Le rebondeur Russell Westbrook, symbole d’une NBA en mutation

Prenez le Top 15 des meilleurs rebondeurs cette saison. Vous n’y trouverez rien d’autre que des pivots, quelques postes 4… et un invité surprise : Russell Westbrook. Le meneur du Thunder occupe la douzième place du classement avec ses 10.5 rebonds de moyenne. C’est plus que Tristan Thompson ou Jonas Valanciunas (qui jouent certes un peu moins) !

Cette donnée fait toute la différence dans sa course à l’histoire, à savoir terminer la saison en triple-double de moyenne. C’est d’ailleurs ce qui impressionne le plus l’illustre Oscar Robertson, le seul à avoir réussi cet exploit : « Qu’il score et fasse des passes, ça ne me surprend pas. Mais son instinct pour le rebond est sans équivalent. »

« Plus de tirs à 3-points signifie beaucoup de rebonds longs »

Cette « anomalie » Westbrook n’est pas un cas isolé. Un peu plus loin dans le même classement, on trouve Giannis Antetokounmpo (8.7 prises), James Harden (8.2), Nicolas Batum (7.2) ou encore Avery Bradley (6.9) qui n’est autre que… le meilleur rebondeur des Celtics ! Cette saison, 10 des 50 meilleurs de la catégorie sont des arrières ou ailiers. L’an passé, ils étaient six. L’année encore d’avant, seulement quatre. Comment expliquer cette tendance ? Du côté des Celtics, Brad Stevens pense que les bonnes prestations de son arrière, avant son absence, sont liées à ses coéquipiers.

« Avery fait un super travail dans la récupération du ballon, mais il sera le premier à vous dire que ses rebonds sont liés aux écrans de retard de nos intérieurs. On ne donne pas de crédit à Amir, Kelly, Tyler, Jonas ou Jordan dans ces rebonds, mais ce sont eux qui créent l’espace permettant aux arrières de récupérer le ballon. »

L’œuvre du collectif donc, mais pas que. Bradley Beal, qui lui n’est pas vraiment concerné par le phénomène, a un autre élément de réponse.

« Le jeu change. Plus de tirs à 3-points signifie beaucoup de rebonds longs, donc les arrières vont en capter davantage, c’est certain. »

L’argument semble logique. Tirer de plus en plus loin, avec des courbes nécessairement plus élevées, donne davantage d’opportunités pour les joueurs de plus petite taille, pas forcément proches du cercle. Or le jeu NBA actuel est de plus en plus porté sur le tir primé. Chaque match compte en moyenne 35 tirs ratés derrière l’arc, soit 37% de l’ensemble des tirs manqués. Cinq ans plus tôt, cette même moyenne se portait à 26 tirs.

« Grâce à ces longs rebonds sur les tirs à 3-points, il y a plus de rebonds à prendre autour de la ligne des lancers-francs, où des joueurs, même s’ils sont placés derrière l’arc, peuvent se placer », observe Billy Donovan. « J’ai toujours pensé que les grands rebondeurs sont ceux qui peuvent lire la trajectoire du ballon et qui peuvent dire où il va atterrir avant d’atterrir. Russell a cette capacité, ce talent. »

Un plus pour lancer la contre-attaque

Dans le cas Westbrook, il s’agit donc autant des qualités physiques exceptionnelles du joueur, que de sa bonne lecture des courbes. Voir son meneur prendre le rebond donne un avantage évident au Thunder : plus besoin de faire une sortie de balle. En récupérant le ballon lui-même, Russell Westbrook peut dans la foulée déclencher la contre-attaque. Résultat, si OKC est loin d’être l’attaque la plus efficace de la ligue, Oklahoma peut compter sur ses 17 points sur jeu rapide chaque soir, soit le troisième plus gros total de NBA.

« À chaque fois qu’il prend le rebond, il a l’opportunité de démarrer la contre-attaque », note John Wall. « C’est difficile de l’arrêter quand il a le ballon et qu’il arrive à pleine vitesse. »

Un compliment que Russell Westbrook pourrait tout à fait rendre à son homologue des Wizards, même si ce dernier capte bien moins de rebonds. C’est d’ailleurs dans la déroute à Washington que le joueur du Thunder a cumulé son plus petit total avec 4 rebonds.

Le vétéran de 36 ans, Nick Collison, impressionné par les qualités athlétiques ahurissantes de son meneur, a été le témoin d’une évolution depuis son arrivée dans la ligue il y a quelques années.

« Je me souviens ma première fois dans la ligue, il y avait toujours deux grands sur le terrain. Habituellement, l’un des deux n’était pas vraiment un grand attaquant. Il était juste le gars qui devait s’occuper du rebond. »

Le « small ball » a depuis lors changé la donne.

Comment lire les stats ? MJ = matches joués ; Min = Minutes ; Tirs = Tirs réussis / Tirs tentés ; 3pts = 3-points / 3-points tentés ; LF = lancers-francs réussis / lancers-francs tentés ; Off = rebond offensif ; Def= rebond défensif ; Tot = Total des rebonds ; Pd = passes décisives ; Fte : Fautes personnelles ; Int = Interceptions ; Bp = Balles perdues ; Ct : Contres ; Pts = Points.