Nikola Vucevic répond aux questions des lecteurs de Basket USA

Né en Suisse et élevé en Belgique, où jouait son père Borislav, ancien international yougoslave, Nikola Vucevic est le plus francophile des Européens de la NBA. Fasciné par l’histoire de l’Hexagone et amoureux de la langue de Molière, le pivot du Magic est naturellement flatté quand Busa le sollicite pour répondre à vos questions.

« Ah ben c’est super ça, génial, ça me fait vraiment plaisir », rétorque-t-il spontanément et avec candeur quand nous lui apprenons qu’il est très apprécié par vous, chers lecteurs.

Pendant plus de vingt minutes, Niko le timide affable (14, 9 pts et 10,9 rbds) s’est confié sans rejeter aucune de vos interrogations, dans un français aussi parfait que ses prises de position au rebond !

Jeunesse Magicienne : Comment se passe ta vie quotidienne sous le soleil de Floride? Comment se passe la vie dans le groupe du Magic, essentiellement composé de jeunes ?

La vie en Floride est très agréable. Il fait souvent beau donc je suis en short et en tee-shirt la plupart du temps, c’est sympa. Orlando est une chouette ville, pas trop immense et sans beaucoup de trafic sur les routes. C’est très étendu donc la densité de population est plus faible, ça me convient très bien car je n’aime pas beaucoup quand il y a trop de monde partout. Après la vie au sein du groupe se passe super bien car j’ai la chance d’être dans une équipe jeune avec des joueurs de mon âge. J’ai une vraie vie sociale avec mes coéquipiers en dehors des parquets, c’est une chance. On va souvent dîner ensemble et boire des verres. On va aussi jouer à des jeux vidéo les uns chez les autres. Quand tu te retrouves dans une équipe plus âgée, beaucoup de tes coéquipiers ont une vie de famille et ne sortent pas. Là au contraire, j’ai des jeunes avec qui je peux faire plein de choses. Du coup, sur le parquet on s’entend aussi très bien et c’est tout bénéfice pour l’équipe.

Coda7 : Avec un père ancien joueur international et un oncle entraîneur, pouvais-tu faire autre chose que du basket dès ton plus jeune âge ?

Non je ne pense pas, car j’ai vraiment grandi dans une famille de basket. Ma mère aussi était joueuse, ce sport est dans mon sang. J’y suis venu automatiquement. Mais en même temps mes parents ne m’ont jamais forcé et comme beaucoup de gamins en Europe j’adore le foot. Je m’y suis essayé mais j’étais trop grand pour être très bon, j’étais même plutôt mauvais. J’ai vite compris que je n’y avais pas beaucoup d’avenir. Quand il a fallu faire un choix, ce fut vite décidé, d’autant plus que j’ai vraiment toujours adoré le basket. Depuis le début ma première motivation est de surpasser mon père, de faire encore mieux que lui.

Jeronimo7 : De plus en plus de jeunes joueurs américains viennent en Europe faire leurs classes avant de rejoindre la NBA. Toi, tu as fait le chemin inverse : tu as choisi de quitter l’Europe pour la NCAA. Pour quelles raisons as-tu fait ce choix ?

La plupart des joueurs NBA viennent des universités américaines donc je me suis dit que pour avoir les meilleures chances d’y aller, il fallait que j’aille en NCAA. Et puis, c’était l’occasion de progresser, de recevoir une bonne éducation intellectuelle et de jouer devant des dizaines de milliers de personnes. En Europe quand tu as 18 ans dans une équipe professionnelle, tu ne joues pas beaucoup. Les coaches préfèrent donner du temps de jeu aux gars expérimentés qui vont leur faire gagner des matches, donc pour mon développement de basketteur la NCAA représentait la meilleure opportunité. On y travaille bien avec les jeunes, tu peux vraiment y devenir un meilleur joueur. Et puis les infrastructures et le public sont des atouts qui entrent en compte aussi au moment du choix. Entre 18 et 22 ans, c’est vraiment ce qui convient le mieux à un jeune. Je trouve que c’est un super système.

