On est à la Draft 2021. Alors que les stars en présence, Cade Cunningham et Evan Mobley en tête, se préparent à être appelés très tôt dans la soirée, un autre joueur moins connu se motive pour le grand moment.
Face à une question de son agent qui lui demande pourquoi il veut atteindre la NBA, après une carrière universitaire partagée entre Wichita State et Oklahoma, Austin Reaves fait le point sur ses objectifs avant d’entrer dans le monde sans foi ni loi des professionnels.
« Je l’ai regardé droit dans les yeux et je lui ai répondu : ‘pour dire à tout le monde d’aller se faire voir' », assène calmement Reaves dans le LA Times. « Toute ma vie, on m’a dit que j’étais trop maigre, pas assez athlétique, pas assez talentueux même. Tout le monde me trouvait des raisons de ne pas y arriver. C’était toujours la même rengaine, ils trouvaient toujours un truc que je ne faisais pas suffisamment bien et qui prouvait que je n’allais pas y arriver. C’était vraiment une bonne sensation de dire à tout le monde d’aller se faire voir. »
Il faut dire qu’avec moins de 90 kg, Reaves fait partie du modèle chétif dans l’univers XXL de la NBA. Mais, avec sa combinaison de talent au tir extérieur et son sens du jeu, Reaves a non seulement réussi à entrer dans la Grande Ligue sans y avoir été invité (non drafté), mais il s’y est également fait sa place dans une des franchises historiques, adoubé pas plus tard qu’il y a une semaine par LeBron James, son coéquipier futur Hall of Famer.
En termes de gènes basket, Reaves a de qui tenir car son papa était meneur à Arkansas State, troisième meilleur passeur de l’histoire de sa fac, tandis que sa mère était aussi une star chez les Razorbacks avec 19 points par match, deuxième meilleure moyenne de l’histoire de l’école.
Les Reaves, une famille basket
Chez les Reaves, ça parle basket en continu. « Je peux probablement vous dire plus facilement les erreurs qu’il a commises que les points qu’il a marqués », sourit sa mère. A laquelle répond Austin, du tac au tac : « Ils me fatiguent ! »
Avec son grand frère Spencer, Austin Reaves est tombé dans la marmite dès qu’il était gamin. Il a appris à jouer dur dès sa plus tendre enfance.
« En tant que grand frère, tu apprécies toujours de battre ton petit frère. Mais il continuait à revenir encore et encore, même quand il se faisait battre à plates coutures. Il a toujours été tenace. Il n’a jamais refusé la compétition, même quand je l’écrabouillais. »
Avec deux titres consécutifs de l’Etat d’Arksansas avec Cedar Ridge dès ses deux premières années au lycée, Reaves a pu avoir un avant-goût de ce que serait le haut niveau, avec la popularité et la compétitivité que cela implique.
« Dans les petites villes, le basket et le sport en général sont la seule chose que les gens peuvent vivre ensemble », poursuit son aîné, Spencer Reaves. « On n’a pas d’équipe NBA, ou d’équipe NFL… C’est bien pour les gens d’avoir quelque chose à quoi s’attacher et s’accrocher. On était suffisamment bon au lycée pour être une de ces choses, c’était vraiment cool. »
Un match à 73 points !
Durant sa dernière saison au lycée, Reaves était carrément devenue une machine de guerre. Redescendu en championnat 3A, Cedar Ridge a pu compter sur son scoreur fou, avec notamment un match où Reaves a pris feu en dernier quart, inscrivant 33 de ses 57 points dans la période, dont le tir de la victoire sur la cloche !
Senior, Reaves a tourné à plus de 40 points de moyenne, confirmant sa domination sans partage avec 43 points dans le match pour un troisième titre en quatre ans. Mieux, le 4 décembre 2015, contre les Mustangs de Forrest City qui évoluaient trois divisions au-dessus de Cedar Ridge, Reaves a affolé les compteurs avec une pointe à 73 unités, dans une victoire folle après trois prolongations (117-115) !
