Avec quasiment 44 points d’écart moyen sur un tournoi terminé à 8 victoires et 0 défaite, la « Dream Team » a tout écrasé. Chuck Daly, le coach américain, n’aura même pas eu à appeler le moindre temps-mort pendant ces Jeux olympiques de Barcelone…
Déjà battue en poule avec 33 points dans la besace, la Croatie aura été la seule équipe (avec Porto Rico) à limiter l’écart sous les 40 unités. Relégués à 32 unités en finale (117-85), les Croates auront même réalisé le meilleur score face à ce qui est considéré comme la plus grande équipe de basket de tous les temps sur la scène internationale.
La « Dream Team » de 92, c’est tout de même la bagatelle de 23 titres NBA, 15 trophées de MVP et pas moins de 117 capes au All-Star Game NBA… Des chiffres qui donnent le tournis.
« C’était comme Elvis et les Beatles réunis », dira Chuck Daly, cité dans The Guardian. « Voyager avec la Dream Team, c’était comme voyager avec douze stars du rock. C’est le seul point de comparaison qu’on puisse trouver. »
Pourtant, à la veille du match pour la médaille d’or, Chuck Daly avait choisi de montrer le match perdu des Américains à Munich en 1972. Histoire de remettre les choses en perspective…
Les joueurs n’en croient pas leurs yeux face à l’incompétence des arbitres, et des officiels en général, qui redonnent trois secondes à l’URSS, qui s’imposera à l’arraché. Ils crient évidemment au scandale. Mais c’était bien le but recherché.
« On veut ramener la médaille d’or là où elle devrait être. Là où elle aurait toujours dû être », lançait Charles Barkley avant même le début du tournoi barcelonais.
Des vraies rock stars !
De leur côté, Michael Jordan et les joueurs ont préparé cette finale à leur manière, entre décontraction et compétitivité exacerbée. Autrement dit, avec des parties de cartes endiablées jusqu’au coeur de la nuit. Et même un rapide tournage pour Air Time, une vidéo de NBA Entertainment. D’où le mythe (vérifié) d’un Jordan qui n’avait pas dormi de la nuit avant la finale… Fatigue mentale… mais pas physique !
Avant le match, le ton est déjà donné alors que le bus de la Croatie est gentiment mis sur le bas-côté pour laisser passer la « Dream Team ». À son arrivée à la salle, alors que son coéquipier des Celtics, Larry Bird, est déjà à l’échauffement, Stojko Vrankovic est furax. « C’était quoi ça ? Vous ne pouvez même pas partager la route avec les autres ?! »
Rigolard, Larry Bird répliquera que ce n’était pas de son ressort. En effet, l’équipe américaine était perpétuellement encadrée de gardes du corps et de voitures de sécurité sur tous ses déplacements. En fait, seul John Stockton pouvait jouer les touristes sans être reconnu sur les ramblas de la ville !
La Croatie mène…
À l’entre-deux, Charles Barkley est sur le banc alors que c’est Karl Malone qui épaule Patrick Ewing dans la raquette. La traction arrière Magic – Jordan – Pippen étant quant à elle fidèle aux postes. Le match a du mal à démarrer pour les Américains qui ouvrent les hostilités par un panier de loin de Jordan.
Il faudra une bonne grosse claquette dunk de Patrick Ewing sur un raté de Magic pour vraiment lancer la machine américaine. Encore que… Les Croates se défendent bien et parviennent même à mener au score : 25-23. Comme l’expliquera Jack McCallum dans son ouvrage de référence, la « Dream Team » est alors fatiguée d’être à Barcelone.
Une fatigue mentale… mais pas nécessairement physique. Le naturel reprend effectivement le dessus en fin de première mi-temps avec les fauves américains qui resserrent leur étreinte défensivement, pour mieux lâcher les chevaux sur la transition.
Charles Barkley fonce tête baissée et rentrera 7 de ses 8 tirs alors que Michael Jordan prend lui peu à peu le contrôle du match, rentrant notamment un tir à reculons, en deux temps, dont il a le secret. Malgré 24 points de Drazen Petrovic et 16 pour Toni Kukoc (qui gagnera alors le respect de Michael Jordan, son futur coéquipier aux Bulls), la Croatie ne peut rien faire face au déferlement des vagues américaines.
… et la Dream Team se fâche !
La rotation de Chuck Daly écrabouille les remplaçants croates avec son jeu de passe léché et un ballon qui vole de main en main pour terminer dans le cercle, depuis l’arc avec Chris Mullin ou Magic Johnson ou plus proche : carrément au dunk, avec Charles Barkley ou David Robinson.
Déjà rétablie depuis longtemps sur ce tournoi à Barcelone, la supériorité américaine est éclatante sur la plus grande scène FIBA, la finale des Jeux Olympiques. 117-85 : la messe est dite, la « Dream Team » est sacrée ! « [Nos adversaires] savaient qu’ils jouaient contre les meilleurs au monde », dira par la suite Chuck Daly, cité dans « The Life » de Roland Lazenby. « Ils vont rentrer chez eux et pour leur reste de leur vie, ils pourront dire à leurs enfants : ‘J’ai joué contre Michael Jordan, Magic Johnson et Larry Bird.’ Et plus ils jouent contre nos meilleurs joueurs, plus ils gagnent en confiance. »
Prédisant déjà la suite, et la progression continue du basket mondial jusqu’à nos jours, Chuck Daly ne pensait certainement pas que les successeurs de son équipe de rêve seraient à nouveau mis à mal dix ans plus tard seulement, en 2002, tristes sixièmes lors des Mondiaux d’Indianapolis. Puis encore en 2004, aux Jeux Olympiques d’Athènes…
Mais en ce soir du 8 août 1992, tout semble parfait dans le monde de la balle orange. L’ordre naturel des choses a été rétabli. Quand les joueurs américains reçoivent un à un leur breloque, tous ayant décidé de cacher (plus ou moins) discrètement le logo Reebok de leur survêtement, les sourires ne sont pas feints.
Magic Johnson serre le poing et brandit haut la bannière étoilée. Il prend Charles Barkley dans ses bras à côté de lui. La « Dream Team » a fait le métier ! « On a été capable de faire ce que tout le monde attendait de nous », conclut Michael Jordan après la finale. « Maintenant on peut être à nouveau fier de notre équipe de basket. »
Et pas qu’un peu… Pour l’éternité, rien que ça !
Les highlights de la finale
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