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Seth Curry, la gloire de mon frère

Seth Curry10 juillet 2015. Après trois heures d’accouchement dans une salle d’un hôpital d’Oakland, Ayesha Curry peut enfin contempler Ryan, sa deuxième fille. Elle pèse 2,8 kilos et se porte comme un charme.

Au-dessus du nouveau-né se penche déjà la bouille enamourée de Riley, trois ans, et celle tout sourire de Stephen, père comblé… mais nerveux. Noyé sous les messages de félicitations, le champion NBA ne peut en effet s’empêcher de penser à quelqu’un d’autre, quelqu’un qui compte beaucoup pour lui et qui, au même moment, ce soir de juillet, s’apprête à vivre l’un des moments les plus déterminants de sa jeune carrière. N’y tenant plus, il allume la télévision branchée dans un coin du centre médical et zappe sur NBA TV.

Si Ryan avait pu ouvrir les yeux, elle aurait alors découvert la copie quasi-conforme de son paternel. Un jeune basketteur possédant la même morphologie, trois centimètres en moins, les mêmes traits du visage, les cheveux noirs coupés ras et le bouc qui lui grignote le menton. Un jeu, une manière de se mouvoir et une attitude drôlement similaires. Ce soir-là en Summer League, dans un gymnase de Las Vegas à moitié rempli, Seth Curry, 25 ans, débute le tournoi de sa vie.

Après deux ans de galères, c’est l’ultime test, celui qui prouvera définitivement si oui ou non il a l’étoffe d’un joueur NBA. Et il compte bien le démontrer seul. Sans l’aide de son père Dell, ancienne star NBA, dans l’ombre duquel il a grandi. Sans celle de son grand frère Stephen, devenu MVP, dans l’ombre duquel il peine à atteindre le rang de basketteur professionnel.

« Les gens pensent qu’être un Curry m’a aidé à devenir ce que je suis, explique Seth. J’ai tendance à penser le contraire : cela m’a desservi. »

Il abandonnait ses matches contre Stephen

Retour quinze ans en arrière. Le vétéran Dell Curry (35 ans), ancien meilleur sixième homme de la ligue, vient de signer à Toronto. Chaque jour d’entraînement, il ramène ses deux fistons : le grand, Stephen, et Seth, de deux ans et demi son cadet. Les deux garçons ne manquent pas un match des Raptors à l’Air Canada Centre, mais ils ne tiennent généralement qu’une mi-temps dans les tribunes. À la pause, ça les démange : ils filent dans le gymnase annexe, enfilent un débardeur et se lancent dans des séances de HORSE de parfois deux heures, ou d’interminables séries de un-contre-un, quatre matches gagnants, comme en playoffs. Face à l’aîné, Seth perd toujours.

« Il ne me laissait jamais gagner, il ne me laissait jamais prendre l’avantage. Mais pendant toutes ces années, on a joué quelques très gros matches. »

Le voyant parfois abandonner, Stephen a besoin de concéder des fautes imaginaires pour que son petit frère accepte de jouer plus longtemps. C’est là, dans le gymnase d’entraînement des Raptors, mais aussi dans la cour de la maison familiale de Charlotte, que Seth Curry, en s’entraînant tous les jours face au futur MVP de la ligue, a forgé son esprit de compétition. Là aussi où est née sa volonté de tracer sa propre route plutôt que de suivre celle creusée par sa star de frangin.

Quand Seth débarque en 2005 au lycée catholique de Charlotte, Stephen est le meneur titulaire de l’équipe ; lui joue au poste deux, en sortie de banc. Il est déjà « l’autre Curry », version plus petite et moins flashy que son aîné. Le public le nargue souvent en chantant à son égard : « Tu-n’es-pas Ste-phen! Tu-n’es-pas Ste-phen! », sans réussir pour autant à déstabiliser le jeune shooteur. « Il ne s’énervait pas, se souvient Shonn Brown, son coach. Il ne disait rien. Il marquait quatre ou cinq paniers à trois-points et continuait à fixer la foule du regard. » Seth Curry est aujourd’hui le meilleur scoreur de l’histoire de l’école.

Et quand Stephen reçoit une bourse universitaire de Davidson, en 2006, il inscrit sur le mur de la chambre de son petit frère le nom de sa nouvelle école, en lettres capitales et fluorescentes qui brillent, le soir, quand Seth éteint la lumière. Mais quand Davidson l’approchera afin d’inscrire un second Curry sur la feuille de match, deux ans plus tard, le cadet déclinera gentiment, préférant rejoindre la modeste université de Liberty, en Virginie. Pour faire les choses à sa manière.

seth-stephen

« Peut-être meilleur » que son frère

Son premier conseiller, Dell, n’a jamais cessé de lui répéter : « Tu n’es pas ton père. Tu es le joueur que tu choisiras d’être ». Puis, quand Stephen a explosé : « Tu es différent. Il n’y a aucune comparaison possible ». Sur le plan de la personnalité, c’est certain. Si le joueur des Warriors est avenant est sociable, Seth est plus timide, toujours dans la retenue.

