A quelques semaines de la plus chaude des intersaisons , Basket USA entame un tour d’horizon hebdomadaire des capacités financières des équipes qui s’apprêtent à être particulièrement actives à l’intersaison. L’enjeu est de taille : attirer un voire deux joueurs majeurs et construire une équipe capable de gagner le titre suprême.
Mais avant de débuter cette revue équipe par équipe, il nous semble important de présenter les règles relativement complexes qui régissent les montants, la durée et l’évolution des contrats des joueurs de la NBA.
Nous avons divisé la série d’articles en trois :
- Une première partie d’introduction générale sur les contraintes pesant sur la masse salariale, composée de 2 articles traitant du salary cap puis de la luxury tax
- Une deuxième partie abordant en 3 articles le cœur du sujet : exceptions au salary cap, calcul effectif de la masse salariale et négociations contractuelles
- Une dernière partie de conclusion, tentant de faire le bilan et de tirer les enseignements de ce mode de fonctionnement.
Ce mardi, nous débutons donc en parlant du salary cap.
Un environnement calme autour de vous, il est temps de faire le vide dans votre tête, avant de plonger dans le monde infernal de la finance de la NBA.
Limitation de la masse salariale : quel intérêt ?
Première nouvelle : même si le propriétaire est riche à foison, ou si la vente de tickets, le merchandising ou les droits télé rapportent des revenus extrêmement confortables, une équipe ne peut pas faire ce qu’elle veut avec sa masse salariale, qui est limitée par un certain nombre de règles, dont la principale est le salary cap, ou « Plafond salarial ». Pas question, donc, de composer un 5 majeur autour de Chris Paul, Kobe Bryant, LeBron James, Dirk Nowitzki, et Dwight Howard.
L’objectif de ces règles est d’empêcher que les franchises les plus riches « archidominent » les autres, et que la différence se fasse au niveau financier plutôt qu’au niveau sportif et managérial. On peut penser à ce qu’est le football anglais ou espagnol aujourd’hui, où les gros clubs, ceux qui ont les meilleurs résultats très régulièrement, sont aussi les plus riches.
C’est d’ailleurs le même principe qui est à l’origine de la draft : les équipes les plus faibles récoltent les meilleurs talents : on cherche à équilibrer pour faire ressortir l’intérêt sportif et le suspens, au détriment de ceux qui sortent le plus gros carnet de chèque et qui pourraient systématiquement signer les rookies les plus prometteurs.
A noter que la Formule 1, justement pour équilibrer son championnat, avait un temps envisagé d’imposer un salary cap.
Fonctionnement du salary cap
Le « salary cap » est tout simplement le montant maximal de la masse salariale d’une équipe. Du moins avant l’application de tout un ensemble d’exceptions, que l’on verra plus tard dans un autre article de la série.
Cette limite est fixée saison par saison, et dépend directement du niveau de revenus de la ligue (grosso modo le chiffre d’affaire), ainsi que de son niveau de profit financier. Pour la saison 2009-10, son montant était de 57,7 m$. La dernière valeur projetée par la NBA pour la saison prochaine est de 56,1 m$. La valeur définitive sera annoncée en juillet.
Le tableau suivant représente les salary cap sur les 5 dernières saisons.
Saison | Montant (en m$) |
2009-10 | 57,700 |
2008-09 | 58,680 |
2007-08 | 55,630 |
2006-07 | 53,135 |
2005-06 | 49,500 |
On voit clairement qu’après plusieurs années d’augmentation ininterrompue jusqu’à 2008-09, la saison 2009-10 a vu le montant maximal de la masse salariale diminuer de presque 1 million de dollar, en relation avec la crise économique mondiale.
Par ailleurs, avec un Lebron James qui peut prétendre à un salaire d’un peu plus de 16 m$ ou un Shaq à 21 m$ cette saison, on voit bien qu’on ne peut, en partant d’un effectif vierge ou quasi vierge (New York), recruter qu’au maximum 2 superstars (pour un sous total de 32 à 42 m$ si on suit l’exemple de Shaq et James) et des lieutenants permettant de construire un candidat au titre. Avec 3 superstars (et un sous total d’au minimum 48 m$ s’ils ont tous au minimum le même nombre d’années dans la ligue que James), il ne reste vraiment que des miettes pour les autres joueurs : difficile de faire autre chose qu’une belle opération marketing.
Mode de calcul et stratégie de communication
Comment le salary cap est-il calculé ? Au mois de juillet de chaque année, la ligue publie le montant anticipé de ses revenus (appelé BRI, pour Basketball Related Income) pour la saison suivant, qui dépend évidemment des conditions économiques et de la performance du business NBA. Pour obtenir le salary cap, on prend une fraction de ce chiffre (51% depuis plusieurs saisons), et on enlève le profit anticipé pour la ligue, ce qui donne une masse salariale totale théorique.
Des ajustements sont alors faits, pour refléter la pertinence des prévisions des années précédentes (si on s’est bien trompé à la hausse comme à la baisse, on corrige « à la main »). On partage finalement cette masse salariale entre les 30 équipes (actuellement) qui composent la NBA, pour obtenir le salary cap. Juillet est donc un mois très important pour les propriétaires et les joueurs, qui vont savoir dans quelles limites ils vont pouvoir jouer pour les salaires.
En juillet 2009, la ligue a poussé plus loin ses prévisions. Non contente d’annoncer les limites pour la saison 09-10, elle a annoncé la couleur pour la suivante. En partant du postulat d’une baisse de revenus de 2,5% à 5%, elle a indiqué qu’on pouvait s’attendre à voir le salary cap pour la saison 2010-11 (celle qui nous intéresse) baisser de 4 à 7 millions de dollars par équipe par rapport à 2009-1 , soit une fourchette entre environ 50 et 53 millions de dollars.
Comme indiqué plus haut, la dernière évaluation est significativement plus haute (56,1 m$), mais David Stern s’est clairement positionné en vue de la future négociation collective (ou CBA pour Collective Bargaining Agreement) dont la signature doit avoir lieu avant l’intersaison 2011-12.
Le message était le suivant : « votre salaire va baisser pour 2010-11 dans le cadre des règles actuelles, mais il faut s’attendre à pire dans le cadre des nouveaux accords ». C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la saison 09-10 a bruissé de rumeur de « grève » (ou lock-out). Ce n’est plus du basket ici, c’est de la négociation, à coup de messages, d’intimidation et de menaces.
Au final, l’ensemble des règles applicables pour la prochaine intersaison est celle de l’accord collectif actuel, et la détermination du salary cap doit donc les respecter. L’inducteur principal du salaire des joueurs est donc, conformément à ce qui est exposé plus haut, le revenu de la NBA.
Pour la suite, on peut très bien imaginer que Stern arrive à la table des négociations en proposant d’allouer une fraction inférieure du BRI aux joueurs, comme par exemple 48 ou 49%, avec à la clé des négociations qu’on peut anticiper comme difficile…
Conclusion
On le voit, le salary cap est le premier instrument de maîtrise des salaires de joueur en NBA. Néanmoins, ce n’est que le « point d’entrée » et beaucoup reste à expliquer. Par ailleurs, comme indiqué ci-dessus, la limite du salary cap n’est pas stricte et il existe un grand nombre d’exceptions possibles, que nous verrons dans le 3ème article de la série. Avant cela, nous parlerons la prochaine fois de la cousine du salary cap, la « luxury tax », qui engendre bien souvent un grand nombre de confusions.