipe qui a gagné deux titres d’affilée, un coach qui a dirigé cette équipe et nous ne sélectionnons pas le meilleur joueur de cette équipe ? » Un autre membre du comité a dit : « Chuck a gagné deux titres. Je ne me souviens pas qu’il les ait gagnés tout seul. » La question Isiah était toujours là, sous-jacente, comme un débris gênant dérivant juste en dessous de la surface.

Isiah n’a jamais appelé Magic directement mais il a fait du lobbying auprès de Magic par l’intermédiaire de Matt Dobek, le chargé de communication des Pistons. Cependant, Magic ne s’est jamais exprimé en sa faveur, en partie, d’après ce que Magic dit aujourd’hui, parce qu’Isiah avait questionné sa sexualité après qu’il eut révélé qu’il était séropositif au VIH. Magic s’en est expliqué dans « When the Game Was Ours », le best-seller de Jackie MacMullan sur Magic et Bird.

 

L’offense faite à Magic

« Il m’a questionné quand j’ai été diagnostiqué séropositif, écrit MacMullan, citant Magic. Comment un soi-disant ami peut-il questionner votre sexualité comme ça ? Je sais pourquoi il l’a fait. C’est parce que nous avions l’habitude de nous embrasser avant les matches et si les gens se mettaient à se poser des questions sur moi, ça voulait dire qu’ils se mettraient à se poser des questions sur lui aussi. » (Magic m’a confirmé tout cela en 2011. Non pas qu’il ait eu besoin de le faire – contrairement à Barkley, Magic n’est pas le genre de gars dont les propos pourraient être mal retranscris dans son propre livre.)

Il y avait aussi quelque chose d’autre, un faux pas supplémentaire d’Isiah que les membres du comité pouvaient utiliser pour justifier son exclusion. Alors que les dernières secondes du match de la quatrième défaite, éliminatoire, contre Chicago s’égrenaient, quelques membres des Pistons se levèrent de leur banc et quittèrent la salle en passant devant le banc des Bulls qu’ils ignorèrent sciemment, sans même daigner les féliciter. Aujourd’hui encore, des gens pensent que c’est arrivé sous l’impulsion d’Isiah. Cela n’a pas été le cas.

« C’était mon idée et je ne la regrette pas un seul instant, m’a confié Bill Laimbeer. Les Chicago Bulls étaient les pires pleurnichards au monde. Ils ont dit des choses sur nous qui allaient bien au-delà du terrain, ils ont dit que nous étions de sales types et de mauvaises personnes. C’était tout simplement que nous jouions un basket qu’ils n’aimaient pas. »

Laimbeer m’a aussi raconté que Daly s’était opposé à ce qu’ils le fassent. « Il nous a dit : “Comportez-vous avec noblesse” », s’est souvenu Laimbeer. Mais ils se sont comportés avec bassesse. Bien que ce ne fût pas l’idée d’Isiah, il était le suivant derrière Laimbeer. Il aurait pu l’arrêter et lui dire : « Billy, ne le faisons pas. » Il était le capitaine, le leader, le meilleur joueur. Mais Isiah ne l’en a pas empêché et c’est devenu pour tout le monde une affaire orchestrée par Isiah. Peut-être que cela a compté dans la décision finale du comité. Peut-être que cela a simplement apporté une justification supplémentaire pour ignorer un paria qui aurait été ignoré de toute façon. Mais en fin de compte, le téléphone d’Isiah n’allait pas sonner.

Jordan veut pouvoir jouer au golf

Finalement, Jordan et Bird ont dit oui. Le premier a fini par être convaincu que Daly, lui-même de l’espèce Golfus degeneratus, lui accorderait suffisamment de temps libre pour assouvir sa passion et le second a fini par être convaincu que sa présence serait plus que symbolique. A ce moment-là, Bird savait qu’il allait prendre sa retraite – quasiment personne d’autre ne le savait – et il savait qu’il avait besoin de peaufiner son image en tant que l’un des plus grands joueurs de l’histoire et l’un des plus importants. Mais peut-être qu’enfin, il réalisait le sens de tout ça. Peut-être que l’idée de jouer aux Jeux olympiques, qu’il avait vus de French Lick « sur un vieux modèle de télévision à antenne en oreilles de lapin », comme il l’a dit plus tard, avait pénétré son âme. Peut-être qu’il voyait les Jeux comme un couronnement logique. Peut-être qu’il en avait marre de répondre aux appels de Magic. Peut-être avait-ce été tout cela à la fois.

Le 21 septembre, Bob Costas présenta le « Dream Team : USA Basketball Selection Show » sur NBC. Le comité d’USA Basketball avait décidé de sélectionner dix joueurs de NBA et de laisser les deux places restantes de l’effectif vacantes, actant ainsi de facto la tenue de tests de sélection au cours de la saison 1991-92. Dans l’ordre, voici comment les joueurs ont été annoncés : Magic Johnson, Charles Barkley, Karl Malone, John Stockton, Patrick Ewing, David Robinson, Larry Bird, Chris Mullin, Scottie Pippen et – au bout du suspense – Michael Jordan.

