Nikola Jokic, ce sont les autres qui en parlent le mieux…

« J’ai côtoyé beaucoup de grands joueurs, et je n’ai jamais rien vu de tel ». Les livres d’histoire donnent raison à Mike Malone puisque le triple double de Nikola Jokic en 14 minutes et 33 secondes la nuit dernière est le plus rapide de l’histoire. Et sa ligne de stats incroyable en fin de soirée laisse pantois : 30 points, 17 passes (record en carrière), 15 rebonds à 11/14 aux tirs dont 3/3 à 3-points en 34 minutes et une évaluation de 54. De quoi donner le vertige, bien au-delà des Rocheuses.

Parmi les joueurs préférés de Brad Stevens ou Steve Kerr, héritier de Magic Johnson d’après Isiah Thomas, le Serbe a conquis une bonne partie de la planète basket avec son profil à la croisée des chemins, intemporel. « Un pivot à l’ancienne qui sait tout faire sur le terrain » a résumé un jour Kevin Durant, y compris étirer le jeu avec ses tirs primés dont la NBA actuelle raffole. Et qu’il soit dans la raquette ou s’en éloigne, le Serbe trouvera toujours le moyen de servir du caviar à ses partenaires.

« J’adore regarder ces joueurs qui donnent l’impression d’avoir un coup d’avance dans une partie d’échecs » résumait Steve Kerr en début de saison, le comparant à Arvydas Sabonis. « Ils font tout tourner autour de lui à Denver. C’est le point de fixation et tous les autres joueurs coupent autour de lui. C’est pour ça qu’ils sont si dynamiques. »

Il faut effectivement rendre aux arrières de Denver, et au système offensif de Mike Malone, ce qui leur est dû : le pivot se régale dans les Rocheuses grâce à une circulation de balle rendue fluide par tous. Mais surtout lui, même s’il ne le reconnaitra pas. Ses 17 passes la nuit dernière ? Un concours de circonstances évidemment : « J’ai juste fait beaucoup de passes, c’est pour ça que j’ai eu autant d’assists » explique-t-il au Denver Post.

Mais pour savoir si le système profite de Nikola Jokic ou si c’est l’inverse, Mike Malone a une réponse pleine d’admiration envers son jeune joueur.

« Je me sens aussi chanceux que si je coachais LeBron, Chris Paul ou Stephen Curry » assure l’entraîneur. « On reconnait la supériorité quand on la voit. Certaines de ses actions, ses bons choix tout le temps, comment il rend ses partenaires meilleurs… J’admire ça. »

Un dernier point essentiel et inestimable : « On a le sentiment d’avoir le plus dynamique, le meilleur facilitateur et le meilleur créateur parmi tous les jeunes joueurs NBA. »

« Son physique est bizarre »

Du côté de ses partenaires justement, on ne tarit évidement pas d’éloge sur la pépite locale. À commencer par Gary Harris, arrivé un an avant lui et pilier de la reconstruction locale à ses côtés.

« Quand tu le regardes, il n’est pas si athlétique que ça. Son physique est bizarre, c’est marrant et c’est dur à expliquer » confiait-il l’an passé à Yahoo. « Mais son sens du jeu, son toucher, sa ruse… Il est dur à défendre, et même face à des gars plus athlétiques il trouve le moyen de scorer. »

Comme lors de ce fameux un-contre-un face à LeBron James, plein d’assurance, qui avait fait parler l’an passé. Un moment charnière dans la carrière du joueur expliquait alors son entraîneur.

Une belle agressivité, trop rare pour certains, mais qui tend à s’installer dans le jeu du Serbe. Comme hier soir par exemple, avec cette domination dans tous les compartiments du jeu, y compris celui des balles perdues. « Je joue de la même façon que d’habitude » a-t-il réagi, avant d’avouer qu’il était « peut-être un peu plus agressif ».

Il ne faut pas oublier qu’il n’a que 22 ans (23 lundi prochain), qu’il est très altruiste et surtout qu’il est arrivé aux Etats-Unis il y a seulement deux ans et demi avec l’étiquette d’un 41e choix de draft ! Personne à l’époque n’imaginait une telle trajectoire, et Will Barton est là pour le rappeler après sa performance de la nuit.

« Parmi les gars qui l’avaient vu en Summer League, personne ne pensait qu’il était si bon. Il y avait des flash, on se disait que ça pouvait aller. Mais à ce point là… »

La faute en partie à son allure, son « physique différent » dit son ami Kristaps Porzingis, aussi différent que son sens du jeu n’est aiguisé comme aime le rappeler Gary Harris.

Leader à la Tim Duncan

Outre l’agressivité, peut-on attendre du troisième année qu’il fasse davantage entendre sa voix ? Pas sûr, mais ce n’est pas grave, et Richard Jefferson nous explique pourquoi.

« Ce n’est pas un gars qui parle beaucoup. Ce n’est pas sa personnalité » décrit le vétéran. « Je ne sais pas si ça viendra un jour. Mais Tim Duncan était pareil. Tu peux être leader en donnant l’exemple, et je pense qu’il est ce genre de joueur. »

Bourré de fondamentaux, le jeune homme possède aussi quelques similitudes avec la légende des Spurs dans le jeu. Même si Gregg Popovich, bien placé pour en parler, trouve une autre comparaison pour le Joker.

« Il a un peu le rythme de George Gervin. Il donne l’impression de valser sur le parquet, mais il est tellement doué. Il sait tirer, passer. C’est juste un super joueur de basket. »

C’est même « le rêve de chaque entraîneur » pour l’ancien assistant de Pop, Mike Brown.

Pour résumer, il y a donc un peu de Magic Johnson, de Tim Duncan ou de George Gervin chez lui, voire de Dirk Nowitzki d’après Wilson Chandler. Un cocktail qui pourrait lui permettre de rejoindre tous ces mythes, pense Mike Miller.

« Il a le potentiel pour être le genre de joueur qui entre au Hall of Fame » assuraitle vétéran en fin de saison dernière , précisant qu’il lui lui faudrait assumer son statut pour avancer, « comprendre qu’il est le meilleur joueur sur le parquet la plupart du temps ».

Il l’a bien compris hier soir.