Vendredi soir face aux Lakers, Jordan Bell a enregistré le premier double double de sa carrière (20 points, 10 rebonds), tout en établissant son record de points sur un match. Cette performance était la confirmation d’un potentiel dévoilé par petites touches depuis le début de saison à coups de dunks et de contres spectaculaires mais aussi de passes dignes de son mentor Draymond Green.
Steve Kerr n’était pourtant pas entièrement satisfait des prestations de son rookie, limitant du même coup son temps de jeu. Quand Jordan Bell a scotché une tentative de dunk de Brandon Ingram lundi au Staples Center, le technicien aurait préféré le voir sprinter de l’autre côté du terrain pour finir en trailer plutôt que de le voir chambrer sa victime.
Sur les 31 premiers matchs de la saison, les exemples de ce genre étaient nombreux et en étant exigeant avec son joueur, Steve Kerr le prépare à avoir le rôle important qui lui tend les bras.
« J’ai maintenant un meilleur feeling »
Après le match de vendredi, l’entraîneur avait toutefois laissé son costume de père Fouettard au vestiaire pour faire l’éloge de son nouveau protégé.
« Jordan a été énorme et ça ne m’a pas surpris, » décrivait-il après la rencontre. « Face à une équipe comme les Lakers, vous avez besoin de joueurs polyvalents et à l’instar de KD et Draymond, Jordan a toutes les qualités requises pour exceller à l’intérieur mais aussi à l’extérieur. Ce soir, il a fait les bons choix face à leur pression défensive, il était au bon endroit et a eu beaucoup de paniers faciles. Il a été impressionnant. »
Suite aux blessures de Zaza Pachulia et de Draymond Green, Jordan Bell a été titulaire lors des six derniers matchs, engrangeant un maximum d’expérience et devenant plus à l’aise dans le collectif offensif et défensif des Dubs. Steve Kerr répète sans cesse que le jeu NBA n’a rien avoir avec le jeu universitaire, et le rookie est en train de prendre la mesure de ses différences.
« Il fallait, et il faut encore, que je m’habitue au jeu NBA, il fallait que j’apprenne notre système et que je me familiarise avec nos adversaires, » explique-t-il. « Je sais où me placer, et j’ai maintenant un meilleur feeling pour trouver les bons angles, poser les écrans, et appliquer ce que le coach me demande. »
Vendredi, en observant Jordan Bell, on aurait ainsi cru voir un jeune Draymond Green découvrir toutes les possibilités qui sont à sa disposition dans le jeu des Warriors.
« Disons que si je pose un écran pour KD, la défense va le trapper et du coup j’ai juste à me rendre disponible. Après il s’agit de prendre la bonne décision lors du quatre contre trois. Et on a tellement de bons shooteurs que la défense doit faire un choix et c’est à moi de trouver le joueur ouvert, » décrivait-il après le match.
« Il pose des questions, il est très curieux… Il apprend vite »
Quelques années auparavant, Draymond Green était passé par le même apprentissage mais dans un contexte totalement différent. À cette époque, les jeunes Warriors découvraient leur potentiel et apprenaient tous ensemble. Jordan Bell arrive lui dans un collectif rodé, fort de deux titres NBA, d’innombrables records, et composé de futurs Hall of Famers à toutes les positions.
Il a donc tout à sa disposition pour progresser à vitesse grand V mais encore faut-il avoir le bon état d’esprit et l’intelligence de jeu nécessaire pour tirer profit de cette opportunité. Kevon Looney et Damian Jones l’ont eu avant lui, sans toutefois montrer le même genre de promesses.
« C’est sympa de voir sa progression depuis le début de saison. C’est une éponge. C’est une personne à qui vous pouvez parlez, qui va vous regarder dans les yeux et acquiescer, et tout de suite enregistrer l’information, » commente Draymond Green. « Il pose des questions, il est très curieux, il ne pense pas tout savoir, au contraire. Quand il est sur le terrain, il joue dur mais vous pouvez aussi voir qu’il sent le jeu et qu’il apprend vite. C’est une qualité importante et rare pour un rookie. »
Le prototype même du pivot moderne de petite taille
Jordan Bell a donc le potentiel pour être comme un poisson dans l’eau à Golden State, et par extension dans la NBA d’aujourd’hui. Avec de plus en plus d’équipes qui copient le style de jeu des Warriors, il est le prototype idéal du pivot polyvalent de petite taille. Et si Steve Kerr n’est pas encore prêt à laisser tomber ses pivots plus traditionnels comme Zaza Pachulia ou David West, l’émergence de Jordan Bell vient s’ajouter à l’abondance de richesse des champions en titre.
« On a toujours besoin de tous nos « gros » 5 car il y aura toujours des matchs où vous devez défendre un pivot plus traditionnel poste bas, » concède l’entraineur des Dubs. « Mais de plus en plus de matchs sont comme celui de ce soir (contre les Lakers) où tout le monde tire à 3-points et attaque le cercle pour faire vivre la balle. Et dans ces circonstances, vous avez besoin d’un pivot de petite taille. »
Avec Draymond Green, les Warriors possédaient déjà la référence en la matière, et avec Jordan Bell, ils ont le luxe de pouvoir developper son clone pour préparer l’avenir. On a hâte de le voir ce soir face aux Cavaliers où il devra sans doute défendre sur LeBron James et Kevin Love selon les séquences.
Propos recueillis à Oakland.