Nous profitons de l’annonce par Canal + du renouvellement de son contrat pour les droits TV de la NBA pour évoquer la place de la NBA en France. Vous êtes nombreux dans vos commentaires à regretter le peu d’intérêt de la part des grands médias pour la NBA en particulier, et le basket en général.
Même si le débat a été maintes fois exposé, même si le chantier est énorme et ne dépend pas de nous, Basket USA propose ce soir de faire le point sur la situation actuelle.
Un âge d’or révolu
Si le basket continue d’attirer toujours plus de licenciés et s’accroche solidement à sa deuxième place des sports co., son exposition dans les grands médias reste minime. Les médias grand public, que ce soit en télé (TF1, France Télévisions) ou en presse écrite (l’Equipe), l’ont soit complètement délaissé ou ne lui accordent que la portion congrue. Pour le fan de NBA ne reste alors plus qu’à se tourner vers les médias spécialisés.
Les magazines basket ont connu leur heure de gloire pendant la période « Michael Jordan / Dream Team ». Les ventes étaient alors à leur apogée et pouvait atteindre jusqu’à 85 000 exemplaires en moyenne ! Puis les premiers nuages ont commencé à poindre comme nous le confirme Grégory, journaliste chez 5 Majeur :
« Il y a eu un gros creux avec la retraite de Jordan, puis avec le lockout (1999), deux éléments qui ont failli tuer la presse basket NBA. 5 Majeur a d’ailleurs fait une pause à cette période. Depuis, l’arrivée de Tipi en NBA, quoi qu’on en dise, nous a fait du bien. L’émergence d’une génération de joueurs charismatiques nous a aidés également à remonter la pente. Iverson, par exemple, à son meilleur, était source de bonnes ventes pour 5 Majeur. »
Si le creux de la vague a été dépassé, il n’en reste pas moins que la NBA est loin des sommets de popularité qu’elle a pu connaitre en France, comme nous le confirme Frank de Mondial Basket :
« Le basket n’est plus à la mode comme il pouvait l’être dans les années 90 (aujourd’hui, c’est le catch qui a le vent en poupe). Le grand public n’est pas demandeur. On ne peut pas espérer développer un produit à partir du moment où il n’y a pas de demande, de « potentiel client ». Le nombre de licenciés augmente peut-être, mais à côté de ça, tous les indicateurs montrent que le basket est devenu une niche. »
Un sport qui a tous les atouts pour réussir…
Pourtant, la NBA a tout pour plaire. Tous les lecteurs de Basket USA se rallieront à cet avis. Il n’y a qu’à regarder les résumés des matchs et autres Top 10 à chaque soirée pour que cette évidence saute aux yeux.
Le basket NBA est ultra-spectaculaire, rassemble des athlètes hors-norme et offre son lot de suspens et d’émotion. Tous ces éléments ont permis l’émergence de superstars, de héros, au premier rang desquels on retrouve bien entendu Michael Jordan, qui fait partie du cercle très fermé des athlètes dont la renommée n’a pas de frontières.
Si ses « successeurs » n’ont pas le prestige de sa majesté, ils n’en demeurent pas moins des icônes internationales, et quand on connait la science du marketing NBA pour mettre en avant leurs exploits, on se dit qu’il y a là tous les ingrédients pour plaire à n’importe quel fan de sport et pas uniquement aux connaisseurs.
C’est encore plus vrai pour les Français que pour la plupart des autres « non-américains » puisque nos meilleurs joueurs jouent dans la ligue, et à l’image de Tony Parker et de Joakim Noah, y jouent un rôle important :
« Il y a 10 ans, il y avait une place d’icône du basket tricolore à prendre », nous explique Frank. « Tony l’a prise en réalisant ce qui paraissait impossible pour un Français : devenir une star en NBA ».
… mais qui reste méconnu
Seulement voila, malgré tous ces atouts, le basket NBA est à l’heure actuelle suivi quasi exclusivement par les aficionados. La première explication qui vient à l’esprit est bien entendu que les matchs NBA se jouent le soir aux Etats-Unis… soit la nuit pour nous. Pas simple pour suivre les matchs en direct à moins d’être insomniaque, mais finalement, c’était déjà le cas dans les années 90.
Après, il y a le fait que la NBA soit proposée par des chaînes payantes comme Canal+ ou Orange Sport, ce qui limite l’accès aux matches. Là encore, s’en tenir à cette explication serait bancal. Comme le soulignait Franck, Canal+ et la voix emblématique de George Eddy ont grandement participé à faire découvrir la NBA. De plus, le basket a la chance de posséder en Jacques Monclar l’un des meilleurs (ou peut-être même le meilleur…) consultants sportifs, tous sports confondus. Pourquoi ne pas en profiter ?
