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Portrait | Mahmoud Abdul-Rauf, il était une foi

NBA — Joueur de génie dans les années 1990, Mahmoud Abdul-Rauf (56 ans, ce 9 mars) demeure l’une des personnalités les plus complexes de l’histoire de la ligue.

Mahmoud Abdul-RaufHélas, même la religion n’y peut rien. Chris Wayne Jackson, Progression de l’année 1993 sous le maillot des Nuggets, est malade. Deux ans plus tôt, en juillet 1991, il est devenu Mahmoud Abdul-Rauf (56 ans, ce 9 mars), confirmant sa conversion à l’Islam par un pèlerinage à La Mecque. Mais son problème est toujours là.

Le corps médical appelle cela le syndrome de la Tourette. Un dérèglement génétique (incurable) de la transmission d’influx nerveux. Ça, c’est pour la définition. Concrètement, cela donne des tics et des comportements bizarroïdes. À Gulfport, Mississippi, le voisinage n’avait pas cherché bien loin…

Atteint du syndrome de la Tourette

Né le 9 mars 1969, le petit Chris Jackson était barjot et il avait de qui tenir. Son oncle était surnommé « Crazy Willy » et sa mère, Jacqueline, avait une attitude parfois étrange. Elle s’amusait à effrayer ses trois enfants, préférait dormir à côté de son lit, parlait toute seule en remontant la rue principale…

Le médecin de famille, plus sympathique que les voisins, diagnostiqua des crises d’épilepsie en voyant Chris rouler les yeux, remonter une épaule jusqu’à l’oreille ou pousser des petits cris incontrôlés à la manière de Michael Jackson.

Avec l’âge, les crises deviennent constantes. En se regardant dans un miroir, Chris prend conscience de la maladie. Ses prières n’y changent rien. Son seul salut est un terrain de basket.

Là, concentré sur son sujet, il règle ses comptes avec les autres et avec lui-même. Pas le moindre tremblement quand il arme son shoot, pas de cris stridents au moment de la passe. Le « cinglé » se balade tellement, qu’il est élu meilleur lycéen de l’état du Mississippi deux années de suite. Balle en main, il transforme l’une de ses « caractéristiques » en qualité.

Chris a une manie, il refait maintes et maintes fois le même geste. Une espèce de recherche obsessionnelle de la perfection. Ainsi, il met un quart d’heure à lacer ses chaussures… pour que les lacets tombent parfaitement. Il ouvre et referme une dizaine de fois la porte du réfrigérateur jusqu’à ce que le « clic » lui confirme que les aliments ne pourriront pas. Il met et remet sans cesse le pan de sa chemise. Il recherche la même perfection au niveau de son jumpshot. Parfois contre son gré.

« On avait joué pendant trois heures. Les copains m’attendaient dans la voiture et moi, je continuais de shooter. Je voulais partir mais je ne pouvais pas. Les potes gueulaient mais rien à faire. Il fallait que je termine par une série parfaite. »

L’un des plus incroyables scoreurs de la NCAA

À ce rythme, Chris Jackson devient vite une machine à shooter. Malgré sa « réputation » locale, il est courtisé par les meilleures universités. Pour ne pas trop s’éloigner de ses racines, il choisit Louisiana State University.

Dès la première année, c’est le carton plein : meilleur marqueur de la South Eastern Conference avec 30.2 points par match et le record NCAA pour un freshman avec 55 points dans une rencontre. Chris est tellement au-dessus du lot qu’il ne restera que deux ans à LSU. Sur 64 matches, il marque plus de 20 points à 52 reprises. Cela englobe 28 matches à plus de 30 points, 11 à plus de 40 et 4 à plus de 50…

Dale Brown, coach de LSU, le dit touché par la grâce de Dieu. Alonzo Mourning, alors à Georgetown, ne voit « pas de meilleur shooteur que lui dans tout le pays ». C’est l’heure d’aller voir ce qui se passe en NBA.

Denver le choisit en 3e position de la Draft 1990 (d’où le numéro 3 sur son maillot). Doug Moe, le coach de l’époque, va jusqu’à le qualifier de « mini-Jordan », rapport à son mètre 83. La suite ressemble plutôt à un mini-désastre.

