Sur le terrain du Chase Center, Kenny Atkinson est tout sourire et sa bonne humeur est contagieuse. L’entrainement des Warriors touche à sa fin et l’assistant de Steve Kerr nous a accordé quelques minutes pour revenir sur le début de ses NBA Finals et notamment sur la performance d’Al Horford.
Atkinson et Horford se connaissent bien. Atkinson était en effet assistant de Mike Budenholzer à Atlanta, alors qu’Horford faisait partie des joueurs majeurs de cette équipe. Dans ses mots, on décèle une affection particulière pour le pivot des Celtics, et il nous explique l’influence que le Dominicain peut avoir sur mais également en dehors du terrain.
Alors qu’il est en pole position pour prendre les rênes de Charlotte, nous lui avons également demandé ce qu’il retenait jusqu’à présent de son passage chez les Warriors, et l’avons interrogé sur son goût pour les stats avancées.
Kenny, lors du Game 1, votre défense a donné beaucoup de tirs ouverts aux Celtics, dont les 12 tirs d’Al Horford. Comment s’ajuster ? Est-ce une question de matchups ou simplement une question de positionnement sur les aides ?
C’est une très bonne question, et je ne vais pas vous livrer nos ajustements (rires), mais vous le verrez vous même demain lors du Game 2. On doit faire un meilleur job sur lui, sortir plus vite sur lui, le toucher, mettre une main parce qu’il est « in the zone » depuis le début des playoffs. Il est adroit mais ce qui m’impressionne le plus c’est qu’il n’hésite pas une seconde, et il dégaine vite, beaucoup plus vite que lorsqu’on était ensemble à Atlanta. On lui a donné des tirs en début de match pour voir s’il allait oser les prendre. Il les a non seulement pris, mais mis dedans, et ça l’a mis en confiance. Donc c’est vraiment l’une des choses que l’on doit changer lors du Game 2, sortir plus vite, et plus dur sur lui. Cela dit, Al (Horford) est capable d’attaquer avec un défenseur sur lui et d’un seul coup, vous vous retrouvez avec un gars de 2m05 qui peut lire le jeu et prendre les bonnes décisions donc il faut qu’on trouve le juste milieu stratégique mais on doit respecter son tir.
Malgré la défaite, est-ce que vous étiez globalement satisfait de votre plan de jeu ?
Dans les grandes largeurs oui, mais il y a quelques ajustements que nous devons mettre en place parce que tout n’était évidemment pas parfait. Mais quand on parle d’ajustements, on ne parle pas de tout changer, ce sont plus des petits détails. Draymond l’a d’ailleurs bien dit. En playoffs ou en Finals, votre priorité est de ralentir les joueurs majeurs. Vous construisez votre plan de jeu défensif avec ça en tête et vous devez faire des choix sur les autres joueurs. Vous décidez quels joueurs vous laissez un peu plus libre. Malheureusement lors du Game 1, on leur a donné trop de liberté. Mais, on a un coaching staff et des joueurs intelligents, nous allons nous ajuster.
« L’impact d’Al Horford sur les Celtics est bien plus grand que ce qu’il leur apporte sur le terrain »
On parle beaucoup de Jayson Tatum, de Jaylen Brown, et de Marcus Smart comme leaders de cette équipe de Boston, mais comme vous avez côtoyez Al Horford lors de votre passage à Atlanta, est-ce que vous pensez que son rôle et son impact ne sont pas sous estimés ?