Pourtant, à ce moment-là, Jan Hubbard avait déjà livré ces dix noms dans « Newsday » et le show, la première production jamais réalisée dans les locaux de NBA Entertainment à Secaucus, au New Jersey, était une sorte de pétard mouillé. Il était censé être une révélation autant qu’une célébration mais assurément, le seul véritable gros titre était : pourquoi Isiah n’est-il pas dans l’équipe ? Alors que diverses rumeurs concernant les Pistons circulaient, Barkley fut direct dans son appréciation : « Les Pistons ! Je déteste ces connards. » Pourtant, quelques instants plus tard, il disait sans aucune ironie apparente combien il était impatient de jouer pour Daly, illustrant là encore la maîtrise d’équilibriste de Daly.

Peu après le show, Magic délivra un communiqué, par l’intermédiaire du département Relations publiques des Lakers, qui exprimait sa déception qu’Isiah ne soit pas dans l’équipe. « J’espère sincèrement que le comité de sélection attribuera l’une des deux places restantes à Isiah. Je dis ceci non pas parce qu’Isiah est mon ami mais parce que je crois qu’il aidera l’équipe à gagner la médaille d’or », disait ce communiqué.

Dennis Rodman se plaint plus qu’Isiah

Jack McCloskey, le general manager des Pistons, démissionna du comité pour protester contre l’exclusion d’Isiah, après quoi Hubbard exposa le fait que McCloskey ne s’était jamais exprimé clairement en faveur d’Isiah lorsqu’il aurait pu le faire. Thomas n’a pas protesté avec véhémence contre son exclusion. En fait, Dennis Rodman, dont certains ont dit qu’il avait reçu une plus grande considération qu’Isiah – « Si jamais le nom de Rodman était venu sur le tapis – et je ne me souviens pas que ça ait été le cas – une douzaine de voix auraient aussitôt dit : “Nooooon !” », m’a affirmé Rod Thorn – s’est beaucoup plus plaint. Mais Thomas était effondré. Quand il a vu Matt Dobek à un mariage cet été-là, il lui a dit : « Ton commis Chuck m’a jeté. » Même Daly, toujours gêné par ce sujet, a concédé : « Puis-je garantir que cela ne les affectera pas pendant la saison ? Je ne pense pas. Je sais qu’Isiah est blessé. Cela ne pourra pas s’en aller. »

Des années plus tard, on découvrait pourtant que c’était loin d’être un choc, que le soutien de Magic à Thomas était bidon lui aussi et constituait une preuve supplémentaire du fait qu’on devrait traiter les « communiqués officiels » d’une équipe comme les fruits d’un arbre empoisonné. Dans le livre de MacMullan, Magic avance : « Isiah a tué ses propres chances de faire les Jeux. Personne dans cette équipe ne voulait jouer avec lui… Michael ne voulait pas jouer avec lui. Scottie [Pippen] ne voulait pas de lui. Bird n’a rien fait pour le défendre. Karl Malone n’en voulait pas. Qui disait : “On a besoin de ce gars” ? Personne. »

Beaucoup supposaient que Thomas serait le onzième joueur sélectionné neuf mois plus tard. Mais ceux qui étaient dans la confidence ont réalisé à ce moment-là que c’en était fini pour Isiah, qu’il avait non seulement perdu contre ses ennemis mais qu’il avait aussi perdu ceux qui étaient censés être ses amis.

Chapitre 15 – L’Elu 

Michael semble tout avoir… mais il y a un inconvénient à « tout »

C’était un vendredi après-midi de la fin septembre, peu après l’annonce des dix premiers noms constituant la « Dream Team », et je me trouvais dans les coulisses de l’émission « Saturday Night Live » avec Michael Jordan. Ça a l’air cool, et ça l’était, mais vous devez également savoir que Jordan en avait probablement un peu marre de moi et pour dire vrai, j’en avais un peu marre de lui aussi. J’avais passé les deux derniers mois de la saison NBA à chroniquer la première course au titre victorieuse de Jordan, qui lui a pris, s’il est utile de le répéter, sept longues années. Jordan était apparu trois semaines d’affilée en couverture de « Sports Illustrated », ce qui reste un précédent (comme le nombre de fois où il a été en couverture – 56 au moment où j’écris ces lignes, soit 18 de plus que son poursuivant immédiat, Mohamed Ali). J’avais épluché chaque parcelle d’information, j’avais observé et scruté sous tous les angles chaque élément concernant Jordan et la saison des Bulls.

