Tout n’est certes pas de sa faute, mais Billy Donovan à Oklahoma City, ça restera comme une grande déception à mes yeux. Je vous explique pourquoi…
Il était censé réaliser le potentiel entier du Thunder. Les emmener en Terre Promise.
En 2015, quand Scott Brooks est laissé sur le bord de la route, trois ans après avoir rallié les Finals, le Thunder tourne un peu en rond. L’équipe dispose d’un effectif savamment construit par le GM Sam Presti, dont toute la Ligue vante le génie. Bref, Oklahoma City est construit pour le titre.
Mais Brooks ne parvient pas à rééditer l’exploit de 2012 avec des sorties de route prématurées en playoffs et la terrible impression que le Thunder semble gâcher ses plus belles années…
Presti est alors tout sourire au moment d’annoncer qu’il a enfin réussi à convaincre Billy Donovan de quitter son confortable cocon de Florida en NCAA, où il a remporté deux titres en 2006 et 2007.
A son arrivée en territoire indien à l’été 2015, Donovan dispose évidemment de Kevin Durant et Russell Westbrook, les deux All-Stars locaux. James Harden est déjà parti bien sûr, mais il reste tout de même une belle escouade de joueurs de complément autour, dont Serge Ibaka, Dion Waiters mais aussi le jeune Steven Adams et même Enes Kanter ou encore des spécialistes comme Andre Roberson ou Anthony Morrow.
Un joli bilan… en surface
En surface, Billy Donovan, c’est un bilan très positif de 243 victoires pour 157 défaites et des playoffs cinq ans d’affilée. C’est propre, c’est joli, c’est mignon. Mais ce n’est que la surface…
Et c’est le problème de Donovan « dans le fond ». En tant que bon « company man », la brosse toujours impeccable, il sourit, il présente bien, il est à l’écoute de ses stars, apprécié de ses employeurs et des médias. Mais ses réponses sont bien souvent des platitudes, des formules usées jusqu’à la corde. Il y a la forme certes, mais zéro fond…
En l’occurrence, à chacune de mes interactions avec lui, et notamment quand je l’interrogeais sur nos « frenchies » passés à OKC (Joffrey Lauvergne et Timothé Luwawu-Cabarrot, voire Joakim Noah pour son passage à Florida), il me ressortait inlassablement les mêmes poncifs sur leur potentiel, leurs qualités, mais sans jamais élaborer l’argumentaire. Des réponses automatiques en somme.
A sa décharge, Donovan a dû faire avec les moyens du bord à Oklahoma City après l’incroyable décision de Kevin Durant à l’été 2016. Appelé à conduire une luxueuse berline tout confort, Donovan a finalement hérité de plusieurs voitures de location, et d’occasion, après sa première saison.
Pour sa deuxième année aux manettes, il a ainsi dû revoir son système pour l’adapter à Russell Westbrook et ses qualités. L’année suivante, il fallait encore bouleverser le playbook avec Paul George et Carmelo Anthony qui débarquent (Melo deux jours avant le camp d’entraînement !). Avant de changer encore après le départ de George pour Los Angeles et l’échange entre Russell Westbrook et Chris Paul.
Cette saison, Donovan avait seulement 7 de ses 17 joueurs qui étaient déjà au club l’année précédente. C’est incompatible avec des velléités de titre, et Sam Presti en était bien conscient : « Il a été constant chaque jour, comme il l’a été par le passé », a sobrement commenté le GM. « Du point de vue tactique, je pense qu’il est très bon pour résoudre les problèmes. Il a hérité de joueurs uniques et de situations particulières mais il a réussi à s’adapter plutôt rapidement. »
S’il quitte le Thunder sur sa meilleure saison individuelle – reconnu par ses pairs par le titre honorifique de co-meilleur entraîneur (avec Mike Budenholzer), en ayant bien réussi à assembler des joueurs destinés à être des monnaies d’échange (en grande partie grâce à Chris Paul, soit-dit en passant), Billy Donovan n’a jamais réussi à effacer la tache initiale de 2016…
L’acte manqué des playoffs 2016
Costaud en saison régulière, Donovan n’a par contre jamais réussi à passer le cap en playoffs. Comme son prédécesseur finalement.
L’historique journaliste local, Berry Tramel, a également souligné cet état de faits, déclarant que Donovan est « un bon coach, mais pas un grand coach ». Si les deux premières saisons ont pu enthousiasmer, les suivantes ont bien fait déchanter…
Mais tout s’est joué dès sa première année, durant les playoffs 2016. Et pour cause, le Thunder de Donovan remportera plus de matchs de playoffs durant ce seul run (11) que lors des quatre années suivantes !
