Chaque jeudi, Basket USA vous propose son « Throwback Thursday », votre moment détente et nostalgie de la semaine. Après Matt Harpring la semaine passée, on poursuit aujourd’hui avec Corey Maggette, l’ancien des Clippers et des Warriors notamment.
Véritable Apollon des parquets, athlète exceptionnel taillé dans le marbre, Corey Maggette est un de ces joueurs symboliques de la nouvelle génération qui a débarqué en NBA au début des années 2000. Monstre physique capable de décrocher le cocotier avec une détente hallucinante, il a fait les beaux jours des Clippers, des Bucks ou encore des Warriors avant de devoir raccrocher après de multiples opérations au genou.
Désormais actionnaire de l’Asvel avec Tony Parker et Michael Finley, Corey Maggette a évoqué pour nous ses souvenirs avec les Clippers de l’an 2000, son concours de dunks en 2001 ou encore les débuts de Stephen Curry à Golden State. Un vrai bonheur d’interview…
Corey, vous avez été drafté en 1999 par les Supersonics, avant finalement d’atterrir à Orlando (dans un échange contre Horace Grant), de quel oeil voyez-vous l’évolution du jeu vers le tir extérieur à outrance et plus trop de jeu intérieur ?
« Ce qui se passe actuellement, c’est que le jeu ressemble de plus en plus au jeu européen. Les joueurs qui arrivent maintenant sont beaucoup plus doués au niveau du tir, des fondamentaux. J’ai toujours remarqué ça de la part des joueurs européens, leurs fondamentaux sont toujours nickel. On voit maintenant les joueurs américains revenir aussi à ces choses-là. Personnellement, j’aime bien les deux époques. J’ai joué pendant les années 90 et maintenant, on est arrivé au moment où les joueurs signent des contrats indécents. Enfin, c’est bien, hein, ça prouve que la ligue fait bien son travail. Je suis content de l’évolution générale du jeu. »
« Les Clippers, c’était le bon temps. J’adore cette période-là ! »
Vous avez connu pas mal d’équipes durant votre carrière mais on se souvient surtout de vous en tant que joueur des Clippers. Et particulièrement de cette équipe des années 2000, avec Lamar Odom, Darius Miles, Quentin Richardson… Une équipe de lycéens quasiment, avec énormément de hype. Quels sont vos souvenirs de cette époque ?
« Ce qu’il faut dire d’abord, c’est que les Clippers n’étaient pas bons du tout à l’époque. Mais on leur a donné de la vie ! Darius, Lamar, Quentin… on avait un groupe de jeunes qui a redonné de la vie à cette franchise. On faisait le show. C’était le Showtime façon Clippers. On était jeune et on ne savait pas vraiment ce qu’on devait faire. Mais on croquait dans la vie. On s’amusait en jouant au basket. Et les fans, la ligue ont commencé à voir ce qu’on faisait. On était vraiment sympa à voir jouer. Je pense qu’à terme, on aurait pu devenir une équipe de playoffs. Mais les dirigeants en ont décidé autrement. Ils ont cassé le noyau dur et après, c’était fini. »
Qu’est-ce qui vous a manqué pour réussir à LA ? De la discipline, une ligne directrice ?
« Un peu des deux à mon avis. Vous savez, on était très jeune. 18, 19 ou 20 ans. Pas mal de gars sortis tout juste du lycée, très immatures. On avait un coach [Alvin Gentry] qui ne savait pas encore comment être coach, surtout pour des jeunes gars comme ça. Je pense que si on était resté ensemble un peu plus longtemps… On aurait pu voir quelque chose de différent. Mais c’est le genre de choses qui arrivent tout le temps en NBA, où il faut attendre la bonne opportunité pour que chaque joueur montre son véritable potentiel. Comme Quentin Richardson avec les Suns après. Il a joué pour D’Antoni avec Steve Nash pour des équipes qui étaient très fortes. Et puis Lamar a été avec les Lakers pour deux titres NBA. C’était vraiment sympa de voir comment les choses peuvent évoluer quand on met les gars dans les bonnes conditions. »
Quand on y repense, on se dit toujours que c’est super dommage de ne pas avoir vu cette équipe plus longtemps… Diriez-vous que cette période chez les Clippers est celle que vous avez préféré ?
« Oui, on avait du talent à tous les postes. Même en sortie de banc, on avait des gars solides. C’était vraiment la bonne époque quand même. J’adore cette période-là ! »
N’avez-vous pas de regrets par rapport à cette période ?
« Non. Je dirais plutôt que j’en ai par rapport à mes deux dernières années. Quand j’étais à Milwaukee. En fait, même avant quand j’étais à Golden State, je me suis tordu la cheville. Ensuite, j’ai dû me faire opérer du genou. Encore après, j’ai eu une blessure au dos et à nouveau au genou quand j’étais avec les Pistons. Et enfin, quand j’étais avec les Spurs [au camp d’entraînement 2013], quand ils ont gagné le trophée en 2014, j’ai à nouveau dû passer sur le billard pour mon genou. C’est le genre de blessures qui me travaillent encore maintenant. C’est difficile à avaler, mais les blessures font partie du jeu. On ne veut jamais qu’elles arrivent mais je m’en suis quand même sorti. »
Avec les retraites de Bryant, Garnett et Duncan, les années 90 disparaissent de la NBA… Quel était votre rival le plus coriace sur les planches ?
