« Cher Daryl, un long discours n’est pas forcément nécessaire. Je vous le dis sans forfanterie et avec la certitude du convaincu, je pourrais je pense apporter un chouia de sophistication tactique au coaching des Rockets. »
Si je devais demain écrire au General Manager de Houston, je pense que je me permettrais au culot, de commencer par ces mots. Parce que je suis un fan aigri par la défaite de dimanche ? Non, depuis que Hakeem Olajuwon est allé écorner sa légende dans l’Ontario canadien, j’ai raccroché les fanions, rangé les calicots et laissé les VHS ds Finals 94 et 95 croupir dans les malles d’une cave bruxelloise. Non, ce qui me pousserait à titiller Daryl Morey, c’est la médiocrité et le conformisme tactique de Kevin McHale – et par ailleurs d’une majorité des entraîneurs en chef de la NBA.
Ceux qui ont assisté au récital de solistes de Jeremy Lin et James Harden dans les possessions cruciales du Game 1 face aux Blazers, comprendront mon énervement. Ces Rockets là sont le degré zéro du basket et chaque pseudo système décidé par le staff texan dans les dernières minutes du temps réglementaire et de la prolongation, m’a conforté dans mon jugement.
Le royaume du prévisible
Sur le dernier temps mort, j’ai même regardé ma femme en l’interpellant « pourquoi le demande-t-il, tout le monde sait déjà ce qui va se passer. » Et ça n’a pas manqué, la gonfle s’est retrouvée dans les mains du Beardman, en isolation, sans même un ou deux écrans pour provoquer le mismatch. Rien. Le néant tactique. Si Zeljko Obradovic voit ça, il va rester dare-dare à Istanbul. Vous me direz, la NBA est une ligue de joueurs, pas de coaches et les gros contrats ont toujours le cuir dans les paumes quand il s’agit de faire pencher la balance. Je le sais bien et ce n’est pas ça qui me chagrine (enfin si, un peu).
Ce que je ne comprendrai jamais, c’est le manque d’imagination dans les choix de systèmes sur les possessions décisives, l’absence de toute surprise, le règne du prévisible et du un-contre-un de playground. Vous avez compté les passes sur les cinq dernières possessions des Rockets ? Allez-y, ça vous prendra aussi peu de temps qu’il en faut à McHale pour donner des consignes simplissimes à ses joueurs.
A quoi ça sert d’avoir 24 secondes en attaque ?
Quand Terry Stotts laisse Damian Lillard prendre un shoot à trois points après cinq secondes alors que Portland n’est qu’à -1, il me rend tout aussi perplexe. La nouvelle égérie d’Adidas a fait mouche, mais pourquoi se précipiter, surtout sans un shoot vraiment ouvert, et prendre le risque d’un tir lointain alors que LaMarcus Aldridge se promène sur les mismatches et peut provoquer à l’intérieur, avec un and one possible à la clef ? S’il y a bien un défaut qui me gonfle dans cette NBA – qui depuis quelques années affiche un niveau global surréaliste de qualité athlétique et technique, c’est l’archi-prédictibilité des tirs pour la gagne. En l’étendant à trois minutes en fin de temps réglementaire puis à presque cinq dans le temps additionnel, Kevin McHale a poussé la nullité tactique à son paroxysme. C’est ça coacher en NBA ? Oublier qu’il y a 24 secondes pour donner du mouvement dans le partage du ballon et se contenter de dire au premier ou deuxième porteur, « vas-y coco, drive ou shoote » ? Franchement, je peux le faire, Fabrice et Dimitri de Busa encore mieux que moi. Et vous aussi.
Je pourrais ici me lancer dans une litanie d’exemples de shoots forcés, de choix douteux, de tirs précipités et casse gueule sur les possessions importantes, en regrettant le désert de systèmes construits et intelligents. La NBA et la moitié de ses coachs manichéens, conservateurs, voire même pusillanimes en regorgent à foison. Mais ça serait défausser le coach des Rockets de sa faute, celle de s’en tenir à un basket simplet et individualiste quand il gagnerait à surprendre. Pour y parvenir, il dispose d’un effectif plus riche que celui des Blazers, c’est bien d’ailleurs l’argument des observateurs qui quasi tous ont donné les Texans gagnants sur la série. J’ai toujours pensé que Rip City était une meilleure équipe de basket, surtout par son QI. Je peux m’endormir tranquille, les Rockets ne m’ont pas contrarié.