En moins d’un mois, la NBA pourrait perdre deux de ses plus grands joueurs, deux légendes au palmarès incroyable qui pèsent 10 titres NBA à eux deux. Le 14 avril dernier, Kobe Bryant faisait ses adieux à la NBA, en la remerciant soixante fois dans un incroyable dernier match. Une carrière conclue en grande pompe sur fond de scénario hollywoodien, malgré une saison désastreuse. Rien à voir avec les quelques points et la poignée de rebonds que Tim Duncan devrait ramasser ce 12 mai à Oklahoma City, lors du Game 6 d’une demi-finale de conférence qui pourrait être, pour lui aussi, l’épilogue d’une formidable carrière. Comme un symbole, Timmy va peut-être prendre sa retraite ce soir, sans crier gare.
Pour nous éclairer sur le choix de « Dream Tim » de poursuivre ou non, les talents de voyant de Charles Barkley seraient les bienvenus, lui qui avait déclaré après son premier duel avec Timmy en 1997 : « J’ai vu l’avenir, il porte le numéro 21. » Dix-neuf ans plus tard, l’avenir porte aujourd’hui le numéro 2 à San Antonio, celui de Kawhi Leonard. Avec LaMarcus Aldridge pour l’épauler et Tony Parker pour assurer la transition, RC Buford et Gregg Popovich ont déjà géré l’après Duncan mais Ginobili, puisque l’Argentin pourrait aussi mettre un terme à sa carrière à la fin de cette saison.
La crise de la quarantaine
Encore à 14 points, 9 rebonds et 2 contres de moyenne l’an passé, et même 18 points et 11 rebonds sur 35 minutes en playoffs, Tim Duncan a clairement marqué le pas cette saison. L’arrivée de LaMarcus Aldridge a bien sûr énormément influencé un déclin statistique dont tout le monde se fiche à San Antonio, mais force est de constater qu’avec ses 8.6 points, 7.3 rebonds et 1.3 contre, Timmy n’influence plus le jeu des Spurs. Toujours essentiel en défense, il n’est plus que la quatrième ou cinquième option offensive quand il est sur le terrain, et connait le second plus faible pourcentage de sa carrière aux tirs pour un nombre de tentatives en forte baisse.
Pire, la maigre contribution de Duncan en saison régulière s’est réduite comme peau de chagrin en playoffs, faisant grimper l’incertitude sur son futur : depuis le début de la postseason, il ne tourne qu’a 4.4 points et 4.8 rebonds par match. Le vétéran est en souffrance face aux intérieurs physiques d’Oklahoma City, ses moyennes tombant à 3.4 points, 2.4 rebonds et 0.8 contre sur la série. Il ne s’agit alors plus simplement de statistiques, mais d’utilité pour les Spurs. Boris Diaw et David West ont joué à sa place dans le money time d’un Game 4 au cours duquel il n’a pas marqué le moindre point, une première en 249 matches de playoffs. Face aux intérieurs « bruts et brutes » du Thunder, TD n’arrive pas à faire parler son expérience et sa technique en attaque, ni son sens du placement en défense laissant Steve Adams écraser physiquement la série.
Role player de luxe ?
Treize fois sélectionné d’affilée dans les All-NBA et All-Défensive team au début de sa carrière, Duncan n’est plus l’intimidateur qu’il était par le passé, mais il a encore de beaux restes. Une seule action peut ainsi détruire la théorie du départ à la retraite de Tim Duncan et la voici :
Quatre minutes à jouer dans le Game 5 d’une série au couteau, et voila le vieux Timmy prenant le dessus sur le monstre physique Russell Westbrook. Et si la réponse était là ? Demandez à Tim Duncan, comme lors de sa découverte du basket à 14 ans, de simplement prendre des rebonds, faire des contres, mettre quelques points au poste bas. Ce pourquoi il est surnommé « Big Fundamental », en somme.
Les Spurs ont recruté Andre Miller et Kevin Martin cette année, ou Tracy McGrady, Antonio McDyess et Robert Horry par le passé, pour apporter de l’expérience à l’équipe. Tim Duncan peut-il se contenter de ce rôle de grand frère et de mentor qui joue 10 à 15 minutes par match ? Même s’il a fait d’énormes sacrifices financiers dans le passé, on l’imagine mal rempiler pour un rôle permanent de troisième ou quatrième intérieur. A 40 ans, on a besoin de rythme, et jouer sur de courtes séquences est très délicat.
Si tout le monde reste, pourquoi pas lui ?
Gregg Popovich et lui le savent déjà et ses stats n’influenceront sûrement pas tant que ça son choix. Parmi les clés de sa réflexion, on peut penser à l’obtention du titre et une sortie par la grande porte, un rôle d’accompagnateur pour Kawhi Leonard et LaMarcus Aldridge ou encore le futur de Manu Ginobili. La même hypothèse qu’il y a douze mois plane à nouveau sur San Antonio : les « vieux » partiront-ils à la retraite en même temps ? Tony Parker aimerait que non.
« Le jour où Timmy et Manu prendront leur retraite ce sera évidemment très différent pour moi parce que j’ai joué toute ma carrière avec eux. Sans eux, ce sera complètement différent mais je sais que ça arrivera un jour car je suis bien plus jeune qu’eux. J’espère juste qu’il prolongeront un an de plus, ce serait super. »
A bientôt 39 ans, l’Argentin avait longtemps hésité à revenir la saison passée, et on imagine que lui aussi décidera de rempiler ou pas, en fonction de la fin de saison et du choix de Duncan. Une certitude, Gregg Popovich, qui avait envisagé de partir en même temps que Duncan, restera lui aussi pour honorer sa promesse à LaMarcus Aldridge.
« En signant LaMarcus, j’ai dû prendre un engagement » confiait-il avant le début de la saison. « Je ne pouvais pas lui dire : ‘LaMarcus, on aimerait te signer. On se voit plus tard.’ Je me suis engagé auprès des gars et de LaMarcus, et je dois tenir ma promesse. »
Tim Duncan, lui, n’a rien promis, mais il a déjà annoncé qu’il ne voulait pas de tournée d’adieux comme Kobe Bryant. Il partira comme il est arrivé, en toute discrétion. Ce soir à la Chesapeake Energy Arena, il n’y aura ni vidéo hommage, ni stars au premier rang. Pourtant, ce match là peut marquer l’histoire de la NBA avec la dernière sortie de l’un des meilleurs intérieurs de l’histoire.