Sur les conseils de ses proches et de quelques coaches qui le trouvent un peu frêle, Chris Jackson prend du poids pendant l’été. Ajoutez à cela un problème de chevilles —excroissance osseuse aux deux pieds—, qu’il préfère régler plus tard, et le feu follet se transforme en tracteur. Méconnaissable. À tel point que Paul Westhead, qui a remplacé Doug Moe sur le banc, doit regarder une K7 vidéo pour se souvenir du joueur qui a été drafté…

Pour compléter le tableau, Chris a du mal à vivre sa maladie dans le contexte NBA. Des onomatopées lâchées involontairement lui valent des coups de sifflet. Des coups de coude nerveux ont tendance à exaspérer ses coéquipiers, assis à ses côtés dans l’avion ou à table. Les journalistes, eux, n’ont pas toujours la patience nécessaire quand, durant les interviews, Chris répond machinalement aux questions… Dans l’ignorance de ce cas particulier, on le juge arrogant ou, « au mieux », idiot.

« Quand je me réveille, j’essaye constamment de contrôler ma voix, mon intonation, la tension, les mouvements », détaillait Abdul-Rauf en 2018 « On bouge constamment. Les gens pensent que je m’échauffe mais la plupart du temps, c’est Tourette. On apprend comment le camoufler. Ces moments de quiétude n’ont pas de prix. Certains l’ont toute la journée. Ils prennent ça pour acquis. »

Most Improved Player en 1993

Malgré des chiffres somme toute honorables pour sa saison rookie (14.1 points de moyenne), Chris Jackson déçoit. Il est en conflit permanent avec Paul Westhead qui ne supporte pas de devoir bâtir une équipe autour d’un joueur sous traitement médical. Avec ses tics, ses hoquets et ses bourrelets, Jackson énerve le coach. L’année suivante est pire et, pourtant, ses chevilles sont désormais en état. Il connaît le banc plus souvent qu’à son tour, mais la confiance ne disparaît pas pour autant : « Mon heure viendra », assure-t-il à sa mère pendant l’été 1992.

Alors Chris met tout en œuvre pour y arriver. Il devient un pilier de la salle de musculation : six heures de travail par jour et un minimum de 600 shoots par séance lui font perdre… 15 kilos. En arrivant au camp d’entraînement suivant, il met tout le monde d’accord. Dan Issel, le nouveau coach, avait prévenu qu’aucune place n’était attribuée d’office. Mais Chris prend vite la sienne : meneur titulaire. « Il est sorti de sa coquille », constatait l’ailier Reggie Williams.

On a affaire à un autre homme. D’ailleurs, Chris Jackson n’est plus. En se convertissant à l’Islam durant l’été 1991, il est devenu Mahmoud Abdul-Rauf (traduction proposée : élégant, charitable et bon).

Le changement se confirme à la fin de la saison 1992/93, quand il est élu Most Improved Player avec des moyennes de 19.2 points, 4.2 passes et 2.8 rebonds (à 45% au shoot, dont 36% à 3-points, et 94% aux lancers…). De retour de La Mecque, il parlait de « la plus grande expérience de (sa) vie ».

Mahmoud n’a alors qu’une envie : y retourner. « Je n’ai pas souffert suffisamment », expliquait-il, à la recherche de la perfection comme toujours. Quand on parle basket, le discours est du même tonneau : « L’année dernière, j’étais en mission. Cette année, je veux tout détruire. Je n’ai plus de temps à perdre. Une carrière en NBA est courte. »

En plus de ses cinq prières quotidiennes, Mahmoud Abdul-Rauf aligne les grosses performances, tournant à plus de 16 points de moyenne pendant trois ans (dont une nouvelle pointe à 19.2, en 1995/96). Une urgence rendue encore plus brûlante par l’évolution de sa maladie, qui entraîne souvent une dégénérescence mentale.

Une fin de carrière comme globe-trotter

La vie n’est pas un long fleuve tranquille. Encore moins pour Abdul-Rauf. Expédié à Sacramento durant l’été 1996, il devient la deuxième option offensive après Mitch Richmond (13.7 points sur 75 matchs), avant de cirer le banc derrière Anthony Johnson. Son temps de jeu tombe à 17 minutes (7.3 points sur 31 matchs) au cours de cette saison 1997/98 qui voit les débuts chez les Kings de son frère en religion : le Français Tariq Abdul-Wahad.

Mahmoud Abdul-Rauf s’envole alors pour la Turquie, direction Fenerbahçe. En 2000, après une année sabbatique, il est de retour en NBA, à Vancouver, comme deuxième doublure de Mike Bibby. Shareef Abdur-Rahim, lui aussi fervent musulman, y flambe d’ailleurs pour rien (20.5 points).

