Passé des parquets aux plateaux télé, sans la moindre appréhension, Tracy McGrady n’a pas sa langue dans sa poche.
L’ancien scoreur patenté des années 2000, double meilleur scoreur en 2003 et 2004, a désormais pris l’habitude de sniper certaines tendances actuelles de la NBA. Comme par exemple, de critiquer le niveau global de la Grande Ligue, visant notamment les franchises qui font du tanking ou plus généralement une conférence Est sans concurrence aucune.
« LeBron doit encore tout faire ! »
Pour l’ancien du Magic ou des Rockets, la finale NBA va ainsi sombrer dans l’ennui le plus total si les Cavs ne changent pas leur approche. Dominés à deux reprises, malgré un duo Curry – Thompson limité à 20 points au premier match, les Cavaliers ne semblent pas à la hauteur du défi. Et en particulier à cause d’une conférence Est qui ne les a jamais préparés à une telle intensité…
« Ils ont une chance parce qu’ils sont arrivés jusque là, mais je les vois perdre en cinq manches. Je l’ai déjà dit pendant l’émission mais je pense que Love-Irving-James doivent produire 65 points par match au moins. Les autres joueurs de l’effectif doivent apporter quelque chose… Je sais que tu as mal à la main JR, mais il faut donner quelque chose. Iman Shumpert, Channing Frye… Je ne vois pas Frye avoir un quelconque impact d’ailleurs. Les Warriors changent sur tous les écrans et ils ne font pas de prise à deux. Du coup, il n’y a pas de position libre pour les shooteurs à l’extérieur. »
En essayant de jouer small ball, coach Lue et les Cavs se fourrent le doigt dans l’oeil. Et bien profond selon T-Mac…
« Personne ne peut battre les Warriors en jouant leur jeu. Et LeBron doit encore tout faire. Après ses finales à 35 points l’an passé, on disait, attendez de voir quand Love et Irving seront là… C’est la même chose ! LeBron doit encore tout faire. » soupire McGrady dans le podcast The Vertical. « Je pense qu’il vaut mieux placer LeBron à 45 degrés et l’entourer de shooteurs. Comme ça, il pourra mieux voir le terrain et faire la passe à ses gars si la prise à deux vient à lui. A ce moment-là, Frye peut de nouveau être utile. Et puis, ça fatiguerait moins LeBron. »
« Me serais-je vraiment senti champion en 2013 ? »
A son époque, McGrady a connu les critiques qu’essuie actuellement James. Superstar esseulée, King James a néanmoins plus de talent autour de lui que McGrady. Mais il faut également un peu de chance pour aller soulever le trophée.
« J’avais des statistiques impressionnantes. J’étais un super joueur, mais je n’ai jamais été dans une équipe qui pouvait vraiment prétendre au titre. On n’avait pas assez de talent. A Orlando, on avait le talent mais Grant Hill n’avait pas la santé. A Houston, j’avais Yao avec moi pour former un tandem mais il a eu des problèmes au pied. Et puis, quand on a eu le talent, avec Ron Artest, Shane Battier, c’est mon genou qui a explosé. On est évalué sur les titres de nos jours, mais tout le monde n’a pas la chance de pouvoir faire partie d’un prétendant au titre. Certains sont tombés face à Kobe et Shaq. D’autres face à Jordan, dans le cas de Charles Barkley, Patrick Ewing, Karl Malone ou John Stockton. »
Tout est une question de timing. Tracy McGrady l’a encore mesuré lors de son ultime aventure NBA, chez les Spurs, avec lesquels il a vécu les finales en 2013. Lorsque Ray Allen est venu crucifier San Antonio de son tir désormais entré dans la légende.
« Même si on avait gagné, qu’est-ce que cela aurait signifié pour moi ? Franchement. Ils m’ont pris en location pour deux mois. Je n’ai pas vraiment joué avec eux. Ils m’ont fait venir car ils avaient des blessés. En tant que compétiteur, ce n’est pas ce qu’on recherche. C’était une superbe opportunité car je n’avais jamais eu la chance de pouvoir atteindre les finales quand je jouais à mon meilleur niveau. Même si on avait gagné, comment me serai-je vraiment senti champion ? La beauté du titre, c’est d’avoir réussi à faire tout le chemin. Là, j’étais assis sur le banc. »
Il n’a pas tort, T-Mac ! Gagner le titre, ça vaut surtout quand on a fait toute la saison avec l’équipe. Voire mieux, quand on a connu les affres de saisons bien compliquées et qu’on arrive enfin à voir le bout du tunnel, et la gloire au bout (coucou Kevin Durant !).
De la relativité des récompenses individuelles
Sur un tout autre sujet, McGrady a souhaité donner un coup de projecteur sur un de ses adversaires les plus coriaces au début des années 2000.
« Jamal Mashburn était sous-estimé. C’était un gars très dur à contenir. Il faisait 2m03 et 109kg. Il savait parfaitement utiliser son corps au poste bas. Je n’arrivais jamais à le contrer. Il savait très bien utiliser son physique. Je me souviens d’un soir à la Nouvelle Orléans. Darrell Armstrong, qui venait d’être transféré d’Orlando, est venu me dire que Mash voulait m’allumer. Et de fait, il m’a passé 40 points sur la tête. Soit dit en passant, j’ai mis aussi 40 points… Mais ce gars était super fort. Il pouvait shooter, il pouvait dribbler, il pouvait jouer au poste. »
Au petit jeu des comparaisons inter-générationnelles, Tracy McGrady a son point de vue. C’est que tout est relatif. Les titres de MVP de Kobe Bryant et Shaquille O’Neal, tous deux récompensés qu’une seule et unique fois, prouvent bien que les trophées individuels ne peuvent pas résumer une carrière.
En d’autres termes, la sélection à l’unanimité de Stephen Curry cette saison n’est pas tant une critique sur le niveau du meneur des Warriors mais plutôt une preuve supplémentaire que le contexte (la saison historique de Golden State notamment, et la Curry mania qui déferle depuis deux ans également) a un rôle primordial à jouer.
Comme l’a très bien dit Jeff Van Gundy, à l’évocation de la carrière de Tracy McGrady, on a trop tendance de nos jours à mettre de l’importance sur le succès en playoffs. Or, ce dernier est sujet à beaucoup de paramètres, souvent incontrôlables. Un peu comme ce tir, et ce titre, arraché par le Heat et Ray Allen en 2013…