Le débat du soir : les 76ers doivent-ils sacrifier leur saison ?

Les Philadelphia 76ers occupent actuellement une décevante 10e place au sein de la conférence Est.

Depuis le départ de Larry Brown en 2003, la franchise de Pennsylvanie n’a eu qu’une seule fois un bilan supérieur à 50 % de victoires. C’était en 2005, 43-39, sous les ordres de Jim O’Brien. Alors à quoi cela sert d’essayer de se qualifier à tout prix pour les play-offs, si les chances sont minces et qu’il y a un phénomène comme John Wall éligible à la prochaine draft. Car des prodiges de ce pédigree là, il ne s’en présente pas tous les ans.

Selon Stephen A. Smith du Philadelphia Inquirer, les Sixers auraient tout intérêt à faire une croix sur leur saison afin de récupérer un bon choix de draft. Nous allons analyser son point de vue très pertinent.

En 2001, les 76ers affrontaient les Lakers lors des NBA Finals

Il y a moins de dix ans, les Sixers régnaient encore sur la conférence est, avec le duo Allen Iverson – Larry Brown à sa tête. En 2001, ils ont atteint les Finales NBA, perdant contre d’invincibles Lakers. Cette même année, Allen Iverson a été élu MVP de la ligue, Larry Brown coach de l’année, Dikembe Mutombo meilleur défenseur de la saison et Aaron McKie meilleur sixième homme.

Depuis, les Sixers n’ont jamais dépassé le stade du premier tour des play-offs, pour peu qu’ils arrivent à s’y qualifier. Cet été, ils ont refusé de resigner Andre Miller, ne voulant pas payer la douloureuse luxary-tax à la fin de la saison. Pourtant Miller était plus qu’un meneur de jeu, c’était le maître à jouer de cette équipe dans l’ombre d’André Iguodala. Ed Stefanski, le General Manager des 76ers, pensait qu’il pouvait laisser les rênes de la franchise aux mains de Louis Williams, en draftant un meneur de jeu supplémentaire au mois de juin (il sélectionnera Jrue Holiday en 17ème position). Résultat, les 76ers se sont écroulés cette saison, perdant jusqu’à douze matchs d’affilée entre novembre et décembre. Pour Miller, il n’y a pas de secret :

« La NBA devient de plus en plus jeune. Vous avez besoin de solides vétérans, que ce soit au poste de meneur de jeu ou à l’intérieur, quelqu’un qui puisse aider ces jeunes mecs. Ce n’est pas une claque en direction des jeunes joueurs, mais les mecs plus vieux peuvent apporter un peu de leur connaissance ».

Stefanski, généralement calme, s’active ses derniers temps. Il a déclaré que personne n’était intransférable dans son effectif. En gros, il veut du changement à Philly. Les rumeurs de transfert concernant Andre Iguodala se font de plus en plus présentes ces jours ci. La date limite pour les transferts est le 18 février. Il ne faudra pas rater le bon coup. Alors, quitte à tout reconstruire, pourquoi ne pas tout lâcher cette saison ? Pourquoi ne pas tenter de récupérer John Wall, le phénomène de Kentucky qui confirme semaine après semaine son énorme potentiel ? C’est envisageable, et ce même si l’équipe réalise un « trade » judicieux dans les jours qui viennent.

D’autres ont fait le choix de sacrifier une saison

Prenons quelques exemples concrets. Lors de la saison 1996-97, David Robinson, le pivot Hall of Famer des Spurs de San Antonio se casse le pied au bout de six matchs, il ne foulera plus un parquet pour le reste de la saison. La saison des texans est ruinée, pourtant, la blessure de l’Amiral fera le bonheur de ses dirigeants.

En juin 1997, se présentera à la draft un intérieur de Wake Forest du nom de Tim Duncan. On lui prédit le plus grand avenir en NBA après avoir dominé les raquettes universitaires. C’est donc la « course au Duncan ». C’est à qui perdra le plus de matchs. Les Boston Celtics sous les ordres de la légende universitaire Rick Pitino rêvent de Duncan. Ils ne gagneront que 15 matchs au total, augmentant de manière conséquente leurs chances d’obtenir le premier choix de draft lors de la loterie. Cependant c’est les Spurs, vainqueurs de seulement 20 matchs, qui remporteront le fameux sésame. Boston crie au scandale, mais c’est bien San Antonio qui draftera Duncan. On connait la suite de l’histoire, les Spurs ont remporté quatre titres NBA (1999 – 2003 – 2005 – 2007) avec l’intérieur, douze fois All-Star, des Iles Vierges dans leur peinture.

