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Comment les basketteurs vivent-ils le mois du ramadan ?

NBA – Traverser le mois du ramadan, avec son jeûne, est une épreuve particulière pour un sportif de haut niveau. Même si, notamment avec l’habitude, le corps suit et le mental prend le dessus.

Kyrie Irving et Jaylen Brown ramadanLe mois du ramadan, un des piliers de l’Islam, prend fin ce dimanche, jour de l’Aïd-el-Fitr. Si elle recouvre bien plus de dimensions et de profondeur que le simple jeûne à observer entre le lever et le coucher du soleil, cette période est un moment important pour le croyant et aussi une épreuve pour les sportifs de haut niveau.

En NBA, plusieurs joueurs observent le jeûne. On pense principalement à Kyrie Irving, Jaylen Brown, Dennis Schroder, ou anciennement Hakeem Olajuwon et Enes Kanter. Et on peut facilement imaginer les difficultés quotidiennes pour ces joueurs et pour les sportifs en général.

Pourtant, « paradoxalement, ce sont souvent les gens qui ne font pas le ramadan qui s’en préoccupent le plus, par rapport à ceux qui le pratiquent », indique Geoffrey Wandji, le médecin de l’équipe de France de basket, joint par Basket USA. « Pour avoir travaillé avec des athlètes qui le faisaient, il n’y a pas de soucis au niveau médical. »

« Un nouveau fonctionnement pour le corps »

La plupart du temps, les athlètes concernés pratiquent ainsi le ramadan depuis l’adolescence, et ils sont donc habitués aux contraintes. De plus, depuis quelques années et pour encore un moment, on se dirige vers des ramadans effectués en hiver, ce qui est plus facile à négocier.

« Largement », nous confirme Lahaou Konaté, ancien international avec les Bleus qui évolue actuellement à l’Étoile sportive Saint-Michel Le Portel Côte d’Opale en Betclic Elite. « Plus jeune, c’était en été, donc les journées sont plus longues. On a moins le temps pour caler des repas et de s’hydrater comme il le faut. Ces dernières années, c’était pendant la saison, donc c’est une habitude. Là, les journées sont assez courtes, même si, à mesure qu’on s’approche du printemps et de l’été, les jours se rallongent. »

Faire le ramadan en été est logiquement moins pratique et plus éprouvant. « C’est plus dur si ça tombe pendant l’intersaison car c’est le moment où tu te prépares pour la saison à venir », poursuit le joueur de 33 ans. « L’organisation est différente, les journées sont plus courtes, la récupération est moindre. Donc la digestion est raccourcie, on emmagasine pas mal de fatigue dans le mois. »

Néanmoins, été ou hiver, journée courte ou longue, « le jeûne du ramadan induit un nouveau fonctionnement pour le corps » nous résume Gladys Dibling, la nutritionniste qui travaille avec l’Equipe de France de basket et a notamment accompagné le groupe pendant les Jeux olympiques de Paris en 2024. « Pour un sportif professionnel, c’est un défi. Mais c’est possible si on a pris conscience qu’il faut bien mettre en place les choses, de manière rigoureuse. »

Outre l’organisation des repas, fixés selon les horaires qui régissent la période de jeûne et qui changent jour après jour, un sportif professionnel doit-il fondamentalement changer ses habitudes alimentaires pendant ce mois ? Non, répond Gladys Dibling, qui précise tout de même qu’il faut être « d’autant plus vigilant à ce moment-là » et qu’il est préférable « que le sportif ait travaillé sur son alimentation avant le ramadan. S’il n’a pas les bases, c’est difficile de les mettre à ce moment-là. »

Un constat partagé par Lahaou Konaté, qui ne sort pas des sentiers battus et fait confiance aux produits qui lui « font du bien » : « Je mange toujours la même chose, période du ramadan ou non. J’essaie de garder mes habitudes. Je ne change rien. Intégrer des nouveaux aliments, faire des tests, ce n’est pas la bonne chose à faire. Je me base sur des aliments simples : eau et fruits. C’est le nécessaire pour moi. »

Surveiller la glycémie et l’hydratation

Pendant ces quatre semaines, et avec les sportifs qu’elle suit, la nutritionniste va faire particulièrement attention aux nutriments et micronutriments, ainsi qu’aux apports en vitamines, minéraux, anti-oxydants et fibres. L’athlète doit se tourner vers les protéines, les acides gras essentiels, les glucides de qualité, à index glycémique bas. Le jeûne n’étant pas neutre pour un sportif, Gladys Dibling va être particulièrement attentive aux « stocks de glycogène qui vont diminuer l’énergie pour les efforts intenses : les sprints, les sauts et les changement de direction ».

