Interview George Eddy : le bilan après un tiers de la saison

Basket USA est allé demander à George Eddy, le journaliste basket de Canal Plus depuis 1984 et consultant sur le plateau de Canal NBA, ce qu’il pensait du début de cette saison 2011/2012 si particulière.

Des favoris, en passant par les surprises, pour ensuite parler des Français et du titre de MVP et enfin discuter du cas Dwight Howard ou de Minnesota, tout y passe.

Que vous inspire ce premier tiers de la saison régulière ?

La confirmation de mes pronostics d’avant-saison. C’est à dire prime à la jeunesse, aux équipes qui ont un banc, qui peuvent faire tourner et récupérer rapidement. Á cause du calendrier compact. Ça se confirme avec Miami, OKC et Chicago, les favoris sont là avec le talent et les jeunes jambes. Et puis derrière des surprises, avec des équipes complètes et sans stars, comme Philadelphie, Indiana, Denver ou Utah. Autre chose, la rapide progression des Clippers, avec Chris Paul qui a bonifié tout le monde très vite.

L’attaque est complètement en berne en ce début de saison…

Oui, et tout ça était prévisible. On savait qu’il y aura des matches de mauvaise qualité, des « blowout » (raclées) et des équipes qui jouent mal après avoir enchaîné 4 matches en 5 jours.

Comme lors du lock-out de 1999 ?

Il y a beaucoup de similitudes. Des joueurs âgés qui n’ont pas fait les efforts nécessaires au niveau de la condition physique, qui sont blessés, hors de forme ou pas bon. C’est plus dur pour les joueurs qui ont la trentaine.

On parle des favoris, comme Miami, OKC ou Chicago, lequel vous impressionne le plus ?

Égalité en Miami et Oklahoma City. Miami arrive à gagner sans Dwyane Wade, qui a manqué 6 matches, et LeBron James est monstrueux. Il a progressé en poste-bas, il a un meilleur jeu dos au panier, il reste adroit de loin et il reste présent dans les passes et les rebonds. C’est la lutte entre lui et Kevin Durant pour le titre de MVP, pour le titre, le meilleur bilan et la meilleure équipe. Un duel au sommet en quelque sorte.

Justement, James ou Durant pour le MVP de la saison ?

Sur le plan des stats, c’est James mais OKC a un meilleur bilan donc ça s’équilibre. Durant est le meilleur joueur dans la meilleure équipe, l’équipe qui joue le mieux à l’extérieur. Et en plus, il a moins d’aide du coté d’OKC. Durant a de très bons joueurs avec lui, mais Miami c’est trois superstars. Il accepte de marquer moins pour le bien de son équipe et il donne plus de responsabilités à James Harden. C’est un joueur et un être humain exceptionnel.

La plus grosse équipe surprise depuis le début de la saison ?

Comme je l’ai dis dans Canal NBA, pour moi, c’est Minnesota. C’est une équipe, comme les Clippers, qui était la risée de la NBA et là, tout d’un coup, cela devient une équipe qui passionne les fans et qui gagne des matches. Il ont Ricky Rubio, qui est digne d’être rookie de l’année, dans le top 3 des passeurs et intercepteurs de la ligue. Il est dans les quatre ou cinq meilleurs meneurs de la ligue à l’évaluation. Kevin Love a perdu 10 kilos, il fait toujours des grosses stats et en plus, son équipe gagne. Donc avec Rick Adelman et l’arrivé de Derrick Williams, cette équipe a fait le plus gros bond en avant, pour passer du néant aux playoffs. Rubio est mon chouchou avec Love. Le matin, quand je regarde les highlights, je commence avec Minnesota et les Clippers.

La plus grosse déception ne serait-ce pas les Knicks ? Vous n’étiez pas très enthousiaste et pour l’instant, New York vous donne raison…

Certes, mais je ne pensais pas que ce serait aussi grave. Le manque de complémentarité entre Carmelo Anthony et Amar’e Stoudemire est criard. Les stats de Stoudemire ont chuté. Melo force trop, et les arrières sont trop faibles. Le départ de Chauncey Billups a été stupide et Baron Davis n’est pas en état de jouer. Comme les Lakers, il y a eu des erreurs de management. C’est Mike D’Antoni qui va payer les pots cassés et c’est pas la joie là-bas.

Les joueurs qui ont la trentaine ont plus de mal, sauf Kobe Bryant….