Chicago avait gagné le titre en cinq matches, venant à bout des Lakers à Los Angeles un mardi soir, ce qui me laissait jusqu’au dimanche pour rédiger mon article. J’étais censé rencontrer Jordan le jeudi mais il me fit faux bond ; même chose le vendredi. Pour être honnête, je ne l’en ai pas vraiment blâmé et j’imagine qu’il célébrait le titre de son côté. Il s’est finalement pointé le samedi matin, avec environ une heure de retard, pour un petit-déjeuner dans l’un de ses petits repaires privilégiés, dans la banlieue de Chicago. « Problème de sonnerie de réveil, m’annonça Jordan en se glissant sur la banquette. Tu sais quoi ? J’ai raté l’heure de départ au golf pour la première fois. Et c’était le début de la saison officielle. »

Nous avons parlé un moment et je lisais du soulagement sur son visage. Il avait rejoint officiellement la liste des gagnants dont faisaient partie Magic, Bird et son rival honni, Isiah. « Personnellement, j’ai toujours pensé qu’en termes d’intensité et d’altruisme, je jouais comme ce genre de joueurs, me dit Jordan en tournant ses gaufres dans son assiette (il voulait dire : des joueurs ayant remporté des titres). Certaines personnes ont vu cela et d’autres non. Et le titre, dans l’esprit de beaucoup de gens, est un signe de… eh bien, de grandeur. Je crois qu’ils peuvent penser ça de moi maintenant. »

Un vendredi après-midi de septembre 1991, dans les coulisses du « Saturday Night Live », personne d’autre que Michael Jordan n’aurait pu dominer le monde de la façon dont il le faisait. Il était plus une incarnation qu’un athlète, au centre de son univers et de beaucoup d’autres, des clowns à sa gauche et des bouffons à sa droite. Quelques mois plus tôt, il avait vaincu les détestés Pistons en finale de Conférence Est puis il avait terrassé Magic, alors même qu’il le rejoignait au mont Olympe de la NBA.

Rapprochement Jordan-Magic

La série pour le titre a tourné en partie à la parade amoureuse entre Magic et Michael, principalement à l’initiative de Magic. « J’ai dit à Michael : “On ne peut pas se quitter comme ça. Je te respecte trop et je suis sûr que tu me respectes” », me raconta Magic. Jordan était loin d’être aussi sentimental que Magic – c’est difficile d’être plus sentimental que Magic – mais il a dit : « Avant, on ne se connaissait pas en tant que personnes. Puis nous devons apprendre à nous connaître et c’est à ce moment-là que l’amitié commence. »

Après les Finales, Jordan disparut pour rejoindre les plus fameux fairways, bunkers et club-houses du monde entier, comme il l’avait fait les mois de juillet et août précédents. Il réapparut toutefois en septembre, tenant sa vengeance. Une semaine avant son apparition à « Saturday Night Live », il se faisait cuisiner dans une émission spéciale de NBC appelée « A Comedy Salute to Michael Jordan », au bénéfice de Comic Relief et de la fondation à but non lucratif de Mike. Cette émission ne valait pas tripette – ni celle de « Saturday Night Live » qu’il a faite – mais elle démontrait qu’il était devenu le chouchou de l’Amérique et son héros national auquel tout le monde pouvait se rallier.

Puis la « Dream Team » a été annoncée. Cela a été suivi par la prestigieuse soirée de gala annuelle à Chicago pour le United Negro College Fund. Le lendemain, une portion de 12 km de l’autoroute I-40 près de Wilmington, la ville de son enfance, était baptisée à son nom. C’est à peu près à cette époque que Marketing Evaluations Inc. a publié son classement Q-ratings (niveaux de reconnaissance d’une marque ou d’une personnalité par le public) et Jordan était le numéro 1 aux Etats-Unis mais également au Canada, ce qui voulait dire qu’il était plus populaire au nord de la frontière américaine que le hockeyeur immortel Wayne Gretzky. Pour résumer, il était devenu champion de NBA, membre de l’équipe olympique, personnalité caritative, une portion d’autoroute et une icône culturelle. C’est du bon boulot dans une vie, et tout ça en l’espace de trois mois.

A suivre…

– Jack McCallum, « Dream Team », éditions Talent Sport, sorti le 8 juin 2016, 396 pages, 22 euros et 13,99 en format numérique (Kindle)

A lire aussi, chez le même éditeur

– Phil Jackson, « Un coach, onze titres NBA », sorti le 14 mai 2014, 352 pages, 22 euros et 13,99 en format numérique (Kindle)

– Roland Lazenby, « Michael Jordan, The Life », sorti le 17 juin 2015, 726 pages, 24 euros et 13,99 en format numérique (Kindle)

– Kent Babb, « Allen Iverson, not a game », sorti le 9 novembre 2016, 322 pages, 22 euros et 13,99 en format numérique (Kindle)

– Jackie MacMullan, « Magic-Bird, quand le jeu était à nous », sorti le 31 mai 2017, 352 pages, 22 euros et 13,99 en format numérique (Kindle)

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