« Les choses à surveiller chez le sportif pendant le ramadan, c’est la glycémie et l’hydratation. Le jeûne pourrait avoir de l’impact sur les filières énergétiques », ajoute le médecin Geoffrey Wandji, également fondateur de DocForSport. « 1% de déshydratation est égal à 10% de perte cognitive et physique », chiffre Gladys Dibling. « Jouer sans s’hydrater sur une période prolongée peut provoquer une baisse de 2 à 5% de la masse corporelle en eau. Ça peut affecter explosivité, la concentration, augmente le risque de blessure. »

D’ailleurs, les sportifs qui tapent dans leurs réserves pendant ces journées sans boire ni manger prennent-ils davantage de risque de se blesser ? Le médecin des Bleus, Geoffrey Wandji, s’appuie sur une étude de l’hôpital Aspetar au Qatar concluant qu’il n’y avait « pas forcément plus de blessures ni de baisse de performances » et que c’était « parfois même le contraire avec une amélioration des performances ».

Une étude de l’hôpital d’orthopédie et de médecine sportive de Doha, publiée en janvier 2023, offrait « un aperçu des recommandations pratiques relatives » au ramadan pour « les athlètes en bonne santé et leur personnel encadrant pour les guider sur la manière d’adopter des stratégies comportementales, sociales et psychologiques appropriées ». Et elle se terminait ainsi : « L’évidence actuelle supporte la conclusion que les athlètes d’élite qui parviennent à maintenir constants leur apport énergétique, leur charge d’entraînement habituelle, leur composition corporelle et les bonnes habitudes de sommeil ne sont pas sujets à subir une diminution des aptitudes athlétiques avec généralement de faibles effets négatifs. Le développement de stratégies d’adaptation peut considérablement atténuer les effets des perturbations du ramadan sur l’entraînement et la compétition, permettant ainsi à l’athlète de s’entraîner à haut niveau tout en entreprenant le jeûne imposé par sa religion. »

Une communication avec l’athlète et avec son corps

Une conclusion confirmée par les propos de Geoffrey Wandji. « Sur le plan médical, je ne mets pas de gros warning là-dessus », dit-il en référence à la pratique du ramadan. « Ce n’est pas si compliqué que ça. Les athlètes se connaissent. Il faut écouter son corps et les athlètes n’ont pas besoin de nous, ils le font depuis leur adolescence. Il faut en parler avec l’athlète. La communication est importante pour cette période-là, pour savoir où ils en sont. »

L’expérience de la pratique a une influence certaine sur le déroulement du mois. L’étude de l’hôpital Aspetar expliquait que « les personnes ayant jeûné plusieurs mois de ramadan dans leur vie disposent de meilleures stratégies d’adaptation que les débutants ». Au contraire, « de jeunes garçons effectuant le jeûne religieux pour la première fois de leur vie ont montré une nette diminution de leurs performances physiques par rapport à leurs performances hors période du ramadan », peut-on lire ensuite.

Lahaou Konaté, à qui il arrive de jeûner pendant certaines journées dans le courant de la saison, ne peut que le confirmer. En général, il lui faut « un ou deux jours maximum » pour s’adapter au ramadan. « Cette année, je n’ai même pas eu de temps d’adaptation. Je me suis adapté directement. Les premiers jours, ce qui est important, c’est s’hydrater avant la limite. Ça évite la fatigue et les migraines le lendemain. »

Les clubs doivent-ils, eux aussi, s’adapter aux joueurs qui pratiquent le ramadan ou est-ce aux joueurs de s’adapter à l’emploi du temps collectif ? Geoffrey Wandji se souvient avoir « travaillé dans un club semi-pro de rugby avec des entraînements la journée et des impacts bien plus virulents qu’au basket et ça ne posait pas de soucis aux athlètes qui faisaient le ramadan ». Il précise même que, sur ce sujet, il a « réfléchi avec les préparateurs physiques à déplacer les entraînements ». Mais les athlètes ont dit non, voulant « faire comme tout le monde ».