Ensuite, il y a Internet avec des sites d’actualité dont Basket USA fait partie, mais aussi des plate-formes (légales ou pas) qui permettent de regarder des rencontres tous les soirs. Clairement, on se dit qu’il n’a jamais été aussi facile de suivre l’actualité de la NBA, ou de voir des images.
Et pourtant, tout cela reste très confidentiel et bien loin du grand public. D’ailleurs, ni Orange, ni Canal+ n’ont souhaité nous dévoiler les chiffres d’audience pour la partie NBA.
Pour expliquer la mauvaise santé du basket en France, l’ultra-médiatisation du foot est souvent évoquée. Il faut bien reconnaitre que les stars du ballon rond sont autrement plus exposées que celle de la balle orange en Europe, que ce soit dans la publicité ou dans les émissions de sport :
« Aujourd’hui, si on interroge des personnes extérieures au basket, qui connaissent-elles ? Tipi car il est médiatique en France, et ensuite ? Difficile à dire. Dans les années Jordan, ces personnes auraient répondu Jordan, Magic, Bird, la Dream Team… »
De manière générale, l’impression qui prédomine est que la NBA et le basket en général souffrent du manque de culture vis-à-vis de ce sport dans notre pays, non seulement par rapport au foot, mais aussi par rapport au rugby, sport pourtant moins « universel » (dans la mesure où il est pratiqué surtout dans certaines régions et par un nombre moins important de licenciés).
« Il y a un risque de volleybalisation du basket » estimait Pierre-Olivier Matigot dans Basket News.
Si l’on ajoute à cela le fait que nous n’avons pas de grands clubs, que notre équipe nationale a rarement fait de bons résultats et que nous souffrons d’une méconnaissance généralisée du jeu (les principes de défense sont terriblement obscurs pour les non-initiés) et l’on comprend que les fondations des années 90 n’aient pas mieux tenu.
Quel avenir ?
Alors bien sûr, pour bon nombre d’entre nous, cela ne fait aucune différence. Vous pourriez n’être qu’une poignée à suivre le basket NBA que vous continueriez à le faire. Mais une passion sportive n’est-elle pas faite pour être partagée ?
Pour les médias, la question ne se pose même pas. Canal+ en est l’illustration parfaite. Aujourd’hui, le groupe a renouvelé son bail pour deux ans mais le groupe a sérieusement envisager de faire disparaître tout bonnement la NBA des grilles de programmes. En un mot, diffuser de la NBA n’est pas rentable, et on se dit que l’engagement de Canal + tient à un fil…
L’offre en kiosque pourrait se réduire puisque Tomar Presse, éditeur de Basketnews, BAM et Maxi Basket, a été placé en redressement judiciaire le 4 mai dernier.
Compte-tenu des coûts de production moins importants, les sites internet continueront d’exister mais les annonceurs ne sont pas légion puisque la NBA est devenu un sport de niche. A l’heure actuelle, le fan de NBA peut s’informer, quelque soit son âge ou son niveau de connaissance. Il faut espérer que cela restera le cas.
Tout n’est pas noir pour autant. Basketsession et Basket USA ont tous les deux battu leur record d’audience début juillet. A eux deux, ces deux sites sont parvenus à cumuler 100 000 visites en une journée ! 100 000 visites, c’est environ 50 000 visiteurs uniques. Ce sont 50 000 personnes qui peuvent, demain, acheter un mensuel ou se lever la nuit pour regarder la NBA. C’est la preuve que l’émulation profite à tous les acteurs, et que l’intérêt pour la NBA va en grandissant. Tout du moins sur le net…
Les belles initiatives de passionnés sont nombreuses, et que ce soit au travers de sites web (Culture Basket), de webradios (Ballin’, Carrément Basket), d’évènements (She got game, Quai 54…), la scène basket reste dynamique. Il est capital de la soutenir pour espérer voir le basket, et donc indirectement la NBA, avoir une chance d’occuper une plus grande place sur la scène sportive. Il en va de même pour nos championnats et l’Euroleague, bien que les fans NBA ne soient pas forcément friands du jeu européen.
Au final, et au-delà du cas NBA, nous aimerions voir émerger une grande réflexion globale sur toutes ces questions, une réflexion qui impliquerait aussi bien la fédération que des fans lambda.
Nous avons tous un rôle à jouer dans l’avenir de ce sport, car à l’image de tous les fans de sports méconnus (une pensée pour les fans de NFL, de NHL ou de baseball…), nous en sommes les ambassadeurs.