Après cet épisode Grizzlies, Abdul-Rauf s’interrompt deux ans, réapparaît en Russie puis en Italie, et annonce une troisième fois sa retraite… rompue en 2006. On le reverra en Grèce et en Arabie Saoudite, après une nouvelle coupure d’un an. À 40 ans, il s’expatrie au Japon et, finalement, on le retrouve en 2018 dans la Big3, cette ligue de vétérans montée par Ice Cube.

Il n’a pas changé, toujours aussi lucide sur notre société mais aussi sur son sport et ses envies.

« J’imagine que j’aime vraiment le jeu mais je suis juste compétitif. Je comprends que perdre fait partie de la vie », confiait-il. « J’imagine que tout dépend de comment on voit la défaite. […] Quand je perds, je dis : ‘Je n’ai pas perdu, j’ai appris’. Je déteste que les gens ne comptent pas sur moi et m’excluent. On discrimine énormément, parfois on se discrimine soi-même : ‘Parce que je suis vieux, je ne suis pas capable de, etc…’ Non, non, non. Nous avons la capacité de nous adapter et d’accomplir de grandes choses. C’est tout ça qui me fait continuer… »

Au-delà des chiffres —leader au pourcentage de réussite aux lancers-francs en 1994 et 1996, à un lancer réussi du record de Calvin Murphy sur une saison—, Mahmoud Abdul-Rauf laisse l’image d’un homme pieux qui a puisé dans la religion la force de combattre un mal vicieux.

Un homme qui osa aussi défier la NBA au nom de ses croyances, refusant d’écouter « The Star-Spangled Banner » face au drapeau américain avant chaque match. Une bannière étoilée symbole pour lui de « répression » dans un pays ayant un lourd « passé de tyrannie ». Suspendu pour un match en mars 1996, Abdul-Rauf obtient quand même le droit de pouvoir fermer les yeux ou de regarder en bas pendant l’interprétation de l’hymne. Il prit d’ailleurs l’habitude de réciter une prière en silence…

Vingt-cinq ans plus tard, les joueurs se mettent à genoux pendant l’hymne, le poing levé vers le ciel…

Mahmoud Abdul-Rauf Pourcentage Rebonds
Saison Equipe MJ Min Tirs 3pts LF Off Def Tot Pd Fte Int Bp Ct Pts
1990-91 DEN 67 23 41.3 24.0 85.7 0.5 1.3 1.8 3.1 2.2 0.8 1.6 0.1 14.1
1991-92 DEN 81 19 42.1 33.0 87.0 0.3 1.1 1.4 2.4 1.6 0.5 1.4 0.1 10.3
1992-93 DEN 81 34 45.0 35.5 93.5 0.6 2.2 2.8 4.3 2.2 1.0 2.3 0.1 19.2
1993-94 DEN 80 33 46.0 31.6 95.6 0.3 1.8 2.1 4.5 1.9 1.0 1.9 0.1 18.0
1994-95 DEN 73 29 47.0 38.6 88.5 0.4 1.4 1.9 3.6 1.7 1.1 1.6 0.1 16.0
1995-96 DEN 57 36 43.4 39.2 93.0 0.5 2.0 2.4 6.8 2.1 1.1 2.0 0.1 19.2
1996-97 SAC 75 28 44.5 38.2 84.6 0.2 1.4 1.6 2.5 2.3 0.8 1.6 0.1 13.8
1997-98 SAC 31 17 37.7 16.1 100.0 0.2 1.0 1.2 1.9 1.0 0.5 0.6 0.0 7.3
2000-01 VAN 41 12 48.8 28.6 75.9 0.1 0.5 0.6 1.9 1.2 0.2 0.6 0.0 6.5
Total   586 27 44.2 35.4 90.5 0.4 1.5 1.9 3.6 1.9 0.8 1.6 0.1 14.6

Comment lire les stats ? MJ = matches joués ; Min = Minutes ; Tirs = Tirs réussis / Tirs tentés ; 3pts = 3-points / 3-points tentés ; LF = lancers-francs réussis / lancers-francs tentés ; Off = rebond offensif ; Def= rebond défensif ; Tot = Total des rebonds ; Pd = passes décisives ; Fte : Fautes personnelles ; Int = Interceptions ; Bp = Balles perdues ; Ct : Contres ; Pts = Points.

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