Busa : Et pourquoi USC ?

Parce que c’était la meilleure équipe qui m’a recruté après mon année de lycée. Je n’ai passé qu’un an au lycée donc je n’ai pas pu me faire voir par beaucoup d’équipes, je n’ai pas eu beaucoup d’offres. J’étais déjà en Californie, c’est Los Angeles, un beau campus, il y avait une bonne équipe et j’ai aimé le discours de Tim Floyd, le coach qui m’a recruté (ndlr : ex-coach des Bulls et des Hornets). USC c’est aussi une des meilleures universités académiques du pays, c’est quasi impossible de refuser une bourse chez eux. J’ai pu y étudier le français et l’histoire française, qui m’a toujours beaucoup plu. Je voulais vraiment continuer de bien parler la langue, je sais que ça se perd vite et ça, je voulais éviter. Je n’ai pas beaucoup joué ma première année car il y avait Taj Gibson, mais j’ai vite vu que j’aurai ensuite ma chance.

wizdz : De quel intérieur t’inspires-tu le plus ?

Il y en a beaucoup mais en ce moment j’aime bien regarder Marc Gasol. Je peux apprendre beaucoup de lui, c’est un pivot super complet qui sait tout faire. Je trouve que je joue un peu comme lui. Je suis admiratif de tout ce qu’il fait pour son équipe et qui ne se voit pas forcément dans les stats. Il n’y a que les coaches et ses coéquipiers qui peuvent vraiment voir tout ce qu’il apporte. Il ne fait peut-être pas des choses incroyables qui vont le faire passer à la TV mais il fait super bien son boulot. Et je pense aussi que c’est un très bon coéquipier. J’aime bien aussi son frère, Pau, Tim Duncan évidemment et LaMarcus Aldridge, dont les gens ne parlent pas beaucoup mais qui est très fort.

Retired_B_Roy7_971  : Quel est le pivot contre lequel tu as déjà joué qui est selon toi le plus sous-estimé ?

Comme je viens de l’expliquer, Marc Gasol et LaMarcus Aldridge, même si lui c’est plus un 4 qu’un 5. Quand Gasol a été élu meilleur défenseur de la ligue, beaucoup de monde s’est demandé pourquoi et n’a pas compris. Mais pour moi c’est amplement mérité.

Retired_B_Roy7_971  : Sur quel aspect de ton jeu as-tu le plus progressé depuis que tu es en NBA et sur lequel dois-tu le plus bosser pour t’améliorer davantage?

J’ai progressé sur mes appuis et ma défense et je dois vraiment m’améliorer dos au panier, au poste.

kobe69 : Votre équipe est jeune et très prometteuses, cette saison vous avez alterné le très bon (victoire contre les Clippers 98/90) et le moins bon (défaite 120/105 contre Boston ou plusieurs défaites à plus de 100 points). Comment expliquer cette irrégularité ?

Nous sommes une jeune équipe, on doit encore apprendre à gérer les back-to-back, mais aussi les soirs où l’on est moins bien. C’est difficile en NBA de garder le même niveau à chaque match, il y en a tellement. Un soir tu es bien, l’autre tu rates les shoots. Et puis je pense que contre une grosse équipe comme les Clippers, inconsciemment on est beaucoup plus dans notre sujet, tous les joueurs sont à fond et on sort un gros match. Le problème c’est que quand après on joue Boston, qui est moins fort, logiquement on se relâche, on se dit que ça va être plus facile alors que pas du tout. Mentalement nous n’étions pas très frais non plus. Plus on va acquérir de l’expérience, plus cette inconstance se réduira. On n’est pas encore habitué à être prêt tous les jours, quel que soit l’adversaire.

Glen rice : Quel est l’intérieur qui te pose le plus de problème en défense?

