Quand on regarde de près le classement du meilleur défenseur, on découvre que P.J Tucker a obtenu six points alors que Tony Allen n’a même pas été cité !
Une véritable injustice à laquelle l’arrière des Grizzlies a répondu de la plus belle manière en réalisant une superbe performance face au quadruple meilleur marqueur de la ligue, et futur MVP, Kevin Durant. Alors pas question pour moi de parler de la fameuse « arme anti-Kevin Durant », mais simplement de rendre hommage à Tony Allen, qui nous a offert une leçon de basket défensif.
Avec Allen, ce que j’apprécie, c’est que c’est un modèle de déplacement, d’activité et d’intensité. Mais une intensité différente d’un Jimmy Butler ou d’un Patrick Beverley, qui eux n’hésitent pas à rentrer physiquement dans leurs adversaires. Allen, lui, n’a pas la taille (1m93) pour faire face aux meilleurs ailiers et arrières de la ligue comme Durant, LeBron James ou Carmelo Anthony. Tout se joue dans les déplacements, très félins, et l’activité de ses appuis et de ses mains.
Comme les attaquants, les défenseurs improvisent
Face à Durant, Allen n’a pas appliqué de stratégie précise. Si les grands attaquants sont les rois de l’improvisation balle en main, les grands défenseurs peuvent aussi laisser place à leur imagination. L’ancien Celtic n’a pas systématiquement coupé les lignes de passe, ou n’est pas toujours passé devant au poste-bas. C’est une question de choix et cela peut aussi déstabiliser un attaquant. Si le scoreur arrive à anticiper les mouvements de son garde du corps, aussi fort soit-il, il peut s’adapter et trouver des solutions. Quand il ne sait pas comment le défenseur va le prendre, il « subit » la situation.
C’est le propre des grands défenseurs : inverser le rapport de force. Faire que le défenseur n’est pas à la merci de l’attaquant, mais le contraire. En clair, Allen est dans l’action, et il dicte les mouvements de l’attaquant. Allen a été parfait dans ce rôle face à KD, il l’a collé, il a reculé, est passé devant, l’a attendu poste bas. Durant a donc toujours eu Allen dans le dos, sans jamais savoir comment il allait pouvoir le jouer, en perdant quelque peu ses repères.
Improviser est donc primordial pour un défenseur, même si Allen a quelques clés quand il entre sur le terrain. Dave Joerger, le coach des Grizzlies, a expliqué avant le Game 2 que le fait qu’il soit remplaçant lui offre la possibilité de voir comment les arbitres sifflent, et donc de connaître le tonalité du match. Une donnée importante, surtout face à un joueur comme Durant, véritable aimant à fautes, qui shoote plus de lancers-francs que n’importe quel joueur dans la ligue.
Un spectacle différent, un plaisir semblable
Voir Allen limiter ainsi Durant est, pour moi, une superbe performance sportive mais aussi esthétique. Les grands scoreurs ont les honneurs des Top 10 avec des gestes incroyables, qui font rêver et qui poussent tous les gamins du monde à faire pareil. Mais voir un défenseur avec de tels appuis, de telles qualités d’anticipation et une telle mentalité, une telle volonté, c’est tout aussi beau. C’est pour cela que je prends un immense plaisir à regarder des joueurs comme Scottie Pippen, Metta World Peace, Jimmy Butler, Kevin Garnett dans un autre style, ou Michael Jordan.
Marquer des points est la chose la plus naturelle au basket, défendre comme un chien face aux meilleurs joueurs du monde demande un supplément d’âme, avec des qualités aussi grandes que pour marquer 40 points par match. En plus, on n’obtient pas toujours les lauriers. Les playoffs sont le théâtre des meilleures défenses de la ligue, et voir des performances comme celle d’Allen, c’est un plaisir unique, différent mais que je vais apprécier autant que si Durant lui colle 45 points lors du Game 3.