La saga Lakers-Celtics version moderne est née en 1984. Andrew Bernstein est reporter photographe NBA. Ses clichés ont fait le tour du monde. Ils ont notamment illustré sept couvertures de « Sports Illustrated », le magazine de référence du sport américain. Bernstein, c’est aussi des « close up » avec les plus grandes stars de la Ligue : Magic Johnson, Larry Bird, Shaquille O’Neal, aujourd’hui Kobe Bryant. Son album privé est un collector.
Andrew a collaboré avec « Mondial Basket » dès 1991. Pour nous, il a ressorti quelques joyaux de cette collection, qu’il commente avec enthousiasme et passion. Andy, fondu de baseball et grand admirateur des Red Sox de Boston, adore également le basket américain. Et surtout ses acteurs. « Il n’existe pas de recette miracle pour réaliser un bon cliché. Mais si tu aimes les joueurs, c’est plus facile. »
1984 : « Ma première Finale Celtics-Lakers »
« C’est ma première Finale entre Boston et Los Angeles. J’étais arrivé un an plus tôt en NBA comme photographe. J’avais donc peu d’expérience. Lorsque le Match 5 a débuté à 21 h dans le Boston Garden, la température était de 37°. L’atmosphère était irrespirable ! Les joueurs et les fans buvaient litre d’eau sur litre d’eau. Tout le monde était trempé bien avant le coup d’envoi de la rencontre car il n’y avait pas de climatisation dans les salles à l’époque. J’ai pris cette photo depuis un balcon pour avoir une vue plongeante. Les Lakers écoutaient Pat Riley lors d’un temps mort. Riley était toujours très strict dans le choix de ses costumes, de ses chemises et de ses cravates. Il fallait que son look soit en permanence impeccable, même pendant un match. Tout devait rester parfait. Ce soir-là, à la fin du premier quart-temps, sa chemise dégoulinait de sueur… Il aurait pu la tordre et en tirer des centilitres d’eau tellement il suintait de partout. Il garda sa veste malgré cette chaleur insupportable ! Sur cette photo, on voit les cous de James Worthy et Mike McGee qui brillent tellement leur corps suinte. J’ai gardé une admiration et un profond respect pour Pat Riley qui m’a beaucoup aidé au début de ma carrière. Grâce à lui, j’ai pu effectuer mon métier de reporter photographe dans de bonnes conditions. »
1985 : « Ma première couverture de Sports Illustrated »
« Cette photo de Kareem Abdul-Jabbar est prise dans la préparation du mouvement qui a fait sa réputation, le skyhook. On lit de la détermination dans le regard de Kareem et de l’inquiétude dans celui de Danny Ainge.
Les joueurs tiennent parfaitement dans un cadre mais c’est Kareem qui prend toute la dimension. Il sera élu MVP des Finals et « Sports Illustrated » choisira ce cliché pour sa couverture des Finales NBA. C’était ma première Une de « Sports Illustrated ». Il y en eut six autres par la suite mais celle-ci est à part.
J’ai grandi à New York en rêvant de réaliser ce type de photo pour faire, un jour, la Une de « Sports Illustrated ». C’est donc un Laker qui m’en a donné la possibilité. Je m’étais établi à Los Angeles en 1978 mais comme Ron Artest ou Lamar Odom, je reste un enfant de New York. On en parle toujours entre nous. Ça crée des liens, même si je sais faire la différence entre mon métier et celui des joueurs. »
1986 : « Robert Parish en défense sur Kareem Abdul-Jabbar »
« J’adore cette photo car on voit toute l’intelligence de jeu de Robert Parish qui se dresse en défense devant Kareem Abdul-Jabbar. On a ici deux acteurs magnifiques de la rivalité Boston-Los Angeles.
Parish était un redoutable défenseur. Il jouera très longtemps et terminera sa carrière comme un vieux sage.
Le showtime était à son apogée. Pourtant, les Lakers n’iront pas en Finales NBA.