Il n’y a pas de tels prodiges disponibles chaque saison, alors il faut en profiter quand ils se présentent.

La draft de 2003 est encore plus intéressante que celle de 1997, car il n’y a pas qu’un seul gros poisson à pêcher, mais cinq : LeBron James (St Vincent St Mary High School), Darko Milicic (Vrsac – Serbie Montenegro), Carmelo Anthony (Syracuse), Chris Bosh (Georgia Tech) & Dwayne Wade (Marquette). Comme en 1997, une fois la mi-saison passée et les espoirs de play-offs envolés, certaines équipes ont sabordé leur saison pour faire venir en leur sein un de ces cinq prodiges. Au final, c’est des Cavs tous heureux qui remporte le gros lot. Les dirigeants de Cleveland iront même jusqu’à annoncer en suivant de la loterie qu’ils drafteront LeBron James. John Lucas, coach des Cavs en 2003 a déclaré le mois dernier aux journalistes que ses dirigeants d’alors, ont sacrifié la saison et son poste de coach (car on ne garde pas un coach qui perd) pour multiplier les chances d’obtenir le premier choix de draft. Sept ans plus tard, LeBron James porte Cleveland en tête de la ligue et les Cavs sont favoris pour le titre NBA.

De son côté, le Heat qui a choisi Dwyane Wade (5ème choix) a été sacré champion NBA en 2006. Les Nuggets eux, ont sélectionné Carmelo Anthony (3ème choix), après un petit retard à l’allumage, la franchise des rocheuses n’a été, la saison passée, qu’à seulement deux victoires d’une Finale NBA. Les Raptors qui ont drafté Chris Bosh au 4ème choix n’ont pas vu leur franchise se développer comme ils l’espéraient, mais Bosh reste l’un des tous meilleurs joueurs à son poste.

Par contre, les Pistons ont eux hérité d’un second choix via les Grizzlies, ils s’en sont servi pour miser sur le futur et drafter Darko Milicic, mais celui-ci ne confirmera jamais son potentiel entrevue en Serbie.

Quelle stratégie faut-il adopter ?

Alors que faire pour les Sixers ? Essayer d’attraper le dernier wagon pour les play-offs ? Ils ne sont finalement qu’à cinq victoire du Heat qui occupe la huitième place de la conférence Est.

Dans cette conférence nettement plus faible que sa voisine, on sait que tout est possible. Mais cela leur rapporteraient quoi ? Quelques centaines de milliers de dollars en étant assurés de jouer à domicile et donc de remplir au moins deux Wachovia Center ? Ou alors miser sur la reconstruction totale de leur effectif en essayant d’attraper un gros poisson à la prochaine draft ?

Stephen A. Smith vote pour cette dernière solution. Comme nous l’avons évoqué un peu plus haut, cette stratégie, loin de l’équité sportive, a prouvé par le passé qu’elle pouvait donner (ou redonner) vie à une franchise en perdition. De plus, la NBA n’est au final qu’un business (demandez aux dirigeants des Hornets), il ne faut pas faire les veuves effarouchées si des dirigeants tentent certains actions ou mouvements qui pourraient paraître malencontreux à première vue.

Rappelez vous le transfert qui a envoyé Pau Gasol Lakers, contre aucun joueur de valeur en échange aux Grizzlies. Ceux-ci sont aujourd’hui la surprise de la saison, et en passe de se qualifier pour les prochains play-offs. De plus, rien ne garanti au dernier de la saison régulière d’obtenir le premier choix de la prochaine draft car cela n’est qu’un loterie après tout (en 1993, Orlando obtiendra le précieux sésame après avoir fini la saison avec un bilan de 41-41).

A la place d’Ed Stefanski, que feriez-vous ? Vous respecteriez l’équité sportive en misant sur quelques transferts et sur votre effectif en place ? Ou alors vous opterez pour la solution de Smith et vous condamneriez votre saison avec l’espoir de pêcher le bon poisson lors de la draft du mois de juin ?