C’était au beau milieu de l’hiver. Steven Adams finissait un match avec un solide double double, 11 points et 12 rebonds en 22 minutes de temps de jeu (à 5/8 aux tirs), dans une victoire facile (106-90) face à Portland. Rien de spectaculaire. Et pourtant…
Que le début…
Avec 9 points en un peu plus de trois minutes d’action en premier quart contre les Blazers ce mercredi 16 décembre, Adams montrait combien ses progrès offensifs pouvaient bonifier son équipe du Thunder.
« C’est un jeune joueur très talentueux. Et il se sent de plus en plus à l’aise en attaque. On essaie de trouver des systèmes où il s’ouvre vers le cercle pour des dunks. Pour lui donner confiance. » justifiait alors son coéquipier (et mentor), Nick Collison dans l’Oklahoman. « Ça prend du temps pour se sentir à l’aise et en confiance en NBA. Il y arrive. Il peut être un très bon attaquant pour nous. C’est très bien de le voir toucher plus de ballons. »
Ayant débuté le basket à 14 ans, et en Nouvelle-Zélande, un pays plutôt réputé pour le rugby que pour la balle orange, Adams ne partait certes pas avec les faveurs des pronostics. Au contraire, élevé à la dure avec 17 frères (2m06 de moyenne…) et soeurs (1m85 de moyenne) avant lui, le petit Steven a même bien failli tourner mal.
Alors qu’il n’a que 13 ans, le décès de son père le marque profondément et Adams perd peu à peu ses repères. Il commence à faire l’école buissonnière et faire les bêtises des gamins de son âge dans la banlieue de Rotorua. Il flirte même avec l’idée d’entrer dans un gang, la Mongrel Mob.
« Mes frères me chahutaient beaucoup, et je pleurais souvent quand j’étais gamin. C’était le seul moyen de défense que j’avais. Leur dire d’arrêter ne marchait pas. Pleurer attirait mon père. Il venait à mon secours. » se souvient Steven sur ESPN, avant d’évoquer ce fameux gang. « L’initiation était brutale. Ils tabassaient tous ceux qui voulaient entrer. Et ça ne m’intéressait pas du tout. »
Repris en main par son frère Warren (lui aussi joueur professionnel de basket), qui a percé au grand jour les mensonges de son petit frère, Steven est envoyé à Scots College, une vieille école presbytérienne de Wellington. Là, un ancien de Washington State, un certain Kenny McFadden, va s’occuper du jeune bushman, que ces camarades croient être un « meurtrier », avec une discipline de fer.
L’éducation de l’enfant sauvage de Rotorua
Façonnant peu à peu ce bloc de granit en pleine croissance, McFadden va surtout préparer l’avenir doré de ce gamin travailleur et complètement transformé par son arrivée dans cette institution chrétienne aux lointaines origines écossaises.
« Je suis devenu accro à l’idée de m’améliorer, » avance Steven Adams. « Mon entraîneur m’avait mis l’objectif de placer une claquette dunk en plein match. Je n’avais jamais réussi à le faire. Il m’a dit qu’il me donnerait une nouvelle paire de chaussures si j’y arrivais. Je n’y arrivais pas. Ça m’a pris environ un an. Et finalement, pendant un match, j’ai réussi. Je me sentais tellement bien. Quand j’ai enfin réussi, je m’en fichais des chaussures. J’étais devenu accro à ça. »
Un an en « prep school », à Notre Dame Prep dans le Massachussetts, puis une autre saison en NCAA, à Pittsburg, et voilà que le jeune pivot venu de l’autre bout du monde pose ses valises en Oklahoma. Entre les pipelines et les derricks, les troupeaux de vaches et les plaines à perte de vue.
Après deux saisons de découverte en NBA, 3 points – 4 rebonds puis 8 points – 7 rebonds, Steven Adams est devenu le pivot d’avenir du Thunder (après un match 6 titanesque face à Memphis lors des playoffs 2014). Longtemps propriété de Kendrick Perkins, le poste de titulaire sous le cercle est désormais devenu celui d’Adams… avec une qualité offensive de plus en plus intéressante. Et exploitée !
Les précédentes aventures du Thunder, en playoffs notamment, retombaient pour l’essentiel sur les épaules de leurs deux All Stars, Russell Westbrook et Kevin Durant. A la grande époque, en 2012 particulièrement lors de leur accès en Finales NBA, il y avait James Harden pour compléter le trident. Cette année, il y a Enes Kanter en sortie de banc, mais aussi Steven Adams, héros de l’ombre du match 2 par exemple. L’un des joueurs obtenus dans l’échange contre ledit Harden puisque ce choix de draft appartenait aux Rockets.
Avec 16 points et 11 rebonds hier soir, Adams a de fait pesé très lourd dans la victoire du Thunder sur son parquet de la ‘Peake. Ce n’est pas compliqué en fait : quand Adams finit en double double durant ces playoffs, et c’est arrivé à trois reprises, Oklahoma City s’impose !
Le dernier élément dans l’équation de Sam Presti
Si Kevin Durant a pu égaler son record en carrière en playoffs, avec 41 points et une éruption offensive de 17 points en dernier quart, pour écoeurer les Spurs, c’est aussi en grande partie grâce au travail de l’ombre d’Adams. A ses poses d’écran notamment.