Excellent élève, il n’est en revanche pas du genre à dire ce qu’il a sur le coeur, et la foule l’angoisse plus qu’elle ne le porte : ado, par peur du ridicule, il n’avait même pas eu la force de sortir de la voiture de Dell pour rejoindre ses amis à une soirée dansante. « Je ne peux même pas vous dire si ça a été difficile pour lui ou pas, assure sa petite soeur, Sydel. Aujourd’hui encore, je ne sais pas comment il a encaissé tout ça. » « Il intériorise beaucoup ses frustrations, mais cela a des effet très sains : il va bosser à la salle, prendre quelques shoots de plus que les autres, ajoutera Casey Hill, son coach à Santa Cruz, en D-League. Le basket semble être son stabilisateur. »

En 2008, Seth Curry devient le meilleur marqueur américain de sa génération à Liberty, où il est l’un des freshmen les plus en vue du pays. Pas vraiment meneur, trop petit pour un deuxième arrière, il est en revanche « capable de créer son shoot comme personne à 18 ans », loue son coach Ritchie McKay. Bon sang ne saurait mentir, même si les mécaniques de tir ne sont pas tout à fait les mêmes : le shoot de Stephen part de la poitrine et se poursuit dans un mouvement fluide, naturel, d’une aisance confondante ; celui de Seth est plus traditionnel, déclenché haut, près du visage, sans que cela n’altère sa qualité esthétique et son efficacité. Grâce à cette arme, il marque plus de 20 points de moyenne pour ses débuts en NCAA. Son grand frère, qui explose tous les records à Davidson et s’apprête à être drafté par les Warriors, promet alors qu’il deviendra « au moins aussi bon » que lui, « peut-être meilleur ».

McKay recevra cet été-là une centaine de coup de fils de responsables d’équipes, intrigués par le potentiel du jeune Seth Curry pour qui Liberty est déjà devenue trop exiguë. Après avoir posée une année sabbatique -obligatoire selon les règles de la NCAA pour pouvoir changer d’établissement-, il file en 2010 à Duke. Parce que c’est plus près de la maison de ses parents. Et parce qu’on n’a pas tous les jours l’occasion de jouer sous les ordres de Mike Krzyzewski.

Il joue toute une saison blessé

Dans la rotation des Blue Devils, il s’installe derrière Kyrie Irving et Nolan Smith, mais la blessure du premier lui permet de grappiller des minutes. Lors de son premier match face au rival de toujours, North Carolina, il plante 18 points en deuxième mi-temps pour un come-back d’anthologie. Une fois ses deux équipiers vedettes partis en NBA, c’est avec Austin Rivers qu’il partage le backcourt de Duke. Il découvre la pression, la vraie. « Quand tu gagnes, Duke est pour un basketteur le meilleur endroit du pays, de loin. Quand tu perds, c’est l’un des pires. Tous les regards sont rivés sur toi. » Cette saison-là, les Blue Devils sont sortis au premier tour des phases finales. Transparent, Seth Curry termine la rencontre à 1/9 aux tirs.

Nommé capitaine de l’effectif avant son ultime saison universitaire, l’arrière est l’un des plus solides prospects du pays quand une fracture de fatigue à la jambe droite, découverte moins d’un mois avant le début de son année senior, soulève de sérieux doutes. Il porte une attelle aux entraînements, en sèche certains pour ne pas forcer sur le tibia et se préserver en vue des matches. Blessé, il marque 17,5 points de moyenne, repoussant au maximum le passage sur le billard. Mais ce dernier devient inévitable au printemps. Deux mois avant la Draft 2013, il apprend qu’il ne pourra participer à aucun workout : sa cote dégringole. Seth Curry suit la loterie NBA depuis son domicile, convaincu qu’il sera sélectionné au second tour. « Toute l’année durant j’avais prouvé que j’étais l’un des meilleurs joueur du pays. » Mais ce soir-là, son nom ne sera jamais appelé.

Crédit : Famille Curry

Viré dans le bus des Grizzlies

Les courbes des frères Curry s’éloignent brusquement. Pendant que l’ainé prend une nouvelle dimension en NBA, le cadet navigue en chancelant de petits contrats en piges inintéressantes. Les Warriors l’attirent en septembre via une signature qui flaire le coup marketing : Seth est immédiatement envoyé en D-League où il plante 36 points dès son premier match.

La veille de Noël, il rejoint les Grizzlies qui l’inscrivent sur la feuille de match dix jours plus tard à Detroit : Curry joue 4 minutes pour sa première apparition en NBA… puis apprend son licenciement dans le bus de l’équipe, une heure après la fin de la rencontre. Deux mois et demi plus tard, il intègre l’effectif des Cavaliers, entre en jeu dès le premier soir (8 minutes, contre Houston) et inscrit son premier panier NBA (un trois-points dans le corner, face à James Harden)… sans savoir qu’il n’en marquera plus pendant un an et demi, et que Cleveland se débarrassera de lui après une semaine de collaboration. Il fête son retour en ligue de développement en marquant 44 points.

