Si les Warriors sont devenus la meilleure équipe défensive de la ligue cette saison (98.2 points concédés sur 100 possessions), ce n’est pas uniquement en raison des qualités de leurs joueurs dans ce secteur. Après tout, Andrew Bogut, Draymond Green, Andre Iguodala ou encore Klay Thompson étaient déjà présents l’an passé et si l’équipe était déjà bonne de ce côté du terrain (99.9 points concédés / 100 possessions), elle parvient désormais à conserver cette rigueur en playoffs (même moyenne de points concédés qu’en saison). De plus, tout au long de ces playoffs, l’équipe a fait preuve de nombreux ajustements défensifs audacieux pour neutraliser leurs adversaires, tels que le décalage d’Andrew Bogut sur Tony Allen dans le Game 4 des demi-finales de conférence face à Memphis ou le lancement d’Harrison Barnes sur Zach Randolph puis sur James Harden en finale de conférence. Cette rapidité d’adaptation, Golden State la doit avant tout à un homme, Ron Adams, assistant de Steve Kerr en charge de la défense.
Arrivé cet été avec le coach, le stratège fait des miracles avec ce groupe. À tel point que l’arrière des Rockets, qui l’a connu à Oklahoma City, se méfiait de lui avant ce Game 3.
« C’est gratifiant de voir tous les joueurs se donner en défense »
« Je sais qu’il garde un atout dans sa manche, » avait-il déclaré avant la rencontre au Mercury News.
Au final, Harrison Barnes et ses coéquipiers ont limité le dauphin au trophée de MVP à 17 points et 3/16 aux tirs. À l’issue du match, Ron Adams détaillait précisément cette décision de mettre Harden sous la tutelle de son jeune ailier.
« Un joueur un peu plus costaud et solide. James (Harden) est si puissant, les gens ne savent pas à quel point il l’est. » a t-il expliqué au quotidien san-franciscain. « C’est l’un des joueurs les plus costauds de la ligue pour sa taille. Il peut repousser les adversaires relativement facilement et Harrison est un gars puissant et costaud. Il a fait du bon travail, » a t-il confié par la suite. « L’un des facteurs les plus déterminants est que l’on a fermé l’espace sur lui, nous l’avons joué avec plus d’agressivité. Nous étions assez bons les deux premiers matchs mais là, c’était différent. »
Depuis son arrivée, l’ensemble de l’équipe s’est ainsi mis au diapason en défense. Même Stephen Curry, jusqu’ici peu réputé dans ce domaine, s’est attelé à cette activité depuis le début de la saison, ce que l’assistant apprécie beaucoup.
« J’ai vraiment été excité quand j’ai vu Steph Curry prendre le rebond (deux rebonds offensifs autoritaires sur les Rockets et, notamment, Dwight Howard). Il fait un travail incroyable depuis la dernière série au rebond. Je sais que pour vous, il a avant tout été brillant offensivement mais il fait beaucoup de petites choses extrêmement importantes mais qui ne sont pas médiatisées et… c’est simplement gratifiant. C’est aussi gratifiant de voir Leandro (Barbosa) jouer et se donner entièrement en défense. Je pourrais faire la liste de tous les gars. »
Avery Bradley : « Tout le monde dit que c’est un grand coach »
Golden State connait bien cette citation d’un célèbre coéquipier de Steve Kerr aux Bulls : « L’attaque fait lever les foules, la défense fait gagner des titres. » Jusqu’ici, l’équipe applique cette doctrine à la lettre. Une doctrine savamment soignée par Ron Adams depuis le début de sa carrière. Ancien coach universitaire (il fut assistant de Jerry Tarkanian lors de la saison légendaire d’UNLV en 1990), Ron Adams est un pédagogue dans l’âme. Épris de la formation, il apprécie de transmettre son savoir aux plus jeunes, joueurs ou coaches, tout en ayant l’intelligence d’apprendre de leur spontanéité.
« J’ai appris il y a longtemps que l’on peut apprendre de tellement de gens différents et que l’âge est parfois insignifiant. J’ai beaucoup appris d’un jeune garçon qui fut un temps mon manager et qui est devenu comme un fils pour nous avant que nous ayons des enfants (…) Il avait 14 ans et j’étais coach de Fresno State à cette époque. C’était ma première expérience professionnelle avec un garçon plus jeune. C’était vraiment un grand apprentissage pour moi, » confie t-il au Mercury News.
