Héros de la fin de match face à Brooklyn avec un petit « tear drop » victorieux, les bras ouverts à son public à ses pieds, Anfernee Simons a probablement tiré aussi la larme à plus d’un vieux fan des Blazers.
Drafté par Portland à sa sortie du lycée en 2018, l’arrière de Portland était alors le premier joueur à réussir le grand saut depuis 2005, et les limites d’âge promulguées par la Ligue.
Six ans plus tard, c’est lui qui, toujours poupon, est en train de remplir l’immense vide laissé par le départ de son mentor et ami, Damian Lillard, parti chercher la consécration du côté de Milwaukee.
Evan Turner lui fait « porter » ses valises
Parmi les meilleurs scoreurs de la Ligue en dernier quart-temps, avec 8.6 points en 9 minutes de moyenne (à un très honnête 46% de réussite dont 42% à 3-points), mais aussi 23 points et 5 passes de moyenne (des chiffres qu’il tient – peu ou prou – depuis maintenant trois saisons), Anfernee Simons n’a certes pas de gimmick au poignet dans son arsenal. Mais pour le reste, le vétéran de seulement 24 ans a tout en magasin !
« Dans l’équipe, je suis considéré comme un des anciens, ce qui est un peu fou pour moi. Mais, par rapport au reste de la Ligue, je suis encore un jeune joueur », raconte-t-il pour The Old Man and The Three. « C’est amusant parce que Mike Schmitz, qui est maintenant notre assistant GM, m’avait interviewé à l’époque où j’étais à la IMG Academy. Il me demandait à quels joueurs je ressemblais en NBA. Et j’avais répondu Dame et CJ. Sans savoir que j’allais jouer avec eux quelques semaines plus tard. Mais, cette première saison, je savais d’emblée que j’allais vivre des moments horribles. Je le savais car j’étais loin d’être au niveau physiquement. Techniquement, je pouvais m’en sortir mais je partais de tellement loin du point de vue physique, je n’étais pas prêt. Mais j’ai accepté mon sort, en me disant que même si j’allais me faire humilier plus d’une fois, j’allais surtout progresser. »
Comme il le reconnait lui-même, il est bien tombé à Portland. Une équipe bien installée dans la hiérarchie de la conférence Ouest avec un jeu offensif qui part des lignes arrières, et l’inévitable duo Damian Lillard – CJ McCollum. Et une bonne culture dans les vestiaires.
À l’instar du traitement réservé par son coéquipier Evan Turner, qui n’a pas manqué de lui rappeler ses devoirs de rookie. Comme de le raccompagner chez lui au milieu de la nuit, après un long voyage, avec ses bagages dans le coffre. Car Evan Turner était lui dans sa Ferrari… qui ne pouvait contenir ses valises !
Ou cette autre fois où Anfernee Simons (et Gary Trent Jr.) ont été missionnés par leur vétéran d’aller remplacer une boucle de sa botte Louis Vuitton qui venait de casser. Sous la neige à New York…
« A posteriori, c’est sûr que ça parait fou qu’Evan Turner m’ait fait faire tout ça. Mais je savais, même en le faisant, pourquoi il le faisait. C’est pour instiller l’humilité chez les jeunes joueurs qui débarquent. J’étais tellement paumé quand je suis arrivé que j’acceptais de faire tout ce qu’on me demandait sans poser de questions. Mais sérieusement, j’ai beaucoup appris de tous nos vétérans. Il en faut dans toutes les équipes ! »
Contraint, puis soulagé, de faire le grand saut en NBA
Débarqué dans le grand bain de la NBA à 18 ans seulement, Anfernee Simons était de la chair à canon. En vérité, le gamin de Floride ne se destinait pas à franchir le pas aussi vite. Il voulait s’arrêter sur la case NCAA. Mais cette dernière s’est volatilisée…
« Je devais aller à Louisville. Je leur avais donné mon accord depuis un an déjà. Mais il s’est passé ce truc [une grosse affaire de fraudes et corruption, ndlr] à Louisville, et j’ai dû repartir à zéro dans mon processus de recrutement. Toutes les grosses écoles avaient déjà leurs recrues sur les postes arrières, donc il ne me restait que peu d’options. Il y avait Florida qui proposait encore une bourse de scolarité, mais finalement, elle a été prise entre temps. Mes dernières options étaient NC State et une ou deux autres facs de ce niveau. NC State aurait probablement été une bonne option pour moi au final, parce que j’aurais pu faire un peu ce que je veux. Mais, une fois que j’ai compris que c’était fini à Louisville, j’ai basculé direct sur la NBA. On m’a parlé de la Draft et j’ai zappé la fac ! Je me disais qu’il pourrait m’arriver des trucs à l’université. On a vu pas mal de gars penser y aller pour un an et y rester quatre ans au final. Mais à l’origine, j’avais fait mon année à IMG pour me préparer à jouer à la fac. »
Passé pour ainsi dire du jour au lendemain du lycée au plus haut niveau, Anfernee Simons a évidemment dû patienter, et manger son pain noir, avant de trouver un peu de temps de jeu ces trois premières années. Et de plus en plus de responsabilités, d’autant plus après le départ de Damian Lillard, ces trois dernières.