Parish et Boston gagneront le titre contre Houston. »
1987 : « La bataille était permanente »
« C’est le retour des Lakers en Finales. En 1986 eut lieu ce qu’on appelle aux Etats-Unis le « robery ». Ce genre de photo avec les deux superstars, Larry Bird et Magic Johnson, était possible : ils ne jouaient pas du tout sur la même position mais se cherchaient toujours. L’un était ailier, l’autre arrière mais sur les lancers francs, ils étaient en permanence à la lutte. Sur un terrain, ils étaient comme chien et chat. Ici, avec le regard tourné vers la balle. La poussée de Magic sur Bird, avec son bras qui bloque celui de Larry, donne de l’intensité à cette photo prise dans la lumière naturelle du vieux Boston Garden. C’est un peu le résumé de ce qu’a été leur affrontement au plus haut niveau lors des Finales NBA. Aujourd’hui, il est plus difficile d’obtenir ce genre de photo avec Kobe Bryant et LeBron James. Avec Larry Bird et Magic Johnson, tout était possible. Les switchs faisaient qu’ils se retrouvaient souvent face-à-face. Mais de façon très éphémère. Il ne fallait pas louper cet instant fugitif. On devait appuyer sur le déclencheur pile au bon moment… »
1991 : « Magic et Bird sont devenus de vrais amis »
« Nous sommes dans un match de saison régulière. La rivalité entre les Celtics et les Lakers existe toujours mais il y a eu une passation de pouvoirs dans la Ligue avec Detroit puis l’avènement des Chicago Bulls de Michael Jordan. On voit sur cette photo qu’il y a moins de tension entre les deux superstars avant le début du match. Larry et Magic sont devenus de vrais amis. Deux amis qui vont s’entendre pour jouer ensemble un an plus tard à Barcelone lors des Jeux Olympiques avec la « Dream Team ». Quelque part, cette photo marque le début de la fin d’une certaine histoire. Magic va déclarer sa séroposivité. Bird souffre du dos en permanence, ce qui va abréger sa carrière. Ils sont là, heureux de jouer à nouveau l’un contre l’autre mais ils savent que ça ne va plus durer très longtemps. Il faut saisir cet instant comme une dernière rencontre exceptionnelle entre deux joueurs extraordinaires.
1993 : « Larry Bird découvre Magic avec un T-shirt des Celtics »
« Nous sommes toujours au Boston Garden. Magic Johnson a répondu à l’invitation de Larry Bird qui organise un match pour son départ. Si Magic porte bien le survêtement des Lakers, Larry découvre avec surprise un T-shirt « Boston Celtics » en dessous… Les deux joueurs sont heureux de se retrouver pour ce match de cérémonie. On sent que ça fait plaisir à Magic de surprendre son pire ennemi d’hier, devenu son meilleur ami. Magic fera le warm-up avec ce T-shirt. La NBA, ce n’est pas seulement des affrontements terribles entre des équipes et des joueurs, ça peut être aussi des moments chaleureux, des instants de bonheur, d’amitié et de complicité. Avec Bird et Magic, ça prenait bien sûr une autre dimension. »
1993 : « Shaq à Hawaï avec Mondial Basket »
« Magic, Shaq et Kobe sont les trois joueurs avec lesquels j’ai eu la meilleure relation de travail. Avec Shaquille, ça a commencé lors de sa draft en 1992. Cette photo a été réalisé à Hawaï avec vous. « Mondial Basket » avait son envoyé spécial, Christophe Derollez, lors d’un camp de big men.
Shaq n’était absolument pas à l’aise dans l’eau mais il voulait pêcher. On lui a donné un tuba, un masque… La plongée, la pêche et même la natation, ce n’était pas du tout son truc. On peut dire qu’il nageait très mal. On lui avait donné des appâts. Il les jetait autour de lui pour attirer les poissons qui, évidemment, n’allaient pas dans la mare où il était. On en a beaucoup ri… Cette photo est le reflet de la personnalité du Shaq, il s’était prêté au jeu très facilement. Il a toujours été facile de faire des photos mises en scène ou spontanées avec Shaquille O’Neal. »