Sa valeur en tant que joueur est évidente mais sa valeur pour le développement des jeunes joueurs est sous côté. Généralement, le staff reçoit tous les compliments quand un jeune progresse. Un Al (Horford), un Draymond (Green) sont super importants pour vos jeunes joueurs. Leur approche est différente de celle des entraineurs mais leur influence est dix fois plus importante. C’est vital et vous l’entendez dans les propos de Jayson Tatum ces dernières semaines. L’impact d’Al Horford sur les Celtics est bien plus grand que ce qu’il leur apporte sur le terrain. Il apporte son leadership, il est garant de leur culture, etc. Bien sûr, les entraineurs qui sont là pour aider au développement des joueurs sont nécessaires, mais avoir ce genre de vétéran est crucial. Je pense à un gars comme Kyle Lowry, Draymond Green, bien que Al aide d’une façon différente. Avec Al, vous pouvez simplement le regarder travailler tous les jours. Il vous donne l’exemple que vous devez suivre. Il va peut être dire une phrase pendant toute la journée, mais ce sont des mots qui vont rester dans votre esprit. Draymond, Chris Paul, ils sont constamment en train de vous parler. Al a un style complètement inverse mais l’impact est tout aussi positif.
Les rumeurs vous placent comme le favori pour décrocher le poste d’entraineur des Hornets. Je ne vais pas vous demander de confirmer cette information mais je suis curieux de savoir en quoi ce passage à Golden State et pouvoir travailler avec Steve Kerr, avec Stephen Curry, Draymond Green, etc., vous a servi dans votre évolution en tant qu’entraineur ?
Oh mon Dieu, c’est une opportunité en or de pouvoir côtoyer Steve (Kerr), de voir la façon dont il interagit avec ses joueurs, en particulier la façon dont il coache des stars et l’équilibre qu’il trouve entre les vétérans et les jeunes joueurs. À Brooklyn, j’étais avec une équipe très jeune donc j’apprends beaucoup sur ce point. Et puis, il y a le fait de voir Steph (Curry) et Draymond, non seulement des stars mais des champions, comment ils se conduisent à l’intérieur du groupe. J’ai l’impression d’être un voleur (rires) ! J’apporte ma pierre à l’édifice mais je reçois beaucoup plus que ce je donne parce que même le staff travaille ensemble depuis plusieurs saisons. Donc je suis comme une éponge, c’est vraiment cool d’avoir cette opportunité, et ça va énormément m’aider si j’ai la chance de retrouver un poste d’entraineur.
« Je peux même être un peu extrême avec ma vision des analytics »
Vous êtes connu dans la ligue comme adepte des « analytics », mais de nombreux joueurs sont toujours résistants à les utiliser. Quelle est votre approche dans ce genre de situation ?
C’est dur. C’est même dur dans un staff. Parce que vous avez la moitié du staff qui n’y croit pas du tout, et certains ne sont pas entièrement convaincus même s’ils sont ouverts d’esprit. Moi, je suis 100% convaincu. Je suis « all in » (rires) ! Et par moment, je peux même être un peu extrême avec ma vision des analytics. Donc, ce n’est pas évident de trouver la bonne approche mais il faut essayer parce que c’est maintenant une partie intégrante de notre profession. C’est souvent à moi d’être créatif, d’être innovant dans ma façon d’aborder le sujet avec les joueurs et mes collègues.
Draymond Green disait jeudi que parfois ce que les entraineurs voient à la video et ce que les joueurs ressentent sur le terrain sont deux choses différentes. Est-ce la même chose avec les analytics ? Existe-t-il parfois un décalage entre les chiffres et la réalité du terrain ?
Complètement. On parlait des choses que j’ai apprises ici, et ça en fait partie. Draymond (Green), Steve (Kerr)… Steve est bon avec les stats et la façon de les utiliser mais il n’est pas aussi extrême que moi. Et vu qu’il a joué en NBA, qu’il connait ce groupe comme sa poche car il les coache depuis des années… Par exemple, si Klay pose un dribble et trouve un tir à mi-distance, c’est un gros OUI alors que quand j’étais à Brooklyn, mon message à un Spencer Dinwiddie était catégorique, je ne voulais jamais le voir prendre un tir à mi-distance ! Donc il s’agit de trouver le bon équilibre mais aussi connaitre les forces et les faiblesses de votre effectif pour utiliser les analytics dans le bon contexte.
Propos recueillis à San Francisco.