Il est très fort individuellement. Mais les Lakers ont fait partir Lamar Odom, ce qui a cassé l’alchimie de l’équipe. En dehors de Kobe, les extérieurs là aussi sont plutôt faibles. Ça joue sur trois cylindres, Bryant, Gasol et Bynum et quand ils ne sont pas bons, ils ont du mal à gagner. Le problème c’est les dirigeants, qui lorgnent sur Dwight Howard et qui n’ont pas renouvelé le poste de meneur.

Justement Dwight Howard, que pensez-vous de ce feuilleton ?

Il me déçoit beaucoup. Il veut aller partout et nulle part. Il est comme un gamin dans un magasin de bonbons et qui ne sait ce qu’il veut. Il ne veut surtout pas rester à Orlando et il est entrain de foutre le vestiaire en l’air. Il critique ses coéquipiers et il veut séduire les autres équipes de la NBA, ce genre de comportement est nul et pas utile quand on veut préparer une saison et gagner des matches. Il est fort individuellement mais ce n’est pas un leader. Et donc les autres craquent nerveusement. Maintenant où il va aller, je pense qu’il faut regarder l’équipe qui a le plus à offrir dans un échange. Et là un Bynum ou un Gasol, c’est ce qui me semble être le plus intéressant.

Vous pensez qu’il sera transféré obligatoirement, donc qui ne sera pas free-agent avec Orlando ?

Il est sur le point de se faire détester à Orlando. Il joue la diva et Orlando est tributaire de ses états-d’âme. Donc il a de moins en moins de chance de rester. Maintenant si Deron Williams arrive à Orlando, pourquoi pas. Ce serait l’idéal pour eux. Mais il préfère Dallas, car c’est chez lui. Donc si Orlando pense qu’il ne va pas rester, alors avant le 15 mars, il sera transféré.

Mais on a vu avec Anthony que récupérer une superstar n’était pas gage de succès et que finalement, le grand gagnant c’est Denver. Ça peut faire peur ça, aux équipes qui veulent Howard ?

Ça devrait. C’est une bonne leçon pour tout le monde. Il n’y a pas que les superstars qui comptent. On le voit avec les équipes comme Philadelphie, Indiana, Denver, Houston ou Utah. Il y a 8-9 joueurs très bons mais pas de stars. Et ce sont ces équipes qui gagnent le plus de matches en ce moment.

Comment vous trouvez nos Frenchies depuis le début de saison ?

Le bilan est positif. Avec l’explosion de Ian Mahinmi et Rodrigue Beaubois qui jouent le money-time à Dallas. Tony Parker fait un super début de saison, avec son record de passes. Nicolas Batum, malgré son genou, est dans ses normes. Kevin Séraphin, c’est décevant car il ne joue pas. John Petro joue peu dans une équipe faible. Boris Diaw joue dans une équipe à le rue, enfin, il ne joue même pas car c’est pas collectif donc pas la peine de mettre Boris sur le terrain. Après Mike Piétrus, il relance sa carrière avec les Celtics, c’est une super nouvelle. Ronny Turiaf est blessé. Et Noah, après un début compliqué, rentre bien dans sa saison et l’équipe de Chicago tourne très bien. Donc il a pas besoin d’en faire trop. Soyons patients avec lui, et il va trouver son rythme.

Boris peut-il être transféré avant la deadline ?

Oui. Le club veut le transférer, c’est sûr. Et cela serait mieux pour lui d’être dans une équipe qui fait des passes qui a envie de jouer ensemble. Un retour à Phœnix serait très bien pour lui. Ou toutes ces équipes qui jouent bien au ballon, qui partagent le temps de jeu et qui gagnent des matches. Un joueur de son âge qui est en plus dans la dernière année de son contrat a besoin de ça. D’être sur le terrain, de gagner des matches et de faire parler en bien de lui. C’est tout ce que je lui souhaite car c’est un garçon adorable.

Quelle est l’action de ce début de saison pour vous ?

C’est difficile, car il y a eu le dunk de Griffin qui a fait beaucoup parler. Et en même temps, il y a eu le saute-mouton de James sur John Lucas. J’ai été plus impressionné par le dunk ligne de fond de Griffin en double pump. Puis, il y a les pénétrations de Derrick Rose, qui ne finissent pas en dunk, mais qui sont hors du commun. Il en a fait plein contre Miami. Quand il part tête de raquette, qu’il efface deux ou trois défenseurs et qu’il finit de manière acrobatique, c’est aussi impressionnant qu’un dunk de Blake Griffin.

Propos recueillis par Jonathan Demay en exclusivité pour Basket USA