Si près du but pourtant en 2016. Après avoir facilement battu les Mavs de Dirk Nowitzki, le Thunder réalise l’upset face aux Spurs. Le duo Adams – Kanter cartonne et OKC semble avoir trouvé la bonne formule en terminant San Antonio en 6 manches, dont 3 victoires de rang.
En finale de conférence face aux Warriors dans un duel unanimement prédestiné à Golden State par les spécialistes, le Thunder parvient à remporter 3 des 4 premiers matchs. A 3-1, Oklahoma City pouvait apercevoir la finale NBA.
A ce moment-là, on se dit que le plan de Presti est en marche. Donovan était la pièce manquante alors que le Thunder, 3e de la conférence Ouest, vient de venir à bout de Spurs historiques, 2e à 67 victoires en saison régulière, et de mettre à mal des Warriors record à 73 victoires. Et ce, coup sur coup ?
Eh bien, non. Une grosse performance d’équipe à l’Oracle au match 5 et Klay Thompson qui s’occupe du match 6 amèneront à un match 7, récital de Steph Curry pour boucler la série. Et, sans le savoir, sceller la fin des espoirs de titre pour Donovan et le Thunder…
« Qu’est-ce qui va me rester [des playoffs 2016] ? Les habitudes qu’on a pu construire sur ces playoffs. » expliquait alors Billy Donovan. « On doit continuer à travailler là-dessus. »
Un communiquant plus qu’un coach
Autant que Presti voulait bien gonfler les qualités tactiques de son coach, le Thunder ne retrouvera jamais cette dynamique. Et ces mots prononcés il y a quatre ans sonnent d’autant plus creux que Billy Donovan n’aura même pas vraiment eu l’opportunité de « continuer à travailler là-dessus »…
Les changements dans l’effectif seront bien trop importants pour lui permettre de renouer avec ce niveau de jeu qui l’avait rapproché tout, tout près, du titre en 2016. Mais on pourrait se dire que dans ce Thunder post-Durant, Donovan va pouvoir prendre un peu plus de place et imposer sa patte.
Que nenni ! Les qualités « tactiques » de Donovan ont été de moins en moins en vue avec les années, le technicien se faisant manger tout crû par ses stars, Westbrook dévorant tout sur son passage notamment. A vrai dire, dès sa première année, on raconte que Donovan « avait peur » de corriger Westbrook et Durant durant les sessions de vidéos.
Durant la saison, Dennis Schröder remarquait justement que son coach était certes à l’écoute de ses joueurs, un bon point ; mais, dans le même temps, qu’il était aussi beaucoup trop influençable et finalement, sans véritable philosophie profonde et sans identité propre. « Il arrive à responsabiliser tout le monde, et c’est un grand changement par rapport à l’année passée et ça porte ses fruits », envoyait Schröder en pensant évidemment à un Russell Westbrook sans aucun garde-fou sur ces dernières saisons à OKC.
Et puis, dans la bulle, l’épilogue de la série face à Houston a encore prouvé que Donovan est incapable de s’adapter lors des fins de match tendues, avec 6 points seulement sur les sept dernières minutes du match 7 face à Houston.
Non, il ne faut pas se voiler la face. Les fameuses qualités tactiques de Donovan sont en fait celles qui font de lui ce coach propre sur lui apprécié sur le circuit : celle du bon communicant, dans la connivence la plus totale, sans aspérité aucune, presque froid et robotique.
Alors, oui, ces qualités-là vont faire de lui un entraîneur recherché sur le marché. Mais elles ne font pas de lui un bon coach. Et encore moins un coach qui fait la différence…
Car, comme l’a récemment déclaré Spencer Dinwiddie à propos de l’arrivée de Steve Nash : « Pour moi, le coaching à ce niveau, surtout avec beaucoup de talent dans l’équipe, c’est 80% de psychologie, 10% de tempérament et 10% de tactique. Il s’agit avant tout de gérer les egos. C’est pour ça que Phil Jackson était phénoménal, il savait parler à Kobe, il savait comment parler à Michael. »
A son échelle, Billy Donovan a semblé réussir à parler à Kevin Durant et à Russell Westbrook. Mais ce fut pour un temps seulement. Et ce n’était finalement qu’une vague impression, KD avouant a posteriori qu’il n’avait pas aimé jouer pour Donovan.
En fin de compte, au lieu de faire mieux, Billy Donovan me fait tout simplement regretter la jeunesse et l’innocence du Thunder de Scott Brooks…