Durant cette période, Seth Curry n’est pas jugé, il est comparé. Les scouts ne se penchent que rarement sur ses qualités, préférant souligner ce qu’il a de moins que Stephen – les qualités athlétiques, la défense, la régularité au tir. « On me comparait au MVP, à l’inverse de tous mes adversaires en D-League que je dominais », se désole-t-il. Comble de l’ironie : à Santa Cruz, il est associé à Mychel Thompson, le frère de Klay. « On nous appelait les Splash Brothers. Je trouvais ça tellement ringard, ça m’exaspérait. » Il change d’environnement en rejoignant l’équipe B d’Orlando, les Bayhawks d’Érié.

Entre deux perf individuelles, il regarde celles de Stephen en se répétant : « J’ai joué contre lui toute ma vie. Je peux jouer dans cette ligue. » Bill Peterson, le coach d’Érié, lui donne son soutien.

« Je me fous de ton frère, lui dit-il entre quatre yeux un soir de déplacement dans la banlieue nord de New York. Tu es un joueur NBA. » 

« Ne pas retourner dans l’ombre de Stephen »

Toutes les offres en provenance de l’étranger (France, Italie, Chine), avoisinant parfois les 100 000 dollars, sont rejetées par Seth Curry qui touche à peine 13 000 dollars la saison à Érié. Il se force à défendre sur des arrières plus grands que lui pendant les rencontres, va se payer un sandwich quand ses équipiers s’offrent un burger-frites, puis, quand chacun rentre chez soi, va travailler seul son floater, son dribble et son physique, pour ne pas se reposer exclusivement sur son shoot extérieur. Il termine l’exercice à 23,8 points, 3,9 rebonds et 4,2 passes de moyenne, 156 paniers à trois-points en 43 matches et une adresse de près de 70% dans le « clutch time », mais aucune équipe NBA lui tend même un contrat de 10 jours.

Le jour où Stephen prononce son discours de remise du trophée de MVP, Seth est en larmes en l’entendant évoquer publiquement leurs duels d’adolescence, qui « ne s’arrêtaient que pour deux raisons : quand maman nous ordonnait de rentrer parce qu’il était trop tard et qu’on faisait trop de bruit, ou quand tu devenais fou parce que je te battais et que tu étais sûr que je trichais. » Puis d’ajouter :

« Je sais que ce n’est pas facile pour toi de voir ton frère jouer en NBA, comme ton père auparavant, mais la manière dont tu gères tout ça est impressionnante. Ton potentiel est sans limites. Ne lâche rien. »

Seth Curry

À Las Vegas, ville où le pari est roi, celui de Seth Curry est simple : s’il réussit sa Summer League, il intègre un effectif NBA. S’il le rate, il suit les directives de son agent, fait ses bagages et file de l’autre côté de l’Atlantique. En ouverture du tournoi, quelques instants après avoir appris que son grand frère lui avait offert une deuxième nièce, il marque 30 points face aux Bucks. Dix jours et quelques solides performances plus tard, il a trois offres de contrats partiellement garantis sur la table : les Pelicans, les Hornets et les Warriors. Pour l’une d’entre elles, ce n’est même pas la peine d’y penser : « Je ne voulais pas jouer à Golden State et retourner dans l’ombre de Steph ». Une quatrième option est évoquée : Sacramento, la franchise de Vlade Divac, ancien équipier de Dell à Charlotte et qui avait vu Seth s’entraîner, petit, parmi les pros. Le géant serbe veut recruter un troisième meneur, bon shooteur, en guise d’alternative au duo Rajon Rondo – Darren Collison. Deux coups de fil et en une demi-heure, l’affaire est conclue. Le 21 juillet, Seth apprend la nouvelle. « Je ne suis pas du genre émotionnel, mais là… »

À 3,9 points de moyenne en 19 matches cette saison, Seth Curry s’est fait une place (11,3 minutes) dans l’effectif 2016 des Kings. George Karl l’utilise principalement lors des rencontres à domicile et l’exhorte à se montrer patient, mais il se dit satisfait de son apport au shoot et de son activité défensive. Le contrat garanti (1,96 million de dollars) a conféré à Seth un luxe qu’il ne connaissait pas jusqu’alors : celui de pouvoir prendre le temps de s’intégrer, d’apprendre les systèmes, de s’ajuster, d’autant que Karl lui accorde « beaucoup de liberté ». Sa maison dans la capitale californienne est située à une heure de route de celle de Stephen, avec qui il parle « très régulièrement, mais rarement de basket ».

Son meilleur match cette saison? Fin novembre, face aux Warriors du frangin, évidemment (9 points, 2 passes). Le même nom, le même numéro, mais pas la même histoire.

« Je ne me suis jamais comparé à lui, rappelle Seth. Je sais ce que je vaux. Je sais ce que je veux accomplir. »

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