Dwight Howard parce qu’il est physiquement très fort et très puissant. C’est d’autant plus difficile cette saison que Houston a beaucoup de shooteurs, il faut donc venir aider sur les extérieurs mais redescendre sur lui aussitôt, et ça c’est compliqué.

Busa : Dans l’impact physique, Howard c’est vraiment ce qui se fait de mieux en NBA ?

C’est un des plus forts oui ! Y’a aussi mon pote du Monténégro Pekovic, qui pour moi est le plus puissant : quand il a ses pieds dans la raquette, personne ne peut le bouger !

McMurphy : Penses-tu que T-Mac mérite d’entrer au Hall Of Fame ?

Je pense que oui, même s’il n’a jamais brillé en playoffs avec ses équipes. Beaucoup de monde dit qu’il lui manque un titre, une finale NBA, qu’il n’était surtout qu’un grand scoreur qui mangeait un peu l’équipe. Mais franchement, c’était un très, très fort joueur donc il le mérite.

Flash2.0 : L’équipe du Magic ressemble à celle du Thunder de 2009. Dans quels domaines ton club doit s’améliorer pour être un candidat au titre d’ici trois, quatre ans ?

Dans tous les domaines ! On a surtout besoin de garder la même base de joueurs et de gagner en expérience, en vécu collectif. Avec le temps et les matches chaque joueur progressera individuellement et au sein du collectif, logiquement ça rendra l’équipe beaucoup plus forte. Nous avons aujourd’hui les joueurs qu’il faut pour être très compétitifs, c’est juste une question de temps et d’expérience. Les gars plus expérimentés qui sont déjà là vont aussi beaucoup nous aider.

the_wolve : Quel est ton secret pour être aussi performant au rebond ?

Y’a plusieurs facteurs, à commencer par ma taille et la longueur de mes bras. J’ai aussi un bon feeling, je lis bien où la balle va rebondir si le shoot est raté, en fonction de l’endroit du terrain où il a été déclenché. Mais bon, le rebond c’est d’abord de l’envie, ce n’est qu’une question d’efforts. Si tu es grand, ce n’est pas franchement compliqué de prendre un rebond.

Dr.J : Comment expliques-tu que malgré tes performances très honorables en NBA, tu n’as joué que 15 minutes par match lors de l’Euro avec ton équipe nationale ?

Je n’ai pas la réponse mais j’aimerais bien l’avoir car je me demande encore tous les jours pourquoi je n’ai pas joué plus ! Le coach pensait que je ne pouvais pas jouer plus de 15 minutes alors que je lui avais dit que j’étais prêt, que j’étais en pleine forme. C’est sa décision, je ne peux rien faire à part la respecter car c’est lui le coach. Lui dit que même si Pekovic avait été là, aucun des deux n’aurait joué plus de 20 minutes en même temps… Il pense sûrement qu’au haut niveau un joueur ne peut pas jouer plus de 20 minutes. C’est bizarre, mais c’est comme ça. C’est du passé, je veux penser à autre chose.

Busa : Cela t’a gâché ton Euro ?

Oui un peu, j’étais quand même dégoûté. J’étais super enthousiaste à l’idée de disputer la compétition, j’étais bien préparé et super prêt pour montrer ce que je pouvais faire. Au final, je n’ai pas eu ma chance et je n’ai pas pu aider l’équipe autant que je l’aurais pu.

Rama_Spurs : Tu préfères le jeu « à l’américaine » ou « à l’européenne » ?

A l’américaine car les joueurs y disposent de plus de liberté. C’est plus facile de t’exprimer et de montrer ton talent, les coachs contrôlent beaucoup moins qu’en Europe. Il y a moins de tactique et plus de points. Quand tu regardes les scores en Euroligue, ça te montre que c’est plus difficile pour un joueur de marquer. Il y aussi des systèmes en NBA mais ils sont plus souples et le joueur est plus responsabilisé. En Europe, chaque système doit être super bien appliqué pour fonctionner. Dans un système ici, le joueur peut beaucoup plus créer.