De son côté, Lahaou Konaté raconte n’avoir jamais eu de problèmes avec ses coaches sur cette question. « Souvent on aménageait mon programme. Je me souviens de ma saison avec Victor Wembanyama à Boulogne. Vincent Collet m’avait demandé mon avis pour l’entraînement, j’avais répondu que je préférais le matin. Il avait adapté le planning. » Car pas question pour lui décaler son mois du ramadan face à ses obligations professionnelles. « C’est important pour moi, spirituellement, de le réaliser en temps voulu. »

Parler moins et dormir plus

Bien qu’habitué et très expérimenté, l’ancien joueur des Bleus (20 sélections) concède qu’il a « besoin de faire de plus en plus de siestes ou de micro-siestes. Dans un moment de calme, je me mets dans ma bulle, ainsi je ressens moins la fatigue ». Le sommeil étant, là aussi, un enjeu important.

« Quand on dort mal ou peu, on a faim et ça dérègle les hormones de la satiété », glisse Gladys Dibling, alors que l’étude qatarie parle d’un sommeil qui a tendance à diminuer aussi bien quantitativement que qualitativement et avance une perte « d’environ 60 minutes par jour pendant toute la période du ramadan ».

Et pour contrer la sensation de soif, qui peut survenir en fin de journée, le joueur du Portel a sa petite technique. « Je blablatais comme jamais et j’ai appris à canaliser ça », en rigole-t-il. « Plus tu parles, plus tu t’entraînes, plus tu vas avoir envie de boire. Donc j’essaie d’être concret quand je prends la parole. »

Vient alors l’heure de casser le jeûne, qui peut survenir en plein match. Ce qui est arrivé plusieurs fois à Lahaou Konaté. « J’ai joué un match à 18h et j’ai coupé mon jeûne à la mi-temps », se souvient-il. « Je bois de l’eau, en petite quantité pour ne pas me sentir lourd, et je mange des dattes. C’est un apport important en glucides et j’en ai besoin pour avoir un coup de boost. J’essaie d’avoir des barres énergétiques avec moi également, pour avoir un apport équilibré et ne pas brusquer mon estomac, afin d’avoir l’énergie nécessaire pour finir le match. »

Un moment qui, s’il intervient pendant un effort, n’est pas anodin, rappelle Gladys Dibling. « Il faut savoir si le sportif est habitué à manger pendant un effort. Tous n’en sont pas capables au niveau digestif », constate la nutritionniste, qui conseille de boire et de partir sur « des sucres rapides car on a besoin d’une énergie immédiate » et sur des « aliments faciles à digérer ». Pour, après le match « prendre un repas complet qui va permettre de recharger les stocks en glycogène, de réparer les tissus, réhydrater l’organisme et réduire l’inflammation ».

« Le cerveau prend le dessus sur le corps pendant cette période »

Si les joueurs ne peuvent pas totalement limiter les effets de la fatigue accumulée dans les derniers jours du jeûne et encore plus quand le ramadan a lieu pendant la période estivale – journée longue, nuit courte -, en revanche, ils doivent tenter de maintenir le plus possible leur poids de forme. Ne pas trop perdre pendant ce mois, ni trop prendre. Alors que cela semble contre-intuitif, ce dernier risque existe.

« On peut connaître des variations à cette période mais il ne faut pas en connaître de trop importantes. J’ai connu des sportifs qui avaient pris du poids pendant le ramadan. Ils n’ont pas une alimentation qualitative, vont rester à table des heures, grignotent parfois la nuit, avec des repas trop riches en graisse, en friture, en sucre », liste Gladys Dibling. « J’ai un sportif qui m’a dit que, pendant le ramadan de l’année dernière, il n’avait quasiment pas joué car son entraîneur le trouvait moins performant. Il ne se donnait pas à 100% pendant l’entraînement et dormait très mal. Il ne mangeait pas bien durant les nuits et avait pris du poids et de la graisse. »

Autre facteur qui peut jouer sur une éventuelle prise de poids : une blessure et un passage à l’infirmerie. Le manque d’activité réduit les dépenses et, sans discipline, on peut vite prendre quelques kilos. On peut penser à Kyrie Irving par exemple, qui s’est gravement blessé dès les premiers jours du ramadan et ne rejouera pas avant de longs mois.