« J’ai dû complètement rapprendre à jouer au basket. Ma première année, je ne jouais pas beaucoup donc j’ai surtout observé. Dame et CJ, comment ils assurent soir après soir. Comment ils pensent le jeu. Et ma deuxième année, quand j’ai commencé à jouer, je me suis rendu compte que j’avais encore beaucoup de chemin [rires] ! Je me souviens, face à la Nouvelle Orléans, ça devait être une de mes premières titularisations. J’étais face à toi en plus [JJ Redick]. J’ai pris trois fautes de suite ! Les trois fautes les plus rapides de ma carrière. Une fois, tu t’arrêtes de courir et je te rentre dedans. La deuxième sur une feinte de tir. C’était une sale soirée pour moi. Mais ce sont les erreurs que tu dois vivre pour progresser. »
Le digne héritier de son mentor
Scoreur naturel capable de frapper de partout, Anfernee Simons a surtout dû apprendre à adapter son jeu selon le rôle que lui demandait son coach, Terry Stotts en l’occurrence. À savoir d’être avant tout un joker offensif en sortie de banc. Une menace de premier rang à 3-points.
« Ma troisième année, je savais que je ne devais plus prendre mes tirs à mi-distance, même si je peux les rentrer. Parce que ce ne sont pas les tirs les plus efficaces. Du coup, j’ai simplifié mon jeu à l’extrême. Je shootais à 3-points, et c’est tout ! S’il n’y avait pas de tir ouvert, je passais la balle. Et peut-être, de temps en temps, je pouvais finir au layup, mais rarement. Ça m’a aidé dans ma carrière car j’ai fini par être reconnu comme un shooteur. Et j’ai pu étendre ma palette offensive à partir de là. »
Leader offensif d’une jeune équipe de Portland qui compte notamment Scoot Henderson et Shaedon Sharpe sur les postes extérieurs, Anfernee Simons est en tout cas le parfait relais entre les deux générations.
Son dernier carton
Anfernee Simons | Pourcentage | Rebonds | |||||||||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Saison | Equipe | MJ | Min | Tirs | 3pts | LF | Off | Def | Tot | Pd | Fte | Int | Bp | Ct | Pts |
2018-19 | POR | 20 | 7 | 44.4 | 34.5 | 56.3 | 0.2 | 0.5 | 0.7 | 0.7 | 0.5 | 0.1 | 0.6 | 0.0 | 3.8 |
2019-20 | POR | 70 | 21 | 39.9 | 33.2 | 82.6 | 0.4 | 1.8 | 2.2 | 1.4 | 1.9 | 0.4 | 0.9 | 0.1 | 8.3 |
2020-21 | POR | 64 | 17 | 41.9 | 42.6 | 80.7 | 0.2 | 2.0 | 2.2 | 1.4 | 1.5 | 0.3 | 0.7 | 0.1 | 7.8 |
2021-22 | POR | 57 | 30 | 44.3 | 40.5 | 88.8 | 0.5 | 2.2 | 2.7 | 3.9 | 1.9 | 0.5 | 2.0 | 0.1 | 17.3 |
2022-23 | POR | 62 | 35 | 44.7 | 37.7 | 89.4 | 0.3 | 2.3 | 2.6 | 4.1 | 2.3 | 0.7 | 2.1 | 0.2 | 21.1 |
2023-24 | POR | 46 | 34 | 43.0 | 38.5 | 91.6 | 0.5 | 3.2 | 3.6 | 5.5 | 2.1 | 0.5 | 2.7 | 0.1 | 22.6 |
Total | 319 | 26 | 43.2 | 38.6 | 87.3 | 0.3 | 2.1 | 2.5 | 2.9 | 1.9 | 0.4 | 1.5 | 0.1 | 14.1 |
Comment lire les stats ? MJ = matches joués ; Min = Minutes ; Tirs = Tirs réussis / Tirs tentés ; 3pts = 3-points / 3-points tentés ; LF = lancers-francs réussis / lancers-francs tentés ; Off = rebond offensif ; Def= rebond défensif ; Tot = Total des rebonds ; Pd = passes décisives ; Fte : Fautes personnelles ; Int = Interceptions ; Bp = Balles perdues ; Ct : Contres ; Pts = Points.