« Je croyais que c’était une faute de frappe. Je n’avais aucune idée de ce que je venais de faire. Je pensais vraiment que c’était une erreur. »
Véritable star dans sa campagne de l’Arkansas, Reaves va par contre déchanter à son arrivée à l’Université de Wichita State. Privé de temps de jeu et de responsabilités sur ses deux premières années chez les Shockers, Reaves va demander un transfert vers l’Oklahoma où il prendra la suite de Buddy Hield et Trae Young dans le profil du shooteur patenté, mais pas que…
« Au lycée, je pensais que j’allais toujours que j’allais être mis de côté parce que je venais littéralement de nulle part. Mais je me souviens de Coach Krug [Lon Kruger], on a commencé à parler et il m’a dit qu’il pensait vraiment que je pouvais être drafté au premier tour l’année [suivante]. C’était la première fois que je me rendais compte que j’avais une chance. Mince, ce gars s’y connaît, il a vu beaucoup de basket, il a eu Trae [Young], Buddy [Hield]. C’était vraiment la première fois que je me disais que c’était vraiment possible pour moi. »
La révélation avec Oklahoma
Débarqué chez les Sooners pour assumer un rôle moteur de créateur de jeu mais aussi de finisseur, Reaves n’a pas tardé à lancer la machine, avec 23 points en tentant 20 tirs dès son premier match avec Oklahoma. A 18 points, 5 rebonds et 5 passes de moyenne pour sa deuxième saison à Norman, sa dernière à la fac, Reaves avait enfin pu donner libre cours à son imagination.
« Austin a de très bons instincts pour le jeu. Il a un excellent sens du jeu, de ce qui se passe et de ce qui doit se passer », explique Kruger. « Il n’y avait aucun doute sur le fait qu’il était le leader. Il était clairement le gars qui allait dicter ce qui allait se passer sur le terrain. »
Sous ses airs de freluquet inoffensif, à mi chemin entre Steve Nash et Steve Kerr, Reaves est un diablotin qui peut sortir de sa boîte à n’importe quel instant, comme face à Utah ou Dallas. Dans le naufrage permanent des Lakers, le rookie a été un des seuls à surnager, offrant 7 points, 3 rebonds et 2 passes de moyenne alors qu’il n’était censé être qu’un « two way » pour faire le nombre.
Tandis que les Lakers étaient déjà hors course pour les playoffs avec une semaine à jouer, Reaves a fini très fort, avec 18 points, 7 rebonds et 5 passes de moyenne sur 4 matchs, dont un énorme triple double à 31 points, 16 rebonds et 10 passes, rejoignant le groupe très fermé de rookies à avoir réalisé cet exploit statistique (Oscar Robertson, Jerry West, Blake Griffin).
En espérant que ce coup d’éclat ne soit pas un coup pour rien, mais bien une étape pour viser encore plus haut, Austin Reaves n’a qu’une hâte. De pouvoir tourner la page sur cette vilaine campagne. Une première saison NBA forcément douce-amère : « C’était une bonne année. Mais en même temps, c’était aussi horrible. »
Austin Reaves | Pourcentage | Rebonds | |||||||||||||
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Saison | Equipe | MJ | Min | Tirs | 3pts | LF | Off | Def | Tot | Pd | Fte | Int | Bp | Ct | Pts |
2021-22 | LAL | 61 | 23 | 45.9 | 31.7 | 83.9 | 0.7 | 2.4 | 3.2 | 1.8 | 1.4 | 0.5 | 0.7 | 0.3 | 7.3 |
2022-23 | LAL | 64 | 29 | 52.9 | 39.8 | 86.4 | 0.5 | 2.5 | 3.0 | 3.4 | 1.7 | 0.5 | 1.5 | 0.3 | 13.0 |
2023-24 | LAL | 82 | 32 | 48.6 | 36.7 | 85.3 | 0.7 | 3.6 | 4.3 | 5.5 | 1.9 | 0.8 | 2.1 | 0.3 | 15.9 |
2024-25 | LAL | 73 | 35 | 46.0 | 37.7 | 87.7 | 0.8 | 3.7 | 4.5 | 5.8 | 2.1 | 1.1 | 2.4 | 0.3 | 20.2 |
Comment lire les stats ? MJ = matches joués ; Min = Minutes ; Tirs = Tirs réussis / Tirs tentés ; 3pts = 3-points / 3-points tentés ; LF = lancers-francs réussis / lancers-francs tentés ; Off = rebond offensif ; Def= rebond défensif ; Tot = Total des rebonds ; Pd = passes décisives ; Fte : Fautes personnelles ; Int = Interceptions ; Bp = Balles perdues ; Ct : Contres ; Pts = Points.