Si Kobe Bryant avait consacré Tony Allen comme le meilleur défenseur qu’il ait affronté dans sa carrière, Shane Battier avait sûrement une place dans la hiérarchie de l’ancien arrière des Lakers. Avec sa taille et ses longs bras, plus une remarquable intelligence de jeu, l’ailier était un excellent défenseur. Une référence même.
L’ancien joueur des Grizzlies et des Rockets a livré plusieurs batailles avec Kobe Bryant et à une époque où les statistiques avancées n’étaient pas aussi développées pour aider les défenseurs.
« Les rapports d’avant-match ressemblaient à ça : Kobe est un bon shooteur à 3-pts, il aime les step-back, il est excellent au poste, il joue le pick-and-roll et n’hésite pas à vous dunker dessus », liste Shane Battier au podcast The Habershow. « Enfin mon préféré : il peut prendre les commandes d’un match. Quelqu’un était payé pour nous dire ça ! Vraiment, je n’y aurais pas pensé par moi-même. Là, avec ces observations, on ne m’aide pas vraiment… »
Face à un des meilleurs attaquants de l’histoire, le travail devenait alors très, très compliqué même si c’est ainsi qu’on progresse se disait Shane Battier. « Je voulais défendre sur lui. Je savais que je devais être à mon meilleur niveau face à Kobe, physiquement bien sûr, mais surtout mentalement. Si je ne l’étais pas à chaque fois, j’allais être humilié. Et je ne peux dire ça d’aucun autre joueur. Aucun. »
Au fil des 37 duels de saison régulière et 7 en playoffs disputés puis avec l’aide des premières statistiques avancées, lancées par Daryl Morey, quand il est arrivé à Houston, Shane Battier a commencé à mieux appréhender Kobe Bryant. Il savait qu’en l’orientant sur sa main gauche et en le forçant à shooter à mi-distance, il ferait baisser son pourcentage. Sans oublier sa marque de fabrique : la main devant le visage.
« S’il était encore là aujourd’hui, il continuerait de dire que cela ne le gênait pas »
Trop fort, le « Black Mamba » a réussi quantité de gros shoots sur Shane Battier notamment en playoffs 2009 (et sur Ron Artest), mais cela n’a pas découragé ce dernier. Au contraire.
« Cette technique fonctionnait, mais pas pour les raisons qu’on imagine », précise l’ancien champion avec Miami, qui avait très bien défendu dans cette demi-finale de conférence. « Je savais que Kobe, en mâle dominant qu’il était, n’allait jamais admettre que cela allait affecter son jeu. Il allait donc montrer au monde que cette tactique ne marchait pas. Il était comme ça. Comment le prouver ? En shootant encore plus à mi-distance, ce qui était sa faiblesse. Oui, il en a marqué, mais cela l’a écarté de prendre des meilleurs tirs, près du cercle. Il ne faisait pas ce qui était le mieux pour lui et son équipe. J’étais dans un match psychologique avec des attaquants de ce niveau. S’il était encore là aujourd’hui, il continuerait de dire que cela ne le gênait pas et voilà pourquoi je l’adore. »
Kobe Bryant a même fait mieux que de le dire : il l’avait écrit dans son livre Mamba Mentality. « Quand quelqu’un comme Shane Battier mettait sa main devant mon visage, ça n’avait pas réellement d’impact sur mon jeu. Je savais que je pouvais shooter malgré tout. Le panier ne bouge pas donc c’est ma mémoire musculaire qui faisait le boulot. Je n’avais pas besoin de voir le cercle pour mettre un panier. »