« Il reste deux gars de cette période encore en lice. Paul Pierce chez les Clippers et Vince Carter à Memphis. Ce sont deux gars incroyables pour moi. Vince Carter était un athlète exceptionnel, un joueur fantastique. Paul Pierce, je m’entraînais avec et contre lui chaque été. Et il est encore dans la ligue cette année ! Il faut vraiment apprécier ces gars-là à leur juste valeur. Ils ont tellement apporté au basket. Maintenant, c’est une nouvelle génération : LeBron James, Steph Curry et même des gars comme Joel Embiid qui arrivent sur la scène. Il y a tellement de nouveaux talents. On a vraiment de la chance d’avoir une ligue si riche en talents… Maintenant que je bosse avec la ligue, je vois bien comment l’image de la NBA a changé. On voit de plus en plus d’argent investi parce que la ligue a changé son image de marque. »
Vous venez d’évoquer Steph Curry, vous avez joué avec lui quand il était rookie. Pouvait-on prévoir une telle explosion pour ce meneur au début de carrière compliqué ?
« Non, franchement. Mais par contre, on pouvait voir qu’il avait déjà une vraie éthique de travail. Ce que je peux dire également, c’est qu’il est très humble. Il venait toujours à l’entraînement prêt à bosser, prêt à apprendre, il posait tout le temps plein de questions. Moi, à l’époque, je faisais partie des vétérans de l’équipe et il n’hésitait pas à venir nous demander conseil. Et c’est toujours un bon point pour un jeune joueur. Il a connu pas mal de complications et de tourments avec ses blessures à la cheville. J’étais là quand ça lui est arrivé, et les gens ont commencé à le mettre aux oubliettes. Mais ça montre sa force de caractère, sa persévérance. Il n’a jamais abandonné. »
« Tony Parker sera propriétaire d’une franchise NBA, c’est sûr ! »
C’était exactement le message de la dernière pub pour son équipementier…
« Ça montre également qu’il ne faut jamais mettre un gars sur la touche trop rapidement en NBA. Parfois, ça ne marche pas forcément les deux ou trois premières saisons, mais une fois que le joueur a compris ce qu’il faut faire, qu’il est dans une bonne situation, dans de bonnes conditions, il peut tout exploser. »
J’ai toujours voulu vous demander ce qui s’est passé au Slam Dunk Contest en 2001. Vous avez passé un dunk après avoir réalisé un frontflip !?!
« Oui, oui, j’ai fait ça [rires] ! »
Le dunk vous a valu un 46 (sur 50) mais c’était tout simplement incroyable. Du jamais-vu. Un peu dans l’esprit de la roue de Michael Finley dans un autre concours, en 1997…
« Oui, tout à fait. En fait, Michael Finley et moi, on est du même quartier. Il était mon modèle en grandissant. Quand j’étais jeune, je faisais des saut périlleux. Je me suis dit, et pourquoi ne pas le faire dans un concours de dunks. Au début, je n’étais pas très chaud et puis finalement, je me suis dit que j’allais le faire. J’ai longtemps hésité, mais sur un coup de tête, je me suis dit que je le ferai. Je savais que je pouvais placer le saut mais bon, j’aurais certainement dû faire un dunk un peu plus créatif après. Mais c’est comme ça, c’était plutôt bien quand même ! »
Vous êtes devenu actionnaire dans le club de Lyon-Villeurbanne avec Tony Parker, comment s’est faite cette connection entre vous, outre le fait que vous ayez joué ensemble rapidement chez les Spurs ?
« Comme vous le savez, la famille de Tony Parker est de Chicago. Je suis de Chicago. Ses frères ont joué là-bas, à Northwestern notamment, et j’ai eu la chance de jouer contre eux. Ils sont aussi venus me voir à Hoops – The Gym à Chicago. En fait, j’ai d’abord commencé à cotoyer ses frères avant Tony. Avec Tony, notre relation a commencé en NBA. Même si on n’était pas dans la même équipe, on a commencé à discuter et devenir proche au fur et à mesure des années. Et quand il a commencé à parler de son projet, j’étais intéressé. Avec Michael Finley qui, comme je vous l’ai dit est un de mes modèles, on en a discuté et on a accepté. Tony est un gars hyper-motivé. Il sait ce qu’il veut… et je peux vous le dire : Tony sera le propriétaire d’une équipe NBA un de ces jours ! Ça va arriver, je peux vous l’assurer. Il est très ambitieux. Il bosse déjà énormément pour être le meilleur sur le parquet mais il bosse encore plus dur hors des terrains pour s’occuper de son club, passer les coups de fil. Il est vraiment impliqué à fond dans ce projet. J’adore sa passion. Tony a un cercle d’amis très restreint et ça signifie quelque chose pour moi d’en faire partie. C’est un ami très proche. »
Et vous avez gagné le titre la saison passée…
« Oh mon Dieu ! C’était vraiment énorme ! On ne s’y attendait vraiment pas. Ça fait plus de trois ans maintenant que je suis dans le projet. Tony a dû virer un de ses anciens coachs. Ce n’était vraiment pas facile pour lui mais en même temps, ça lui a donné la confiance de faire les choix difficiles. Dans un environnement comme ça, il faut être capable de prendre ces décisions douloureuses. Et c’était sa meilleure décision. Moi, j’étais comme un gosse dans un magasin de confiseries ! C’était vraiment un pur plaisir d’être sur place pour voir les joueurs, voir les matchs et faire partie de cette célébration. »
Qu’avez-vous pensé de notre pays ?
« J’adore la France. La gastronomie, le vin, la langue… J’ai essayé d’apprendre le français mais ce n’est pas facile. C’est encore un projet en cours. J’aime venir en France, il y a tellement de culture dans ce pays. J’y vais tous les ans, c’est un vrai plaisir. »
Propos recueillis à Portland
Illustration : Harrison Freeman
Période Duke (1998-99)
Période Clippers (2000-08)
Période Warriors (2008-10)
Période Bucks
Période Bobcats (2011-12)