Douze ans qu’il est à la tête de la franchise la plus victorieuse du sport américain et pourtant, jusqu’à hier, R.C Buford n’avait jamais été récompensé pour son travail. Comme nous vous l’expliquions, ce titre de meilleur dirigeant n’avait rien d’attendu cette année, les Spurs n’ayant pas particulièrement remanié leur effectif. La reconnaissance est donc d’autant plus savoureuse qu’elle vient couronner l’ensemble de son oeuvre. Et celle-ci est dantesque.
Depuis son arrivée, San Antonio a disputé 968 matchs pour un bilan de 688 victoires contre 280 défaites. On vous mâche la conversion : cela représente 71% de victoires. Dans le même temps, les Spurs ont remporté 3 titres de champions NBA, 4 fois la conférence Ouest et sont allés chaque année en playoffs pour seulement deux éliminations au premier tour.
Pour autant, ne comptez pas sur R.C Buford pour se délecter trop longtemps de ce bilan flatteur.
« Je le répète, on ne fait pas ça pour gagner ce genre de récompenses. On est ici pour gagner le titre, » déclarait Buford, hier, lors de la remise du trophée.
L’élève de Larry Brown
Comme Gregg Popovich, le GM se fiche des hommages, seul le succès compte. Ce n’est d’ailleurs pas une coïncidence si les deux hommes se ressemblent autant, ils viennent de la même école : celle de Larry Brown.
C’est à l’université de Kansas que R.C. Buford rentre dans le staff de Larry Brown. Nous sommes en 1983 et le general manager n’est alors qu’un jeune assistant-coach de 23 ans sans la moindre expérience. Sous l’égide du coach, Buford gagne peu à peu de l’influence et gravit les échelons.
En 1988, il est l’adjoint le plus en vue quand Kansas remporte le titre universitaire. L’été suivant, Larry Brown devient l’entraineur en chef des San Antonio Spurs et son assistant le suit dans le Texas. C’est là que R.C. Buford fait la rencontre de Gregg Popovich, également assistant. En 1992, Larry Brown est viré, s’envole pour les Clippers et prend R.C. Buford dans ses valises. Mais quelques mois plus tard, l’assistant n’est plus dans les petits papiers et quitte le staff angelino.
Non sans mal, R.C Buford repart à l’université. Le technicien a dégoté un poste d’assistant à Florida. L’histoire pourrait s’arrêter là mais à nouveau, il se trouve à la bonne place au bon moment : Florida atteint le Final Four. Dans le même temps, San Antonio est racheté par un homme d’affaires de San Antonio, Peter Holt. Le magnat confie les postes de président et general manager à Gregg Popovich.
Le meilleur conseiller de Gregg Popovich
Ce dernier se souvient de son ancien collègue et décide de le rappeler aux affaires en tant que directeur du scouting. Huit ans plus tard, R.C. Buford gravit les échelons jusqu’à devenir general manager du club en 2002, sous la bénédiction de Gregg Popovich.
Sans son coach, San Antonio n’aurait jamais réussi à agréger autant de talents, sur le terrain ou dans les coulisses. Gregg Popovich est le vrai boss des Spurs mais son talent réside justement dans sa capacité à s’entourer. Il sait à quel point il doit à ses proches. Hier, il n’avait que des éloges pour son GM.
« Je suis très heureux que R.C. ait enfin cette récompense, absolument méritée et ce, depuis très longtemps. Sa connaissance des règles, son expertise du jeu et son oeil avisé pour dénicher le talent ont servi les Spurs avec succès depuis très longtemps. C’est un vrai bonheur d’être à ces côtés depuis tout ce temps. »
Un talent sans égal pour le recrutement
Année après année, San Antonio est parvenu à rester au sommet de la ligue sans jamais faire de bruit sur le marché des transferts, sans jamais dépenser outrageusement. Cette discrétion dans l’excellence n’aurait pu exister sans le labeur du General Manager. C’est à lui que Gary Neal et Danny Green doivent leur carrière. Le premier n’a jamais été drafté, le second fut coupé par les Cavs en 2010. C’est lui qui dénicha Manu Ginobili (drafté en 57e position), Tiago Splitter, (28e) ou George Hill (26e). C’est encore lui qui est à l’origine de la venue américaine de Fabricio Oberto, des signatures judicieuses de Patty Mills, Boris Diaw ou Marco Belinelli. Surtout, c’est grâce à lui si Gregg Popovich s’est un jour attardé sur le cas d’un petit meneur français, aujourd’hui triple champion NBA.
Nous sommes à l’été 2001, les Spurs n’ont que le 28e choix de la draft et le staff vient d’assister au work-out laborieux de Tony Parker. Le français est jet-lagué, il n’arrive à rien. Pour le coach texan, le meneur ne fait pas le pli.
« Je lui ai dit qu’il était trop soft et que je cherchais quelqu’un de plus mordant, » racontait Gregg Popovich il y a deux ans. « Il était nonchalant, comme s’il était à un café à Montmartre en train d’avaler un croissant et un verre de vin. Cela n’avait pas l’air de l’intéresser plus que ça. »
Heureusement pour le basket français et les Spurs, R.C. Buford est sous le charme du joueur depuis qu’il l’a vu jouer. Il insiste lourdement pour que Gregg Popovich le revoit trois jours avant la draft. La suite, vous la connaissez.
L’histoire de Tony Parker révèle combien l’organisation des Spurs est intelligente, combien chaque élément de cette équipe a son importance et son mot à dire. Si Popovich est à l’origine de cet état d’esprit, R.C Buford le met à profit depuis plus de dix ans désormais. San Antonio peut bénir le lien qui unit les deux hommes : grâce à lui, les Spurs ne sont pas seulement restés parmi l’élite, ils la définissent.