Toutes ces considérations alimentaires et médicales sont évidemment importantes pour faire fonctionner le corps, la machine même, du sportif pendant ce mois particulier. Cependant, comme le constate Geoffrey Wandji, « le cerveau prend le dessus sur le corps pendant cette période ». L’aspect mental est fondamental et les exemples de sportifs plus performants durant cette période sont nombreux. Il y a quelques années, Karim Benzema, au Real Madrid, avait particulièrement brillé pendant son jeûne.

En NBA, l’exemple le plus connu est celui d’Hakeem Olajuwon. La légende des Rockets n’avait aucun mal à dominer ses adversaires dans ces conditions. « Je me sens tellement mieux : je me sens plus léger, plus rapide, plus concentré. Quand Dieu recommande quelque chose, c’est dans votre intérêt. Tout votre corps vit un changement. C’est comme une renaissance », décrivait-il en février 1996.

Comment Jaylen Brown a-t-il vécu ce mois de mars ? « C’est un défi car on change de fuseau horaire pour le lever et le petit déjeuner donc on essaie de s’adapter », livrait-il à Andscape. « Mais c’est un défi pour les gens dans le monde entier. Je n’aime pas en faire une affaire personnelle parce que je serais un athlète. Cela fait partie de ma foi. » Pour tenir ces quatre semaines, le MVP des Finals 2024 s’appuie sur deux éléments : sa « force mentale » et la connexion avec les autres croyants du monde entier. « C’est simplement entre moi et le gars en haut. Je renforce cette relation », conclut-il.

De son côté, Lahaou Konaté confie se sentir « très bien » pendant ces semaines de jeûne. « Je me sens apaisé, serein. Physiquement, je me sens bien. Pour moi, il n’y a pas de secret : si tu es bien organisé, au niveau des repas et du sommeil, ça va aider pour être performant. Le ramadan reste bénéfique avant tout. »

Une porte vers le jeûne intermittent ?

Comme la pratique du ramadan n’empêche pas les bonnes performances et face à l’épanouissement des athlètes portés par leur foi – ce que l’étude de l’hôpital Aspetar appelle « l’intelligence religieuse » – certains sportifs pourraient se laisser tenter par le jeûne intermittent afin, eux aussi, de se sentir plus légers, plus rapides. Lahaou Konaté le pratique déjà pendant la saison. « J’ai eu un coach, Jurij Zdovc, avec les Metropolitans 92, qui faisait souvent le jeûne intermittent. Chacun a sa philosophie et son expérience sur la question. J’ai eu plusieurs coéquipiers qui l’ont fait aussi, tout en étant performants », nous raconte-t-il.

Cette pratique serait-elle bénéfique ? « Avec mes connaissances, je sais que le jeûne peut avoir énormément de bénéfices pour le corps, pour la performance et l’esprit », avance Gladys Dibling. Le médecin des Bleus souligne que les choses sont assez simples pour un sportif de haut niveau face au « fasting » : « Il a une épée de Damoclès au-dessus de la tête, ce sont ses performances et ses résultats. S’il n’est pas performant, si cela affecte ses performances, il va changer ».

Si la fatigue intervient très vite et vient à plomber les performances, l’étude d’Aspetar suggère que cela peut être la cause d’un « effet nocebo », dont il faudra se méfier. Inverse de l’effet placebo, il serait la « croyance négative » que le ramadan ou le jeûne intermittent « a évidemment un effet délétère sur la performance physique ». Même s’il ne faut pas écarter non plus « une mauvaise stratégie d’entraînement » dans ce ressenti, voire une certaine impatience face au temps d’adaptation nécessaire pour un sportif qui ne serait pas familier de cette pratique.

Geoffrey Wandji conclut que « l’organisme est une machine très intelligente » et que face à des croyances, que ce soit pour le ramadan ou pour un jeûne intermittent, « le corps va suivre en général ».

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