« Maintenant, c’est différent. » explique Adams sur Sports Illustrated, concernant les poses d’écran. « Auparavant, mon gars me laissait et j’étais grand ouvert. Ils faisaient prise à deux sur Kevin ou Russ. Maintenant, on essaie de garder mon défenseur sur moi le plus possible. [Les Spurs] ont fini par changer sur l’écran poste bas, et on en a profité. C’est devenu un avantage. »
Profitant désormais du moindre espace offensif que lui laisse la défense adverse, Adams peut de fait sanctionner par une belle vitesse d’exécution pour sa taille. Ses dunks monumentaux, après le décalage de Westbrook, sont devenus légion pour le Thunder. Son duo avec Enes Kanter est tout autant en train de le devenir.
Malgré ses 2m13 et 116 kilos, le néo-z peut effectivement bouger. Si vous n’y croyez pas, visionnez à nouveau cette incroyable fin de match 2 à San Antonio. Avant de se faire attraper le bras par un fan texan, Adams a quasiment arrêté à lui seul la contre-attaque des Spurs, lancée à trois contre un. Son retour héroïque, et son sprint pour aller gêner le tir de Patty Mills dans le coin, sont l’exemple parfait de l’apport incommensurable d’Adams en défense.
Mais son apport offensif commence de plus en plus à se voir également. Le gamin discret de Rotorua a beau continuer à se cacher derrière son humour décalé et son accent venu d’ailleurs, son immense talent va bien finir par le rendre indispensable au Thunder. Celui qui avouait en début de série qu’il s’était fait berner par Tim Duncan lors de leur premier affrontement en playoffs, vient tout simplement de laisser la légende des Spurs à un zéro pointé pour la première fois de son immense carrière…
« Beaucoup de gens considèrent Steven Adams comme cette présence physique sous le cercle, » conclut Billy Donovan dans l’Oklahoman. « Mais il est aussi un très, très bon joueur de basket. Il comprend le jeu. Et je ne suis pas sûr qu’il soit suffisamment respecté en tant que joueur de basket. »
Les temps sont en train de changer…
https://www.youtube.com/watch?v=5fanNifL1bo
Steven Adams | Pourcentage | Rebonds | |||||||||||||
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Saison | Equipe | MJ | Min | Tirs | 3pts | LF | Off | Def | Tot | Pd | Fte | Int | Bp | Ct | Pts |
2013-14 | OKC | 81 | 15 | 50.3 | 0.0 | 58.1 | 1.8 | 2.3 | 4.1 | 0.5 | 2.5 | 0.5 | 0.9 | 0.7 | 3.3 |
2014-15 | OKC | 70 | 25 | 54.4 | 0.0 | 50.2 | 2.8 | 4.6 | 7.5 | 0.9 | 3.2 | 0.5 | 1.4 | 1.2 | 7.7 |
2015-16 | OKC | 80 | 25 | 61.3 | 0.0 | 58.2 | 2.7 | 3.9 | 6.7 | 0.8 | 2.8 | 0.5 | 1.1 | 1.1 | 8.0 |
2016-17 | OKC | 80 | 30 | 57.1 | 0.0 | 61.1 | 3.5 | 4.2 | 7.7 | 1.1 | 2.4 | 1.1 | 1.8 | 1.0 | 11.3 |
2017-18 | OKC | 76 | 33 | 62.9 | 0.0 | 55.9 | 5.1 | 4.0 | 9.0 | 1.2 | 2.8 | 1.2 | 1.7 | 1.0 | 13.9 |
2018-19 | OKC | 80 | 33 | 59.5 | 0.0 | 50.0 | 4.9 | 4.6 | 9.5 | 1.6 | 2.5 | 1.5 | 1.7 | 0.9 | 13.8 |
2019-20 | OKC | 63 | 27 | 59.2 | 33.3 | 58.2 | 3.3 | 6.0 | 9.3 | 2.3 | 1.9 | 0.8 | 1.5 | 1.1 | 10.9 |
2020-21 | NOP | 58 | 28 | 61.4 | 0.0 | 44.4 | 3.7 | 5.2 | 8.9 | 1.9 | 1.9 | 0.9 | 1.3 | 0.7 | 7.6 |
2021-22 | MEM | 76 | 26 | 54.7 | 0.0 | 54.3 | 4.6 | 5.4 | 10.0 | 3.4 | 2.0 | 0.9 | 1.5 | 0.8 | 6.9 |
2022-23 | MEM | 42 | 27 | 59.7 | 0.0 | 36.4 | 5.1 | 6.5 | 11.5 | 2.3 | 2.3 | 0.9 | 1.9 | 1.1 | 8.6 |
2024-25 | HOU | 57 | 14 | 54.5 | 0.0 | 46.2 | 2.9 | 2.8 | 5.7 | 1.2 | 1.1 | 0.4 | 0.9 | 0.5 | 3.9 |
Comment lire les stats ? MJ = matches joués ; Min = Minutes ; Tirs = Tirs réussis / Tirs tentés ; 3pts = 3-points / 3-points tentés ; LF = lancers-francs réussis / lancers-francs tentés ; Off = rebond offensif ; Def= rebond défensif ; Tot = Total des rebonds ; Pd = passes décisives ; Fte : Fautes personnelles ; Int = Interceptions ; Bp = Balles perdues ; Ct : Contres ; Pts = Points.