Stephen Curry aurait fait un beau MVP des Finals

L’élection d’Andre Iguodala pour le titre de MVP des Finals est symboliquement remarquable puisque la NBA récompense rarement un joueur de devoir. En fait, depuis la création du trophée en 1969, on compte peu de MVP de ce type : Wes Unseld en 1978 (9 points, 11.7 rebonds, 3 passes), Cedric Maxwell en 1981 (17.7 points, 9.5 rebonds, 2.8 passes), voire Kawhi Leonard en 2014 (17.8 points, 6.4 rebonds, 2 passes, 1.6 interception et 1.2 contre). En 2004, Chauncey Billups avait un profil assez proche mais le meneur était bien le leader offensif de son équipe (21 points, 5.2 passes). 

Pour Andre Iguodala, c’est une belle histoire, lui qui fut parfois critiqué pour son manque leadership, son salaire conséquent et son impact chiffré parfois faible. Néanmoins, une question demeure : est-il vraiment, au sein de l’équipe championne, le joueur ayant été le plus « valuable » pour son équipe ?

En termes de statistiques simples, Stephen Curry a ainsi livré une prestation digne de sa saison régulière : 26 points à 44.3%, 38.5% à 3-points, 88.2% sur la ligne, 5.2 rebonds, 6.3 passes, 1.8 interception mais 4.3 balles perdues en 42.5 minutes. Certes, Kyrie Irving n’était pas là, mais Curry a rendu une copie digne de son statut de MVP.

À ses côtés, « Iggy » est certes moins offensif mais tout aussi complet : 16.3 points à 52.1%, 40% à 3-points, 35.7% sur la ligne, 5.8 rebonds, 4 passes, 1.3 interception et 1 balle perdue en 37 minutes. On retiendra aussi et surtout sa défense sur LeBron James. Certes, ce dernier a tourné à 35.8 points, 13.3 rebonds et 8.8 passes/m, mais lorsque Iggy était sur le parquet, l’adresse de LeBron était de 38%, et le différentiel de +55 en faveur des Warriors ! Lorsqu’Andre Iguodala était sur le banc, l’adresse de LeBron grimpe à 44% et les Cavs affichent un différentiel de +30.

Le métronome Andre Iguodala face au feu-follet Stephen Curry

Plus généralement, l’impact d’Andre Iguodala des deux côtés du terrain fut impressionnant avec 117 points/100 possessions en attaque, 100 pts concédés/100 poss en défense, contre 104 pts/100 poss en attaque pour Stephen Curry et 102 pts/100 poss en défense.

Aussi, Stephen Curry et Andre Iguodala présentent un ratio +/- (calculé pour analyser l’impact du joueur sur l’équipe sur et en-dehors du terrain) très proche : +9.8 pour Andre Iguodala, +9.5 pour Stephen Curry. En revanche, l’ailier des Warriors fut le plus constant avec un différentiel positif lors de chaque match des finales, contre deux négatifs pour le meneur (lors des Game 2 et 3).

Dans d’autres secteurs, le meneur des Warriors a bien eu l’influence d’un patron. Il n’est ainsi pas seulement le meilleur passeur de son équipe, il est aussi à l’origine du plus grand nombre de passes secondaires, la fameuse « hockey assist » (passe déclenchée avant la passe décisive) avec 2 par match, ce qui permet de formaliser sa faculté à attirer les défenses, à créer des ouvertures et libérer ses coéquipiers. Andre Iguodala est 4e avec 0.9 passe de ce type.

Stephen Curry décisif, Andre Iguodala lieutenant exemplaire

Enfin, et c’est une donnée cruciale, Stephen Curry fut bien l’homme des fins de match pour Golden State. Ses stats sur les derniers quart-temps de la finale sont énormes : 10.8 points (1er) à 55.3%, 50% à 3-points, 91.7% aux lancers-francs, 1.8 rebond (4e), 1.7 passe (1er). Lors de cette période, Andre Iguodala fut aussi un contributeur de poids, même si sa production est évidemment moindre, malgré un temps de jeu équivalent (10 min pour l’ailier, 9.8 pour le meneur) : 5.7 points (2nd) à 61.1%, 64.3% à 3-points (1er), 1.3 rebond (7e), 0.5 passe (5e).

Lors du Game 6, la capacité de Stephen Curry à décocher des flèches longue distance à chaque retour des Cavaliers lors du dernier quart-temps fut flagrante et c’est bien la marque d’un tueur.

Au final, toutes ces données ne sont que des indications concrètes de l’influence des deux joueurs. Sans Stephen Curry, Andre Iguodala n’aurait pu profiter d’autant de liberté et d’ouvertures mais dans un vote, l’impression visuelle compte et l’influence de l’affect est indéniable. À ce titre, Stephen Curry a peut-être souffert d’attentes très importantes au regard de son statut de MVP de la saison. Les statistiques démontrent qu’il avait son mot à dire pour l’élection de ce trophée, du moins suffisamment pour obtenir au moins une voix (il n’en a eu aucune !). Les 11 journalistes votants ont estimé que ce n’était pas le cas, et même si Andre Iguodala fait un beau MVP des Finals, Stephen Curry méritait au moins un vote.