Depuis son arrivée en NBA, il perpétue ce lien avec son environnement. Assistant/coach de Boston l’an passé, ses anciens joueurs l’appréciaient énormément.
« C’est tellement cool qu’il soit dans notre staff. Tout le monde le respecte tellement et ne cesse de dire à quel point c’est un bon entraîneur, » s’enthousiasmait ainsi Avery Bradley auprès du Boston Globe. « Chaque joueur que j’ai vu travailler avec lui a toujours quelque chose à dire sur les petits détails qu’ils ont pu ajouter à leur panoplie grâce lui. C’est un grand renfort, » poursuivait Brandon Bass.
À chacun de ses passages, les défenses de ses équipes progressent
Sa plus longue expérience en NBA, il l’a vécue avec les Bulls entre 2003 et 2008 puis entre 2010 et 2013. Viré par Gar Forman pour une mésentente au sujet du temps de jeu des joueurs, Ron Adams avait pourtant contribué à faire des Bulls l’une des meilleures équipes défensives sous son ère. 17e défense de la ligue en 2003 avec 100.5 encaissés sur 100 possessions, Chicago est ainsi devenu la deuxième défense du pays un an plus tard (97.5 points/100 possessions). Mêmes résultats avec le Thunder, 20e défense de la ligue avec 106.9 points concédés sur 100 possessions en 2008/09 (année de son recrutement) puis 8e en 2009/19 (101.6 pts/100 poss).
Retour à Chicago : l’équipe est 10e dans ce secteur en 2009/10 sans lui, avant de repasser 1ère dans cette catégorie en 2010/11. Les chiffres sont trop éloquents pour que ce bilan ne soit qu’une simple coïncidence.
Priorité de Brad Stevens au moment d’étoffer son staff l’an passé, Ron Adams aime entourer des entraîneurs de qualité et ces derniers le lui rendent bien :
- John Lucas, son head-coach aux Sixers ? « Quand il a travaillé avec moi, il arrivait juste dans la ligue mais il est devenu l’un des meilleurs assistant-coaches, » a t-il déclaré à NewsOk.
- George Karl, aux Bucks ? « Ron a fait un boulot incroyable en me débarrassant du travail de préparation et de développement. »
- Tom Thibodeau, lui-même réputé pour sa science défensive ? « Ron est un grand ami, un coach remarquable et il va me manquer, » déclarait-il après le licenciement de ce dernier en 2013.
- Brad Stevens ? « Ce que j’aime à son sujet, c’est qu’il comprend le processus, il comprend la situation globale mais il vous défie chaque jour afin que vous soyez excellent. »
« C’est l’effort qui vous mène jusqu’au sommet »
Au cours d’une rencontre de novembre dernier, les Warriors se retrouvaient distancés d’un point par les Blazers à quelques secondes de la fin. Beaucoup d’entraîneurs auraient alors appelé leurs joueurs à la faute, et c’est ce que Steve Kerr allait faire, avant que Ron Adams ne le convainque du contraire. Une décision alors saluée par l’entraîneur des Warriors.
« Ron Adams m’a dit : ‘Faisons plutôt une prise à deux. Essayons de les pousser en touche et ne faites pas faute à moins qu’on ne soit vraiment obligés de le faire. Il a imaginé cette séquence parfaitement, » commentait l’entraîneur après la rencontre.
C’était un souhait des dirigeants de Golden State, refusé par Mark Jackson : le staff de coaches devait être fourni en stratèges de qualité, d’autant plus avec un head-coach inexpérimenté. En acceptant la proposition des Warriors, Steve Kerr a eu l’intelligence de suivre ce conseil à la lettre avec Alvin Gentry, parmi les meilleurs coaches pour l’attaque, et Ron Adams, son alter-ego défensif.
Pour le moment, cela porte chance aux Warriors en route pour leur première finale depuis 1975. Et pour Ron Adams, c’est l’occasion de consacrer une carrière bien remplie par 13 années de banc NBA malheureusement toujours dénuées de titre. Et pour un homme habitué à l’ombre, il n’y aurait pas de meilleure reconnaissance.
« C’est l’effort qui vous mène vraiment jusqu’au sommet, » a t-il conclu auprès de la presse californienne.